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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_482/2008 /rod 
 
Arrêt du 26 août 2008 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Wiprächtiger et Zünd. 
Greffier: M. Oulevey. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne, 
intimé. 
 
Objet 
Refus de suivre, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du canton de Vaud du 28 février 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 4 février 2008, X.________, qui purgeait une peine privative de liberté aux Établissements pénitentiaires de la Plaine de l'Orbe (EPO), a porté plainte auprès du Juge d'instruction de la Broye et du Nord vaudois. Il alléguait que la personne qui lui avait donné des soins dentaires aux EPO le 1er octobre 2007 lui avait causé des lésions corporelles en lui incisant par maladresse la gencive à la base de douze dents, jusqu'alors parfaitement saines. Il indiquait s'être aperçu de cette lésion le jour même du traitement. Il affirmait que, depuis lors, sa gencive était douloureuse, qu'il avait de la peine à manger, à boire et à dormir normalement, et qu'il était victime de malaises. 
 
Par ordonnance du 8 février 2008, le juge d'instruction a refusé de suivre à cette plainte, aux motifs que les faits dénoncés, constitutifs de lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 CP), ne se poursuivaient que sur plainte et que celle-ci était en l'espèce tardive. 
 
B. 
X.________ a recouru contre cette ordonnance, en faisant valoir qu'il avait attendu l'échec de pourparlers engagés avec les assistants sociaux des EPO avant de se résoudre à déposer plainte. 
 
Statuant le 28 février 2008, le Tribunal d'accusation du canton de Vaud a rejeté le recours et confirmé le refus de suivre. 
 
C. 
Par acte rédigé en albanais et accompagné d'une traduction en italien, X.________ recourt au Tribunal fédéral contre l'arrêt du Tribunal d'accusation, dont il demande la réforme en ce sens que l'ordonnance de refus de suivre soit annulée et la cause renvoyée au juge d'instruction pour ouverture d'une enquête. 
 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Conformément à l'art. 54 al. 1 LTF, la procédure devant le Tribunal fédéral doit être conduite en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Si les parties utilisent une autre langue officielle, celle-ci peut être adoptée. 
 
En l'espèce, l'arrêt attaqué a été rendu en français. Le recourant, qui a fait traduire son acte de recours en italien par un interprète officiel, ne prétend pas comprendre cette dernière langue, ni être dans l'impossibilité de trouver un interprète français-albanais dans son pays. Dès lors, le présent arrêt doit être rendu en français. 
 
2. 
Le plaignant a qualité pour recourir au Tribunal fédéral lorsque la contestation a pour objet son droit de porter plainte (art. 81 al. 1 ch. 6 LTF). Interjeté dans le délai de trente jours prévu par la loi (art. 100 al. 1 LTF) par un plaignant contestant la tardiveté de sa plainte, et dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) par une autorité de dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF), le présent recours est en principe recevable. 
 
3. 
Aux termes de l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois (1ère phr.). Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction (2ème phr.). 
 
La connaissance de l'auteur de l'infraction suppose la connaissance des faits constitutifs de l'infraction, d'une part, et la connaissance de leur auteur, d'autre part. De simples soupçons ne suffisent pas. Il faut une connaissance assez fiable pour que l'ayant droit puisse considérer que des poursuites auraient de fortes chances de succès et ne l'exposeraient pas au risque d'être lui-même repris pour dénonciation calomnieuse ou diffamation (ATF 126 IV 131 consid. 2a p. 132 s. et l'arrêt cité; 101 IV 113 consid. 1b p. 116 et les arrêts cités). L'ayant droit qui conçoit des soupçons n'a pas l'obligation de prendre des renseignements. Sa connaissance effective est seule déterminante (ATF 101 IV 113 consid. 1b p. 116 et les arrêts cités). 
 
3.1 Le recourant ne conteste pas qu'il a eu connaissance de sa lésion dès le 1er octobre 2007. Mais il fait valoir qu'il ne connaît pas l'identité de la jeune femme qui lui a donné des soins, dès lors qu'il n'a pas retenu son nom sur le moment et que les assistants sociaux des EPO ont refusé de le lui rappeler par la suite . Le recourant semble vouloir déduire de cet oubli que le délai trimestriel de l'art. 31 CP n'avait pas encore commencé à courir lorsqu'il a déposé sa plainte le 4 février 2008. 
 
Pour que le délai de l'art. 31 CP parte, le texte de la loi n'exige pas que l'ayant droit connaisse le nom de l'auteur et qu'il soit ainsi en mesure de déposer une plainte nominale. Il faut et il suffit que l'ayant droit ait connaissance d'éléments qui permettent d'individualiser directement l'auteur, sans confusion possible. Constituent de tels éléments non seulement les nom et prénom de l'intéressé, mais aussi, par exemple, son matricule s'il s'agit d'un gendarme ou sa fonction si l'ayant droit sait que celle-ci n'a qu'un seul titulaire. 
 
La cour cantonale a constaté que le recourant a porté plainte contre "le" dentiste des EPO, formulation qui implique nécessairement qu'il n'y a qu'un dentiste qui exerce dans ces établissements. Dès lors peu importe que le recourant n'ait pas retenu le nom de ce praticien et qu'il ne s'en souvînt plus au moment où il dit s'être aperçu de sa lésion. Lorsqu'il a remarqué l'incision dans sa gencive, le 1er octobre 2007, le recourant savait que cette lésion était le fait du dentiste des EPO, personne parfaitement individualisée. Aussi le délai trimestriel de l'art. 31 CP a-t-il couru dès le 1er octobre 2007. 
 
3.2 Devant la cour cantonale, le recourant a soutenu que les trois mois dont il disposait pour porter plainte devaient être comptés à partir de la rupture, consommée le 5 décembre 2007, des pourparlers qu'il avait eus, assisté de son avocat, avec les assistants sociaux des EPO. Ainsi, il aurait agi en temps utile en déposant plainte le 4 février 2008. 
 
En dépit de la lettre de l'art. 31 CP, le délai institué par cette disposition est un délai de péremption (ATF 97 IV 238 consid. 2 p. 240), qui ne peut être ni suspendu, ni interrompu, ni prolongé. Tout au plus son terme est-il reporté au prochain jour ouvrable lorsqu'il tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit du for (cf. ATF 83 IV 185). Dans le cas présent, les pourparlers engagés par le recourant n'ont dès lors eu aucun effet sur l'écoulement du délai de plainte. Parti le 1er octobre 2007, celui-ci a couru sans discontinuer jusqu'à son expiration, le mercredi 3 janvier 2008 (l'art. 133 al. 1 CPP/VD déclarant fériés les deux premiers jours de l'année). C'est donc à tort que le recourant conteste la tardiveté de sa plainte. 
 
3.3 Enfin, le recourant allègue qu'après le dépôt de sa plainte, la direction des EPO lui aurait infligé des sanctions disciplinaires injustifiées, et que le personnel pénitentiaire l'aurait menacé de mort, par mesures de rétorsion. 
 
Outre qu'elles s'écartent des constatations de l'arrêt attaqué, ces allégations sont sans pertinence, puisque le recourant n'a pas tardé à porter plainte à cause de ces prétendues mesures de rétorsion. Elles sont dès lors irrecevables (art. 105 LTF). Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
4. 
Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal d'accusation du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 26 août 2008 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Schneider Oulevey