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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1C_304/2018  
 
 
Arrêt du 18 juin 2019  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président, 
Fonjallaz et Muschietti. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
Helvetia Nostra, 
représentée par Me Pierre Chiffelle, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, 
représentée par Me Eric Ramel, avocat, 
intimée, 
 
Municipalité d'Ollon, 
représentée par Me Jacques Haldy, avocat, 
Direction générale de l'environnement du canton de Vaud (DGE/DIREV). 
 
Objet 
Autorisation de construire un chalet et d'abattre un arbre, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
du canton de Vaud, Cour de droit administratif 
et public, du 23 mai 2018 (AC.2017.0344). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 7 septembre 2017, la Municipalité d'Ollon a délivré à A.________ l'autorisation de construire un chalet avec deux logements de six pièces sur la parcelle n° 14783 située à Chesières en zone de chalets D. Le permis est subordonné à l'inscription au registre foncier d'une mention "résidence principale ou logement assimilé à une résidence principale". Il implique l'abattage d'un arbre (érable triple) dont la compensation a été ordonnée. L'opposition formée par Helvetia Nostra a été écartée. 
 
B.   
Par arrêt du 23 mai 2018, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par Helvetia Nostra. La constructrice, établie dans la commune d'Ollon depuis de nombreuses années, prévoyait de s'établir avec sa famille dans l'un des deux logements, le second étant destiné à la vente comme résidence principale. Il se prêtait à une telle utilisation et était accessible toute l'année. La population résidente avait augmenté dans la commune depuis 2013, en particulier dans les localités de Chesières et de Villars-sur-Ollon qui avait enregistré une augmentation de 212 habitants en quatre ans. Selon un rapport établi par la commune, aucun des logements affectés en résidence principale n'était resté inoccupé. Même si les constructions réalisées depuis 2013 ou en cours de réalisation permettraient de répondre dans une certaine mesure à l'accroissement de la population et à la demande de logements de six pièces et plus, on pouvait encore admettre une demande suffisante pour ce genre de biens. Les griefs relatifs à l'abattage de l'érable triple et à la nécessité de protéger le corridor à faune d'importance régionale ont été également écartés, dans la mesure de leur recevabilité. 
 
C.   
Helvetia Nostra forme un recours en matière de droit public par lequel elle demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et l'autorisation de construire. Elle requiert l'effet suspensif, qui a été accordé par ordonnance du 17 juillet 2018. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. La Municipalité d'Ollon et l'intimée A.________ concluent au rejet du recours. Invité à se déterminer, l'Office fédéral du développement territorial ARE relève que le taux de résidences secondaires dans ce secteur est de près de 70%, que les nouveaux habitants depuis 2013 ont manifestement trouvé à se loger dans les nombreux logements vacants, les 150 logements autorisés n'ayant pas encore été réalisés, et que 63 logements comparables à ceux projetés seraient en vente au mois de mai 2018. On ne verrait pas en quoi les dimensions et le standing de ces logements les réserveraient nécessairement, comme le retient la cour cantonale, à des résidences secondaires. L'ARE doute néanmoins que ces considérations permettent d'admettre un abus de droit de la part de la constructrice. 
La recourante, l'intimée et la Municipalité d'Ollon ont déposé des observations complémentaires, persistant dans leurs conclusions respectives. L'intimée a encore produit un arrêt de la cour cantonale du 19 janvier 2019 concernant également la construction de résidences principales à Villars-sur-Ollon. La recourante s'est déterminée à ce sujet. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recours a été déposé dans le délai prescrit (art. 100 al. 1 LTF) et la qualité pour agir de la recourante (art. 89 al. 1 LTF) n'est pas contestable (ATF 139 II 271). 
Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Il en résulte que les documents postérieurs à l'arrêt attaqué et qui ne portent pas sur des faits notoires (notamment l'extrait relatif à l'acquisition par l'intimée d'un appartement à la Tour-de-Peilz) sont irrecevables, tout comme les griefs qui se fondent sur ces pièces. 
 
2.   
Dans un premier grief, la recourante persiste à considérer qu'il existerait des soupçons sérieux d'abus de droit. L'intimée n'aurait pas clairement manifesté son intention d'habiter l'un des deux logements; elle est déjà propriétaire d'un chalet à Ollon (ainsi que d'un appartement à la Tour-de-Peilz) et on ne connaîtrait pas l'affectation de ce chalet en cas de déménagement; il resterait donc deux logements supplémentaires dans la commune sans acquéreur connu. Sur le vu de l'augmentation de la population à Chesières et Villars-sur-Ollon entre 2013 et 2016 (80, respectivement 132 habitants) et des logements réalisés (59) et autorisés (264), l'offre en résidences principales répondait manifestement à la demande. La cour cantonale a admis que plusieurs biens similaires à celui projeté sont actuellement en vente (pour un prix situé entre 500'000 et 1'100'000 fr.) mais a considéré que le standing et la dimension de ces biens les destinaient à la résidence secondaire. La recourante estime que rien ne viendrait confirmer cette appréciation, et relève que le chalet de l'intimée est devisé à 3'000'000 fr. En dépit de l'augmentation du nombre d'habitants, la cause se rapprocherait de celle jugée dans l'ATF 144 II 249, compte tenu de l'importance de l'offre. Il y aurait lieu dès lors de s'assurer au préalable, sur le vu d'engagements concrets, que les deux logements prévus seront bien occupés par des habitants à l'année. 
 
2.1. Face à l'interdiction générale de dépasser le seuil de 20 % de résidences secondaires dans une commune, on ne peut exclure que certains constructeurs soient tentés de contourner la réglementation en déclarant faussement qu'ils entendent utiliser leur construction en tant que résidence principale ou l'affecter en résidence touristique mise à disposition du public. Un abus de droit manifeste ne saurait toutefois être admis que s'il apparaît d'emblée que le projet ne pourra pas être utilisé comme annoncé, notamment en raison de l'insuffisance de la demande de résidences principales dans la commune en question pour le type d'objets concernés, et/ou en présence d'autres indices concrets (ATF 142 II 206 consid. 2.2 p. 209). En droit public, le principe de la bonne foi est explicitement consacré par l'art. 5 al. 3 Cst., en vertu duquel les organes de l'Etat et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Il y a fraude à la loi - forme particulière d'abus de droit - lorsqu'un justiciable évite l'application d'une norme imposant ou interdisant un certain résultat par le biais d'une autre norme permettant d'aboutir à ce résultat de manière apparemment conforme au droit (ATF 142 II 206 consid. 2.3 p. 209 s.). La norme éludée doit alors être appliquée nonobstant la construction juridique destinée à la contourner (ATF 142 II 206 consid. 2.3 p. 210; ATF 134 I 65 consid. 5.1 p. 72; 131 I 166 consid. 6.1 p. 177 et les arrêts cités). Pour être sanctionné, un abus de droit doit apparaître manifeste. L'autorité qui entend faire appliquer la norme éludée doit établir l'existence d'une fraude à la loi, ou du moins démontrer l'existence de soupçons sérieux dans ce sens. Cette appréciation doit se faire au cas par cas, en fonction des circonstances d'espèce (ATF 144 II 49 consid. 2.2 p. 52; 142 II 206 consid. 2.5 p. 210 et la jurisprudence citée).  
Dans le contexte de l'art. 75b Cst. et de ses dispositions d'application, il n'y a pas lieu d'assouplir la répartition du fardeau de la preuve dans ce domaine en exigeant systématiquement du constructeur qu'il prouve d'emblée le respect de l'affectation prévue. Toutefois, il appartient à l'autorit é charg ée de la délivrance des permis de construire de s'assurer que les conditions posées pourront être respectées (ATF 142 II 206 consid. 4.3 p. 215; arrêt 1C_546/2015 du 23 juin 2016 consid. 2.5). Il s'agit de vérifier si, en prétendant vouloir construire une résidence principale (but en soi admissible au regard de la norme constitutionnelle) selon la définition des art. 2 al. 2 et 3 LRS, l'intéressé n'a pas pour objectif de contourner l'interdiction découlant de l'art. 75b Cst. et de l'art. 6 LRS en réalisant, à terme, une résidence secondaire. Il en va de même s'il envisage d'emblée, toujours en prétendant vouloir construire une résidence principale, de faire usage de l'art. 14 LRS qui permet de suspendre cette affectation lorsqu'il n'existe pas de demande pour un tel logement à un prix raisonnable (ATF 142 II 206 consid. 2.4 p. 210). Dans ce cadre, l'autorité doit rechercher s'il existe des indices concrets mettant d'emblée en doute la volonté ou la possibilité d'utiliser l'immeuble comme résidence principale. Ces indices peuvent, selon les circonstances, concerner la situation de l'immeuble (zone de construction, accessibilité toute l'année, éloignement des lieux de travail), sa conception même (dans l'optique d'une occupation à l'année), éventuellement son prix, les circonstances tenant à la personne qui entend y habiter, lorsque celle-ci est connue (résidence actuelle, lieu de travail, déclarations d'intention de l'intéressé lui-même). Lorsque le ou les futurs occupants ne sont pas connus (logements destinés à la vente ou à la location), le critère principal est celui de la demande de résidences principales dans le même secteur (ATF 144 II 49 consid. 2.2 p. 52; 142 II 206 consid. 2.4 p. 210). 
 
2.2. En l'occurrence, la constructrice a clairement manifesté l'intention d'habiter elle-même avec sa famille l'un des deux logements. Il n'y a pas lieu de mettre en doute cette intention, la recourante habitant déjà dans la commune depuis douze ans. Il n'y a pas, cela étant, à s'interroger sur le sort de son logement actuel à Ollon, qui est d'affectation libre, ni a fortiori sur celui dont elle est, aux dires de la recourante - qui se fonde à ce propos sur une pièce nouvelle, irrecevable en vertu de l'art. 99 al. 1 LTF -, propriétaire à la Tour-de-Peilz. Ni la norme constitutionnelle, ni la LRS ne sauraient poser des restrictions à l'utilisation des logements construits avant leur entrée en vigueur. Les logements créés sous l'ancien droit bénéficient en effet des garanties d'utilisation figurant à l'art. 11 LRS. C'est dès lors pour un seul logement, qui n'a pas encore trouvé preneur, qu'il y a lieu d'examiner l'existence d'une demande suffisante.  
 
2.3. Selon les chiffres produits en cours de procédure, la population a augmenté de 80 habitants à Chesières et de 132 habitants à Villars-sur-Ollon de 2013 à fin 2016. Dans le même temps, 59 logements ont été construits sur le territoire communal, dont 12 à Chesières; également pour la même période, 264 logements ont été autorisés, dont les travaux n'ont pas débuté ou sont en cours. Ces nouveaux logements répondraient selon la recourante à la demande de résidence principale, les nouveaux résidents ayant tous trouvé à se loger. La cour cantonale a également tenu compte de l'offre de biens en vente sur le site internet www.comparis.ch; elle a constaté (consultation au 16 mai 2018) une offre de 63 biens immobiliers de 6 pièces ou plus à Villars-sur-Ollon et Chesières. La recourante se prévaut de chiffres différents trouvés sur le même site internet, soit 208 appartements et 59 chalets à vendre à Villars, respectivement 108 appartements et 25 chalets à Chesières. On ignore toutefois dans quelle mesure ces derniers chiffres se rapportent à des objets comparables, par leurs dimensions, leur standing et leur situation, au logement projeté. Comme cela est relevé ci-dessus, on ne saurait exiger que les biens qui sont actuellement d'affectation libre soient obligatoirement voués à satisfaire la demande de résidences principales.  
En dépit des incertitudes liées aux chiffres évoqués ci-dessus (en particulier le sort des logements autorisés mais non encore construits, ainsi que la proportion des logements affectés obligatoirement à la résidence principale), compte tenu de l'accroissement régulier de la population dans le secteur concerné (la présente cause diffère sur ce point de celle jugée dans l'ATF 144 II 49) et du nombre de logements construits ou à construire pour la même période, on ne peut considérer que la demande de résidence principale serait manifestement insuffisante au point de remettre en cause l'affectation du projet litigieux. Selon un rapport produit par la commune, aucun des biens affectés à la résidence principale n'est actuellement inoccupé. La typologie, le prix et la situation du logement en question correspondent d'ailleurs à une affectation en résidence principale. 
Le grief tiré de l'abus de droit manifeste doit dès lors être rejeté. 
 
3.   
Invoquant ensuite l'application concomitante des art. 15 et 21 al. 2 LAT, la recourante relève que la commune d'Ollon a mis à l'enquête la constitution d'une zone réservée de 500'000 m² et devrait encore dézoner 250'000 m². La parcelle n° 14783 est partiellement en zone forestière, éloignée du centre. Elle représenterait 2638 m² qui se trouveraient soustraits aux mesures de redimensionnement de la zone à bâtir. Il y aurait ainsi lieu d'effectuer un contrôle préjudiciel du plan d'affectation communal, compte tenu de l'entrée en vigueur de l'art. 15 al. 2 LAT et de la localisation de la parcelle en marge d'un quartier relativement peu bâti. 
 
3.1. Selon la jurisprudence, le contrôle incident ou préjudiciel d'un plan d'affectation dans le cadre d'une procédure relative à un acte d'application est en principe exclu. Un tel contrôle est néanmoins admis, à titre exceptionnel, lorsque les conditions d'un réexamen des plans au sens notamment de l'art. 21 al. 2 LAT sont réunies (cf. ATF 121 II 317 consid. 12c p. 346). Aux termes de l'art. 21 al. 2 LAT, lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d'affectation feront l'objet des adaptations nécessaires; une modification sensible des circonstances au sens de l'art. 21 al. 2 LAT peut être purement factuelle, mais également d'ordre juridique, comme une modification législative (cf. ATF 144 II 41 consid. 5.1 p. 44 s. et les références citées; 127 I 103 consid. 6b p. 105; arrêt 1C_308/2017 du 4 juillet 2018 consid. 3.1). Le régime transitoire de l'art. 38a al. 2 LAT ne prohibe toutefois pas la mise en oeuvre de planifications existantes conformes à la LAT, ni ne préjuge des parcelles qui seront concernées par le redimensionnement de la zone à bâtir; ce choix relève dans une large mesure du pouvoir d'appréciation des autorités locales de planification. Pour que l'entrée en vigueur des modifications de la LAT du 15 juin 2012 puisse justifier un contrôle préjudiciel de la planification, il faut que s'y ajoutent d'autres circonstances, notamment la localisation de la parcelle par rapport à la zone à bâtir existante, le niveau d'équipement de la parcelle et la date d'entrée en vigueur du plan d'affectation (ATF 144 II 41 consid. 5.2 p. 45 s. et la jurisprudence citée).  
 
3.2. En l'occurrence, la parcelle sur laquelle est situé le projet est équipée et bordée par une route. Elle se situe certes à la limite entre la zone de chalets D et la zone alpestre, mais ne constitue pas pour autant une petite zone constructible isolée, un bâtiment se trouvant déjà construit sur la parcelle voisine à l'ouest, au même niveau. La zone forestière formellement délimitée au nord de la parcelle a été prise en compte et ne saurait constituer une circonstance nouvelle au sens de la jurisprudence.  
Les éléments mentionnés par la recourante ne suffisent dès lors pas pour admettre qu'une exclusion de la zone à bâtir s'imposerait d'emblée. Le grief doit lui aussi être rejeté. 
 
4.   
Il en va de même du grief relatif à l'abattage de l'érable triple, dans la mesure où celui-ci repose sur les mêmes arguments (situation de la parcelle) pour remettre en cause la pesée d'intérêts confirmée par la cour cantonale. 
 
5.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe. Celle-ci versera aussi une indemnité de dépens à l'intimée, qui a procédé avec l'aide d'un mandataire professionnel (art. 68 al. 2 LTF). La Municipalité d'Ollon n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Une indemnité de dépens de 2'000 francs est allouée à l'intimée A.________, à la charge de la recourante. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Municipalité d'Ollon, à la Direction générale de l'environnement du canton de Vaud (DGE/DIREV), au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 18 juin 2019 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Chaix 
 
Le Greffier : Kurz