Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.250/2002/viz 
 
Arrêt du 16 mai 2003 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Féraud et Fonjallaz. 
Greffier: M. Parmelin. 
 
Parties 
A.________ et B.________, 
recourants, 
tous les deux représentés par Me Philippe Paratte, avocat, rue de l'Oriette 3, 2001 Neuchâtel 1, 
 
contre 
 
Époux C.________, 
intimés, 
Conseil communal du Landeron, 2525 Le Landeron, 
Département de la gestion du territoire du canton 
de Neuchâtel, Château, 2001 Neuchâtel 1, 
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, 
case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
art. 24 al. 2 aLAT; reconstruction hors de la zone à bâtir, 
 
recours de droit administratif contre l'arrêt du 
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel du 
13 novembre 2002. 
 
Faits: 
A. 
Le 29 septembre 1999, époux C.________ ont acquis par voie d'enchères publiques la parcelle n° xxx du cadastre du Landeron, en zone agricole. D'une surface de 1'868 mètres carrés, cette parcelle supportait une maison d'habitation mitoyenne avec celle des époux D.________ érigée sur la parcelle voisine au sud, et qualifiée de ruine dans le rapport d'expertise déposé à l'Office des poursuites de Neuchâtel. Menaçant de s'écrouler à la suite des intempéries survenues fin décembre 1999, la bâtisse a été démolie dans le courant du mois de janvier 2000 après que les propriétaires eurent reçu du chef du Service de l'aménagement du territoire du canton de Neuchâtel l'assurance expresse de pouvoir reconstruire. 
Le 24 mai 2000, époux C.________ ont déposé une demande de permis de construire une maison familiale à l'emplacement de l'ancienne. Mis à l'enquête publique du 30 juin au 19 juillet 2000, ce projet a suscité l'opposition de A.________ et de B.________, copropriétaires de la parcelle voisine au nord, qui invoquaient, entre autres arguments, la non-conformité du projet à la destination de la zone. Le dossier a été transmis au Département de la gestion du territoire du canton de Neuchâtel (ci-après: le Département de la gestion du territoire), comme objet de sa compétence, avec les préavis favorables des services de l'Etat concernés par le projet et de la Commune du Landeron. Par décision du 25 janvier 2002, le Département de la gestion du territoire a admis l'opposition des voisins et refusé le projet de construction déposé par les époux C.________. Il a estimé que le bâtiment démoli ne pouvait pas bénéficier de la garantie de la situation acquise compte tenu de son état de délabrement très avancé constaté en 1989 déjà; il a estimé en outre que les constructeurs ne pouvaient se prévaloir ni des autorisations spéciales délivrées au précédent propriétaire les 22 mai 1990, 13 janvier 1994 et 13 décembre 1996, ni des assurances données par le chef du Service cantonal de l'aménagement du territoire, aux motifs qu'elles n'étaient pas opposables aux tiers et que leur auteur n'était pas compétent pour autoriser des projets de construction hors de la zone à bâtir. 
Au terme d'un arrêt rendu le 13 novembre 2002 sur recours des époux C.________, le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel (ci-après: le Tribunal administratif ou la cour cantonale) a annulé cette décision et renvoyé la cause au Département de la gestion du territoire pour nouvelle décision au sens des considérants. Il a considéré que les conditions dont dépendait le droit des époux C.________ à la protection de la bonne foi étaient toutes remplies et permettait de tenir le principe d'une reconstruction pour acquis en l'absence d'un intérêt public de nature à faire obstacle à l'octroi d'une dérogation. 
B. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________ et B.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de confirmer la décision rendue par le Département de la gestion du territoire le 25 janvier 2002, respectivement de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour qu'il statue à nouveau dans le sens des considérants. Ils prétendent que les conditions posées à l'octroi d'une autorisation dérogatoire fondée sur l'art. 24c al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT; RS 700) ne seraient pas réunies, s'agissant d'une ruine, et que le projet ne pouvait être admis pour des raisons tirées des règles de la bonne foi. 
Le Tribunal administratif, les époux C.________ et la Commune du Landeron concluent au rejet du recours. Le Département de la gestion du territoire et l'Office fédéral du développement territorial proposent de l'admettre. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p. 47 et les arrêts cités). 
1.1 Aux termes de l'art. 34 al. 1 LAT, la voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions prises, comme en l'espèce, par l'autorité cantonale de dernière instance à propos de la reconnaissance de la conformité à l'affectation de la zone de constructions et d'installations sises hors de la zone à bâtir et sur des demandes de dérogation selon les art. 24 à 24d LAT. 
1.2 Selon l'art. 106 al. 1 OJ, le recours doit être déposé dans les trente jours ou, s'il s'agit d'une décision incidente, dans les dix jours dès la notification de la décision. Le Tribunal administratif a tenu pour acquis le principe d'une reconstruction; il a en conséquence admis le recours des intimés et renvoyé la cause au Département de la gestion du territoire pour qu'il se prononce sur l'opposition de A.________ et de B.________ en tant qu'elle avait trait aux autres points litigieux. La cour cantonale s'est donc prononcée définitivement sur le principe même d'une reconstruction hors de la zone à bâtir. La décision attaquée présente les traits d'un arrêt partiel sur ce dernier point qu'elle tranche définitivement (ATF 118 Ib 196 consid. 1b p. 198/199; 117 Ib 325 consid. 1b p. 327 et les références citées). Le recours de droit administratif a donc été interjeté en temps utile. 
1.3 En tant que copropriétaires d'un terrain directement voisin de celui des époux C.________, A.________ et B.________ ont un intérêt digne de protection à obtenir l'annulation de l'arrêt attaqué, qui tient pour acquis le principe d'une reconstruction du bâtiment démoli sur la parcelle des intimés, et ont qualité pour agir selon l'art. 103 let. a OJ (ATF 126 II 300 consid. 1c p. 302; 124 II 293 consid. 3a p. 303; 121 II 171 consid. 2b p. 174 et les arrêts cités). Les autres conditions de recevabilité du recours de droit administratif sont réalisées, de sorte qu'il convient d'entrer en matière sur le fond. 
2. 
Le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral sans être lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 114 al. 1 OJ). Il peut ainsi admettre le recours pour d'autres raisons que celles invoquées par les recourants ou, au contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (ATF 128 II 34 consid. 1c p. 37). Le Tribunal fédéral est cependant lié par les faits tels qu'ils ont été constatés par le Tribunal administratif, à moins qu'ils ne soient manifestement inexacts ou incomplets (art. 105 al. 2 OJ). 
3. 
Le bâtiment dont la reconstruction est litigieuse est situé en dehors des zones à bâtir; il doit servir de logement à des personnes qui ne sont pas elles-mêmes agriculteurs et qui n'ont ainsi aucune prétention à pouvoir s'installer en zone agricole; il est dès lors constant que le projet litigieux n'est pas conforme à la destination de la zone et qu'il ne pouvait être autorisé en vertu de l'art. 22 al. 2 LAT (cf. ATF 125 III 175 consid. 2b p. 178). Une éventuelle reconstruction est dès lors régie par l'art. 24 al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 août 2000 (aLAT), dans la mesure où le nouveau droit n'est pas plus favorable sur ce point aux intimés (art. 52 al. 2 OAT; cf. ATF 127 II 209 consid. 2c p. 211/212). 
3.1 Selon la jurisprudence rendue en application de l'art. 24 al. 2 aLAT et confirmée sous l'angle du nouveau droit, la reconstruction d'un bâtiment détruit ou démoli situé en dehors de la zone à bâtir n'entre en considération que si ce bâtiment était encore utilisable conformément à son affectation et que son utilisation réponde toujours à un besoin (ATF 127 II 209 consid. 3a p. 212; arrêt 1A.74/1992 du 7 mars 1994, consid. 3b paru à la ZBl 96/1995 p. 187). La protection de la situation acquise ne s'étend en effet pas aux bâtiments en ruine, inutilisables et prêts à s'écrouler (cf. DFJP/OFAT, Etude relative à la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, Berne 1981, n. 44 ad art. 24; voir aussi en ce sens, Piermarco Zen-Ruffinen/Christine Guy-Ecabert, Aménagement du territoire, construction, expropriation, Berne 2001, ch. 595, p. 279, et ch. 608, p. 284). La garantie de la propriété ne confère au surplus aucun droit à réutiliser à des fins de construction un emplacement où ont déjà été érigés des ouvrages ou à conserver au-delà de sa durée de vie un ouvrage convenablement entretenu (arrêt A.423/1981 du 5 mai 1982, consid. 3b paru à la JAB 1982 p. 447/448). 
3.2 En l'occurrence, lorsque le précédent propriétaire a acquis la parcelle n° xxx en 1989, le bâtiment qui y était érigé se trouvait déjà dans un état de délabrement avancé, selon les constatations faites par le Service cantonal de l'aménagement du territoire dans le cadre d'un premier projet de reconstruction. L'état de ruine de cet édifice a été confirmé par l'architecte des requérants d'une autorisation de bâtir présentée le 12 avril 1996. Les photographies prises à cette époque montrent en effet que le bâtiment n'est plus utilisable comme tel pour l'habitation, le mur en façade ouest et les planchers intermédiaires étant effondrés. Il importe à cet égard peu que cette situation soit le fait d'une destruction accidentelle ou d'une démolition volontaire du propriétaire, comme le prétendent les intimés (cf. ATF 127 II 209 consid. 3c p. 213). Les époux D.________ se sont adressés au mois de novembre 1998 à la Commune du Landeron pour signaler qu'une partie du toit de l'immeuble mitoyen s'était effondrée à la suite de conditions météorologiques tempétueuses, rendant les alentours extrêmement dangereux. Dans son rapport établi en mai 1999, l'expert mandaté par l'Office des poursuites de Neuchâtel qualifie ce bâtiment de ruine; il en va de même des intimés dans une lettre remise le 25 novembre 1999 à la Commune du Landeron, après une visite sur place. Les photographies prises à cette époque sont à cet égard éloquentes et confirment l'effondrement du pan ouest du toit. A la suite des intempéries survenues en décembre 1999, le bâtiment a dû être intégralement démoli pour des raisons de sécurité; selon une lettre du bureau d'ingénieur E.________, à La Neuveville, du 12 janvier 2000, seules les pierres de taille de l'entrée de la cave et d'une porte ont été mises en dépôt en vue d'une réutilisation éventuelle. Dans ces conditions, le caractère de ruine du bâtiment démoli ne saurait sérieusement être contesté. Enfin, l'ensemble formé par cet édifice et la maison familiale mitoyenne des époux D.________ ne présentait pas une unité du point de vue architectural qui justifierait de le traiter comme un tout sous l'angle de la garantie de la situation acquise, indépendamment des limites de propriété (cf. pour un cas d'application, arrêt non publié 1A.154/1989 du 11 avril 1990, consid. 3). 
Les conditions posées à l'art. 24 al. 2 aLAT en vue de l'octroi d'une dérogation ne sont donc pas réunies. 
4. 
Le Tribunal administratif a reconnu aux intimés un droit de reconstruire sur la base des assurances que le Service cantonal de l'aménagement du territoire leur avait données en ce sens par téléphone et dans la lettre du 12 janvier 2000 adressée aux autorités communales. 
4.1 Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités (ATF 128 II 112 consid. 10b/aa p. 125; 126 II 377 consid. 3a p. 387 et les arrêts cités). Selon la jurisprudence établie sur la base de l'art. 4 aCst., applicable au regard de l'art. 9 Cst., un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 122 II 113 consid. 3b/cc p. 123 et les références citées). La question de savoir si, dans un cas déterminé, le principe de la bonne foi a été violé est une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (art. 104 let. a OJ en relation avec l'art. 114 al. 1 OJ; ATF 117 Ia 285 consid. 2 p. 287; 108 Ib 377 consid. 3b p. 385). 
4.2 Le Département de la gestion du territoire prétend qu'il était seul compétent pour délivrer l'autorisation spéciale requise s'agissant d'une reconstruction hors de la zone à bâtir et que les assurances données aux intimés par le Service cantonal de l'aménagement du territoire ne le lieraient par conséquent pas. Il n'y a pas lieu d'examiner plus avant cette question. En effet, selon la jurisprudence, des renseignements inexacts communiqués par l'autorité compétente au seul propriétaire ne peuvent être opposés aux tiers qui s'en prennent à l'octroi d'un permis de bâtir; celui qui présente un projet de construction sait, ou doit savoir, qu'une procédure d'autorisation de construire est nécessaire, avec une mise à l'enquête publique au cours de laquelle les voisins touchés par le projet peuvent faire opposition. ll ne saurait de bonne foi escompter des renseignements ou des assurances qui lui ont été donnés une décision favorable quant à l'issue de la procédure d'opposition; les droits des tiers l'emportent dans ce cas sur la protection de la bonne foi du constructeur (ATF 117 Ia 285 consid. 3e p. 290; voir aussi ATF 112 Ib 280 consid. 8b p. 296). Aussi, même si elles devaient lier le Département de la gestion du territoire, les assurances données aux intimés ne seraient de toute manière pas opposables aux recourants, en leur qualité de voisins directs. C'est donc à tort que le Tribunal administratif a cru pouvoir faire prévaloir les règles de la bonne foi sur l'application stricte du droit fédéral. Enfin, les intimés ne sauraient tirer aucun droit à une reconstruction des autorisations spéciales délivrées au précédent propriétaire les 22 mai 1990, 13 janvier 1994 et 13 décembre 1996, s'agissant d'autorisations de police délivrées pour un projet concret qui ne s'est finalement pas réalisé (ATF 108 Ia 135 consid. 5a p. 139; 102 Ia 438 consid. 7a p. 448; arrêt 2P.58/1996 du 28 mai 1996, consid. 3 publié in SJ 1996 p. 539). 
5. 
Le recours doit en conséquence être admis. Il convient ainsi d'annuler l'arrêt attaqué, de rejeter la demande d'autorisation de construire formée le 24 mai 2000 par époux C.________ et de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
Vu l'issue du recours, l'émolument de justice sera pris en charge par les intimés, qui succombent (art. 156 al. 1 OJ). Ces derniers verseront en outre une indemnité de dépens aux recourants, qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un mandataire professionnel (art. 159 al. 1 OJ). La Commune du Landeron, qui a procédé seule en prenant fait et cause pour les intimés, n'a pas droit à des dépens. Il en va de même des autorités concernées (art. 159 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la décision du Département de la gestion du territoire du canton de Neuchâtel du 25 janvier 2002 est confirmée. 
2. 
La cause est renvoyée au Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure cantonale. 
3. 
Il est mis à la charge des intimés, solidairement entre eux, un émolument judiciaire de 2'000 fr. et une indemnité de 2'000 fr. à verser à titre de dépens aux recourants, créanciers solidaires. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants, aux intimés, au Conseil communal du Landeron, au Département de la gestion du territoire et au Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial. 
Lausanne, le 16 mai 2003 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: