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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_97/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 26 juin 2014  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président, 
Jacquemoud-Rossari et Rüedi. 
Greffière : Mme Boëton. 
 
Participants à la procédure 
Ministère public de la République  
et canton de Neuchâtel, 
recourant, 
 
contre  
 
X.________, 
représenté par Me Daniel Brodt, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Fixation de la peine; sursis, 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale 
du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, 
du 18 décembre 2013. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 23 novembre 2012, le Tribunal criminel du Littoral et du Val-de-Travers a notamment reconnu X.________ coupable d'actes d'ordre sexuel avec un enfant et viol au préjudice de Y.________, l'a condamné à une peine privative de liberté de deux ans ferme, et a renoncé à révoquer le sursis à l'exécution d'une peine privative de liberté de huit mois qui avait été prononcée par le Tribunal de police du district de Neuchâtel le 10 septembre 2009, notamment pour extorsion et chantage (art. 156 CP), menaces (art. 180 CP) et contrainte (art. 181 CP). Sur le plan civil, le tribunal a condamné X.________ au versement d'une indemnité de 2'000 fr. à titre de réparation morale à Y.________. 
 
B.   
Statuant sur appel principal de X.________ et appel joint du Ministère public, la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a, par jugement du 18 décembre 2013, partiellement admis celui de X.________ sur la question de la peine, et a rejeté celui du Ministère public. 
 
 Elle a confirmé le jugement de première instance s'agissant de la culpabilité du prévenu et a condamné ce dernier à seize mois de peine privative de liberté avec sursis durant trois ans, le sursis étant subordonné au suivi d'une psychothérapie sous la surveillance du service de probation. La cour cantonale a renoncé à révoquer le sursis assortissant la peine de huit mois de privation de liberté prononcée le 10 septembre 2009 mais en a prolongé le délai d'épreuve d'un an. 
 
 En substance, il était reproché à X.________ (âgé de 22 ans au moment des faits) d'avoir, au petit matin du 1 er août 2011, invité dans son appartement Y.________, alors âgée de 15 ans et 11 mois, afin de lui imposer d'entretenir une relation sexuelle.  
 
C.   
Le Ministère public, Parquet général, de la République et canton de Neuchâtel forme un recours en matière pénale contre ce jugement, concluant principalement à sa réforme en ce sens que X.________ soit condamné à une peine privative de liberté de seize mois sans sursis. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
 Invités à se déterminer sur le recours, l'autorité cantonale a renoncé à formuler des observations et s'est référée à son jugement, alors que l'intimé a conclu au rejet du recours, avec suite de frais et dépens. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recourant conteste exclusivement l'octroi du sursis à la peine privative de liberté de seize mois prononcée par l'autorité cantonale en se référant aux principes développés par la jurisprudence en la matière. 
 
1.1. Aux termes de l'art. 42 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (al. 1). En cas de condamnation dans les cinq ans qui précèdent l'infraction à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de six mois au moins, le sursis n'est toutefois possible qu'en présence de circonstances particulièrement favorables (al. 2).  
 
 Dans ce dernier cas, la présomption d'un pronostic favorable, respectivement du défaut d'un pronostic défavorable, ne s'applique plus, la condamnation antérieure constituant un indice faisant craindre que l'auteur puisse commettre d'autres infractions. L'octroi du sursis n'entre donc en considération que si, malgré l'infraction commise, on peut raisonnablement supposer, à l'issue de l'appréciation de l'ensemble des facteurs déterminants, que le condamné s'amendera. Le juge doit examiner si la crainte de récidive fondée sur l'infraction commise peut être compensée par des circonstances particulièrement favorables, soit des circonstances qui empêchent que l'infraction antérieure ne détériore le pronostic. Tel sera notamment le cas si l'infraction à juger n'a aucun rapport avec l'infraction antérieure ou que les conditions de vie du condamné se sont modifiées de manière particulièrement positive (ATF 134 IV 1 consid. 4.2.3 p. 7). Le fait que l'auteur ait omis de réparer le dommage, comme on pouvait raisonnablement l'attendre de lui (art. 42 al. 3 CP), est également un indice à prendre en compte dans l'établissement du pronostic (ATF 134 IV 1 consid. 4.2.4 p. 7). 
 
 Lorsque l'hypothèse visée par l'art. 42 al. 2 CP est réalisée, un sursis partiel au sens de l'art. 43 CP est exclu (arrêts 6B_373/2011 du 14 novembre 2011 consid. 4.1; 6B_492/2008 du 19 mai 2009 consid. 3.1.3 non publié in ATF 135 IV 152). 
 
 Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans l'émission du pronostic visé par l'art. 42 CP. Ce dernier doit toutefois être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 186 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'intervient que s'il l'a excédé ou en a abusé, notamment lorsqu'il a omis de tenir compte de critères pertinents et s'est fondé exclusivement sur les antécédents du condamné (ATF 134 IV 140 consid. 4.2 p. 143; 133 IV 201 consid. 2.3 p. 204). 
 
1.2. En l'espèce, la peine privative de liberté de seize mois infligée au condamné est compatible avec l'octroi du sursis. Toutefois, le 10 septembre 2009, soit dans les cinq ans avant la commission des infractions à l'origine de la présente procédure, le prévenu a été condamné à une peine privative de liberté de huit mois avec sursis, de sorte qu'il ne peut bénéficier du sursis qu'en présence de circonstances particulièrement favorables au sens de l'art. 42 al. 2 CP.  
 
1.3. La cour cantonale a considéré que la récidive du prévenu n'était pas spéciale au vu des circonstances et perspectives différentes prévalant dans les deux affaires. Selon elle, le prévenu paraissait avoir tiré - à tout le moins en partie - la leçon de la première affaire, eu égard à ses déclarations en cours de procédure.  
 
 Par ailleurs, l'autorité cantonale a relevé que l'affaire pendante, additionnée à un différend d'ordre professionnel, avait eu des répercussions sur la vie et la santé du prévenu l'amenant à consulter un psychiatre. Elle a pris en compte le fait qu'il avait retrouvé un travail stable et qu'il n'avait pas commis de nouvelle infraction depuis le 1 er août 2011.  
 
 Observant finalement qu'on ne pouvait  "aller jusqu'à parler de déni complet, même si X.________ semble avant tout centré sur lui-même et cherche à comprendre ce qui lui est arrivé", la cour cantonale a considéré qu'on ne pouvait attendre des excuses circonstanciées de la part du prévenu compte tenu de sa conception très différente de celle de la partie plaignante des événements du 1er août 2011.  
 
 Elle a conclu qu'au vu de ces différents éléments, nonobstant le cas de récidive, il était tout de même  "possible de reconnaître des circonstances d'amendement particulièrement favorables, qui autorisent malgré tout l'octroi d'un nouveau et dernier sursis à X.________".  
 
1.4. L'appréciation cantonale ne saurait être suivie, dans la mesure où elle porte sur des critères sans pertinence dans l'établissement du pronostic ou permettant, au mieux, d'exclure un pronostic défavorable. Or, dans la configuration d'espèce, la peine prononcée ne peut être assortie du sursis qu'en cas de circonstances particulièrement favorables.  
 
1.4.1. En premier lieu, force est de constater que, si les infractions d'extorsion et chantage ainsi que de contrainte faisant l'objet de la décision du 10 septembre 2009, sont de nature différente de celles reprochées en l'espèce, elles impliquent toutefois dans les deux cas, ainsi que le relève à juste titre le recourant, l'usage par le prévenu d'un moyen de contrainte pour parvenir à ses fins. La cour cantonale l'admet d'ailleurs, en ajoutant toutefois que cette contrainte a été exercée dans le cadre d'infractions de natures différentes. Or, il sied de rappeler que la jurisprudence relativise l'impact des antécédents sur le pronostic du condamné s'ils n'ont "aucun rapport" avec la nouvelle infraction. Aussi, compte tenu du mode opératoire du prévenu, consistant à user de la contrainte pour obtenir ce qu'il souhaite, l'on ne saurait considérer que la seule nature différente des infractions empêche l'antécédent du prévenu de détériorer son pronostic.  
 
1.4.2. La prise de conscience de la responsabilité de l'auteur, les remords ou regrets exprimés ainsi que le comportement durant la procédure pénale sont autant de critères déterminants à prendre en considération dans l'établissement du pronostic (cf. SCHNEIDER/GARRÉ, in Basler Kommentar, Strafrecht II, 3 ème éd. 2013, n os 73, 75 et 78 ad art. 42 CP; cf. par exemple arrêt 6B_717/2011 du 17 janvier 2012 consid. 2 dans l'établissement d'un pronostic favorable). Or, contrairement à ce que prétend l'intimé, ces derniers ne ressortent pas de la décision cantonale. Tout au plus l'autorité cantonale évoque que, si le prévenu a nié une partie des faits durant la procédure, c'est parce que, selon lui, la relation sexuelle était initialement consentie. On ne décèle ici ni prise de conscience ni remords. Il n'est en particulier pas exposé que le prévenu se serait excusé, aurait formulé des regrets ou aurait fourni un quelconque effort pour réparer le préjudice subi par la victime. Sur ce point d'ailleurs, la cour cantonale s'est limitée à relever que la perception différente des deux protagonistes implique qu'on ne saurait attendre du prévenu des excuses  "très circonstanciées". Or, si l'on ne peut lui reprocher d'avoir omis de formuler des excuses sincères ou des regrets, cette attitude ne s'apparente en aucun cas à des circonstances particulièrement favorables (cf. arrêt 6B_479/2011 du 24 novembre 2011 consid. 1.3.3 à teneur duquel des excuses et des regrets ne suffisent pas à faire apparaître les circonstances comme particulièrement favorables).  
 
1.4.3. La cour cantonale ne saurait retenir des circonstances particulièrement favorables du fait que le prévenu n'a pas commis de nouvelles infractions depuis le 1 er août 2011, dès lors qu'un tel comportement correspond à ce que l'on doit pouvoir attendre de tout un chacun (arrêts 6B_479/2011 du 24 novembre 2011 consid. 1.3.3; 6B_889/2010 du 24 mai 2011 consid. 4.2). Le fait que le prévenu semble avoir  partiellement tiré la leçon de ses antécédents et envisage de suivre une thérapie approfondie n'est pas susceptible de compenser la crainte de récidive, pas plus que ses angoisses relatives à son rapport aux filles ou ses insomnies. La cour cantonale précise d'ailleurs que cette thérapie est motivée par les troubles du sommeil du prévenu et par son besoin de comprendre ce qui lui est arrivé. Ce ne sont pas là des circonstances suggérant une évolution particulièrement positive du prévenu.  
 
1.4.4. La nouvelle stabilité professionnelle du prévenu, relevée par la cour cantonale, constitue quant à elle un critère pertinent. Cela étant, dans la mesure où les conséquences de l'exécution d'une peine ferme sur la vie professionnelle d'un condamné sont inévitables, et ne peuvent conduire à une réduction de la peine qu'en cas de circonstances extraordinaires (cf. arrêts 6B_494/2011 du 4 octobre 2011 consid. 2.3; 6B_488/2010 du 4 octobre 2010 consid. 2.2), une stabilité professionnelle ne permet en tous les cas pas, à elle seule, d'en déduire des circonstances particulièrement favorables (cf. notamment arrêt 6B_479/2011 du 24 novembre 2011 consid. 1.3.3). Cela reviendrait en outre à accorder un poids excessif à ce seul critère et à en négliger d'autres, tout aussi pertinents, en lien avec les perspectives d'amendement.  
 
1.5. En définitive, les circonstances mises en exergue par la cour cantonale ne suffisent pas à réaliser les exigences qualifiées posées par l'art. 42 al. 2 CP, ce d'autant que plusieurs critères déterminants ont été ignorés en faveur d'autres facteurs isolés qui ne permettent pas, quand bien même ils seraient considérés dans leur globalité, de retenir des circonstances particulièrement favorables. En conséquence, c'est en violation de l'art. 42 al. 2 CP que l'autorité cantonale a constaté l'existence de circonstances permettant d'accorder le sursis dans la configuration d'espèce.  
 
2.   
En conclusion, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé en tant qu'il met X.________ au bénéfice du sursis, et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue dans le sens des considérants, étant précisé que, lorsque le juge statue sur la question du sursis, il a déjà fixé la quotité de la peine et il ne s'agit plus que de définir sa forme d'exécution appropriée (ATF 134 IV 1 consid. 5.3.3 p. 11; arrêt 6B_664/2007 du 18 janvier 2008 consid. 3.2.3). 
 
 L'intimé, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité à l'accusateur public qui obtient gain de cause (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis, l'arrêt attaqué annulé en tant qu'il prononce le sursis, et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 26 juin 2014 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président :       La Greffière : 
 
Mathys       Boëton