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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_529/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 19 septembre 2013  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président, 
Schneider et Jacquemoud-Rossari. 
Greffière: Mme Kistler Vianin. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Olivier Haldimann, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1.        Ministère public du canton de Berne,  
2.       Y.________, 
intimés. 
 
Objet 
Arbitraire; propagation d'une maladie de l'homme 
(art. 231 CP), 
 
recours contre le jugement de la Cour suprême 
du canton de Berne, Section pénale, 
2e Chambre pénale, du 19 décembre 2012. 
 
 
Faits:  
 
A.   
Par jugement du 27 octobre 2011, le Tribunal régional Jura bernois-Seeland a condamné Y.________ notamment pour séquestrations, viols, contraintes sexuelles, lésions corporelles simples, injures, voies de fait et diffamation commis à l'égard de X.________. Il l'a en revanche libéré de la prévention de propagation d'une maladie de l'homme et de lésions corporelles graves. Il lui a infligé, en particulier, une peine privative de liberté de sept ans, en tant que peine d'ensemble et ordonné son internement, l'exécution de la peine précédant l'interne-ment. 
 
B.   
Par jugement du 19 décembre 2012, la Cour suprême du canton de Berne a en partie confirmé le jugement de première instance. Elle a toutefois libéré le prévenu de la prévention de viols, ce qui a entraîné une réduction de la durée de la peine privative de liberté à quatre ans. 
 
C.   
Contre ce dernier jugement, X.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Elle conclut, principalement, à la réforme du jugement en ce sens que Y.________ est condamné pour viols, propagation d'une maladie de l'homme et lésions corporelles graves, commis à son préjudice, et condamné à lui verser un montant de 34'000 fr. avec intérêt à 5% l'an dès le 1 er octobre 2009, à titre d'indemnité pour tort moral; subsidiairement, elle conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à un autre tribunal pour nouveau jugement. En outre, elle sollicite l'assistance judiciaire.  
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 136 V 141 consid. 1 p. 142). 
A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). Un tel intérêt juridique est reconnu à la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF). Selon la jurisprudence, la partie plaignante n'est habilitée à recourir contre un jugement prononçant l'acquittement du prévenu que si elle a, autant que cela pouvait raisonnablement être exigé d'elle, exercé l'action civile, en prenant des conclusions chiffrées en réparation de tout ou partie de son dommage matériel ou de son tort moral (ATF 137 IV 246 consid. 1.3.1 p. 248). En l'espèce, la recourante a participé à la procédure cantonale en tant que partie plaignante, elle a pris des conclusions civiles et le jugement peut avoir des effets sur celles-ci. Sa qualité pour recourir doit donc être admise. 
 
2.   
La recourante s'en prend à l'établissement des faits en relation avec l'acquittement de viol. Elle reproche à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en ne retenant pas que l'intimé avait utilisé la contrainte, en particulier la force, afin d'obtenir des relations sexuelles. Elle lui fait également grief de ne pas avoir retenu les menaces, dans la mesure où, lors de son audition du 29 juin 2010, elle avait exprimé sa crainte " qu'il tape moi ou les chats ou qu'il casse quelque chose dans l'appartement si elle refusait les relations sexuelles ". Enfin, elle se plaint d'arbitraire lorsque la cour cantonale constate que l'intimé ne pouvait pas savoir à chaque fois que la recourante ne disait pas " non " pour l'exciter. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer la constatation des faits, susceptibles d'avoir une influence sur l'issue du litige, que si ceux-ci ont été établis de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraire (cf. ATF 136 II 447 consid. 2.1, p. 450). On peut renvoyer, sur la notion d'arbitraire, aux principes maintes fois exposés par le Tribunal fédéral (voir par ex.: ATF 138 III 378 consid. 6.1 p. 379; 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136 III 552 consid. 4.2 p. 560 ; 135 V 2 consid. 1.3 p. 4 s.; 134 I 140 consid. 5.4 p. 148; 133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les arrêts cités). En bref, pour qu'il y ait arbitraire, il ne suffit pas que la décision attaquée apparaisse discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat.  
 
2.2. La cour cantonale a fondé son jugement sur les déclarations que la recourante a faites dans son audition du 29 juin 2010: "  Durant cette période [soit autour de novembre 2008], je ne voulais pas faire l'amour avec lui. Comme il était déjà arrivé qu'il pète les plombs et qu'il casse tout dans l'appartement quand je lui disais non, je me laissais des fois faire. Des fois je lui disais " non " plusieurs fois en criant, mais il continuait quand même. Quand il avait fini, il me disait qu'il croyait que je disais " non " pour l'exciter, mais il savait très bien que ce n'était pas vrai (DO 229). Les juges cantonaux ont considéré que ces déclarations (DO 229) manquaient de précision et d'individualisation, ce qui empêchait d'arriver à une conclusion suffisante par rapport à l'élément de contrainte. Pour le surplus, ils ont écarté la deuxième partie des déclarations de la recourante qui faisaient référence à l'usage de la force (" je lui disais " non, arrête, j'ai mal " et lui il me tenait les mains et il me disait qu'il devait d'abord finir "), car ces déclarations concernaient des rapports sexuels qui étaient déjà " en cours " et qui ne faisaient pas l'objet de l'acte d'accusation.  
 
 Le raisonnement de la cour cantonale n'est pas critiquable. La recourante ne mentionne l'usage de la force qu'en relation avec les rapports sexuels en cours, qui ne font pas l'objet de l'acte d'accusation. Les déclarations figurant à la page 229 du dossier (DO 229) sont pour le surplus très générales et ne permettent pas de retenir l'usage de la force ou de la violence en relation avec des actes déterminés. De plus, ces déclarations ("  Comme il était déjà arrivé qu'il pète les plombs et qu'il casse tout dans l'appartement quand je lui disais non, je me laissais des fois faire ") ne sauraient fonder ni une menace ni un acte de violence. En effet, la menace doit avoir pour objet un préjudice corporel auquel la victime ne peut s'opposer et la violence désigne l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime dans le but de la faire céder. La cour cantonale n'est donc pas tombée dans l'arbitraire en ne retenant pas ces déclarations, dans la mesure où celles-ci ne sauraient suffire pour retenir une condamnation pour viol.  
 
 Pour le surplus, la cour cantonale a expliqué ne pas pouvoir retenir les pressions psychiques compte tenu du contexte global et du fait que " cela n'était pas mis en accusation ". Au vu de cette double motivation, il n'est pas nécessaire de déterminer si la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire en omettant de retenir certains faits qui pourraient fonder des pressions psychiques. En effet, lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes, il appartient au recourant, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit (ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s.). Le grief est irrecevable. 
 
 Enfin, la recourante a déclaré qu'elle avait peur qu' " il tape moi ou les chats ou qu'il casse quelque chose dans l'appartement si elle refusait " (DO 232). Ces déclarations ne sauraient suffire pour justifier une condamnation pour viol. Elles se réfèrent de manière générale à des actes sexuels, sans préciser s'il s'agissait d'actes de sodomie (pour lesquels l'intimé a été condamné pour contrainte sexuelle) ou d'actes sexuels proprement dits. En outre, ces déclarations ne constituent pas une menace (dès lors que la recourante n'a pas déclaré que l'intimé lui avait objectivement fait redouter des violences). Le grief soulevé n'est donc pas pertinent. 
 
3.   
La recourante soutient que l'intimé aurait dû être condamné pour délit impossible de propagation d'une maladie de l'homme et de lésions corporelles graves. 
 
3.1. L'art. 231 CP punit celui qui, intentionnellement, aura propagé une maladie de l'homme dangereuse et transmissible.  
 
3.1.1. Les hépatites B et C sont des maladies de l'homme dangereuses et transmissibles ( BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3 e éd., 2010, n° 8 ad art. 231 CP). Le fait que le risque de transmission de la maladie par la voie sexuelle est relativement faible n'est pas déterminant (ATF 131 IV 1 consid. 2.2 p. 5 s. à propos du SIDA).  
 
3.1.2. Le comportement délictueux consiste à transmettre la maladie à au moins une personne, que ce soit par le sang, le sperme ou tout autre moyen. S'il n'est pas certain que la maladie ait été transmise, la tentative est concevable (arrêt 6B_808/2009 du 3 décembre 2009). Ainsi, il est admis que lorsqu'il n'est pas possible de déterminer avec suffisamment de certitude si la victime était déjà infectée avant d'entretenir des relations intimes avec l'auteur, le doute doit profiter à l'accusé, en ce sens que l'on doit considérer que la victime était déjà atteinte. Seul le délit impossible pourra alors être retenu (cf. MICHEL DUPUIS, Petit commentaire du Code pénal, 2 e éd., 2012, n° 18 ad art. 231 CPP).  
 
3.1.3. L'infraction peut être commise intentionnellement ou par négligence. Selon la jurisprudence, la personne séropositive qui, connaissant son infection et le risque de contamination, entretient des relations sexuelles non protégées avec un partenaire qui n'est pas au courant de son état de santé, agit par dol éventuel, et non par négligence consciente (ATF 131 IV 1 consid. 2.2. p. 5; 125 IV 242 consid. 3f p. 253). La personne qui doit admettre, en raison d'indices concrets, qu'elle a peut-être été contaminée par le VIH doit s'abstenir de rapports sexuels non protégés aussi longtemps qu'elle ne peut exclure avec une certitude suffisante l'hypothèse de sa contamination. Si elle agit autrement, elle crée pour les biens juridiquement protégés de ses partenaires, au mépris du devoir général de prudence, un danger qui dépasse le risque admissible (ATF 134 IV 193 consid. 8.1 p. 205, jurisprudence critiquée par la doctrine qui estime que, dans certains cas, il faudrait retenir que l'infraction a été commise non par dol éventuel, mais par négligence; cf. MICHEL DUPUIS ET AL., op. cit., n° 22 ad art. 231).  
 
3.2.  
 
3.2.1. Selon le jugement attaqué, l'intimé était en couple avec la recourante depuis le 22 juin 2008, et le rapport de l'institut A.________ (DO 1141) montre que le résultat était positif en ce qui concerne l'hépatite C en mai et juin 2009. La cour cantonale a constaté que le rapport du Dr B.________ n'était pas très explicite sur la question de l'information qui avait été donnée à ce moment à l'intimé. Elle a toutefois jugé ce point non déterminant. Elle a expliqué qu'en effet, il n'était pas possible de déterminer si l'intimé était à l'origine de l'infection de la recourante ou si, au contraire, la recourante était déjà infectée et qu'elle avait infecté l'intimé.  
 
3.2.2. Contrairement à ce que soutient la cour cantonale, il convient de déterminer si l'intimé savait s'il était porteur de l'hépatite C ou s'il existait des indices concrets dans ce sens. En effet, si tel était le cas, il devait prendre les précautions nécessaires pour ne pas infecter ses partenaires sexuelles, sous peine de se rendre coupable de propagation de maladie transmissible. Le fait que la recourante était éventuellement déjà infectée n'exclut pas toute condamnation. En effet, si la maladie ne pouvait pas être transmise, car la recourante était déjà porteuse de l'hépatite C, on se trouve dans le cas d'un délit impossible. Dans la mesure où le jugement attaqué ne se prononce pas sur la question de savoir si le recourant savait ou non qu'il avait une hépatite C, la Cour de céans ne peut contrôler l'application de l'art. 231 CP, respectivement de l'art. 122 CP. Il convient donc d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité précédente afin que l'état de fait soit complété et qu'un nouveau jugement soit prononcé, sans qu'il y ait lieu de demander des observations (ATF 133 IV 293 consid. 3.4.2).  
 
4.   
En conclusion, le recours doit être partiellement admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
 La recourante a requis l'assistance judiciaire. Cette requête est sans objet dans la mesure où elle obtient gain de cause et peut, à ce titre, prétendre à des dépens réduits de la part du canton (art. 64 al. 2 et 68 al. 1 LTF). Le recours était, pour le surplus, dénué de chance de succès, si bien que l'assistance judiciaire doit être refusée dans cette mesure (art. 64 al. 1 LTF). Une partie des frais sera ainsi supportée par la recourante (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est partiellement admis, l'arrêt attaqué est annulé en tant qu'il libère l'intimé de la prévention de propagation d'une maladie de l'homme et de lésions corporelles graves. Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La requête d'assistance judiciaire est rejetée dans la mesure où elle n'est pas sans objet. 
 
3.   
La part des frais judiciaires mise à la charge de la recourante est arrêtée à 800 fr., le solde demeurant à la charge de l'Etat. 
 
4.   
Le canton de Berne versera au conseil de la recourante une indemnité de 1'500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour suprême du canton de Berne, Section pénale, 2 e Chambre pénale.  
 
 
Lausanne, le 19 septembre 2013 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Mathys 
 
La Greffière: Kistler Vianin