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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
2C_739/2017  
 
 
Arrêt du 17 avril 2018  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président, 
Zünd, Aubry Girardin, Donzallaz et Haag. 
Greffier: M. Tissot-Daguette. 
 
Participants à la procédure 
1. A.X.________, 
2. B.X.________, agissant par A.X.________, 
3. C.X.________, agissant par A.X.________, 
tous les trois représentés par Me Sébastien Pedroli, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Service de la population du canton de Vaud. 
 
Objet 
Refus d'octroi d'autorisations de séjour au titre du regroupement familial, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 4 juillet 2017 (PE.2016.0468). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.X.________, ressortissant kosovar né en 1975, a eu deux filles (nées les 9 juin 2000 et 17 juin 2002) avec une compatriote. Les deux enfants et leur mère vivent actuellement dans leur pays d'origine. L'intéressé est arrivé en Suisse en 2002 et y a déposé une demande d'asile qui a été rejetée. En 2003, il a épousé une ressortissante suisse et a ainsi été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour. Le couple s'est séparé en 2004 et le divorce a été prononcé en 2006. Cette même année, A.X.________ a épousé une ressortissante polonaise née en 1980. Le 1 er juillet 2010, il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour UE/AELE au titre du regroupement familial, sa femme s'étant également vue remettre une telle autorisation. L'intéressé a obtenu la nationalité polonaise le 18 septembre 2013.  
 
B.   
Le 6 mars 2015, A.X.________ a déposé une demande de regroupement familial en faveur de ses deux enfants, leur mère ayant donné son accord. Après une instruction de la cause, notamment auprès de l'Ambassade de Suisse au Kosovo, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal), par décision du 15 novembre 2016, a refusé aux deux filles d'entrer en Suisse et a rejeté leurs demandes d'autorisations de séjour. Sur recours du 12 décembre 2016, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a confirmé cette décision par arrêt du 4 juillet 2017. 
 
C.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.X.________ et ses deux filles demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 4 juillet 2017 et de renvoyer la cause au Service cantonal, afin qu'il accorde des autorisations de séjour aux deux enfants. Ils se plaignent de violation du droit international. 
Le Tribunal cantonal et le Secrétariat d'Etat aux migrations concluent tous deux au rejet du recours. Le Service de la population renonce à se déterminer. Dans des observations finales, A.X.________ et ses deux filles confirment leurs conclusions, à tout le moins implicitement. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 141 II 113 consid. 1 p. 116). 
 
1.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de séjour à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Selon la jurisprudence, il suffit, sous l'angle de la recevabilité, qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et que, partant, la voie du recours en matière de droit public soit ouverte (ATF 139 I 330 consid. 1.1 p. 332 et les références citées).  
Quelle que soit leur nationalité, les enfants d'une personne ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne peuvent en principe bénéficier d'un droit de séjour dérivé des art. 7 let. d ALCP (RS 0.142.112.681) et 3 par. 1 annexe I ALCP, s'ils sont âgés de moins de 21 ans ou à charge (cf. art. 3 par. 2 let. a annexe I ALCP). La recevabilité du recours en matière de regroupement familial dépend de l'âge de l'enfant au moment du dépôt de la demande (arrêts 2C_909/2015 du 1 er avril 2016 consid. 1.2 et les références citées). Le recourant 1, ressortissant de l'Union européenne séjournant en Suisse, est potentiellement habilité à invoquer les art. 7 let. d ALCP et 3 par. 1 et 2 let. a annexe I ALCP pour en déduire un droit au regroupement familial pour ses filles, âgées de 14, respectivement 12 ans lorsque la demande d'autorisation de séjour a été déposée, ce qu'il étaye de manière soutenable. Il s'ensuit que le présent recours n'entre pas dans les motifs d'exclusion de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, sans que cela ne préjuge l'issue du litige (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1 p. 332). La voie du recours en matière de droit public est partant ouverte.  
 
1.2. Pour le surplus, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue par un tribunal supérieur de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par les destinataires de l'arrêt entrepris qui ont qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF), le recours est partant recevable.  
 
 
2.   
Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3 p. 156). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 137 III 226 consid. 4.2 p. 234). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF). 
Dans la mesure où les recourants avancent des éléments de fait ne ressortant pas de l'arrêt attaqué, en particulier en relation avec les liens existants entre le recourant 1 et ses enfants, sans exposer en quoi les conditions qui viennent d'être rappelées seraient réunies, il n'en sera pas tenu compte. Le Tribunal fédéral vérifiera donc la correcte application du droit sur la seule base des faits retenus par l'autorité précédente. 
 
3.   
La LEtr (RS 142.20) s'applique aux ressortissants des Etats membres de l'Union européenne notamment lorsqu'elle prévoit des dispositions plus favorables que celles de l'ALCP (art. 2 al. 2 LEtr). Tel n'est pas le cas en l'espèce. Ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, mais titulaire d'une première autorisation de séjour depuis 2003, le recourant 1 a déposé la demande de regroupement familial le 6 mars 2015, soit hors des délais prévus à l'art. 47 al. 1 LEtr, étant précisé que ceux-ci ont commencé à courir le 1 er janvier 2008 (cf. art. 126 al. 3 LEtr; arrêt 2C_147/2015 du 22 mars 2016 consid. 2.4.2). Il en résulte qu'un regroupement familial fondé sur les dispositions de la LEtr ne serait envisageable qu'en cas de raisons familiales majeures (cf. art. 47 al. 4 LEtr), que les circonstances de la présente cause ne font aucunement apparaître et que les recourants ne soulèvent du reste nullement.  
 
4.   
Les recourants se prévalent des art. 7 let. d ALCP et 3 par. 1 annexe I ALCP. Ils estiment que le Tribunal cantonal a retenu à tort que le recourant 1 n'entretenait pas de relations familiales minimales avec ses filles pour prétendre au regroupement familial. Ils invoquent en outre une violation de l'art. 3 par. 1 de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE; RS 0.107), estimant que l'autorité précédente a faussement retenu que le regroupement familial était contraire aux intérêts des enfants. 
 
4.1. D'après l'art. 3 par. 1 annexe I ALCP, en relation avec l'art. 7 let. d ALCP, les membres de la famille d'une personne ressortissant d'une partie contractante ayant un droit de séjour ont le droit de s'installer avec elle, à condition que celle-ci dispose d'un logement approprié (cf. art. 3 par. 1 phr. 2 annexe I ALCP). Sont notamment considérés comme membres de la famille, quelle que soit leur nationalité, le conjoint et leurs descendants de moins de 21 ans ou à charge (art. 3 par. 2 let. a annexe I ALCP). Contrairement à la LEtr, l'ALCP ne prévoit pas de délai pour demander le regroupement familial. Jusqu'à l'âge de 21 ans, le descendant d'une personne ressortissant d'une partie contractante peut donc en tout temps obtenir une autorisation de séjour au titre de regroupement familial. C'est le moment du dépôt de la demande de regroupement familial qui est déterminant pour calculer l'âge de l'enfant (arrêt 2C_909/2015 du 1 er avril 2016 consid. 1.2 et les références citées).  
Selon la jurisprudence, même fondé sur l'ALCP, le regroupement familial ne doit pas être autorisé sans réserve. Il faut que le citoyen de l'Union européenne donne son accord, que le parent de l'enfant soit autorisé à s'en occuper ou, en cas d'autorité parentale conjointe, ait obtenu l'accord de l'autre parent et qu'il existe une relation familiale minimale entre le parent en Suisse et l'enfant résidant à l'étranger. Enfin, le regroupement familial doit paraître approprié au regard de la CDE et ne pas être en contradiction manifeste avec le bien-être de l'enfant (cf. ATF 136 II 65 consid. 5.2 p. 76 s., 78 consid. 4.8 p. 87, 177 consid. 3.2.2 et 3.2.3 p. 185 s.). En droit européen, le regroupement familial est avant tout conçu et destiné à rendre effective et à favoriser la libre circulation des travailleurs, en permettant à ceux-ci de s'intégrer dans le pays d'accueil avec leur famille; cette liberté serait en effet illusoire si les travailleurs ne pouvaient l'exercer conjointement avec leur famille (ATF 130 II 113 consid. 7.1 p. 125; arrêt 2C_416/2017 du 18 décembre 2017 consid. 2.1). L'objectif du regroupement familial n'est pas tant de permettre le séjour comme tel des membres de la famille des travailleurs ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne que de faciliter la libre circulation de ces derniers, en éliminant l'obstacle important que représenterait pour eux l'obligation de se séparer de leurs proches (ATF 130 II 113 consid. 7.1 p. 125 et les références citées). En d'autres termes, le regroupement familial tel que prévu aux art. 7 let. d et 3 par. 1 annexe I ALCP vise à assurer que les travailleurs ressortissants d'un Etat contractant ne renoncent pas à la libre circulation pour des motifs familiaux. Le but que doit poursuivre le regroupement familial découlant de l'ALCP est donc de réunir une famille et de lui permettre de vivre sous le même toit. Les exigences quant au logement approprié posés par l'ALCP en attestent. 
Il convient encore de relever que les droits accordés par les art. 3 al. 1 annexe I ALCP et 7 let. d ALCP le sont sous réserve d'un abus de droit (ATF 136 II 177 consid. 3.2.3 p. 186; arrêt 2C_909/2015 du 1 er avril 2016 consid. 3.3 et les références citées). Tel est notamment le cas lorsque des indices montrent clairement que le regroupement familial n'est pas motivé par l'instauration d'une vie familiale, mais par des intérêts économiques (cf. arrêt 2C_1144/2012 du 13 mai 2013 consid. 4.2 et les références citées). Dans un arrêt 2C_195/2011 du 17 octobre 2011, le Tribunal fédéral a confirmé le refus des autorités d'accorder le regroupement familial sollicité par une mère en faveur de son fils âgé de 20 ans au moment de la requête. La Cour de céans a considéré qu'il n'était pas démontré que le fils, qui avait toujours vécu chez sa grand-mère à Kinshasa, ait pu maintenir une relation avec sa mère, la simple contribution financière à l'entretien de l'enfant n'étant à cet égard pas suffisante (consid. 4.3). En d'autres termes, le fait qu'un enfant vienne en Suisse peu avant d'atteindre l'âge limite peut, dans certaines circonstances, constituer un indice d'abus du droit conféré par l'art. 3 par. 1 annexe I ALCP, en relation avec l'art. 7 let. d ALCP. Cela vaut en tout cas lorsque les descendants ne sont pas eux-mêmes ressortissants d'une partie contractante. Dans ce cas, l'enfant ne dispose que d'un droit dérivé à une autorisation de séjour qui dépend du droit de séjour originaire de l'un des membres de sa famille. Au-delà de l'âge de 21 ans, le descendant lui-même non-ressortissant d'une partie contractante ne dispose en principe plus de droit de séjour en Suisse. En pareille situation, plus l'enfant est âgé, plus il est indiqué de s'interroger sur l'intention du requérant. En effet, lorsque l'enfant attend le dernier moment pour bénéficier du regroupement familial, il y a lieu de se demander si la requête est motivée principalement par l'instauration d'une vie familiale ou par de purs intérêts économiques (cf. arrêt 2C_131/2016 du 10 novembre 2016 consid. 4.7). Toute autre est la situation du descendant qui possède la nationalité d'une partie contractante. Dans ce cas, l'enfant ayant atteint ses 21 ans peut en principe se prévaloir d'un droit propre à une autorisation de séjour. Le danger d'un contournement des prescriptions d'admission est donc plus faible (arrêt 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.3 et les références citées).  
 
4.2. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt entrepris que les filles du recourant 1 ont toujours vécu hors de Suisse avec leur mère et que seule l'aînée a cohabité durant les deux premières années de sa vie avec son père. Le Tribunal cantonal a relevé que le recourant 1 n'avait pas vu ses filles pendant plusieurs années, durant la période qui précédait la délivrance de son autorisation de séjour UE/AELE en juillet 2010. Il a jugé que cela, ajouté au fait que la fille cadette a déclaré, lors de son audition à l'Ambassade de Suisse au Kosovo, qu'elle et sa soeur n'avaient fait la connaissance de leur belle-mère que six ou sept ans après le mariage de leur père, excluait l'existence d'une relation familiale minimale. L'autorité précédente a encore relevé que le recourant prétendait entretenir des liens par téléphone et messages sur Internet, ainsi que par deux visites annuelles. Les filles seraient également venues en Suisse.  
 
4.3. En l'état, l'autorité précédente ne saurait cependant être suivie. En effet, elle a expliqué qu'avant le 1 er juillet 2010, le recourant n'avait pas vu ses filles pendant plusieurs années. Elle ne s'est néanmoins nullement prononcée sur la période postérieure à cette date, se contentant de " douter  du caractère étroit " de la relation familiale en raison des déclarations de l'une des filles. Une telle motivation, qui n'est pas basée sur la notion de relation familiale minimale au sens de la jurisprudence (ATF 136 II 65 consid. 5.2 p. 76; 177 consid. 3.2.3 p. 186) et qui, au demeurant, ne prend pas en compte l'ensemble des pièces produites par les recourants, n'est pas suffisante et n'exclut en tout cas pas l'existence de telles relations entre les recourants après juillet 2010. Il convient donc d'admettre le recours et de renvoyer la cause à l'autorité précédente, afin que celle-ci statue en considérant l'ensemble des pièces figurant au dossier et, si elle l'estime nécessaire, qu'elle instruise plus avant les faits pour se prononcer sur le droit des recourants au regroupement familial fondé sur l'ALCP, conformément à la jurisprudence citée ci-dessus (cf. consid. 4.1).  
 
5.   
Sur le vu de ce qui précède, il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 4 LTF). Les recourants ont en outre droit à une indemnité de partie (art. 68 al. 1 LTF), à charge du canton de Vaud. (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. L'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 4 juillet 2017 est annulé. La cause est renvoyée au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le canton de Vaud versera aux recourants la somme de 2'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Service de la population et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 17 avril 2018 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
Le Greffier : Tissot-Daguette