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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
9C_649/2018  
 
 
Arrêt du 15 janvier 2019  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Pfiffner, Présidente, Parrino et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Berthoud. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Alain Schweingruber, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, du 24 juillet 2018 (AI 150 / 2017). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________ présente une malformation congénitale du membre supérieur gauche depuis sa naissance (péromélie jusqu'au poignet, OIC 176). Elle a obtenu un certificat de capacité d'aide-hospitalière et a travaillé en qualité d'aide-soignante auprès de l'Hôpital B.________ depuis 1991. Son taux d'activité est passé de 100 % à 80 % en octobre 1992, a été réduit à 50 % dès 2005 puis à 40 % dès 2007. Elle a cessé cette activité en 2014 en faveur d'un travail sur appel pour l'hôpital et s'est inscrite à la Caisse publique de chômage depuis le 1 er mai 2014.  
Invoquant des lombalgies chroniques en relation avec une maladie de Scheuermann, A.________ a déposé entre-temps une demande de prestations de l'assurance-invalidité, le 28 mars 2014. L'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura (ci-après: l'office AI) lui a proposé des mesures de réadaptation d'ordre professionnel; l'assurée a par la suite été sommée de collaborer à leur mise en oeuvre, à peine de se voir opposer un refus de ces prestations et qu'il soit statué en l'état sur le droit à la rente (cf. sommation du 13 décembre 2016). Les mesures n'ont finalement pas abouti. 
Appliquant la méthode mixte d'évaluation de l'invalidité, l'office AI a fixé le taux d'invalidité global à 36 %, ce qui l'a conduit à nier le droit de l'assurée à la rente, par décision du 30 octobre 2017; de même, il a nié devoir prendre en considération des mesures de réadaptation d'ordre professionnel, car l'assurée les avait mises en échec en raison de son manque d'implication dans les démarches entreprises. 
 
B.   
A.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances. Par jugement du 24 juillet 2018, la juridiction cantonale a rejeté le recours. 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande l'annulation, éventuellement la réforme. 
L'intimé conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. La recourante s'est encore déterminée le 10 décembre 2018. 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 143 I 310 consid. 2.2 p. 313; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Il applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 140 V 136 consid. 1.1 p. 137 s.; 139 II 404 consid. 3 p. 415). Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, pour autant que les manquements ne soient pas manifestes (ATF 144 V 173 consid. 1.2 p. 175 et les références). 
 
2.  
 
2.1. Bien que la recourante ait pris des conclusions uniquement cassatoires sans indiquer ce qu'elle entend obtenir sur le fond de la cause, on peut comprendre à la lumière de la motivation de son recours (cf. ATF 137 III 617 consid. 6.2) qu'elle conteste aussi bien le refus de la prise en charge de mesures de réadaptation d'ordre professionnel que celui d'une rente.  
A cet égard, le jugement attaqué expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs à l'évaluation de l'invalidité (art. 16 LPGA et art. 28a LAI), en particulier ceux qui se rapportent à la méthode mixte (ATF 137 V 334), ainsi qu'à l'obligation de l'assuré de participer activement à la mise en oeuvre notamment de mesures de réadaptation d'ordre professionnel (art. 7 ss LAI en relation avec l'art. 21 al. 4 LPGA). Il suffit d'y renvoyer. 
 
2.2. Compte tenu de la date de la décision administrative en cause, qui détermine l'application dans le temps des règles légales au présent litige (ATF 130 V 445 consid. 1.2.1 p. 447), il n'y a pas lieu de tenir compte de la modification réglementaire relative à l'évaluation de l'invalidité des assurés exerçant une activité lucrative à temps partiel entrée en vigueur le 1er janvier 2018 (art. 27bis RAI; voir aussi arrêt 9C_404/2018 du 22 août 2018 consid. 2.2).  
 
3.  
 
3.1. En ce qui concerne le refus d'octroi des mesures de réadaptation d'ordre professionnel, les premiers juges ont constaté une violation de l'obligation de la recourante de collaborer. Cette violation consistait notamment dans le fait que la recourante avait refusé de suivre une mesure d'orientation professionnelle auprès du Centre ORIF et avait exigé qu'il fût statué préalablement sur son droit à une rente d'invalidité avant la mise en oeuvre de mesures professionnelles. Ces manquements ont conduit le tribunal à confirmer le refus signifié par l'administration.  
 
3.2. La recourante conteste n'avoir pas fait preuve d'une motivation suffisante pour suivre les mesures envisagées et s'être opposée à leur mise en oeuvre concrète. Elle soutient qu'elle avait simplement refusé d'entreprendre des mesures qu'elle jugeait inadaptées à son état (des travaux de polissage) et fait grief à l'intimé de ne pas avoir entrepris d'autres démarches à la suite de ce refus. Elle ajoute qu'elle avait elle-même pris des mesures concrètes pour se réinsérer dans le circuit économique, en raison de l'inactivité de l'intimé.  
 
3.3. Compte tenu de l'argumentation de la recourante, il n'y a pas lieu de s'écarter des constatations de l'instance précédente relatives à la violation de l'obligation de collaborer entraînant le refus de prester. La recourante ne critique pas de manière précise les faits établis par les premiers juges quant aux différentes tentatives de l'intimé de mettre en oeuvre les mesures prévues et l'attitude de la recourante y relative (notamment acceptation formelle [le 16 février 2015], puis exigence d'une décision préalable sur la rente [mai 2015]), pas plus qu'elle ne met en évidence en quoi le refus de prise en charge était contraire au droit. Elle se limite dans une large mesure à présenter sa propre interprétation du déroulement des faits, en affirmant qu'elle ne s'était pas opposée à la mise en oeuvre des mesures en cause.  
Dans ce contexte, le seul fait que la recourante s'est effectivement rendue à l'ORIF (à l'improviste) ne suffit pas à établir sa collaboration ou participation aux mesures envisagées. Comme l'a constaté la juridiction cantonale, à cette occasion, le responsable du Centre ORIF a tenté d'expliquer à l'assurée que la mesure d'orientation prévue visait précisément à définir un ou des domaines d'activités dans lesquels elle pourrait travailler de manière réaliste malgré son handicap. En réponse, la recourante a indiqué qu'elle ne viendrait pas au Centre, en se plaignant de l'absence d'aide de la part de l'assurance-invalidité (cf. note d'entretien du 15 novembre 2016). En dépit de cette opposition, la recourante a à nouveau été invitée à se rendre au Centre ORIF (courrier du Directeur de l'ORIF du 24 janvier 2017), après qu'elle a indiqué y accepter un stage (courrier du 14 décembre 2017 à l'intimé). Lors de l'entretien d'admission, elle a toutefois indiqué que la mesure lui paraissait totalement inutile (rapport du 8 mars 2017). Au regard de ce nouveau revirement, le refus de mesures d'ordre professionnel apparaît conforme au droit et le recours est mal fondé sur ce point. 
 
4.  
 
4.1. S'agissant ensuite du droit à la rente, l'office intimé avait retenu qu'une activité mono-manuelle uniquement était exigible à plein temps de la part de la recourante, en respectant les limitations fonctionnelles suivantes liées à son état de santé: pas de port de charge supérieure à 5 kg éloignée du corps, à 10 kg près du corps, pas de position en porte-à-faux, pas de position le tronc penché en avant, changement de position fréquent. Comme la recourante avait déclaré qu'elle travaillerait à un taux de 40 % en l'absence d'atteinte à la santé, l'intimé a évalué l'invalidité selon la méthode mixte. Il a comparé le revenu que la recourante avait réalisé en 2013 en qualité d'aide-soignante avant l'atteinte à la santé (soit 31'273 fr. 80 pour une activité exercée à 40 %, qu'il a extrapolé pour un emploi à plein temps et indexé à 79'598 fr. 75) avec le revenu d'invalide tiré de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après: ESS) auquel il a appliqué une déduction statistique de 10 % (soit un revenu de 48'312 fr. 68). Il en est résulté un empêchement de 39,30 % pour la part active, pondérée à 40 %, soit une invalidité de 15,72 % pour l'activité lucrative. Pour la part ménagère de 60 %, l'office intimé a fixé les empêchements à 33,60 %, ce qui correspondait à une invalidité de 20,16 % (avec une pondération de 60 %). Le taux d'invalidité global se montait ainsi à 35,88 %, arrondi à 36 % (cf. décision du 30 octobre 2017).  
 
4.2. La juridiction cantonale a modifié seulement la répartition du temps consacré à l'activité lucrative et aux travaux ménagers et constaté que l'assurée aurait utilisé 50 % de son temps pour chacun des champs d'activité. La somme des empêchements dans les tâches ménagères a ainsi été fixée à 33,60 %, ce qui donnait un degré d'invalidité de 16,80 % compte tenu de la pondération de 50 %; pour la part active, l'empêchement de 39,30 %, également avec la pondération à 50 %, aboutissait à un degré d'invalidité de 19,65 %. Comme le taux d'invalidité global (16,80 + 19,65) ne s'en trouvait pas modifié (36,45 %, arrondi à 36 %), l'issue du litige demeurait inchangée. En particulier, en ce qui concerne le revenu d'invalide dans l'activité lucrative, les premiers juges ont confirmé le recours aux statistiques salariales de l'ESS, ainsi que l'abattement de 10 % dont l'intimé avait tenu compte.  
 
4.3. En ce qui concerne l'évaluation de l'invalidité, la recourante conteste uniquement le bien-fondé de la réduction de 10 % opérée sur le salaire statistique d'invalide. Invoquant son handicap physique, elle soutient que l'absence d'une main constitue incontestablement une limitation fonctionnelle contraignante, en plus des autres limitations constatées médicalement. A son avis, une déduction de 25 % sur le salaire statistique devrait être prise en compte.  
 
4.4. Dès lors que le grief de la recourante amène le Tribunal fédéral à examiner le résultat de l'évaluation de l'invalidité, il convient de constater qu'en reprenant le revenu sans invalidité de 79'598 fr. 75 (salaire annualisé) déterminé par l'office AI, la juridiction cantonale a fait une application erronée de la méthode mixte d'évaluation de l'invalidité, telle que prévue par l'art. 28a al. 3 LAI et la jurisprudence y relative, avant l'entrée en vigueur, au 1 er janvier 2018 de l'art. 27bis al. 2 à 4 RAI (consid. 2 supra). Conformément à la méthode de calcul prévalant jusqu'alors, pour déterminer le taux d'invalidité afférent à la part consacrée à l'activité lucrative, il ne s'agit pas de se fonder sur le revenu que la recourante aurait pu réaliser si elle avait pleinement utilisé ses possibilités de gain (soit le revenu correspondant à un taux d'activité de 100 %), mais il faut tenir compte du revenu correspondant au taux d'activité exercée à temps partiel (cf. ATF 137 V 334 consid. 4.1 p. 339). En prenant en considération le revenu sans invalidité que l'assurée aurait réalisé si elle avait exercé à plein temps son activité à temps partiel, la juridiction cantonale a en quelque sorte appliqué de manière anticipée la nouvelle disposition réglementaire qui n'était pas en vigueur au moment des faits déterminants, ce qui se révèle contraire au droit (arrêt 9C_553/2017 du 18 décembre 2017 consid. 6.2).  
Il convient dès lors de corriger le montant retenu à titre de revenu sans invalidité et de le fixer à 39'799 fr. 40, en fonction du salaire - obtenu pour un taux d'activité de 50 % - établi initialement par l'office intimé sur la base du revenu de l'assurée en 2013 (cf. le calcul de la perte économique établi dans le rapport du 8 mars 2017). La comparaison de ce montant avec le revenu d'invalide de 53'680 fr. 75 (avant abattement) constaté par la juridiction cantonale à la suite de l'office intimé ne met pas en évidence de perte de gain, même en tenant compte d'un abattement maximum de 25 % sur ce salaire statistique (correspondant alors à 40'260 fr. 55). A cet égard, on ajoutera cependant que selon la jurisprudence, un abattement de 20 % à 25 % sur les données salariales de l'ESS paraît justifié dans le cas d'un assuré ne pouvant exercer qu'une activité mono-manuelle, ou d'une personne qui est privée de l'usage de la main dominante (arrêt 8C_58/2018 du 7 août 2018 consid. 5.3 et les arrêts cités). La référence que fait l'office intimé à l'arrêt 8C_471/2017 du 16 avril 2018 n'est pas pertinente, cette affaire concernant une personne qui disposait de l'usage intact de sa main dominante et partiel de l'autre main. 
En fin de compte, dans le cas d'espèce, une invalidité ne peut être retenue que pour la part ménagère (16,80 %), mais dans une mesure qui n'ouvre pas le droit à une rente (art. 28 al. 2 et art. 28a al. 3 LAI). Le jugement entrepris n'est dès lors pas critiquable dans son résultat et le recours se révèle également infondé en ce qui concerne la seconde prétention. 
 
5.   
L'attention de la recourante est attirée sur la modification déjà mentionnée de l'art. 27bis RAI, avec effet au 1er janvier 2018 (modification du RAI du 1er décembre 2017; RO 2017 7581). Conformément au ch. 2 des dispositions transitoires de cette modification, une nouvelle demande peut, à certaines conditions, être examinée par l'organe d'exécution de l'assurance-invalidité lorsque l'octroi d'une rente a été refusé avant l'entrée en vigueur de ladite modification. Il est loisible à la recourante de faire usage de cette possibilité. 
 
6.   
Vu l'issue du litige, les frais de la présente procédure sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 15 janvier 2019 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Berthoud