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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2P.50/2005 /svc 
 
Arrêt du 20 octobre 2005 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Merkli, Président, 
Hungerbühler et Wurzburger. 
Greffière: Mme Rochat. 
 
Parties 
Commune du Bas-Vully, 
recourante, représentée par Me Christoph J. Joller, avocat, 
 
contre 
 
X.________ SA, 
intimée, représentée par Me Daniel Schneuwly, avocat, 
Préfet du district du Lac, Schlossgasse 1, 3280 Morat, 
Tribunal administratif du canton de Fribourg, 
cour fiscale, rue André Piller 21, 1762 Givisiez. 
 
Objet 
autonomie communale; taxe de raccordement au réseau communal de l'épuration, 
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Fribourg (Cour fiscale) 
du 10 décembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
La société X.________ SA s'occupe du commerce, de la réparation et de l'entretien de machines agricoles, communales et de chantier. Ses locaux (atelier, bureau, halles de stockage et d'exposition) sont construit sur fonds d'autrui. Elle bénéficie de deux droits de superficie inscrits au registre foncier de la Commune du Bas-Vully, soit 6'428 m2 sur la parcelle no 1387, propriété de la Commune du Bas-Vully, et 5'094 m2 sur l'article no 1664, propriété de Y.________ (lié directement à la société). 
Le 19 octobre 1989, la Commune du Bas-Vully a évalué à 2'387,42 m2 la surface utilisable des immeubles de la société construits sur la parcelle no 1387, à l'exception de la halle d'exposition, à cheval sur le deux parcelles, qui fait l'objet d'une autre procédure. La taxe de raccordement, fixée à 38 fr. le m2 par le règlement communal, s'élevait ainsi à 90'722 fr. 
Après facturation d'un premier acompte de 12'792 fr. payé par la société, la Commune a, le 28 octobre 1992, facturé à l'administrateur de la société le solde de la taxe, soit 77'930 fr., payable en trois annuités. La réclamation formée par la société contre la manière de calculer la taxe de raccordement a été rejetée, par décision du Conseil communal du 15 décembre 1992, notifiée le 4 mai 1993. 
B. 
Le 26 mai 1993, X.________ SA a recouru auprès du Préfet du district du Lac contre la taxe de raccordement qui lui était réclamée. Elle a cependant versé le montant forfaitaire de 10'000 fr. qu'elle avait proposé dans sa réclamation. 
Les 10 janvier et 4 septembre 1995, ainsi que le 24 octobre 2000, la Commune a invité le Préfet du Lac à statuer, sans toutefois recourir pour déni de justice formel. Ce dernier a finalement rejeté le recours de la société, par décision du 21 mars 2002, en considérant la taxe litigieuse conforme à la loi et à la jurisprudence. 
C. 
Par arrêt du 10 décembre 2004, le Tribunal administratif a admis le recours de la société X.________ SA et annulé la décision du Préfet du 21 mars 2002. Il a constaté que, dans la mesure où la société n'était que superficiaire de l'article 1387, propriété de la Commune du Bas-Vully, elle ne pouvait être débitrice de la taxe de raccordement, car le droit cantonal limitait la participation à ce financement aux seuls propriétaires ou usufruitiers d'immeubles. Dès lors, en prévoyant que les propriétaires de bâtiments sur fonds d'autrui devaient participer au financement de la construction et de l'entretien des installations publiques d'évacuation et d'épuration des eaux usées l'art. 16 du règlement communal était contraire au droit cantonal. 
D. 
Agissant par la voie du recours de droit public, la Commune du Bas-Vully conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal administratif du 10 décembre 2004, pour violation de son autonomie et arbitraire. 
Le Tribunal administratif conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. 
La société X.________ SA conclut également au rejet du recours dans la mesure où il est recevable, avec suite de frais et dépens. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours dont il est saisi (ATF 131 I 145 consid. 2 p. 147, 153 consid. 1 p. 156; 131 II 58 consid. 1 p. 60 et les arrêt cités). 
1.1 Le recours de droit public est conçu pour la protection des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 lettre a OJ). Il doit permettre à ceux qui en sont titulaires de se défendre contre toute atteinte à leurs droits de la part de la puissance publique. De tels droits ne sont reconnus en principe qu'aux citoyens, à l'exclusion des collectivités publiques qui, en tant que détentrices de la puissance publique, ne sont pas titulaires des droits constitutionnels et ne peuvent donc pas attaquer, par la voie du recours de droit public, une décision qui les traite en tant qu'autorités. Cette règle s'applique aux cantons, aux communes et à leurs autorités, qui agissent en tant que titulaires de la puissance publique (ATF 129 I 313, consid. 4.1 p. 318; 125 I 173 consid. 1b p. 175; 121 I 218 consid. 2a p. 219). 
La jurisprudence admet toutefois qu'il y a lieu de faire une exception pour les communes et autres corporations de droit public, lorsque la collectivité n'intervient pas en tant que détentrice de la puissance publique, mais qu'elle agit sur le plan du droit privé ou qu'elle est atteinte dans sa sphère privée de façon identique ou analogue à un particulier, notamment en sa qualité de propriétaire de biens frappés d'impôts ou de taxes ou d'un patrimoine financier ou administratif. Une seconde exception est admise en faveur des communes et autres corporations publiques lorsque, par la voie du recours de droit public, elles se plaignent d'une violation de leur autonomie (art. 189 al. 1 lettre b Cst.; ATF 129 I 313 consid. 4.1 p. 319 et les arrêts cités). La question de savoir si une commune est autonome dans le domaine en cause est toutefois une question de fond et non de recevabilité (ATF 129 I 313 consid. 4.2 p. 319, 410 consid. 1.1 p. 412). 
1.2 En l'espèce, la Commune recourante est propriétaire du bien- fonds sur lequel la société intimée, au bénéfice d'un droit de superficie, a construit plusieurs bâtiments, dont elle est propriétaire. Elle peut donc agir comme propriétaire de terrain pouvant être amenée à supporter la taxe litigieuse. Il y a lieu dès lors d'entrer en matière sur le recours qui remplit les conditions de recevabilité des art. 84 ss OJ
2. 
L'art. 50 al. 1 Cst. garantit l'autonomie communale dans les limites du droit cantonal. Une commune bénéficie de la protection de son autonomie dans les domaines que le droit cantonal ne règle pas de façon exhaustive, mais qu'il laisse en tout ou partie dans la sphère communale, conférant par là aux autorités municipales une liberté de décision appréciable (ATF 126 I 133 consid. 2 p. 136; 124 I 223 consid. 2b p. 226/227 et les arrêts cités). Il suffit que cette liberté puisse s'exercer, non pas dans un domaine entièrement réservé à la commune, mais dans l'accomplissement des tâches particulières qui sont en cause, quelle que soit leur base juridique (ATF129 I 410 consid. 2.1 p. 413). 
Il est en l'espèce constant que les communes fribourgeoises jouissent d'une certaine autonomie pour adopter un règlement relatif à l'épuration des eaux et que le droit cantonal ne règle pas de manière exhaustive la perception des taxes de raccordement (art. 33 de la loi cantonale du 22 mai 1974 d'application de la loi fédérale du 8 octobre 1971 sur la protection des eaux contre la pollution (LALPEP). Indépendamment de sa qualité pour agir comme propriétaire, la recourante peut dès lors aussi se plaindre d'une violation de son autonomie, dans la mesure où l'arrêt attaqué a jugé la disposition réglementaire qu'elle a édictée dans ce domaine contraire au droit cantonal. 
3. 
La recourante reproche au Tribunal administratif de ne pas avoir respecté son autonomie à adopter un règlement sur l'épuration des eaux, en considérant arbitrairement que la législation cantonale définissait de manière restrictive le cercle des personnes pouvant être assujetties au paiement de la taxe de raccordement, alors que le titulaire d'un droit distinct et permanent est un propriétaire foncier au sens de l'art. 655 CC
3.1 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. D'après la jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le texte n'est pas absolument clair, ou si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (ATF 131 II 13 consid. 7.1 p. 31; 130 II 49 consid. 3.2.1 p. 53, 65 consid. 4.2 p. 71 et les arrêts cités; 130 V 479 consid. 5.2 p. 484). 
3.2 La recourante a mis à la charge de la société intimée la taxe de raccordement au réseau communal de l'épuration sur la base de l'art. 16 al. 1 de son règlement relatif à l'évacuation et à l'épuration des eaux qui dispose: 
 
"Les propriétaires ou les usufruitiers d'immeubles, bâtis ou non, et de bâtiments sur fonds d'autrui, situés dans le périmètre du PDE (plan directeur des égouts), sont astreints à participer au financement de la construction et de l'entretien des installations publiques d'évacuation et d'épuration des eaux selon les bases suivantes: 
a) taxe de raccordement, 
b) taxe annuelle d'utilisation, 
c) taxe spéciale." 
Le Tribunal administratif a jugé cette disposition contraire à l'art. 33 LALPEP qui habilite les communes à adopter un règlement relatif à l'épuration des eaux, en précisant, à son alinéa 2, ce qui suit: 
 
"Le règlement peut prévoir la perception d'une taxe dont le produit doit être affecté exclusivement à l'épuration des eaux. La taxe est perçue auprès des propriétaires ou des usufruitiers d'immeubles bâtis ou non bâtis. Pour fixer le montant de la taxe, il doit être tenu équitablement compte de l'affectation des immeubles et des bâtiments." 
La Cour cantonale se réfère également à l'art. 101 al. 1 de la loi cantonale du 9 mai 1983 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATeC), selon lequel "les propriétaires fonciers sont tenus de participer aux frais d'équipement par des contributions, selon le principe de la couverture des frais effectifs et en fonction des avantages retirés". 
3.3 Lorsqu'il a adopté la loi d'application de la loi fédérale du 8 octobre 1971 sur la protection contre la pollution, le législateur fribourgeois a décidé de définir le contenu du règlement communal que les communes étaient chargées d'adopter de façon plus précise que ne le faisait le projet du Conseil d'Etat à l'art. 34, lequel ne contenait rien à propos du cercle des assujettis à la taxe (voir Bulletin du Grand Conseil 1974 p. 11). Sur proposition de la commission, il a donc ajouté que "la taxe est perçue auprès des propriétaires ou usufruitiers d'immeubles bâtis ou non bâtis". Ce faisant, il n'a pas envisagé d'étendre la perception de la taxe auprès d'autres personnes que celles du propriétaire et de l'usufruitier, parce que ce dernier était responsable de l'immeuble en cas de succession, à charge pour elles de récupérer, cas échéant, la taxe auprès des producteurs des eaux usées. Selon les termes mêmes du rapporteur de la commission, le législateur a en effet renoncé, pour des raisons pratiques, à encaisser la taxe "directement auprès de ceux qui polluent et qui sont en fait les locataires" (voir les débats au Grand Conseil lors de la séance du 13 février 1975, in: BGC 1974 p. 212/213 et p.215). 
Il résulte donc clairement des travaux préparatoires que le législateur fribourgeois n'a pas voulu laisser les communes libres de définir elles-mêmes le cercle des assujettis à la taxe, mais qu'il a limité cette perception aux seuls propriétaires et usufruitiers. Contrairement à ce que soutient la recourante, la notion de propriétaire contenue à l'art. 33 al. 2 LALPEP ne saurait donc être étendue au titulaire du droit de superficie au sens de l'art. 779 al. 3 CC car, si une telle solution avait été envisagée, elle aurait dû être prévue expressément par la loi (voir, sur ce point, Marc-Olivier Buffat, les taxes liées à la propriété foncière, en particulier dans le canton de Vaud, thèse Lausanne 1989, p. 175/176, y compris l'exemple pour le canton de Genève retranscrit à la n. 2 p. 175). 
Il s'ensuit qu'en ajoutant à son règlement la catégorie des assujettis à la taxe, les propriétaires de bâtiments bâtis sur fonds d'autrui, la recourante s'écarte du droit cantonal qui a lui-même défini de manière exhaustive les personnes pouvant être assujetties à la taxe. Il est à cet égard sans pertinence que ce règlement ait été approuvé à deux reprises par la Direction des travaux publics, après son adoption, le 17 août 1987 et après sa modification, le 2 juillet 1996. 
3.4 A cela s'ajoute que le titulaire d'un droit de superficie ne saurait être assimilé au propriétaire foncier dont l'immeuble enregistre une plus-value du fait des investissements consentis par la collectivité, comme le souhaiterait la recourante. Le droit de superficie est en effet une servitude. Dès lors, même si un droit distinct et permanent est un immeuble en vertu de l'art. 655 al. 2 CC, à condition qu'il ait été inscrit au Registre foncier selon les formes prévues à l'art. 9 ORF, il reste un droit (servitude ou droit analogue) dont le contenu et l'étendue sont régis par ses règles propres, notamment en ce qui concerne la relation du titulaire du droit avec le propriétaire de fonds (Paul-Henri Steinauer, Les droits réels, Tome II , Berne 2002, n. 1512, 1513 et 1517, p. 38/39). Il appartient donc au contrat de superficie de régler les rapports entre les deux, en particulier en ce qui concerne le paiement de la taxe de raccordement. Si, comme en l'espèce, cette question n'est pas expressément tranchée, il y aura matière à interprétation de ce contrat. 
3.5 Dans ces conditions, la solution retenue par l'arrêt attaqué est conforme au droit cantonal; elle n'est donc en tous cas pas arbitraire, même si une autre solution était envisageable (sur cette notion, voir ATF 131 I 217 consid. 2.1 p. 219). Ainsi, dans un arrêt 2P.248/2004 du 13 mai 2005, le Tribunal fédéral a jugé qu'au vu du droit cantonal et du large pouvoir d'appréciation dont dispose le législateur pour déterminer qui est le débiteur de la taxe de raccordement, celle-ci pouvait être mise à la charge du superficiaire. La recourante ne saurait dès lors soutenir que l'interprétation de l'art. 16 al. 1 de son règlement donnée par la juridiction cantonale viole son autonomie. 
Pour le reste, la recourante ne prétend pas que le droit cantonal serait contraire au droit fédéral (art. 49 Cst.), en particulier depuis l'entrée en vigueur, au 1er novembre 1997, des art. 3a et 60a de la loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (RS 814.20), qui imposent aux cantons de mettre les émoluments ou autres taxes à la charge de ceux qui sont à l'origine de la production d'eaux usées. Ce point n'a dès lors pas à être examiné (art. 90 al. 1 OJ). 
4. 
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, avec suite de frais à la charge de la recourante (art. 156 al. 1 OJ). Il y a lieu également d'allouer à la société intimée une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera à la société intimée une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Préfet du district du Lac et au Tribunal administratif du canton de Fribourg. 
Lausanne, le 20 octobre 2005 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: