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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1B_277/2009 
 
Arrêt du 26 novembre 2009 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, Raselli et Fonjallaz. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Parties 
A.________, 
B.________, 
C.________, 
D.________, 
tous représentés par Me Gaëtan Coutaz, avocat, 
recourants, 
 
contre 
 
E.________, représenté par Me Christian Favre, avocat, 
intimé, 
 
Y.________, Juge d'instruction auprès de l'Office du Juge d'instruction cantonal du canton du Valais, 1950 Sion 2, 
Ministère public du canton du Valais, 1950 Sion 2. 
 
Objet 
récusation facultative, 
 
recours contre la décision du Président du Tribunal cantonal du canton du Valais du 24 août 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 7 mai 2003, X.________ a acquis aux enchères publiques, pour le prix de 9'600'000 fr., les parcelles 445, 446, 447, 448, 449, 450, 451, 453, 456, 460, 477, 481, 483 et 545 de la commune de Montana, toutes propriétés de B.________. 
Le 23 juin 2008, A.________, B.________, C.________ et D.________ (ci-après: A.________ et consorts) ont déposé une dénonciation pénale, avec constitution de partie civile, contre E.________, F.________ et G.________, voire X.________, pour violation du secret bancaire (art. 47 de la loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne [LB; RS 952.0]), au motif que ces derniers auraient distribué à des tiers, en vue de la vente des parcelles de B.________, des plaquettes d'information contenant des renseignements confidentiels. Ils ont également formulé une demande de séquestre des documents relatifs aux faits dénoncés, ainsi que des parcelles précitées. 
Le 19 août 2008, le Juge d'instruction Y.________, de l'Office du Juge d'instruction cantonal du canton du Valais, (ci-après: le juge d'instruction) a refusé le séquestre desdites parcelles. L'autorité de plainte du Tribunal cantonal du canton du Valais a rejeté la plainte de A.________ et consorts contre cette décision. Le 28 novembre 2008, le juge d'instruction a rejeté la requête de A.________ et consorts tendant à l'annotation d'une restriction du droit d'aliéner sur les parcelles susmentionnées. Les prénommés ont formé sans succès une plainte contre cette décision. Par courrier du 4 mars 2009, ils ont à nouveau demandé au Juge d'instruction l'annotation d'une restriction du droit d'aliéner sur les parcelles précitées, ce qui a été refusé le 10 mars 2009. Le 11 mars 2009, le juge d'instruction a ouvert une instruction d'office à l'encontre de E.________ pour violation du secret bancaire. Le refus du 10 mars 2009 a fait l'objet d'une nouvelle plainte, que le Juge de l'autorité de plainte du Tribunal cantonal a rejetée dans la mesure de sa recevabilité. Le recours formé devant la Cour de céans contre cette décision a été déclaré irrecevable (arrêt 1B_155/2009 du 24 août 2009). 
 
B. 
Le 15 juin 2009, A.________ et consorts ont demandé la récusation du juge d'instruction Y.________, au motif que, tout comme dans une précédente procédure, il aurait manifesté sa volonté de ne donner aucune suite à l'affaire, faisant ainsi douter de son impartialité. Le juge en question ayant refusé de se récuser et le Juge d'instruction cantonal ayant refusé de le dessaisir du dossier, la cause a été transmise au Président du Tribunal cantonal. 
Par décision du 24 août 2009, le Président du Tribunal cantonal a rejeté la demande de récusation. Il a considéré que la requête était tardive pour tous les faits survenus avant le 5 juin 2009, dès lors qu'aux termes de l'art. 35 ch. 1 du Code de procédure pénale valaisan du 22 février 1962 (CPP/VS; RS/VS 312.0) la récusation devait être demandée dans les dix jours dès la survenance du cas de récusation ou dès le moment où le requérant en avait eu connaissance. Il a au demeurant estimé que, supposés recevables, ces griefs auraient dus être écartés. La requête était recevable en tant qu'elle visait une lettre du 5 juin 2009 (recte: du 4 juin 2009), dans laquelle le juge d'instruction manifestait son intention de prononcer un non-lieu. Le Président du Tribunal cantonal n'y a cependant pas vu un indice de partialité du magistrat visé par la demande de récusation. 
 
C. 
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ et consorts demandent au Tribunal fédéral d'annuler cette décision. Invoquant les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, ils se plaignent en substance de la partialité du juge d'instruction visé par la demande de récusation. L'autorité de plainte et le juge d'instruction ont renoncé à formuler des observations. Le Ministère public du canton du Valais s'est déterminé, en concluant au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. E.________ s'est également déterminé; il conclut au rejet du recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Selon l'art. 78 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale. Aux termes de l'art. 81 al. 1 let. b LTF, ont qualité pour former un tel recours les personnes ayant un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. Il s'agit en particulier de la victime, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF). En principe, seule la victime au sens de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5) a un intérêt juridique au sens de l'art. 81 al. 1 let. b LTF (ATF 133 IV 228 consid. 2.3 p. 230 ss). Cela étant, le simple lésé peut se voir reconnaître la qualité pour recourir lorsqu'il invoque une violation - équivalant à un déni de justice formel - d'un droit procédural de partie (arrêt 1B_134/2008 du 18 août 2008 consid. 1 et les références). Tel est le cas en l'occurrence, les recourants faisant valoir leur droit à un tribunal indépendant et impartial, en alléguant que le juge d'instruction aurait la volonté de ne donner aucune suite à l'affaire. Par ailleurs, la décision attaquée est une décision incidente concernant une demande de récusation, de sorte qu'elle peut faire l'objet d'un recours immédiat en application de l'art. 92 al. 1 LTF. Enfin, interjeté en temps utile contre une décision prise en dernière instance cantonale, le recours est recevable au regard des art. 80 et 100 al. 1 LTF
 
2. 
A l'appui de leurs griefs, les recourants présentent de nombreux faits qui ne ressortent pas de la décision attaquée. Ils perdent ainsi de vue que le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Le recourant ne peut critiquer la constatation de faits, susceptibles d'avoir une influence déterminante sur l'issue de la procédure, que si ceux-ci ont été établis de manière manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire (art. 97 al. 1 LTF; ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62; Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4135; pour une définition de l'arbitraire cf. ATF 134 I 263 consid. 3.1 p. 265 s.; 133 I 149 consid. 3.1 p. 153), ce qu'il lui appartient de démontrer par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.). Une telle démonstration faisant défaut en l'espèce, il n'y a pas lieu de s'écarter des faits retenus dans la décision attaquée. 
 
3. 
Les recourants remettent d'abord en cause la constatation du Président du Tribunal cantonal selon laquelle la demande de récusation est tardive en tant qu'elle porte sur des faits antérieurs au 5 juin 2009. Cela étant, ils ne se plaignent pas d'une application arbitraire de l'art. 35 ch. 1 CPP/VS, qui prévoit que la récusation doit être demandée dans les dix jours dès la survenance du cas de récusation ou dès le moment où le requérant en a eu connaissance. Ils n'exposent pas non plus quelles dispositions légales ou constitutionnelles auraient été violées à cet égard. Or, il n'appartient pas au Tribunal fédéral d'examiner d'office si la décision attaquée est en tous points conforme au droit. C'est au contraire au recourant qu'il incombe d'exposer, au moins de manière succincte, en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF; cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254). Faute de motif de recours valable (cf. art. 95 ss LTF) et de motivation répondant aux exigences minimales susmentionnées, ce premier moyen doit être déclaré irrecevable. 
 
4. 
Pour le surplus, les recourants soutiennent que le juge d'instruction visé par la demande de récusation a fait preuve de partialité. Invoquant les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, ils reprochent implicitement à l'autorité intimée de ne pas avoir reconnu que les éléments qu'ils alléguaient donnaient l'apparence de la prévention de ce magistrat. 
 
4.1 A moins que le juge d'instruction assume une fonction d'ordre juridictionnel, son indépendance ne s'examine pas au regard des art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, mais à l'aune de l'art. 29 al. 1 Cst. Cette disposition assure cependant au justiciable une protection équivalente à celle de l'art. 30 al. 1 Cst. s'agissant des exigences d'impartialité et d'indépendance requises du juge d'instruction (ATF 127 I 196 consid. 2b p. 198). Les parties ont ainsi le droit de demander la récusation du juge dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Cette garantie tend à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part du juge ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules des circonstances objectivement constatées doivent être prises en compte, les impressions purement individuelles des parties au procès n'étant pas décisives (ATF 134 I 238 consid. 2.1 p. 240, 20 consid. 4.2 p. 21; 133 I 1 consid. 5.2 p. 3 et 6.2 p. 6; 131 I 24 consid. 1.1 p. 25 et les arrêts cités). D'éventuelles erreurs de procédure ou d'appréciation commises par un juge ne suffisent pas à fonder objectivement un soupçon de prévention. Seules des fautes particulièrement graves et répétées pourraient avoir cette conséquence; même si elles paraissent contestables, des mesures inhérentes à l'exercice normal de la charge du juge ne permettent pas de suspecter celui-ci de partialité (ATF 116 Ia 135 consid. 3a p. 138; 113 Ia 407 consid. 2 p. 408 ss; 111 Ia 259 consid. 3b/aa p. 264). 
 
4.2 En l'occurrence, l'élément qui a en partie motivé la demande de récusation et qui est survenu dans les dix jours précédant celle-ci est la réception du courrier du juge d'instruction daté du 4 juin 2009. Dans cette lettre, le magistrat présente son appréciation de la cause et conclut que l'instruction n'a pas permis de démontrer un comportement pénalement répréhensible de la part des représentants de X.________. Il annonce dès lors qu'il entend clore l'affaire par un non-lieu et il impartit, conformément à la jurisprudence cantonale, un délai de quinze jours pour requérir un complément d'instruction. 
4.2.1 Le Président du Tribunal cantonal constate que le courrier en question relève de l'exercice ordinaire de la charge du juge d'instruction. Les recourants ne le contredisent pas sur ce point et ils ne démontrent pas en quoi cette lettre constituerait un indice de prévention du magistrat visé. Ils se bornent à critiquer l'appréciation du juge d'instruction mais ils ne présentent pas d'éléments qui susciteraient des doutes objectivement fondés quant à une éventuelle partialité de celui-ci. Le fait que le juge ne partage pas le point de vue des plaignants n'est manifestement pas suffisant pour fonder de tels doutes. En outre, les recourants ne sauraient être suivis lorsqu'ils reprochent au juge de refuser d'administrer les moyens de preuve offerts, dans la mesure où la lettre du 4 juin 2009 leur impartit précisément un délai pour requérir un complément d'instruction. Enfin, comme le relève la décision attaquée, la demande de récusation n'est pas le moyen approprié pour contester une future décision de non-lieu, dès lors qu'une telle décision pourra faire l'objet d'un recours et que l'appréciation du juge d'instruction pourra être discutée dans ce cadre. 
4.2.2 Pour le surplus, les griefs des recourants ont trait à des éléments antérieurs au 5 juin 2009, dont la mise à l'écart n'a pas été valablement contestée (cf. supra consid. 3). Au demeurant, il n'apparaît pas que ces éléments soient de nature à susciter des doutes objectifs quant à l'impartialité du magistrat visé par la demande de récusation. Il convient en particulier de relever qu'il est inexact que les seuls actes d'instruction effectués d'office par le juge visaient à classer l'affaire le plus rapidement possible. En effet, le juge d'instruction ne s'est pas limité à interpeller les destinataires des plaquettes d'information litigieuses pour vérifier la prescription d'une infraction, mais il a fait entendre plusieurs personnes à titre de renseignements - en invitant les recourants à soumettre des questions à l'une d'entre elles - et il a formellement ouvert une instruction contre E.________ et auditionné ce dernier en présence de l'avocat des recourants. Il a en outre interpellé l'auteur de l'avis de droit sur lequel se fondent les recourants et il lui a soumis des questions complémentaires détaillées, de sorte qu'on ne saurait lui reprocher d'avoir purement et simplement ignoré ce moyen de preuve. Il est par ailleurs évident que cet avis de droit ne lie pas le magistrat instructeur, qui est libre de s'en écarter sans se voir reprocher d'emblée un parti pris incompatible avec les exigences déduites de l'art. 29 al. 1 Cst. Quant aux critiques relatives à une précédente procédure, elles apparaissent hors de propos et ne démontrent du reste pas une hostilité du juge d'instruction à l'égard des recourants. Au demeurant, les critiques des recourants reviennent pour l'essentiel à discuter de l'appréciation du juge d'instruction, ce qui a davantage sa place dans un recours contre une décision de non-lieu que dans une requête de récusation. 
4.2.3 En définitive, on ne distingue pas dans les allégués des recourants d'éléments concrets susceptibles de remettre en cause la partialité de magistrat instructeur au sens de la jurisprudence susmentionnée. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la garantie du juge impartial a été respectée, de sorte que c'est à bon droit que l'autorité intimée a rejeté la demande de récusation. 
 
5. 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants, qui succombent, doivent supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). L'intimé, qui s'est déterminé avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge des recourants (art. 68 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3. 
Une indemnité de 1'500 fr. est allouée à l'intimé à titre de dépens, à la charge des recourants. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Juge d'instruction, au Ministère public du canton du Valais et au Président du Tribunal cantonal du canton du Valais. 
 
Lausanne, le 26 novembre 2009 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Féraud Rittener