Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1B_256/2008/col 
 
Arrêt du 25 novembre 2008 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Fonjallaz. 
Greffier: M. Kurz. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Bernard Katz, avocat, 
 
contre 
 
Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne, 1014 Lausanne, 
B.________ et C.________, représentés par Me Elie Elkaim, avocat, 
D.________, représentée par Me Jean-Yves Zufferey, avocat, 
Procureur général du canton de Vaud, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
récusation pénale, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 août 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
Par ordonnances des 29 et 31 mai 2007, A.________ a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne, comme accusé de détournement de valeurs patrimoniales sous main de justice et abus de confiance. Lors de l'audience de jugement du 18 juin 2008, le Président du Tribunal a informé l'accusé qu'il envisageait d'aggraver l'accusation, les faits paraissant constitutifs de banqueroute frauduleuse notamment; après une suspension de séance de 35 minutes, le président a fait savoir qu'il renonçait "en l'état" [selon procès-verbal de la séance] à l'aggravation de l'accusation. Après l'audition de divers témoins, le Tribunal a informé l'accusé qu'il entendait retenir une qualification juridique différente des faits et procéder à une disjonction de causes. L'accusé s'y est opposé; estimant que le procédé était déloyal, il a requis la récusation du Tribunal. 
 
B. 
Par arrêt du 5 août 2008, la Cour administrative du Tribunal cantonal vaudois a rejeté la demande de récusation; les violations des règles de procédure devaient faire l'objet d'un recours ordinaire. Le Tribunal avait décidé d'aggraver l'accusation sur la base des éléments recueillis au cours de l'instruction; certes maladroit, ce revirement ne suffisait pas à fonder un soupçon de partialité. Le procès-verbal de l'audience faisait foi de son contenu et le requérant n'en avait pas demandé la relecture; il n'y avait pas à instruire sur les inexactitudes alléguées par le requérant. 
 
C. 
A.________ forme un recours en matière pénale contre ce dernier arrêt; il en demande l'annulation, et conclut, principalement à la récusation du Tribunal correctionnel, subsidiairement au renvoi de la cause à la Cour administrative pour complément d'instruction dans le sens des considérants. 
La cour cantonale se réfère à son arrêt. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Le Président du Tribunal correctionnel s'est exprimé dans le sens du rejet du recours. Les parties plaignantes ont renoncé à déposer des observations. 
Considérant en droit: 
 
1. 
Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision relative à la récusation d'un juge pénal peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale. L'accusé et auteur de la demande de récusation a qualité agir (art. 81 al. 1 LTF). Le recourant a agi dans le délai de trente jours prescrit à l'art. 100 al. 1 LTF
 
2. 
Le recourant soulève un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu. Il soutient que, contrairement à ce qui figure au procès-verbal d'audience, le Président n'avait pas précisé que sa décision initiale de renoncer à aggraver l'accusation était prise "en l'état"; pour le recourant, il s'agissait ainsi d'une renonciation pure et simple, de sorte que le revirement ultérieur apparaîtrait comme déloyal. Le recourant avait proposé à la cour cantonale que les membres du Tribunal correctionnel soient entendus séparément sur ce point, ainsi que sur les actes accomplis durant la suspension d'audience de 35 minutes qui avait suivi la première déclaration. Le refus d'instruire à ce sujet violerait l'art. 29 al. 2 Cst. 
 
2.1 Le droit d'être entendu permet au justiciable de participer à la procédure probatoire en exigeant l'administration des preuves déterminantes (ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16 et les arrêts cités). Ce droit ne s'étend toutefois qu'aux éléments pertinents pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135, 417 consid. 7b p. 430; 124 I 208 consid. 4a p. 211, 241 consid. 2 p. 242, 274 consid. 5b p. 285 et les arrêts cités). 
 
2.2 La question de savoir si le refus d'aggraver l'accusation avait été assorti ou non de la réserve "en l'état" n'était pas pertinente pour l'issue de la cause. En effet, quelle que soit la manière dont il a été formulé, le refus initial d'aggraver l'accusation ne pouvait être compris comme une renonciation définitive: comme le relève la cour cantonale, l'aggravation peut en effet intervenir jusqu'à l'issue des débats, sur le vu notamment des éléments découverts durant l'instruction. Le recourant ne pouvait dès lors, de bonne foi, se croire à l'abri d'une aggravation de l'accusation. 
Rien ne permet par ailleurs de penser que la suspension d'audience ait eu un autre motif que de délibérer sur l'opportunité d'aggraver l'accusation à ce stade; contrairement à ce que soutient le recourant, la durée de cette suspension, soit quelque 35 minutes, n'a rien d'anormal. Dans la mesure où le président du Tribunal affirme que la nécessité d'une aggravation est apparue par la suite, on ne voit pas que l'audition des membres du Tribunal permettrait de contredire cette affirmation. Dénuées de pertinence, les offres de preuves du recourant ont été écartées à juste titre, sans que cela ne viole le droit d'être entendu. 
 
3. 
Sur le fond, le recourant soupçonne le Président du Tribunal correctionnel d'avoir eu dès le début l'intention d'aggraver l'accusation et d'avoir fait croire le contraire au recourant, au terme de la suspension d'audience. Le recourant y voit une attitude déloyale et insolite. Il relève que, contrairement à ce que retient l'arrêt attaqué, la décision d'aggraver l'accusation ne pouvait faire l'objet d'un recours. 
 
3.1 La garantie d'un procès équitable (art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH) réserve notamment au justiciable le droit à ce que sa cause soit jugée par un magistrat indépendant et impartial. Cela permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître des doutes sur son impartialité, et tend à éviter que des circonstances extérieures ne puissent influer sur le jugement, en faveur ou en défaveur d'une partie. La récusation ne s'impose pas seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, une telle disposition interne ne pouvant guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de prévention et fassent redouter, objectivement, une attitude partiale du magistrat. (ATF 134 I 238 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
 
3.2 En l'occurrence, les soupçons du recourant reposent sur de simples conjectures. Le changement d'attitude du Tribunal s'explique aisément par la découverte, en cours d'instruction, d'éléments propres à aggraver l'accusation. Le recourant estime que le tribunal aurait fait "naître sa confiance", mais il n'explique pas en quoi le fait de ne pas annoncer immédiatement l'aggravation des charges lui aurait porté un quelconque préjudice. Il n'existe dès lors aucun indice objectif de prévention. 
 
4. 
Il s'ensuit que c'est à juste titre que la requête de récusation a été écartée. Le recours en matière pénale est rejeté, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'accorder des dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 25 novembre 2008 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Féraud Kurz