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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1321/2022  
 
 
Arrêt du 14 mars 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et van de Graaf. 
Greffier : M. Fragnière. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Mathilde Ram-Zellweger, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Indemnisation pour des frais et honoraires d'avocat, etc., 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 31 août 2022 
(n° 228 PE19.016875-//DAC). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 7 mars 2022, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a condamné A.________ pour lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 CP) à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à 100 fr., avec sursis durant 2 ans, ainsi qu'à une amende de 750 francs. Il a en outre astreint A.________ à verser à B.________ 1 fr. à titre de réparation du tort moral et 4'000 fr. à titre d'indemnité au sens de l'art. 433 CPP. Enfin, les frais de procédure, arrêtés à 3'175 fr., ont été mis à la charge de A.________. 
 
B.  
Statuant par jugement du 31 août 2022, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis l'appel de A.________. Elle a réformé le jugement du 7 mars 2022 en ce sens que A.________ était acquitté et l'a confirmé pour le surplus. Cela étant, elle a mis les frais de la procédure d'appel à la charge de A.________ à raison d'un cinquième, le solde étant laissé à la charge du canton de Vaud, et a alloué à ce dernier une indemnité réduite de 2'000 fr. pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en appel. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants. 
Le 14 juin 2019, entre 20h30 et 21h00, dans le parc public bordant le Golf de l'Hippodrome à Divonne-les-Bains (France), A.________ n'a pas réussi à retenir son chien qui tirait fortement sur sa laisse. Cet animal s'est ainsi jeté sur le chien appartenant à B.________ et l'a saisi à pleine gueule. Il a également mordu la main de B.________ qui était intervenu, lui occasionnant des lésions à plusieurs doigts. 
A.________ a été libéré en raison de l'incompétence du juge suisse à connaître des faits. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 31 août 2022. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que, d'une part, une pleine indemnité lui soit accordée pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en première et deuxième instances et que, d'autre part, l'entier des frais de la procédure soit laissé à la charge du canton. 
Invités à se déterminer sur le recours, le Ministère public de l'arrondissement de La Côte et la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois y ont renoncé, en se référant aux considérants du jugement attaqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant n'a pas chiffré la conclusion qu'il a formulée en lien avec la pleine indemnité qu'il réclame pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en instances cantonales. 
 
1.1. Le recours en matière pénale est une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF). Le recourant ne peut se borner à demander l'annulation de la décision et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale, mais doit également, sous peine d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige. Il n'est fait exception à ce principe que lorsque le Tribunal fédéral, s'il admettait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond et ne pourrait que renvoyer la cause à l'autorité cantonale (ATF 137 II 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3; arrêt 6B_1266/2020 du 25 avril 2022 consid. 2, destiné à la publication). Lorsque le litige ou l'un des aspects de celui-ci porte sur le paiement d'une somme d'argent, les conclusions doivent être chiffrées (ATF 134 III 235 consid. 2), étant précisé que c ela vaut aussi pour la fixation d'une indemnité en procédure pénale (arrêts 6B_1362/2021 du 26 janvier 2023 consid. 2.1; 6B_1045/2017 du 27 avril 2018 consid. 1.2; 6B_868/2016 du 9 juin 2017 consid. 2). Des conclusions non chiffrées suffisent exceptionnellement lorsque la somme à allouer est d'emblée reconnaissable au regard de la motivation du recours ou de la décision attaquée, voire du rapprochement des deux actes (ATF 134 III 235 consid. 2 et les réf. citées).  
 
1.2. Il ressort de l'arrêt attaqué que le recourant n'avait pas conclu à l'allocation d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP en première instance et qu'il n'a produit aucune liste des opérations précisant ses prétentions à cet égard. Enjoint lors de l'audience d'appel à chiffrer ses conclusions conformément à l'art. 429 al. 2 CPP, le recourant a sollicité 20'000 fr. pour les deux instances cantonales, sans distinguer le montant réclamé pour la procédure de première instance. Ainsi, la cour cantonale, qui a rejeté les conclusions du recourant tendant à l'octroi d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP pour la première instance, a arrêté à 2'500 fr. la pleine indemnité pour l'instance d'appel (cf. jugement attaqué, consid. 7.5 et 8 p. 21 s.).  
 
1.3.  
 
1.3.1. En ce qui concerne la première instance, il n'est pas possible de déduire quelle est la somme à allouer, tant au regard de la motivation du recours que de la décision attaquée, voire même du rapprochement de ces deux actes. En tout état, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de chiffrer d'office les prétentions du recourant, comme il le requiert en enjoignant les juges fédéraux à "s'inspirer, à titre indicatif, des notes de frais et honoraires produites par le Conseil de la partie plaignante" (cf. mémoire de recours, p. 6).  
Partant, faute pour le recourant d'avoir chiffré ses conclusions relatives à l'indemnité réclamée selon l'art. 429 CPP pour la procédure de première instance, le recours est irrecevable à cet égard. 
 
1.3.2. S'agissant des dépens en appel, on comprend, à la lecture des motifs du recourant et du jugement attaqué, que ce dernier sollicite une pleine indemnité correspondant à 2'500 fr. (soit 500 fr. de plus que celle allouée), de sorte qu'il pourra être entré en matière sur ce point.  
 
1.4. Au surplus, en tant que le recourant demande à ce que l'entier des frais de la procédure (arrêtés à 3'175 fr. en première instance et à 2'460 fr. en appel) soit laissé à la charge du canton de Vaud, son recours est recevable.  
 
2.  
Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 426 CPP, ainsi que la présomption d'innocence au sens des art. 10 al. 1 CPP et 6 par. 2 CEDH, en mettant les frais de la procédure de première instance à sa charge nonobstant son acquittement. 
 
2.1. La répartition des frais de procédure de première instance repose sur le principe, selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation (art. 426 al. 1, 1ère phrase CPP), car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en oeuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1).  
La condamnation d'un prévenu acquitté à supporter tout ou partie des frais doit respecter la présomption d'innocence, consacrée par les art. 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH. Celle-ci interdit de rendre une décision défavorable au prévenu libéré en laissant entendre que ce dernier serait néanmoins coupable des infractions qui lui étaient reprochées. Une condamnation aux frais n'est ainsi admissible que si le prévenu a provoqué l'ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui ou s'il en a entravé le cours. A cet égard, seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte (ATF 144 IV 202 consid. 2.2; 119 Ia 332 consid. 1b; 116 Ia 162 consid. 2c). Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l'imputation des frais, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement. Une condamnation aux frais ne peut se justifier que si, en raison du comportement illicite du prévenu, l'autorité était légitimement en droit d'ouvrir une enquête. Elle est en tout cas exclue lorsque l'autorité est intervenue par excès de zèle, ensuite d'une mauvaise analyse de la situation ou par précipitation. La mise des frais à la charge du prévenu en cas d'acquittement ou de classement de la procédure doit en effet rester l'exception (ATF 144 IV 202 consid. 2.2 et les arrêts cités). Le juge ne peut fonder sa décision que sur des faits incontestés ou déjà clairement établis (ATF 112 Ia 371 consid. 2a; arrêts 6B_1003/2021 du 8 septembre 2022 consid. 1.1; 6B_1090/2020 du 1er avril 2021 consid. 2.1.1). 
A teneur de l'art. 426 al. 3 let. a CPP, le prévenu ne supporte pas les frais que la Confédération ou le canton ont occasionnés par des actes de procédure inutiles ou erronés. Ces actes doivent être considérés a priori ( ex tunc) objectivement comme inutiles ou erronés (arrêts 6B_832/2020 du 22 février 2021 consid. 4.1 et les réf. citées; 6B_1255/2016 du 24 mai 2017 consid. 1.3; 6B_523/2014 du 15 décembre 2014 consid. 5.3).  
 
2.2. En l'espèce, la cour cantonale a tenu pour établi que, le 14 juin 2019, entre 20h30 et 21h00, le recourant se trouvait, en compagnie de son chien, sur les lieux de l'infraction reprochée et que c'était son animal qui avait causé les blessures de l'intimé.  
Aussi, l'autorité précédente a considéré qu'en laissant son chien, qui s'était désentravé, sans surveillance ni maîtrise, dans un parc public, pour s'adonner à des exercices sportifs, le recourant avait eu peu d'égard quant à la sécurité des passants dans un lieu d'agrément notoirement fréquenté un vendredi soir en début d'été par beau temps. De nature civile (cf. art. 56 al. 1 CO), la faute du recourant était à l'origine de l'attaque du chien, objet de la plainte pénale, et partant de l'ouverture de la procédure pénale, à l'exclusion de toute autre faute concomitante du plaignant ou d'une quelque autre carence de quiconque (cf. jugement attaqué, consid. 7.3 et 7.4 p. 20 s.). 
 
2.3. Le raisonnement de la cour cantonale ne saurait être suivi.  
 
2.3.1. Il découle du jugement attaqué que le recourant a été acquitté en raison de l'incompétence du juge suisse à connaître de l'action pénale, eu égard aux faits qui s'étaient déroulés en France.  
Selon l'appréciation de la cour cantonale qui, en l'absence de grief invoqué à cet égard, n'est pas examinée par le Tribunal fédéral (cf. art. 42 al. 2 LTF), le droit pénal français exigeait que l'atteinte involontaire à l'intégrité d'autrui eût entraîné une incapacité totale de travail, afin que le comportement reproché au prévenu fût constitutif d'un délit punissable d'une peine d'emprisonnement de 2 ans et de 30'000 euros d'amende (cf. art. 220-20-2 du Code pénal français); à défaut, le comportement litigieux ne pouvait constituer qu'une contravention (cf. art. 131-13 du Code pénal français). Cela étant, il ne ressortait ni du jugement de première instance ni du dossier que le plaignant eût souffert d'une incapacité de travail, celui-ci ayant au contraire indiqué avoir continué ses activités après les morsures jusqu'à être capable, sans entrave notable, de conduire son chien auprès d'un vétérinaire lausannois. Les faits dénoncés ne pouvaient dès lors constituer un crime ou un délit au sens de la partie requise, donnant lieu à l'extradition de leur auteur (cf. art. 2 par. 1, a contrario, de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 [CEExtr; RS 0.353.1] cum art. 35 al. 1 EIMP), de sorte qu'ils échappaient au champ d'application de l'art. 7 al. 1 let. a et c CP (cf. jugement attaqué, consid. 4.2 à 4.4 p. 11 à 14).  
 
2.3.2. En particulier, la cour cantonale a constaté que les autorités pénales suisses n'étaient matériellement pas compétentes pour la poursuite et le jugement de l'infraction en cause (cf. art. 1 et 22 ss a contrario CPP cum art. 3 à 8 CP), ce qui constituait un empêchement de procéder au sens de l'art. 310 al. 1 let. b CPP conduisant à une non-entrée en matière (cf. arrêts 6B_1425/2019 du 9 juin 2020 consid. 1.3; 6B_1335/2018 du 28 février 2019 consid. 4.5.1).  
Par voie de conséquence, l'autorité précédente devait considérer que le ministère public avait ouvert une instruction contre le recourant alors qu'il n'était ab initio pas légitimé à le faire, ce qu'il lui appartenait pourtant d'examiner d'office et soigneusement, dès la réception de la plainte pénale (cf. art. 310 al. 1 let. b CPP), en présence d'un élément d'extranéité d'emblée reconnaissable (cf. art. 7 al. 1 CP).  
Dans ce contexte, les frais de la procédure de première instance ne pouvaient pas être mis à la charge du recourant en application de l'art. 426 al. 2 CPP (cf. art. 426 al. 3 let. a CPP; consid. 2.1 supra).  
Il s'ensuit que le grief soulevé par le recourant s'avère fondé, de sorte que le recours doit être admis sur ce point. 
 
3.  
Le recours doit être partiellement admis, dans la mesure où il est recevable, et le jugement du 31 août 2022 (ch. II du dispositif) réformé (art. 107 al. 2 1ère phrase LTF) en ce sens que les frais de la procédure de première instance, arrêtés à 3'175 fr., sont laissés à la charge du canton de Vaud. La cause doit cependant être renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision concernant les frais et dépens de la procédure d'appel (cf. consid. 1.3.2 et 1.4 supra).  
Le recourant, qui n'obtient que partiellement gain de cause, supporte une partie des frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il peut prétendre à des dépens réduits, à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF), lequel est dispensé de frais (art. 66 al. 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. Le jugement attaqué est réformé au chiffre II de son dispositif en ce sens que les frais de la procédure de première instance, arrêtés à 3'175 fr., sont laissés à la charge du canton de Vaud. La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision concernant les frais et dépens de la procédure d'appel. Pour le surplus, le recours est irrecevable. 
 
2.  
Une partie des frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le canton de Vaud versera au recourant une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens réduits pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 14 mars 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Fragnière