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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_231/2020  
 
 
Arrêt du 25 mai 2020  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, 
Jacquemoud-Rossari et van de Graaf. 
Greffière : Mme Paquier-Boinay. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Nicola Meier, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève, 
2. B.________, 
intimés. 
 
Objet 
Contrainte sexuelle; arbitraire, in dubio pro reo, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 16 janvier 2020 (AARP/9/2020 (P/3560/2017)). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 19 mars 2019, le Tribunal correctionnel genevois a acquitté A.________ des chefs d'accusation de contrainte sexuelle aggravée ainsi que de séquestration et enlèvement; il l'a en revanche reconnu coupable de lésions corporelles simples aggravées, de contrainte, de lésions corporelles simples, de tentative de menaces, de vol, de tentative de vol, de dommages à la propriété, de non-restitution du permis de conduire malgré les sommations de l'autorité, de conduite sans autorisation, de violation simple des règles de la circulation routière et d'infraction à la LStup. Il a révoqué le sursis octroyé le 11 avril 2016 par le ministère public et prononcé une peine privative de liberté d'ensemble de 36 mois, qu'il a suspendue au profit d'un traitement institutionnel des addictions (art. 60 CP), ainsi qu'à une amende de 400 fr., avec une peine privative de liberté de substitution de 4 jours. Il l'a en outre condamné à payer à B.________ la somme de 8'000 fr. pour la réparation de son tort moral. 
 
B.   
Par arrêt du 16 janvier 2020, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a admis partiellement l'appel formé par B.________ contre le jugement du Tribunal correctionnel, qu'elle a réformé en ce sens qu'elle a déclaré A.________ coupable, outre les autres infractions retenues à son encontre, de contrainte sexuelle; elle a porté à 50 mois la durée de la peine privative de liberté, qu'elle a également suspendue au profit d'un traitement institutionnel des addictions, et à 15'000 fr. le montant des dommages-intérêts pour tort moral. 
Les faits à l'origine de cette condamnation sont en substance les suivants. 
Le 31 juillet 2016, A.________, qui logeait depuis quelques semaines au domicile de B.________ a conçu le soupçon que celle-ci lui avait pris une boulette de cocaïne. Entre 10 h et 21 h, il lui a à réitérées reprises infligé des coups; il lui a notamment pincé les seins, donné des coups de pied dans la poitrine, tordu les oreilles, asséné des coups sur tout le corps y compris le visage avec les pieds, les mains et à l'aide d'un manche à balai, allant jusqu'à casser ce dernier sur sa tête en lui causant de nombreux hématomes, ecchymoses et dermabrasions ainsi que la fracture de deux dents. 
A un moment donné, après avoir infligé des coups à B.________, l'avoir jetée au sol à plusieurs reprises et l'avoir menacée de la tuer si elle parlait à la police, A.________ l'a obligée à s'allonger sur un matelas et à se déshabiller avant de lui enfoncer un manche à balai dans l'anus. 
Toujours sous le même prétexte de retrouver la boulette de cocaïne, la surveillant de près, il l'a contrainte à déféquer devant lui et, après avoir fouillé ses excréments au moyen d'une spatule, l'a contrainte à manger un morceau de matière fécale, en usant de violence, en proférant des menaces de mort et en profitant du climat de terreur qu'il avait instauré. Il a par ailleurs contraint B.________ à rester debout toute la soirée, sans bouger, sans manger et sans aller aux toilettes alors que lui-même se nourrissait et regardait la télévision. Il a quitté l'appartement vers 21 h et n'y est plus revenu. 
Les deux protagonistes, qui consommaient en général de la cocaïne le soir, en avaient consommé " du matin au soir " le jour des faits. 
 
C.   
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement de la Chambre pénale d'appel et de révision. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et à la confirmation du jugement du Tribunal correctionnel et, subsidiairement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recourant ne s'en prend à l'arrêt attaqué que dans la mesure où il le reconnaît coupable de contrainte sexuelle pour avoir introduit un manche à balai dans l'anus de la victime. 
 
2.   
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir constaté les faits de manière arbitraire et d'avoir violé le principe " in dubio pro reo ". 
 
2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence ou à son corollaire, le principe " in dubio pro reo ", ceux-ci n'ont pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (voir ATF 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.).  
Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.). 
 
2.2. La cour cantonale a constaté que si le recourant avait fini par reconnaître l'intégralité des violences infligées à l'intimée, les versions des protagonistes divergent concernant les faits constitutifs de contrainte sexuelle. Elle a considéré comme crédible la thèse de l'intimée. Elle a notamment relevé que la présence de traces d'ADN du recourant sur le plus petit morceau du manche de balai attestait qu'il l'avait saisi après qu'il eut été brisé; comme ce morceau, nettement plus court que l'autre et arrondi à son extrémité, porte par ailleurs des traces d'ADN et de sang de l'intimée, il est tout à fait plausible que le recourant s'en soit servi pour pénétrer l'anus de cette dernière. La cour cantonale a relevé que cette hypothèse est encore renforcée par plusieurs éléments, notamment le fait que l'intimée a constaté une perte de sang au niveau anal après les faits et que la police a noté que le matelas était maculé de sang, ce que le recourant n'explique en aucune manière. En outre, l'intimée, si elle a varié dans ses déclarations relatives au lieu et au moment où les faits contestés ont été commis, a été constante dans sa description de la manière dont ils se sont déroulés et n'est jamais revenue sur ses accusations. Par ailleurs, la cour cantonale a noté que l'attitude de l'intimée au cours de la procédure ne dénotait aucune volonté de charger le recourant. Enfin, l'arrêt attaqué ne méconnaît pas le fait que le récit de l'intimée comporte des incohérences d'une certaine importance, mais admet que cela n'entache pas sa crédibilité de façon déterminante car ces confusions peuvent s'expliquer par le déphasage engendré par la répétition, l'ampleur et la violence des sévices subis. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique.  
 
2.3. Le recourant soutient qu'en raison de différents éléments la cour cantonale ne pouvait pas apprécier les preuves comme elle l'a fait.  
Il invoque en premier lieu le manque de spontanéité de l'intimée, qui n'a pas évoqué cet épisode lorsqu'elle s'est confiée pour la première fois sur les événements à l'origine de la présente procédure le 1er août 2016, à savoir le lendemain des faits. Comme l'a admis la cour cantonale, le fait que l'intimée n'ait évoqué ces actes que deux jours plus tard et en présence de personnes en qui elle avait confiance est tout à fait explicable par la difficulté d'évoquer de tels actes, la grande vulnérabilité de l'intimée et sa crainte de représailles. 
Le recourant se prévaut par ailleurs du rapport médical duquel ressort qu'aucune lésion traumatique n'a été constatée à l'intérieur du canal anal. Il ne ressort toutefois pas des constatations de fait de la cour cantonale que le rapport en question exclurait que l'intimée ait pu subir un acte comme celui imputé au recourant, de sorte qu'il n'est possible d'en tirer aucune conclusion selon laquelle la version des faits retenue par la cour cantonale serait arbitraire. 
Le recourant cherche à tirer argument de ses propres déclarations, qu'il qualifie de constantes. Or à la lecture de l'arrêt attaqué il s'avère que ce n'est que petit à petit, au fil des auditions devant les autorités successives, qu'il a admis la majeure partie des actes dénoncés par l'intimée. Dans ces circonstances, le fait qu'il continue à en nier une partie ne suffit manifestement pas pour qu'il faille considérer comme insoutenable de la lui imputer. 
Le recourant mentionne en outre le profil psychiatrique de l'intimée, qui n'a toutefois pas été méconnu par la cour cantonale, qui a relevé que celle-ci souffrait de troubles schizophrènes, lesquels étaient stabilisés au moment des faits. Elle a par ailleurs fait référence aux déclarations d'une infirmière qui soignait l'intimée depuis 9 à 10 ans et a affirmé que cette dernière, qui suivait son traitement de manière régulière et se présentait quotidiennement auprès de son service pour prendre ses médicaments, n'avait présenté au cours des dernières années que très peu d'idées délirantes. Comme son récit des événements de la soirée a été largement confirmé par les aveux du recourant, il n'y a aucune raison de considérer que ses déclarations relatives à la partie contestée des faits serait la conséquence d'idées délirantes imputables à son état de santé psychiatrique. 
 
Enfin, le recourant se prévaut de son absence d'antécédents judiciaires en lien avec des infractions de nature sexuelle ainsi que du caractère particulier des faits qui lui sont reprochés, qu'il semble considérer comme incompatibles avec le fait que l'examen de sa propre sexualité n'a pas mis en évidence de déviance. Ces éléments ne sont pas non plus de nature à faire apparaître comme arbitraires les constatations de la cour cantonale, d'autant que le recourant était sous l'effet d'une consommation importante de stupéfiants au point qu'il a lui-même dit ne conserver pratiquement aucun souvenir des événements. 
 
3.   
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 189 al. 1 CP. Il fait valoir qu'il s'agit tout au plus d'un " cas équivoque " au sens où l'entendent la jurisprudence et la doctrine et que l'élément subjectif de la recherche d'excitation ou la satisfaction de l'instinct sexuel de l'un des participants fait défaut. 
 
3.1. Conformément à l'art. 189 al. 1 CP, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel, sera puni d'une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d'une peine pécuniaire.  
Constitue un acte d'ordre sexuel au sens de cette disposition une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l'excitation ou à la jouissance sexuelle de l'un des participants au moins (arrêt 6B_1097/2019 du 11 novembre 2019 consid. 2.1 et les arrêts cités). Selon la jurisprudence, il faut d'abord distinguer les actes n'ayant aucune apparence sexuelle, qui ne tombent pas sous le coup de la loi, des actes clairement connotés sexuellement du point de vue de l'observateur neutre, qui remplissent toujours la condition objective de l'infraction, indépendamment des mobiles de l'auteur. Dans les cas équivoques, il convient de tenir compte de l'ensemble des éléments d'espèce (cf. ATF 125 IV 58 consid. 3b p. 63 et les références citées). La pénétration vaginale ou anale par le pénis, les doigts ou un objet constitue un acte clairement connoté sexuellement (AIMÉE H. ZERMATTEN, in Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 12 ad art. 187; MICHEL DUPUIS ET AL., Petit commentaire du Code pénal, 2e éd., 2017, n° 23 ad art. 187 CP). 
 
Sur le plan subjectif, l'auteur doit agir intentionnellement, ce qui implique qu'il doit être conscient du caractère sexuel de son comportement, mais ses motifs ne sont pas déterminants, de sorte qu'il importe peu que l'acte tende ou non à l'excitation ou à la jouissance sexuelle (arrêts 6B_299/2018 du 4 juillet 2018 consid. 2.1.1; 6B_180/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités). Le dol éventuel suffit (arrêt 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.2). 
 
3.2. Contrairement à ce que soutient le recourant, l'acte qui lui est imputé, à savoir le fait d'introduire un manche à balai dans l'anus de l'intimée constitue clairement un acte d'ordre sexuel. Par ailleurs, il ne pouvait ignorer la connotation sexuelle d'un tel acte, de sorte que l'élément subjectif de l'infraction est également réalisé. Partant, la condamnation du recourant pour contrainte sexuelle en application de l'art. 189 al. 1 CP ne viole pas le droit fédéral.  
 
4.   
Mal fondé, le recours doit être rejeté. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires, dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 25 mai 2020 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Paquier-Boinay