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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1C_1/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 27 mars 2017  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux, Merkli, Président, 
Karlen, Fonjallaz, Chaix et Kneubühler. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
B.________, 
tous deux représentés par 
Maîtres François R. Micheli et Marc Joory, 
recourants, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale 
à la France, remise anticipée de moyens de preuve, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, 
Cour des plaintes, du 21 décembre 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 17 novembre 2014, le Ministère public de la Confédération (MPC) est entré en matière sur une demande d'entraide judiciaire formée par un juge d'instruction près le Tribunal de grande instance de Parisdans le cadre d'une information pour délits d'initiés, demande tendant notamment à une surveillance téléphonique active de raccordements attribués à la société A.________ SA (A.________) et à B.________ (B.________). Le MPC a autorisé la transmission immédiate des données récoltées tout en interdisant aux autorités françaises leur utilisation à des fins probatoires et en réservant une décision finale de refus. Cette décision, avalisée le 19 novembre 2014 par le Tribunal des mesures de contrainte (Tmc), a été confirmée le 3 novembre 2015 par la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral. Par arrêt du 23 novembre 2015 (1C_602/2015), le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours formé par A.________ et B.________, considérant que les écoutes téléphoniques n'avaient en définitive pas donné de résultat permettant une transmission immédiate. 
 
B.   
Une demande d'entraide complémentaire a été présentée au MPC le 4 mars 2016, par laquelle l'autorité française demandait l'intégralité des écoutes téléphoniques réalisées entre les 14 et 30 novembre 2014 pour les besoins de nouvelles investigations relatives à d'autres délits d'initiés. Le MPC est entré en matière le 4 avril 2016. Il a ordonné la transmission des résultats des mesures de surveillance avant que les personnes concernées n'en soient informées, aux conditions suivantes: 
a) L'utilisation à titre probatoire des données transmises par les autorités suisses est interdite jusqu'à autorisation donnée par lesdites autorités. Par utilisation à titre probatoire, on entend toute utilisation pour obtenir, motiver ou fonder une décision finale sur la cause ou un de ses aspects (prononcé de peines ou de mesures, confiscation, etc.). L'utilisation pour obtenir, fonder ou motiver des mesures d'enquête (p. ex. mise en sécurité de moyens de preuve ou de valeurs patrimoniales révélées par les écoutes, arrestations provisoires, etc.) ne constitue pas une utilisation à titre probatoire du présent paragraphe. 
b) Si la Suisse devait finalement refuser l'entraide, les autorités françaises devront retirer immédiatement de leur dossier, puis détruire la documentation objet des transmissions suisses à la première demande des autorités suisses." 
Le 6 avril 2016, le Tmc a autorisé cette exploitation de moyens de preuve. Le 21 avril 2016, le MPC a encore rendu une ordonnance d'exécution de sa décision d'entrée en matière, estimant justifié de transmettre l'intégralité des communications (enregistrements vocaux, SMS, retranscriptions, données techniques, journaux des contacts et des identifications) sur la période visée. 
A.________ et B.________ ont été informés de cette mesure le 4 août 2016. Ils ont recouru auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral contre les décisions des 4 et 21 avril 2016. 
 
C.   
Par arrêt du 21 décembre 2016, la Cour des plaintes a déclaré le recours irrecevable. Tant la décision d'entrée en matière que l'ordonnance d'exécution étaient de nature incidente. Selon les directives de l'Office fédéral de la justice (OFJ) relatives à l'entraide judiciaire pénale (édition 2009, ci-après: les directives), les écoutes téléphoniques pouvaient être effectuées et leurs résultats transmis à l'autorité étrangère de manière anticipée à l'insu des personnes concernées si les besoins de l'enquête le justifiaient. Certes, le MPC aurait pu rendre une ordonnance de clôture dès lors que les écoutes avaient déjà été effectuées auparavant. Toutefois, l'autorité requérante avait requis que ce volet de son enquête demeure confidentiel. Les conditions posées à une transmission immédiate permettaient de prévenir tout dommage irréparable. Se référant à son arrêt du 3 novembre 2015, la Cour des plaintes a considéré que la validité des garanties fournies sur ce point ne pouvait être remise en question. 
 
D.   
Par acte du 2 janvier 2017, A.________ SA et B.________ forment un recours en matière de droit public par lequel ils demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour des plaintes, de constater que la transmission anticipée à l'Etat requérant des écoutes téléphoniques n'est pas admissible en application de l'art. 18a EIMP, et que les conditions fixées à l'utilisation de ces enregistrements ne correspondent pas à la réserve de la spécialité. Ils concluent aussi à ce que l'OFJ et le MPC soient invités à prendre les mesures adéquates auprès de l'autorité requérante pour mettre à exécution l'arrêt du Tribunal fédéral et demandent le renvoi de l'affaire à l'autorité de première instance. Subsidiairement, ils demandent le renvoi de la cause à la Cour des plaintes pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Les recourants requièrent l'effet suspensif et demandent qu'un délai leur soit accordé pour compléter leur recours. 
La Cour des plaintes persiste dans les termes de son arrêt, sans observations. Le MPC conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, en précisant notamment que la clôture de la procédure d'entraide est en cours. L'OFJ conclut principalement à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. 
Les recourants ont déposé de nouvelles observations le 3 février 2017, en estimant que la condition du préjudice irréparable serait réalisée et en persistant dans leurs conclusions. La Cour des plaintes a persisté dans les termes de son arrêt. Le MPC et l'OFJ ont renoncé à de nouvelles observations. 
Le 10 mars 2017, le MPC a fait savoir qu'il avait rendu le même jour une ordonnance de clôture autorisant la transmission des renseignements litigieux, sous réserve du principe de la spécialité, levant simul tanément les conditions d'utilisation posées lors de la transmission anticipée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Selon l'art. 84 LTF, le recours en matière de droit public est recevable à l'encontre d'un arrêt du Tribunal pénal fédéral en matière d'entraide judiciaire internationale si celui-ci a pour objet la transmission de renseignements concernant le domaine secret. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (al. 1). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 133 IV 215 consid. 1.2 p. 218). 
L'art. 93 al. 2 LTF précise que les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours, sauf en cas de saisie d'objets ou de valeurs, pour autant que les conditions de l'art. 93 al. 1 LTF soient réunies. En matière d'entraide judiciaire, l'existence d'un préjudice irréparable doit être admise restrictivement, à la lumière des critères énumérés à l'art. 80e al. 2 EIMP
En vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il incombe au recourant de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées aux art. 84 et 93 LTF sont réunies (ATF 133 IV 131 consid. 3 p. 132). 
 
1.1. Les recourants relèvent que les décisions du MPC ont eu pour effet la transmission immédiate à l'étranger de renseignements résultant d'écoutes téléphoniques. Ils estiment qu'une telle remise prématurée pourrait avoir les mêmes effets qu'une décision finale. Au contraire de l'affaire précédente concernant les recourants (arrêt 1C_602/2015), des enregistrements d'écoutes téléphoniques auraient bien été remis de manière anticipée à l'autorité requérante. Ces enregistrements ayant été réalisés aux mois de novembre et décembre 2014, le MPC aurait pu rendre directement une ordonnance de clôture. La remise prématurée serait destinée à priver les recourants de leurs droits alors que, dans l'Etat requérant, ils n'ont pas non plus accès au dossier faute de mise en examen. Les recourants estiment par ailleurs que la condition d'un préjudice irréparable serait réalisée, comme cela est le cas en matière pénale s'agissant des écoutes téléphoniques. En outre, le principe de la spécialité n'a pas été rappelé lors de la transmission, ce qui permettrait notamment une utilisation à des fins fiscales. Les recourants estiment que la question de la transmission anticipée au regard des art. 18a et 18b EIMP, ainsi que l'utilisation des renseignements avant une décision de clôture constitueraient des questions de principe.  
 
1.2. La jurisprudence considère en effet qu'un acte de procédure ayant pour conséquence la transmission prématurée de renseignements à une autorité étrangère - lorsque ceux-ci sont requis par la même autorité par le biais de l'entraide judiciaire - peut avoir les mêmes effets qu'une décision finale de clôture. Il en va ainsi lorsque, dans le cadre d'une procédure pénale en Suisse, l'accès au dossier accordé à une partie comporte le risque d'une transmission intempestive à un Etat requérant (ATF 139 IV 294). Il en va de même lorsque les enquêteurs étrangers sont admis à participer aux actes d'entraide sans que des précautions suffisantes ne soient prises pour les empêcher d'exploiter les moyens de preuve de manière anticipée (ATF 127 II 198 consid. 2b p. 204; on y voit dans ce cas une décision incidente susceptible de causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 80e al. 2 let. b EIMP).  
En l'occurrence, les renseignements requis ont été transmis de manière anticipée à l'autorité requérante, sans que les recourants n'aient été informés et mis en mesure de faire valoir leurs objections. Le but de cette transmission est de permettre une exploitation de ces renseignements dans le cadre de l'enquête pénale en cours. Le risque d'exploitation de ces moyens de preuve avant la clôture définitive de la procédure d'entraide est donc particulièrement évident (cf. également ZIMMERMANN, la Coopération judiciaire internationale en matière pénale, 4 ème éd. Berne 2014 n° 428 en ce qui concerne les modalités de la vidéoconférence). Ainsi, à l'instar de la jurisprudence précitée, il y a lieu de considérer que la transmission immédiate du contenu des écoutes téléphoniques doit être traitée comme ayant les mêmes effets qu'une décision finale de clôture. C'est dès lors à tort que la Cour des plaintes a considéré la décision attaquée comme incidente et a examiné si les recourants subissaient un préjudice irréparable. Par ailleurs, sur le fond, la question de la transmission immédiate des résultats d'une mesure de surveillance de la correspondance en vertu des art. 18a et 18b EIMP soulevée dans le recours constitue, comme l'a relevé le Tribunal fédéral dans son précédent arrêt et comme l'admet le MPC dans sa réponse, une question délicate (arrêt 1C_602/2015 consid. 2) qui n'a pas encore été traitée par la cour de céans, satisfaisant manifestement la condition du cas particulièrement important au sens de l'art. 84 LTF, vu les intérêts en jeu.  
 
1.3. Le prononcé par le MPC, après le dépôt du recours, d'une ordonnance de clôture autorisant la remise des renseignements ayant fait l'objet de la transmission anticipée, ne rend pas pour autant le recours sans objet. En effet, la jurisprudence fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle ne perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 137 I 23 consid. 1.3.1 p. 24; 136 II 101 consid. 1.1 p. 103). Tel est le cas en l'espèce dès lors qu'il se pose une question de principe et que les décisions de transmission anticipée, jugées admissibles par les instances précédentes, sont normalement suivies de décisions de clôture susceptibles de faire perdre tout objet à un éventuel recours.  
Il y a donc lieu d'entrer en matière. 
 
1.4. Procéduralement, la situation est particulière dans la mesure où l'instance précédente s'est déjà prononcée de façon approfondie sur les éléments matériels litigieux dans le cadre de l'examen de l'existence d'un éventuel préjudice irréparable. Cela étant, il ne ferait pas de sens de lui renvoyer cette cause pour qu'elle statue sur des points de droit qu'elle a déjà examinés, même si c'était à un autre titre. Le recours respectant les exigences de la LTF en matière de motivation et les autorités en charge de l'entraide judiciaire pénale étant soumises à une obligation de célérité expressément formulée par le législateur (art. 17a EIMP), la cour de céans est en mesure de statuer sur le fond (art. 107 al. 2 LTF).  
 
2.   
Sur le fond, les recourants estiment qu'une transmission anticipée des écoutes téléphoniques ne serait pas possible en vertu des art. 18a et 18b EIMP. La première disposition ne permettrait pas une transmission avant le prononcé d'une ordonnance de clôture. La seconde ne s'appliquerait pas au contenu des communications, mais seulement aux données accessoires. Le recourant considère par ailleurs que la commission rogatoire du 25 janvier 2016 serait insuffisamment motivée et irrégulièrement formulée. Le MPC estime au contraire qu'une interprétation littérale, systématique, historique et téléologique des dispositions précitées, confirmée par une majorité de la doctrine, permettrait une transmission anticipée aux conditions telles que fixées dans sa décision. L'OFJ considère que les exigences du droit suisse ne sont pas entièrement adaptées aux instruments de coopération moderne et que la mesure de transmission anticipée serait le seul moyen propre à assurer la crédibilité de la Suisse dans le cadre de la mise en place de mesure d'entraide nécessitant réactivité et discrétion, sans quoi les enquêtes étrangères pourraient être bloquées, voire mises en danger. 
 
2.1. Dans le système de l'EIMP, toute transmission d'information à l'étranger doit en principe être précédée d'une décision de l'autorité suisse d'exécution se prononçant sur l'octroi et l'étendue de l'entraide judiciaire (art. 80d EIMP). Cette décision de clôture permet aux personnes touchées par la mesure d'entraide de faire valoir leurs objections et, le cas échéant, de recourir (art. 80b et 80e EIMP). Certains actes d'entraide peuvent faire exception à ce principe fondamental et impliquer une transmission prématurée d'informations à l'Etat requérant. Il s'agit notamment de l'autorisation donnée aux enquêteurs étrangers d'assister à l'exécution de la demande (art. 65a EIMP et 26 OEIMP), de la transmission spontanée d'information (art. 67a EIMP) de l'audition par vidéoconférence ou par conférence téléphonique, et des divers moyens d'investigation impliquant la participation en Suisse d'enquêteurs étrangers (observation transfrontalière, livraison surveillée, enquête discrète et équipes communes d'enquête). Ces divers actes d'entraide peuvent être admis en droit suisse moyennant des précautions particulières, dans la mesure où ils sont expressément prévus par le droit interne ou lorsqu'ils sont imposés par les dispositions d'un traité international d'application immédiate (ZIMMERMANN, Communication d'informations et de renseignements pour les besoins de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale: un paradigme perdu ? in: AJP 2007 p. 62 ss).  
 
2.2. Le droit suisse de procédure pénale (art. 269 ss CPP) prévoit certes que le résultat des écoutes téléphoniques puisse être exploité avant que l'intéressé n'en ait connaissance et permet ainsi de surseoir à l'information et au droit de recours de la personne concernée jusqu'à la clôture de la procédure préliminaire (art. 279 CPP). Dans le domaine de l'entraide judiciaire, le principe d'une transmission de renseignements à l'étranger en temps réel va cependant à l'encontre des règles générales sur la procédure d'entraide judiciaire rappelées ci-dessus (consid. 2.1; cf. également, s'agissant de l'engagement d'agents infiltrés étrangers, ATF 132 II 1 consid. 3.3 p. 8; OFJ,L'entraide judiciaire internationale en matière pénale, Directives 9 ème édition 2009 p. 65). Il en va de même lorsque, comme en l'espèce, l'autorité suisse d'exécution procède préalablement aux écoutes et au tri des transcriptions et les transmet à l'autorité requérante avant toute ordonnance de clôture. Un tel mode de procéder devrait dès lors être soit explicitement prévu par le droit interne en matière d'entraide judiciaire ("admis en droit suisse", art. 63 al. 1 EIMP), soit imposé par une convention internationale (ATF 131 II 132 consid. 2 p.133). Tel n'est pas le cas en l'état actuel.  
 
2.3. Le deuxième Protocole additionnel à la CEEJ (RS 0.351.12, entré en vigueur pour la Suisse le 1 er février 2005, ci-après le protocole II) prévoit des nouveaux instruments de coopération tels que, notamment l'observation transfrontalière (art. 17), les enquêtes discrètes et équipes communes d'enquête (art. 19 et 20), soit autant de moyens d'investigation comportant une transmission de moyens de preuve en temps réel et à l'insu des personnes visées. La surveillance téléphonique en temps réel ne fait toutefois pas partie des moyens prévus.  
Quant à l'art. III de l' Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, conclu le 28 octobre 1996 et entré en vigueur le 1er mai 2000, il ne concerne que le principe de spécialité sans constituer une base conventionnelle pour le transfert anticipé, voire en temps réel, du contenu d'écoutes téléphoniques. 
L'art. 18a EIMP a été adopté parallèlement à l'adoption du CPP et à la révision de la LSCPT, pour tenir compte de l'abrogation de différentes dispositions de cette loi (FF 2006 1327). Il prévoit, à l'al. 2, que la surveillance par poste et télécommunications peut être ordonnée par le MPC ou l'OFJ, et doit être approuvée par le Tribunal des mesures de contrainte compétent (al. 3), sans toutefois autoriser expressément une remise anticipée des résultats de la surveillance. L'art. 18a al. 4 EIMP prévoit que les conditions de la surveillance et la procédure sont régies par les art. 269 à 279 CPP et par la LSCPT. Cette disposition, qui se trouvait déjà dans la version précédente de la loi (RO 2001 3096, 3110; FF 1998 3730), se limite à un rappel des règles formelles de procédure et de compétence, mais n'a pas pour but de permettre une transmission anticipée de renseignements à l'étranger à l'insu des personnes ayant fait l'objet de la surveillance téléphonique (FF 2006 1327). 
Quant à l'art. 18b EIMP, il a été introduit suite à l'entrée en vigueur pour la Suisse, le 1er janvier 2012, de la Convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité (CCC, RS 0.311.43). Intitulé "Divulgation rapide de données conservées", l'art. 30 CCC prévoit en effet la communication des données concernant le trafic aux fins d'identifier le fournisseur de services et la voie de communication. Comme cela ressort de cette disposition, la transmission est limitée aux données informatiques. L'art. 18b EIMP, qui permet d'ordonner une transmission avant la clôture de la procédure d'entraide, est lui aussi limité aux données "relatives au trafic informatique", dans le cas spécifique où il s'agit de déterminer le fournisseur de services situé dans un Etat étranger. Il ne ressort ni de cette disposition, ni de l'art. 30 CCC, ni du message y relatif (FF 2010 4309 ss) que cette procédure pourrait s'appliquer à une surveillance téléphonique. Au contraire, le message relève qu'en raison du conflit potentiel entre les principes de base de l'entraide judiciaire et les impératifs d'une transmission d'informations en temps réel, l'art. 18b EIMP se limite aux données relatives au trafic, sans inclure celles relatives au contenu (FF 2010 4311 s.). Dans ces conditions, il faut admettre, contre l'avis majoritaire de la doctrine (cf. AEPLI, BSK-ISTR, n° 35 ad art. 18a IRSG; FABBRI/FURGER, Geheime Überwachungsmassnahmen in der internationalen Kooperation in Strafsachen; Ermittlungserfolg im Ausland versus Rechtsgüterschutz in der Schweiz, RPS 128/2010 p. 394 ss; FABBRI, Geheime Beweiserhebung in der Schweiz im Rahmen der internationalen Strafrechtskooperation, in: Rechtsschutz bei Schengen und Berlin, Zurich 2013 p. 39 ss, 58; ZIMMERMANN, op. cit. n° 441, qui admet un sursis ou une renonciation à la communication selon l'art. 279 al. 2 CPP et met en évidence les difficultés pratiques liées aux modalités d'une telle communication ultérieure), que la transmission anticipée d'écoutes téléphoniques n'est pas prévue en l'état actuel du droit suisse et international (HARARI/CORMINBOEUF, Entraide internationale en matière pénale et transmission anticipée à l'Etat requérant, in: Mélanges en l'honneur de Claude Rouiller, Bâle 2016 p. 77 ss, 92). Une application analogique de l'art. 18b EIMP pourrait certes être envisagée s'agissant des données relatives au trafic téléphonique, mais il ressort de ce qui précède que le législateur a expressément voulu écarter toute transmission anticipée de données relatives au contenu des conversations. 
La surveillance téléphonique en temps réel, à tout le moins la transmission anticipée de telles données, peut se révéler d'une grande utilité dans le cadre d'investigations qui doivent pour un temps demeurer secrètes. A défaut d'une base légale ou conventionnelle, un tel mode de procéder ne peut toutefois pas être admis. Il ne pourra l'être qu'à la faveur d'une révision législative. 
 
3.   
Outre l'annulation de l'arrêt attaqué, les recourants demandent au Tribunal fédéral de constater que la transmission anticipée n'est pas admissible en application de l'art. 18a EIMP. Sur le vu des considérants qui précèdent, il y a lieu d'admettre ces conclusions et de réformer l'arrêt attaqué en ce sens, d'une part que le recours à la Cour des plaintes est déclaré recevable et, d'autre part, qu'il est constaté que la transmission anticipée n'est pas admissible. 
En revanche, il n'y a pas lieu d' annuler formellement ou de modifier les décisions du MPC, voire d'ordonner, comme le voudraient les recourants,une intervention auprès de l'autorité requérante. En effet, selon la jurisprudence, lorsque des renseignements font l'objet d'une transmission prématurée, il n'y a pas forcément lieu d'en demander la restitution. Le vice peut en effet encore être réparé par la suite lorsqu'il apparaît, après avoir permis aux parties intéressées de faire valoir leurs objections, que les conditions d'octroi de l'entraide judiciaire sont réalisées et que les renseignements litigieux doivent de toute façon aboutir en mains de l'autorité requérante (ATF 129 II 544 consid. 3.6 p. 549, 125 II 238 consid. 6a p. 246). 
En l'occurrence, le MPC a déjà rendu une ordonnance de clôture autorisant la remise et l'exploitation des écoutes téléphoniques. Une telle décision, une fois définitive et exécutoire, pourrait avoir pour effet de guérir les irrégularités constatées dès lors que les renseignements resteraient en mains de l'autorité requérante et pourraient être exploités comme moyens de preuve, la réserve de la spécialité ayant été dûment rappelée. 
 
4.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours est admis au sens des considérants. L'arrêt attaqué est réformé dans le sens suivant: le recours déposé à la Cour des plaintes est déclaré recevable et il est constaté que la transmission anticipée selon l'ordonnance du 4 avril 2016, est illicite au regard de l'art. 18a EIMP. Les conclusions relatives au principe de la spécialité deviennent sans objet et celle qui tend à une intervention auprès de l'autorité requérante est écartée. Les recourants, qui obtiennent pour l'essentiel gain de cause, ont droit à des dépens, à la charge du MPC (art. 68 al. 2 LTF). Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). La cause doit être renvoyée à la Cour des plaintes afin qu'elle statue à nouveau sur les frais et dépens, compte tenu de l'issue de la procédure. Le présent arrêt rend sans objet la demande d'effet suspensif, sans qu'il y ait à s'interroger sur le sens d'une telle demande compte tenu de l'objet de la contestation. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
 
1.   
Le recours est admis au sens des considérants. Le ch. 1 du dispositif de l'arrêt attaquéestréformé dans le sens suivant: le recours déposé à la Cour des plaintes est déclaré recevable et il est constaté que la transmission anticipée, selon l'ordonnance du 4 avril 2016, est illicite au regard de l'art. 18a EIMP. Le ch. 3 du dispositif de l'arrêt attaqué est annulé. Le recours est rejeté pour le surplus. La cause est renvoyée à la Cour des plaintes pour nouvelle décision sur les frais et dépens. 
 
2.   
Une indemnité de dépens de 3'000 fr. est allouée aux recourants, à la charge de la Confédération (Ministère public de la Confédération). 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, au Ministère public de la Confédération, au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, et à l'Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire. 
 
 
Lausanne, le 27 mars 2017 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
Le Greffier : Kurz