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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1B_229/2013  
   
   
 
 
 
 
Arrêt du 18 juillet 2013  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, 
Merkli et Chaix. 
Greffière: Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Christophe Tafelmacher, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.  
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 22 mai 2013. 
 
 
 
Faits:  
 
A.  
A.________, ressortissant du Kosovo, a été interpellé le 10 décembre 2012 sous la prévention d'entrave à l'action pénale. Il lui est reproché d'avoir aidé B.________, prévenu de meurtre, à se soustraire à son arrestation lorsqu'il se trouvait à La Chaux-de-Fonds. B.________ a reconnu avoir tué son beau-frère le 29 octobre 2012. 
Par ordonnance du 12 décembre 2012, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud a refusé d'ordonner la détention provisoire du prénommé. Sur recours du Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le Ministère public), la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: la cour cantonale) a ordonné la détention provisoire de A.________. 
Par la suite, sa détention a été régulièrement prolongée, en dernier lieu jusqu'au 10 août 2013, par ordonnance du 6 mai 2013 du Tribunal des mesures de contrainte. A.________ a recouru contre cette ordonnance auprès de la cour cantonale, qui a rejeté ce recours par arrêt du 22 mai 2013. Le Tribunal cantonal a considéré en substance qu'il existait de sérieux indices de culpabilité ainsi qu'un risque concret de fuite. Il a en outre jugé que le principe de proportionnalité demeurait respecté. 
 
B.  
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt attaqué, en ce sens que sa libération immédiate est ordonnée. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle instruction et nouvelle décision au sens des considérants. Il requiert en outre l'assistance judiciaire. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. Le Ministère public conclut au rejet du recours. 
 
 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est en principe ouvert contre une décision relative au maintien en détention provisoire au sens des art. 212 ss CPP. Dès lors que l'acte de procédure litigieux ne met pas un terme à la procédure pénale (art. 90 s. LTF), il s'agit d'une décision incidente prise séparément au sens de l'art. 93 al. 1 LTF. La décision ordonnant la mise en détention provisoire du prévenu étant susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, elle peut faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, l'accusé a qualité pour agir. Pour le surplus, le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF
 
2.  
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction. 
Le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des faits, revue sous l'angle restreint des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF (ATF 135 I 71 consid. 2.5 p. 73 s. et les références). 
 
3.  
Invoquant le principe de la proportionnalité, le recourant soutient que la durée de la détention est excessive au regard de la peine encourue. Il se prévaut en particulier du fait qu'aucun élément concret au dossier ne permettrait de lui attribuer un comportement actif, constitutif d'entrave à l'action pénale. Il souligne aussi que le Ministère public a remis en liberté, le 24 avril 2013 déjà, le frère de B.________, également prévenu d'entrave à l'action pénale, dans le cadre du même contexte de fait. 
 
3.1. Le principe de proportionnalité postule que toute personne qui est mise en détention préventive a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou d'être libérée pendant la procédure pénale (art. 31 al. 3 Cst. et 5 par. 3 CEDH). Une durée excessive de la détention constitue une limitation disproportionnée du droit à la liberté personnelle, qui est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse la durée probable de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre (art. 212 al. 3 CPP).  
Dans l'examen de la proportionnalité de la durée de la détention, il y a lieu de prendre en compte la gravité des infractions faisant l'objet de l'instruction. Le juge peut maintenir la détention préventive aussi longtemps qu'elle n'est pas très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre concrètement en cas de condamnation (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 et les références). Il convient d'accorder une attention particulière à cette limite, car le juge de l'action pénale pourrait être enclin à prendre en considération dans la fixation de la peine la durée de la détention préventive à imputer selon l'art. 51 CP (ATF 133 I 168 consid. 4.1 p. 170 et les arrêts cités). 
 
3.2. Le recourant est prévenu d'entrave à l'action pénale (art. 305 al. 1 CP), infraction passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus qui réprime celui qui aura soustrait une personne à une poursuite pénale. La notion de soustraction présuppose que l'auteur a empêché une action de l'autorité dans le cours d'une procédure pénale au moins durant un certain temps. Elle est réalisée lorsque, par exemple, une mesure de contrainte relevant du droit de procédure telle qu'une arrestation est retardée par l'action du fauteur. Un simple acte d'assistance qui ne gêne ou perturbe la poursuite pénale que passagèrement ou de manière insignifiante ne suffit dès lors pas. Au nombre des actes qui entrent en ligne de compte s'agissant d'une entrave à l'action pénale, on trouve entre autres la dissimulation de moyens de preuve afin de retarder l'élucidation de l'affaire en faveur de la personne poursuivie, ainsi que l'hébergement temporaire d'un fugitif ou le transport d'une personne recherchée par les autorités de poursuite pénale et le soutien matériel procuré. Dans tous les cas, il faut démontrer que le fugitif, le suspect ou l'auteur a été soustrait durant un certain temps à l'action de la police du fait du prétendu fauteur (ATF 129 IV 138 consid. 2.1 p. 140).  
L'infraction d'entrave à l'action pénale ne peut être commise par omission que si l'auteur a un devoir de garant, auquel n'importe quelle obligation ne saurait être assimilée; il doit s'agir d'un devoir juridique qualifié, par exemple un devoir de protection ou de surveillance (ATF 123 IV 70 consid. 2 p. 72 et les arrêts cités). Le citoyen n'a pas de devoir général de dénoncer aux autorités pénales les condamnés en fuite ni de fournir à la police des renseignements sur le délinquant et sur l'endroit où il se trouve. Le fait qu'une personne soit contactée ou sollicitée par un prévenu ne fait pas naître un tel devoir (ATF 117 IV 467 consid. 3 p. 472 s.). 
 
3.3. En l'occurrence, le recourant se trouve en détention provisoire depuis plus de sept mois. A teneur de l'arrêt cantonal, l'activité délictueuse qui lui est reprochée est limitée à une très courte période puisqu'il est soupçonné d'avoir aidé B.________ à se soustraire à son arrestation, entre le 29 octobre et le 1er novembre 2012, alors que celui-ci se trouvait à La Chaux-de-Fonds, caché dans un appartement occupé par C.________ et D.________. Le recourant a d'ailleurs admis s'être rendu à trois reprises à La Chaux-de-Fonds durant ce laps de temps et avoir rencontré le meurtrier dans l'appartement où il était caché le 30 octobre 2012. La cour cantonale a encore relevé que le contrôle rétroactif téléphonique ordonné sur le téléphone du recourant montrait qu'il avait été en contact avec C.________ et avec le frère de B.________ pendant la période précitée.  
Ces éléments ne permettent cependant pas de retenir une entrave à l'action pénale d'une ampleur telle qu'elle justifierait une peine privative de liberté sévère. L'intéressé ne semble en outre pas avoir un devoir de garant vis-à-vis de B.________. Le fait que l'ADN du recourant a été retrouvé sur l'arme ayant servi à tuer E.________ a peu de pertinence s'agissant du délit d'entrave à l'action pénale puisque l'arme a été retrouvée lors de l'arrestation de B.________ et qu'il ne ressort pas du dossier ni de l'arrêt attaqué que le recourant a été chargé de la faire disparaître. A un stade aussi avancé de la procédure, après huit mois d'enquête, la probabilité que la prévention d'entrave à l'action pénale se renforce apparaît faible. Dans ces conditions, sans préjuger de la sanction qui sera fixée par le juge du fond, on peut admettre que le comportement reproché au recourant - qui n'a pas d'antécédents judiciaires - ne saurait vraisemblablement conduire au prononcé d'une peine ferme de plus de sept mois de détention. 
Il y a donc lieu de constater que la détention provisoire du recourant est à ce jour très proche de la durée de la peine privative de liberté à laquelle il faut s'attendre en cas de condamnation. La durée de la détention préventive est dès lors excessive au sens de la jurisprudence susmentionnée et le maintien en détention du recourant viole le principe de la proportionnalité. Il convient par conséquent d'ordonner sa mise en liberté immédiate. 
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être admis, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs soulevés par le recourant. L'arrêt attaqué doit donc être annulé et la libération immédiate du recourant ordonnée, à charge pour le Ministère public d'organiser sans délai les modalités de celle-ci. 
Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant, assisté d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge de l'Etat de Vaud (art. 68 al. 1 LTF). Dans ces conditions, sa demande d'assistance judiciaire est sans objet. 
 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.  
Le recours est admis et l'arrêt du 22 mai 2013 de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud est annulé. 
 
2.  
La libération immédiate du recourant est ordonnée, à charge pour le Ministère public d'organiser sans délai les modalités de celle-ci. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Un indemnité de 2'500 francs est allouée à l'avocat du recourant à titre de dépens, à la charge de l'Etat de Vaud. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué à l'avocat du recourant, au Ministère public central et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 18 juillet 2013 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Fonjallaz 
 
La Greffière: Tornay Schaller