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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_182/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 20 novembre 2017  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Pfiffner, Présidente, 
Meyer et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Berthoud. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Daniel Känel, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office AI du canton de Fribourg, 
Route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, du 20 janvier 2017 (608 2015 120). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par décision du 10 mai 2001, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: l'office AI) a alloué une rente entière d'invalidité à A.________ dès le 1 er juillet 2000, en raison d'un épisode dépressif de degré léger à moyennement grave entraînant une incapacité totale de travail (rapport de la doctoresse C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, médecin traitant, du 3 janvier 2001). Le droit à cette prestation a été confirmé à l'occasion de révisions en 2002, 2005 et 2009.  
Dans le cadre d'une nouvelle révision de la rente, la doctoresse C.________ a attesté que l'état de santé était stationnaire (rapport du 23 septembre 2013). Le 8 avril 2014, l'office AI a confié un mandat d'expertise psychiatrique au docteur B.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie. Ce médecin n'a diagnostiqué aucune affection ayant une répercussion sur la capacité de travail; il a fait état d'un trouble dépressif récurrent, actuellement en rémission (F33.4), ainsi que d'une anxiété généralisée (F41.1), sans répercussion sur la capacité de travail. Ne pouvant objectiver la date à partir de laquelle l'assurée aurait pu reprendre une activité professionnelle, l'expert a proposé de retenir celle de la date de son entretien avec l'assurée, soit le 17 juin 2014 (rapport du 22 juillet 2014). 
Sur la base de cette expertise, l'office AI a retenu que l'état de santé de l'assurée s'était amélioré, qu'elle était désormais en mesure d'exercer à plein temps une activité correspondant à ses compétences professionnelles et qu'elle ne subissait plus de perte de gain. En conséquence, il a envisagé de supprimer la rente (projet de décision du 9 février 2015). L'assurée s'y est opposée (écriture du 10 mars 2015, en versant au dossier des certificats de la doctoresse C.________ du 6 mars 2015 et du docteur D.________ des 14 et 24 février 2015). 
Par décision du 19 mai 2015, l'office AI a supprimé la rente avec effet au 1 er juillet suivant.  
 
B.   
A.________ a déféré la décision du 19 mai 2015 au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'office AI pour mise en oeuvre d'une nouvelle expertise, voire de mesures nécessaires à la réintégration professionnelle. 
En cours de procédure, l'assurée a produit une expertise psychiatrique réalisée par le docteur E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (rapport du 23 août 2015). Ce médecin, qui a examiné l'assurée les 24 juin et 7 juillet 2015, a diagnostiqué un trouble mixte de la personnalité avec traits de personnalité histrionique, de personnalité dépendante et de personnalité anxieuse (F61.0), ainsi qu'une anxiété généralisée (41.1). Pour l'expert, la capacité de travail atteignait 30 à 40 % dans une activité professionnelle adaptée, effective uniquement dans un milieu protégé. 
Par jugement du 20 janvier 2017, la juridiction cantonale a rejeté le recours. 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande l'annulation, en concluant au renvoi de la cause à l'office AI pour instruction complémentaire et nouvelle décision. 
L'intimé conclut implicitement au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
Le 28 juin 2017, l'intimé a produit divers documents reçus de la Caisse suisse de compensation. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il fonde par ailleurs son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération. 
 
2.   
L'intimé a déposé de nouvelles pièces bien après le délai imparti pour se déterminer et sans qu'un second échange d'écritures n'ait été ordonné (cf. art. 102 LTF). Pour ce motif déjà, il n'en sera pas tenu compte. 
 
3.   
Le litige porte sur la suppression, par la voie de la révision, du droit à la rente entière d'invalidité allouée à la recourante depuis le 1 er juillet 2000. Le jugement entrepris expose les règles légales et les principes jurisprudentiels sur la notion d'invalidité et son évaluation (art. 8 et 16 LPGA, art. 28 LAI), ainsi que sur les conditions auxquels le droit à une rente d'invalidité peut être révisé (art. 17 LPGA) et la valeur probante des rapports médicaux (ATF 125 V 351). Il suffit d'y renvoyer.  
 
4.   
La juridiction cantonale a constaté que les diagnostics posés par le docteur E.________ ainsi que son appréciation de la capacité de travail correspondaient à une situation existant postérieurement à la décision administrative. Elle a aussi relevé que l'expert privé avait eu de la peine à suivre la recourante, compte tenu de ses digressions et des renseignements qu'elle avait donnés de façon hachée, "si bien qu'il [était] difficile de savoir quelle est la réalité". Pour le tribunal cantonal, il n'était dès lors pas possible de constater une évolution - ou son absence - de l'influence des troubles sur les activités quotidiennes, d'autant moins que le docteur E.________ s'était basé sur les rapports de la doctoresse C.________ pour dire qu'il n'y avait pas eu d'évolution sans pour autant exprimer sa propre appréciation à ce sujet. L'expertise privée n'était ainsi pas déterminante pour établir la situation médicale et la capacité de travail au moment de la décision administrative. 
A propos des rapports de la doctoresse C.________, les premiers juges ont considéré qu'ils étaient dépourvus de force probante, notamment en raison de la brièveté des réponses apportées sur le questionnaire, de leur manque de détail, sans mention de l'anamnèse, des examens ou de la motivation. 
En revanche, les premiers juges ont qualifié l'expertise psychiatrique du docteur B.________ de convaincante. Ils ont précisé qu'il importait peu que cet expert n'ait pas été en mesure d'objectiver le moment à partir duquel la recourante avait retrouvé une stabilité psychique et était à nouveau capable de travailler, car l'expert avait attesté l'absence de signe de trouble dépressif récurrent sévère ou moyen depuis plusieurs années avant son expertise. Suivant dès lors les conclusions du docteur B.________, les juges cantonaux ont constaté que l'état de santé de la recourante s'était notablement amélioré de manière à retrouver une pleine capacité de travail dès le 17 juin 2014. 
 
5.   
La recourante soutient que l'expertise du docteur B.________ est dépourvue de force probante, car ce médecin n'aurait pas procédé correctement à l'anamnèse, n'aurait pas tenu compte de sa situation personnelle et de sa longue absence du marché du travail. Elle en déduit que la juridiction cantonale ne pouvait pas se fonder uniquement sur cet avis médical en écartant les autres. 
Par ailleurs, la recourante se plaint d'une constatation des faits manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF). Elle observe qu'il ne ressort pas du jugement attaqué que des médecins auraient attesté une amélioration de son état de santé; à cet égard, elle rappelle qu'une simple appréciation différente d'un état de fait, demeuré pour l'essentiel inchangé, ne justifie pas une révision au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA. Dans ce contexte, elle relève que le docteur B.________ n'a pas fixé le moment à partir duquel son état de santé se serait amélioré de façon notable et durable. Quant au docteur E.________, la recourante soutient qu'il ne s'est pas seulement basé sur les rapports de la doctoresse C.________, mais qu'il a bien procédé à sa propre appréciation médicale, de manière détaillée et convaincante. En préférant l'appréciation sommaire et peu documentée du docteur B.________, la juridiction de recours aurait versé dans l'arbitraire. 
En outre, la recourante est d'avis que les faits ont été établis en violation du droit, car les constatations de l'expert B.________ sont très éloignées de celle de son confrère E.________ quant à sa personnalité. Elle soutient qu'il faudrait tenir compte de la situation qui prévalait au moment de la dernière décision de l'AI passée en force pour savoir si une amélioration notable et durable de l'état de santé peut être prise en compte. Comme cela ne ressort pas du dossier de l'intimé, la dernière procédure de révision doit être refaite. 
 
6.  
 
6.1. L'argumentation de la recourante consiste à soutenir que l'appréciation du docteur B.________ devrait être écartée au profit de celle du docteur E.________, au motif que ce dernier aurait réalisé une expertise meilleure et détaillée, tenant compte de sa situation, à la lumière de laquelle sa cause devrait ainsi être jugée. Par son argumentation, la recourante n'invoque toutefois pas de faits concrets et pertinents qui permettraient d'admettre que son rapport d'expertise du 22 juillet 2014 ne satisferait pas aux réquisits jurisprudentiels relatifs à la force probante de tels documents (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352).  
Contrairement à l'opinion que défend la recourante, le docteur B.________ - nommé en qualité d'expert selon la procédure prévue à l'art. 44 LGPA - n'a pas simplement donné une nouvelle appréciation médicale d'un état de fait demeuré pour l'essentiel inchangé. Au contraire, il a clairement fait état d'une évolution du trouble dépressif qui avait justifié l'octroi de la rente depuis l'année 2000, en indiquant qu'il n'y avait plus aucun signe dépressif, en tout cas pas d'un trouble dépressif récurrent sévère, ni moyen, lorsqu'il avait pratiqué son examen le 17 juin 2014. Relevant une stabilité psychique existant vraisemblablement depuis de nombreuses années, l'expert a ainsi constaté que l'état de santé s'était amélioré (p. 9-10 du rapport d'expertise du 22 juillet 2014). Quant à l'expert E.________, il a exclu la présence d'un trouble dépressif (p. 8 du rapport d'expertise du 23 août 2015), ce qui conforte l'appréciation de son confrère B.________ sur ce point. 
Dans ces conditions, les faits n'ont pas été établis de façon inexacte (cf. art. 97 al. 1 LTF) dans la mesure où il a été constaté que la recourante ne présentait plus de trouble dépressif d'une gravité ayant jadis justifié l'octroi de la rente (voir le rapport de la doctoresse C.________ du 3 janvier 2001) et que son état de santé psychique s'était notablement amélioré depuis lors sous cet angle. 
 
6.2.  
 
6.2.1. En ce qui concerne ensuite l'évaluation du docteur E.________, la juridiction cantonale a considéré avant tout qu'on se trouvait en présence de faits postérieurs à la décision administrative du 19 mai 2015, si bien que le juge ne devait pas en tenir compte pour en examiner la légalité (cf. ATF 131 V 407 consid. 2.1.2.1 p. 412 et les références). Devant le Tribunal fédéral, l'intimé s'est rallié implicitement à cette appréciation.  
Le docteur E.________ a rédigé son rapport du 23 août 2015 sur la base du dossier ainsi que de ses consultations des 24 juin et 7 juillet 2015. Bien qu'étant postérieures d'un mois au prononcé de la décision administrative, les premières observations de ce médecin se rapportent à une situation qui prévalait vraisemblablement au jour où la décision du 19 mai 2015 a été rendue, l'apparition subite d'un trouble de la personnalité dans ce bref laps de temps pouvant être exclue. L'expertise privée ne pouvait donc être écartée, motif pris de la date à laquelle elle a été rendue. 
 
6.2.2. Cela étant, les autres raisons retenues par la juridiction cantonale pour considérer que le rapport du 23 août 2015 n'était pas déterminant ne relèvent pas, quoi qu'en dise la recourante, d'une appréciation arbitraire des preuves (sur cette notion, ATF 140 III 16 consid. 2.1 p. 18 s.; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379 s.).  
A la suite des premiers juges, on constate tout d'abord que l'expert privé a observé qu'en raison de la manière dont l'assurée a répondu aux questions - imprécisions, digressions, agitation, pleurs - il était difficile de cerner la réalité des propos de la recourante; il était par ailleurs difficile de savoir où elle vivait réellement et impossible de savoir comment elle passait et occupait une journée (rapport du 23 août 2015, p. 6). Au regard de ces difficultés, on ne voit pas sur quelles observations concrètes le médecin mandaté par la recourante s'est fondé pour faire état de l'empêchement de celle-ci à entretenir des relations sociales ou d'un comportement inadéquat avec des choix de vie, éléments - parmi d'autres - qui l'ont conduit à retenir le diagnostic de trouble mixte de la personnalité avec traits de la personnalité histrionique, de personnalité dépendante et de personnalité anxieuse (F 61.0, CIM-10). A cet égard, le rapport du docteur E.________ ne contient aucune explication sur les motifs qui l'ont conduit à s'écarter de l'appréciation de son confrère B.________, qui avait exclu tout élément anamnestique faisant penser à un trouble de la personnalité durant l'enfance ou l'adolescence, ainsi que tout signe ou symptôme d'un tel trouble, au moment de son examen. Ce médecin avait également conclu que les activités quotidiennes de l'assurée, dont celle-ci lui avait apparemment fait part de manière cohérente, n'étaient pas compatibles avec un statut de malade. 
L'expertise du 23 août 2015 n'est pas plus explicite quant à l'absence de toute amélioration de l'état de santé psychique de l'assurée depuis la fin des années 1990, alors que le docteur B.________ avait conclu à une stabilité psychique chez l'assurée depuis en tout cas la date de son examen (juin 2014). Le docteur E.________ indique ainsi une absence d'évolution de la symptomatologie depuis quinze ans sans aucunement prendre position sur l'appréciation opposée de l'expert mandaté par l'administration. 
Par ailleurs, et avant tout, les conclusions de l'expert privé quant à l'incapacité totale de travail de la recourante ne sont pas convaincantes et ne sauraient dès lors être suivies. Pour motiver une "difficulté majeure dans les relations interpersonnelles" sur le plan professionnel, le médecin se réfère à un conflit qu'aurait eu l'assurée avec son employeur en l'an 2000, décrit par la doctoresse C.________ dans son rapport du 11 avril 2000. Il résulte toutefois de cet avis du médecin traitant que l'incapacité de travail retenue alors était liée à une dépression post partum et à des difficultés familiales; le "conflit avec l'employeur" n'a aucunement été mentionné en lien avec un trouble de la personnalité - diagnostic absent des rapports médicaux de l'époque - mais avec la fatigue de l'assurée, qui allaitait son enfant, et l'atmosphère trépidante dans la salle d'opération dans laquelle l'assurée exerçait son activité d'infirmière instrumentiste. L'épisode isolé mentionné par l'expert psychiatre ne suffit pas à justifier l'incapacité de travail retenue plus de quinze ans plus tard - l'assurée ayant au demeurant exercé une activité lucrative de 1993 à 2000 sans empêchement -, ni à convaincre de la "difficulté des relations interpersonnelles" qui empêcherait l'assurée de travailler en dehors d'un milieu protégé. 
 
6.2.3. Dans ces circonstances, on ne saurait qualifier d'arbitraire le choix opéré par les premiers juges de suivre les conclusions du docteur B.________ et non celles de son confrère E.________. Les griefs de la recourante sur ce point sont mal fondés. En conséquence, le Tribunal fédéral n'a pas à s'écarter des constatations cantonales sur l'existence d'un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA, conduisant à la suppression de la prestation d'invalidité.  
 
7.   
Vu l'issue de la procédure, la recourante supportera les frais y afférents (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 20 novembre 2017 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Berthoud