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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2C_382/2011 
 
Arrêt du 16 novembre 2011 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Zünd, Président, 
Karlen et Aubry Girardin. 
Greffier: M. Chatton. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représenté par Jacques Bonfils, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, Les Portes-de-Fribourg, route d'Englisberg 9-11, 1763 Granges-Paccot (FR). 
 
Objet 
Autorisation de séjour, droit d'être entendu, 
 
recours contre l'arrêt de la Ie Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 23 mars 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
Ressortissant kosovar né en 1973, X.________ est entré en Suisse le 28 août 1991 pour y déposer une demande d'asile, qui a été rejetée le 2 septembre 1992. Il a cependant été admis provisoirement en Suisse. Sa demande, formée en 1998, en vue de l'obtention d'une autorisation de séjour a été rejetée en raison de son comportement délictuel. Le 16 août 1999, l'admission collective provisoire dont X.________ avait bénéficié a été levée et un délai lui a été imparti pour quitter la Suisse. Le 19 novembre 1999, il a épousé en Suisse une compatriote disposant actuellement d'un permis d'établissement et a obtenu une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. Deux enfants, nés en 2003 et 2007, sont issus de cette union. 
 
B. 
X.________ a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales. Le 15 avril 1997, il a été condamné pour complicité de vol, recel et infraction à l'ordonnance fédérale sur l'acquisition et le port d'armes à feu à quatre mois d'emprisonnement avec sursis durant un délai d'épreuve de deux ans ainsi qu'à l'expulsion avec sursis du territoire suisse pendant cinq ans durant un délai d'épreuve de cinq ans. Le 11 février 2000, il a été condamné à trois jours d'arrêts et une amende de 500 fr. pour infraction aux règles de la circulation routière et violation des devoirs en cas d'accident. Par jugement, entré en force (cf. arrêt 1P.675/2006 du 10 janvier 2007), du 10 mai 2005, il a été condamné à quatre ans de peine privative de liberté, sous déduction de 473 jours de détention préventive, pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants, participation à une organisation criminelle, blanchiment d'argent et violation de la législation sur les armes. Le sursis à l'expulsion de cinq ans a été révoqué à cette occasion. X.________ a été mis au bénéfice de la libération conditionnelle le 11 novembre 2008. 
 
C. 
Par décision du 9 janvier 2009, le Service de la population et des migrants du canton de Fribourg (ci-après: le Service cantonal) a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de X.________ et a ordonné son renvoi de Suisse. Le recours formé contre cette décision a été rejeté par la Ie Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal) en date du 23 mars 2011. 
 
D. 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, doublé d'un recours constitutionnel subsidiaire, X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 23 mars 2011. Sur recours en matière de droit public, il conclut principalement au renouvellement de son autorisation de séjour, subsidiairement, à ce qu'il soit ordonné au Tribunal cantonal de motiver sa décision de ne pas organiser des débats, plus subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour qu'il organise des débats. Sur recours constitutionnel subsidiaire, X.________ demande que la cause soit renvoyée au Tribunal cantonal pour que ce dernier, principalement, motive sa décision de ne pas organiser des débats, et, plus subsidiairement, organise de tels débats. 
Le Service cantonal conclut à la confirmation de sa décision du 9 janvier 2009 et l'Office fédéral des migrations au rejet du recours. 
Constatant que les débats demandés par le recourant n'ont pas été organisés, le Tribunal cantonal propose l'admission de la conclusion plus subsidiaire du recourant, tendant à ce que l'affaire lui soit renvoyée pour qu'il organise de tels débats. 
Par ordonnance présidentielle du 16 mai 2011, la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif formée par X.________. Par ordonnance du 30 mai 2011, le Tribunal fédéral a rejeté la requête d'assistance judiciaire déposée par le recourant, la condition de l'indigence n'étant pas réalisée. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Comme la procédure de non-renouvellement (révocation) de l'autorisation de séjour du recourant a été initiée en 2008 et que la décision de refus du Service cantonal date du 9 janvier 2009, la présente cause est soumise à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (RS 142.20; LEtr; cf. art. 126 al. 1 LEtr; arrêt 2C_759/2010 du 28 janvier 2011 consid. 1). 
 
2. 
Dans le même acte (art. 119 al. 1 LTF), le recourant a déposé à la fois un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire. 
 
2.1 Selon l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral, ni le droit international ne donnent droit. D'après la jurisprudence, il suffit qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et que, partant, la voie du recours en matière de droit public soit ouverte (ATF 136 II 177 consid. 1.1 p. 179; arrêt 2C_972/2010 du 24 mai 2011 consid. 1.1). 
En l'espèce, le recourant, qui est arrivé en Suisse en août 1991, fait ménage commun avec son épouse et leurs enfants titulaires d'une autorisation d'établissement et se prévaut de l'art. 8 CEDH au titre du droit au respect de la vie familiale. Il a ainsi en principe droit à une autorisation de séjour pour regroupement familial (art. 43 al. 1 LEtr). En pareilles circonstances, il convient donc d'admettre un droit, sous l'angle de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, lui permettant de former un recours en matière de droit public. La question de savoir si c'est ou non à juste titre que les juges cantonaux ont confirmé le refus du Service cantonal de renouveler son autorisation de séjour et le prononcé de son renvoi de Suisse, ressortit au fond et non à la recevabilité (cf. arrêts 2C_430/2011 du 11 octobre 2011 consid. 2; 2C_575/2009 du 1er juin 2010 consid. 2). 
 
2.2 Pour le surplus, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 45 al. 1, 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF) par le destinataire de l'arrêt attaqué qui a qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public est recevable, ce qui entraîne l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 a contrario LTF). 
 
3. 
Dans un grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. Il reproche au Tribunal cantonal de ne pas l'avoir informé de l'absence de débats, ni d'avoir motivé une telle décision, alors que, dans son recours du 10 février 2009 auprès du Tribunal cantonal, la tenue de débats avait été explicitement requise sur la base de l'art. 91 du Code fribourgeois de procédure et de juridiction administrative du 23 mai 1991 (CPJA/FR; RS/FR 150.1). Se fondant sur l'arrêt 9C_402/2010 du 21 février 2011 (consid. 2.1), qui traite de l'art. 30 al. 3 Cst., le recourant estime aussi que les juges cantonaux ne pouvaient pas sans motif valable renoncer à organiser des débats publics. 
 
3.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature formelle ancrée à l'art. 29 al. 2 Cst., dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 135 I 279 consid. 2.6.1 p. 285; 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 124 I 49 consid. 1 p. 50) et avec un plein pouvoir d'examen (ATF 127 III 193 consid. 3 p. 194). 
 
3.2 Le droit d'être entendu comprend notamment l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 135 V 65 consid. 2.6 p. 73; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88). Elle n'est pas tenue de discuter de manière détaillée tous les arguments soulevés par les parties ni de statuer séparément sur chacune des conclusions qui lui sont présentées. Elle peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige; il suffit que le justiciable puisse apprécier correctement la portée de la décision et l'attaquer à bon escient (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88). 
3.3 
3.3.1 Les garanties minimales en matière de droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. ne comprennent en principe pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148; 130 II 425 consid. 2.1 p. 428; arrêt 2C_276/2011 du 10 octobre 2011 consid. 2.1, non publié au recueil officiel). Le droit cantonal peut toutefois, selon les cas, offrir une protection plus étendue aux justiciables (cf. ATF 135 I 91 consid. 2.4.2.1 p. 96 a contrario; arrêt 2D_32/2010 du 8 octobre 2010 consid. 3.1). 
3.3.2 A teneur de l'art. 30 al. 3 Cst., dont le recourant se prévaut en se référant expressément à l'arrêt 9C_402/2010 du 21 février 2011 (consid. 2.1), l'audience et le prononcé du jugement sont publics, la loi pouvant prévoir des exceptions. Cette disposition constitutionnelle n'offre pas au justiciable le droit à une audience dans toutes les causes soumises à un contrôle judiciaire en vertu de l'art. 30 al. 1 Cst.; son alinéa 3 se limite à garantir que, lorsqu'il y a lieu de tenir une audience, celle-ci se déroule publiquement, sauf exceptions prévues par la loi. Un droit comme tel à des débats publics oraux n'existe, en vertu des garanties constitutionnelles de procédure, que pour les causes bénéficiant de la protection de l'art. 6 par. 1 CEDH ou lorsque les règles de procédure le prévoient ou encore lorsque sa nécessité découle des exigences du droit à la preuve (cf. ATF 128 I 288 consid. 2 p. 290; arrêt 2C_276/2011 du 10 octobre 2011 consid. 2.1, non destiné à la publication). 
L'obligation d'organiser des débats publics suppose une demande formulée de manière claire et indiscutable. Une requête de preuve (demande tendant à la comparution personnelle, à l'interrogatoire des parties, à l'audition de témoins ou à une inspection locale) ne suffit pas à fonder une telle obligation. Saisi d'une demande tendant à la mise en oeuvre de débats publics, le juge cantonal doit en principe y donner suite. Il peut cependant s'abstenir dans les cas prévus par l'art. 6 par. 1 seconde phrase CEDH, lorsque la demande est abusive (chicanière ou dilatoire), lorsqu'il apparaît clairement que le recours est infondé, irrecevable ou, au contraire, manifestement bien fondé ou lorsque l'objet du litige porte sur des questions hautement techniques (arrêt 9C_402/2010 du 21 février 2011 consid. 2.1). 
3.3.3 Une décision relative au séjour d'un étranger dans un pays ou à son expulsion ne concerne ni un droit de caractère civil, ni une accusation en matière pénale au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH (arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme Mamatkoulov et Askarov c. Turquie [GC], du 4 février 2005, Rec. 2005-I, par. 82 s.; arrêt 2D_30/2011 du 22 juin 2011 consid. 3.1), de sorte qu'aucun droit procédural ne peut être déduit de cette disposition conventionnelle en l'occurrence. 
3.3.4 Selon l'art. 91 al. 1 CPJA/FR, "si les parties le demandent ou si le règlement de l'affaire le requiert, le Tribunal cantonal et les commissions de recours qui statuent en dernière instance cantonale ordonnent des débats". Ceux-ci sont en principe publics (al. 2). Il découle de la formulation de l'art. 91 al. 1 CPJA/FR que les parties se voient, de par le droit de procédure cantonal, conférer un véritable droit à la tenue de débats publics devant le Tribunal cantonal ("si les parties le demandent") même dans les causes ne relevant pas de l'art. 6 par. 1 CEDH, et que le Tribunal cantonal doit en principe y donner suite ("ordonnent") sans que les parties ne soient tenues de motiver leur requête. 
 
3.4 En l'espèce, le recourant a, au chiffre 4 des conclusions prises dans son recours auprès du Tribunal cantonal du 10 février 2009, expressément requis la tenue de débats. La formulation "Des débats seront ordonnés" est dénuée de toute ambiguïté. L'arrêt querellé ne contient aucun développement au sujet de cette conclusion ou de la raison pour laquelle les juges cantonaux auraient décidé de ne pas y donner suite, en violation des exigences de motivation découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. 
Le défaut de tenue de débats devant le Tribunal cantonal est d'autant moins compréhensible que le droit cantonal instaure le principe de la tenue de tels débats. Au demeurant, il n'est pas possible de conclure, objectivement, à l'existence de circonstances particulières propres à entraîner une dérogation à l'art. 91 al. 1 CPJA/FR (cf., mutatis mutandis, arrêt 2D_32/2010 du 8 octobre 2010 consid. 3.3). Du reste, le Tribunal cantonal admet dans ses observations du 19 août 2011 que c'est à tort que de tels débats n'ont pas été organisés. 
Il découle de ce qui précède que l'omission par les juges cantonaux de se prononcer sur la requête du recourant et d'organiser des débats en application de l'art. 91 al. 1 CPJA/FR a violé le droit d'être entendu de ce dernier. 
 
3.5 La violation du droit d'être entendu précitée ne peut plus être guérie en instance fédérale, car la tenue de débats devant le Tribunal fédéral revêt un caractère exceptionnel, s'effectue selon les cas et conditions prévus par la loi (cf. art. 57 ss LTF), et ne peut être exigée par les parties (cf. arrêts 2C_665/2010 du 24 mai 2011 consid. 7; 2C_844/2009 du 22 novembre 2010 consid. 3.2.3, non publié aux ATF 137 II 40, mais in: Pra 2011 n° 73 p. 520). 
 
4. 
Dans ces circonstances, le recours en matière de droit public doit être admis quant à la conclusion plus subsidiaire formulée par le recourant et la décision entreprise annulée. L'arrêt attaqué étant annulé pour des motifs formels, il n'y a pas lieu d'examiner le bien-fondé des griefs matériels figurant dans le recours. La cause sera renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle entre en matière sur la requête du recourant tendant à l'organisation de débats, qu'elle y procède, comme elle l'a elle-même annoncé, en application de l'art. 91 al. 1 CPJA/FR et rende une nouvelle décision (cf. art. 107 al. 2 LTF). Compte tenu de l'issue du litige, il ne sera pas perçu de frais (art. 66 al. 4 LTF). En revanche, le canton de Fribourg versera des dépens au recourant, qui seront toutefois réduits, dès lors qu'il n'obtient gain de cause que s'agissant du recours en matière de droit public (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours en matière de droit public est admis, l'arrêt du Tribunal cantonal du 23 mars 2011 est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
2. 
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
3. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4. 
Le canton de Fribourg versera au recourant une indemnité de 1'000 fr. à titre de dépens. 
 
5. 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, à la Ie Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des migrations. 
 
Lausanne, le 16 novembre 2011 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Zünd 
 
Le Greffier: Chatton