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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_694/2022  
 
 
Arrêt du 24 février 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffière: Mme Schwab Eggs. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Amélie Giroud, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Expulsion; révision, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, du 14 janvier 2022 (n° 57 PE19.003746/MTK). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 19 février 2020, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a notamment condamné A.________ à une peine privative de liberté d'ensemble de 36 mois, ainsi qu'à une amende de 300 fr., pour vol en bande et par métier, tentative de vol en bande et par métier, violation de domicile et dommages à la propriété et a ordonné son expulsion du territoire suisse pour une durée de vingt ans. 
Par prononcé du 29 mai 2020, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a pris acte du retrait de l'appel formé par A.________ contre le jugement du 19 février précédent, a rayé la cause du rôle, a déclaré ce jugement exécutoire et a statué sur les frais et indemnités de procédure. 
 
B.  
Le 23 décembre 2021, A.________ a formé une demande de révision du jugement du 19 février 2020 devant la cour d'appel et a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement, à la réforme du chiffre VI de son dispositif en ce sens qu'il soit renoncé à l'expulser du territoire suisse et, subsidiairement, au renvoi de la cause pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il a requis l'assistance judiciaire. 
 
C.  
Par décision du 14 janvier 2022, la cour d'appel a déclaré la demande de révision irrecevable, a admis la requête d'assistance judiciaire, a statué sur l'indemnité du défenseur d'office ainsi que sur les frais et a déclaré la décision exécutoire. 
 
D.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision du 14 janvier 2022. Il conclut en substance, avec suite de frais et dépens, principalement, à sa réforme en ce sens que sa demande de révision est recevable, qu'elle est admise, que le chiffre VI du dispositif du jugement du 19 février 2020 du tribunal correctionnel est réformé comme il suit: "VI. Renonce à expulser A.________ du territoire suisse" et que les frais de la procédure de révision sont laissés à la charge de l'État. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert par ailleurs l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
E.  
Invités à se déterminer sur ce recours, la cour d'appel y a renoncé, se référant à la décision attaquée, tandis que le ministère public a conclu à son rejet. Ces écritures ont été communiquées à titre de renseignement à A.________. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'art. 99 al. 2 LTF dispose que toute conclusion nouvelle est irrecevable. Ce principe s'applique dans tous les domaines du droit - y compris ceux dominés par la maxime d'office -, en matière pénale en particulier. Les conclusions prises en instance fédérale ne doivent, alors, pas modifier l'objet du litige tel qu'il est délimité par la décision de dernière instance cantonale, sauf à le restreindre (arrêt 6B_806/2019 du 9 octobre 2019 consid. 1 et la référence citée). 
Par ses conclusions prises à l'appui de sa demande de révision, le recourant a circonscrit le litige porté devant la cour cantonale à la seule question de son expulsion. Invoquant l'art. 9 Cst., le recourant soutient pour la première fois devant le Tribunal fédéral qu'il serait arbitraire de maintenir qu'il est coupable des infractions retenues contre lui par les premiers juges et, partant, que les conditions à son expulsion sont remplies. Quoi qu'il soutienne, son grief revient en réalité à élargir l'objet du litige et doit être considéré comme une conclusion nouvelle. Dans la mesure où la question de sa culpabilité n'a pas été soumise à la cour cantonale, sa conclusion doit être déclarée irrecevable. Au demeurant, le recourant tente en réalité de remettre en cause le jugement du 19 février 2020, alors que l'objet du présent litige est limité à la phase du rescindant de la procédure de révision. 
 
 
2.  
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits (art. 9 Cst.) et d'une violation des art. 410 al. 1 let. a et 412 al. 2 CPP. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, toute personne lésée par un jugement entré en force peut en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère ou plus sévère du condamné.  
Par faits, on entend les circonstances susceptibles d'être prises en considération dans l'état de fait qui fonde le jugement. Quant aux moyens de preuve, ils apportent la preuve d'un fait, qui peut déjà avoir été allégué. Une opinion, une appréciation personnelle ou une conception juridique nouvelles ne peuvent pas justifier une révision (ATF 141 IV 93 consid. 2.3; 137 IV 59 consid. 5.1.1). Les faits ou moyens de preuve sont inconnus lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.2; 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2.a). Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 145 IV 197 consid. 1.1; 137 IV 59 consid. 5.1.4; 130 IV 72 consid. 1; arrêt 6B_1122/2021 du 20 juin 2022 consid. 1.1). 
Une modification du jugement antérieur n'est possible que si elle est certaine, hautement vraisemblable ou vraisemblable (ATF 120 IV 246 consid. 2b; 116 IV 353 consid. 5a; arrêt 6B_676/2022 du 27 décembre 2022 consid. 1.3.4). La procédure de révision ne sert pas à remettre en cause des décisions entrées en force, à détourner des dispositions légales sur les délais de recours ou celles sur la restitution des dits délais, voire à introduire des faits non présentés dans le premier procès en raison d'une négligence procédurale; l'abus de droit ne sera cependant admis qu'avec retenue (ATF 145 IV 197 consid. 1.1; 130 IV 72 consid. 2.2; 127 I 133 consid. 6). 
Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de faits ou de moyens de preuve nouveaux et sérieux est une question de droit. En revanche, savoir si un fait ou un moyen de preuve était effectivement inconnu du juge est une question de fait qui peut être revue pour arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves. Il en va de même de la question de savoir si un fait nouveau ou un moyen de preuve nouveau est propre à modifier l'état de fait retenu puisqu'elle relève de l'appréciation des preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade du rescindant. Enfin, c'est de nouveau une question de droit de savoir si la modification de l'état de fait est juridiquement pertinente, c'est-à-dire de nature, en fonction des règles de droit de fond applicables, à entraîner une décision plus favorable au condamné en ce qui concerne la culpabilité, la peine ou les mesures (ATF 130 IV 72 consid. 1 et les références citées; arrêt 6B_1122/2021 du 20 juin 2022 consid. 1.1). 
 
2.2. La cour cantonale, se fondant sur les éléments qui étaient déjà à disposition du tribunal de première instance, a relevé en substance que même si l'expression de "traite d'êtres humains" n'avait alors pas été évoquée, le motif de révision n'était pas véritablement nouveau, la question de la soumission par la violence et les menaces d'un tiers pour commettre des cambriolages ayant été discutée à l'audience de première instance. Compte tenu des détails qui émaillaient la déposition du recourant, on pouvait présumer qu'il faisait partie d'un réseau et avait potentiellement été victime de traite d'êtres humains dans ce cadre, le recourant ne donnant toutefois aucune indication personnelle susceptible de vérifier ses dires. Son rôle dans l'organisation criminelle, tout comme son éventuel statut de victime de traite d'êtres humains n'étaient ainsi pas inconnus des premiers juges, lesquels avaient renoncé à instruire plus avant ces questions, sans pertinence selon eux pour l'examen de la culpabilité de l'intéressé. La cour cantonale a encore retenu que l'appréciation des premiers juges n'avait pas été remise en question en raison du retrait de l'appel.  
 
2.3. Le recourant reproche en substance à la cour cantonale de n'avoir pas, lors de l'établissement des faits, pris en compte les nouveaux éléments invoqués dans la procédure de révision. En particulier, les pièces 3 et 5 du bordereau des pièces produites à l'appui de sa demande de révision (dossier cantonal, P 60/2) - lettres échangées les 3 et 6 novembre 2020 par son conseil et le ministère public central - attesteraient de l'existence d'une enquête réalisée en parallèle de l'enquête officielle, dont il résulterait qu'il aurait été identifié comme victime de traite d'êtres humains par un inspecteur de police, qu'il aurait été approché par la brigade de lutte contre la traite d'êtres humains pour mettre en oeuvre un plan de protection en vue de dénoncer le réseau criminel dont il aurait été victime, qu'il aurait rencontré cette brigade à plusieurs reprises alors qu'il était en détention provisoire et que son identification en qualité de victime, ses entretiens et son travail avec cette brigade ne figureraient pas au dossier de la cause. La cour cantonale n'aurait pas examiné - ni même mentionné - ces éléments de preuve. En outre, le contenu de sa déposition du 29 septembre 2020 en qualité de personne appelée à donner des renseignements (pièce 4 du bordereau susmentionné) confirmerait la réalité de son statut de victime, les raisons pour lesquelles il n'aurait pas été en mesure d'en parler au moment de l'enquête ayant abouti au jugement dont la révision était demandée et le danger encouru en cas d'expulsion. Enfin, la décision du 21 avril 2021 du Secrétariat d'État aux migrations (SEM) (pièce 6 du bordereau susmentionné), bien qu'elle rejette sa demande d'asile, reconnaîtrait sa qualité de victime potentielle de traite d'êtres humains. Le recourant souligne que les pièces 4 et 6 constitueraient des preuves nouvelles de son statut de victime.  
Le recourant fait également grief à la cour cantonale d'avoir considéré que son statut de victime était connu lors de l'audience du 19 février 2020 sur la seule base de sa déposition du 29 septembre 2020 - au demeurant postérieure au jugement -, des déclarations d'un co-prévenu faisant état de violence et de menaces d'un tiers, ainsi que de ses propres déclarations en audience. A cet égard, il souligne que la question préjudicielle concernait l'organisation de la bande et son rôle en son sein et non son statut de victime de traite d'êtres humains. Il aurait été arbitraire de retenir sur la base de ces éléments que son statut de victime était connu du tribunal de première instance. 
S'appuyant en substance sur la participation présumée du recourant à un réseau criminel, la cour cantonale a considéré que le statut de victime de traite d'êtres humains invoqué par celui-ci à l'appui de sa demande de révision n'était pas inconnu du tribunal de première instance. On peut à cet égard douter qu'un tel statut soit assimilable à la participation à un réseau criminel, cette question pouvant toutefois demeurer indécise. Il est en effet indifférent que le fait allégué ait ou non déjà été connu du tribunal de première instance puisque le point essentiel est que le recourant a apporté des preuves nouvelles destinées à rendre vraisemblable son allégation. En d'autres termes, la cour cantonale ne devait pas se demander uniquement si le fait était nouveau mais examiner si les preuves nouvelles produites à l'appui de la demande de révision remplissaient les conditions posées à l'art. 410 al. 1 let. a CPP permettant d'obtenir la révision. Or la cour cantonale n'a pas statué sur ces pièces nouvelles, certaines n'étant même pas mentionnées dans sa décision. La décision attaquée doit donc être annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle apprécie les moyens de preuve du recourant et détermine s'ils sont susceptibles de rendre vraisemblable le statut dont le recourant se prévaut. 
La cour cantonale a souligné que le tribunal de première instance avait renoncé à instruire le rôle du recourant dans l'organisation criminelle et ainsi, à suivre le raisonnement de la cour cantonale, son éventuel statut de victime de traite d'êtres humains au motif que cela était sans pertinence pour l'examen de sa responsabilité. On comprend tout d'abord de la motivation cantonale que le fait en question n'a pas été établi, à tout le moins au stade de sa vraisemblance, et n'a pas fait l'objet d'une appréciation de son existence. On comprend en outre de sa motivation que la cour cantonale a estimé que, même si le statut de victime de traite d'êtres humains du recourant était établi, cet élément de fait avait été jugé non pertinent par le tribunal de première instance. Savoir si le statut de victime de traite d'êtres humains du recourant aurait dû avoir une influence sur la réalisation des infractions reprochées au recourant est une question de droit. Or une appréciation juridique prétendument erronée ne peut pas faire l'objet d'une révision (cf. ATF 96 I 279 consid. 3) mais doit être contestée par les voies de droit ordinaires. Il ne ressort en revanche pas de la décision cantonale que le tribunal de première instance aurait également considéré que le potentiel statut de victime de traite d'êtres humains du recourant n'avait pas d'incidence sur l'expulsion. Si au terme de l'examen des preuves à laquelle elle se livrera, la cour cantonale retient la vraisemblance du statut de victime du recourant, il lui appartiendra encore de se prononcer sur le caractère sérieux de celles-ci, soit de savoir si la deuxième condition de l'art. 410 al. 1 let. a CPP est également remplie; on rappelle à cet égard que la vraisemblance est suffisante. Elle devra notamment prendre en considération les décisions administratives à l'appui desquelles le recourant prétend que son renvoi serait illicite au sens de l'art. 3 CEDH qui interdit la torture. Un tel élément peut en effet être de nature à entraîner une décision plus favorable au recourant (cf. ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5). 
En définitive, il incombera à la cour cantonale d'apprécier, au stade de la vraisemblance et sur la base des preuves produites à l'appui de la demande de révision, le statut de victime de traite d'êtres humains dont le recourant se prévaut et, le cas échéant, l'incidence de ce statut sur l'expulsion. Vu l'admission du recours, les autres griefs du recourant deviennent sans objet. 
 
3.  
Le recours doit être admis dans la mesure de sa recevabilité, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Le recourant, qui obtient gain de cause, ne supportera pas les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et a droit à des dépens à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF). Sa demande d'assistance judiciaire devient ainsi sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le canton de Vaud versera au mandataire du recourant une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 24 février 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Schwab Eggs