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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
5A_817/2020  
 
 
Arrêt du 28 janvier 2021  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
A.B.________, 
représentée par Me Blaise Stucki, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
C.________, 
représentée par Me Serge Patek, avocat, 
intimée, 
 
Office des poursuites de Genève, 
rue du Stand 46, 1204 Genève. 
 
Objet 
notification d'un acte de poursuite, validité, 
 
recours contre la décision de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, du 17 septembre 2020 (A/503/2020-CS DCSO/318/20). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a.  
 
A.a.a. Les époux B.B.________ et A.B.________ sont domiciliés au chemin U.________, à V.________ (GE), dans une maison individuelle.  
 
A.a.b. B.B.________ est l'employeur formel des époux D.D.________ et E.D.________. Cette dernière s'occupe, quatre jours par semaine (les lundis, mardis, jeudis et vendredis) de 10h00 à 13h30, des deux enfants des époux B.________. Elle reçoit ses instructions, notamment quant a l'emploi du temps des enfants, de B.B.________. E.D.________ comprenant mal le français, il arrive à A.B.________ de lui traduire en italien les messages que lui laisse B.B.________.  
 
A.b.  
 
A.b.a. Le 31 octobre 2019, C.________ a adressé à l'Office cantonal des poursuites du canton de Genève (ci-après: office) une réquisition de poursuite ordinaire dirigée contre A.B.________ en vue du recouvrement d'un montant de 93'000 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an dès le 10 juillet 2019, allégué être dû au titre de prêt, selon avenant du 31 janvier 2019 à un contrat de cession de parts sociales du 6 décembre 2018.  
 
A.b.b. Un commandement de payer, poursuite n° xx xxxxxx x, a été établi le 12 novembre 2019 par l'office. Il a été notifié le 14 novembre 2019 par un employé de la Poste suisse au domicile des époux B.________, en mains de E.D.________ - désignée de manière erronée dans le procès-verbal de notification comme la soeur de la poursuivie - et n'a été frappé d'opposition ni lors de sa remise ni dans les dix jours qui ont suivi.  
 
A.c. Le 6 décembre 2019, C.________ a requis la continuation de la poursuite.  
A.B.________ étant inscrite au registre du commerce en qualité de cheffe d'une raison individuelle, une commination de faillite a été établie le 10 décembre 2019 et notifiée le 12 suivant, à nouveau en mains de E.D.________, dans des circonstances en tous points similaires à celles ayant entouré la remise du commandement de payer environ un mois plus tôt. 
Le 30 janvier 2020, A.B.________ a reçu du Tribunal de première instance de Genève une citation à une audience de faillite devant se dérouler, à la suite du dépôt par C.________ d'une requête de faillite, le 2 mars 2020. 
 
B.  
 
B.a. Par acte adressé le 7 février 2020 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: chambre de surveillance), A.B.________ a formé une dénonciation, subsidiairement une plainte, contre les notifications intervenues les 14 novembre et 12 décembre 2019, concluant à la constatation de leur nullité, subsidiairement à leur annulation. A l'appui de ses conclusions, la plaignante a fait valoir que ces notifications étaient viciées dans la mesure où elles étaient intervenues en mains d'une personne ne faisant pas partie de son ménage et n'étant pas son employée. A cela s'ajoutait que le procès-verbal de notification était erroné puisqu'il mentionnait que la personne recevant les actes était la soeur de la poursuivie. L'agent notificateur avait par ailleurs exercé une pression sur E.D.________ en lui assurant faussement que les documents remis n'étaient pas importants. Ces vices avaient eu pour conséquence que la plaignante n'avait pris connaissance que tardivement du commandement de payer, ce qui l'avait empêchée d'y former opposition en temps utile, et de la commination de faillite.  
 
B.b. Par décision du 17 septembre 2020, la chambre de surveillance a rejeté la plainte précitée.  
 
C.   
Par acte posté le 1 er octobre 2020, A.B.________ interjette un recours en matière civile contre cette décision. Elle conclut principalement à sa réforme, en ce sens que la plainte formée le 17 [recte: 7] février 2020 est admise, et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à la chambre de surveillance pour nouvelle décision dans le sens des considérants. En substance, elle se plaint d'un établissement arbitraire des faits (art. 9 Cst.) et de la violation de l'art. 64 al. 1 LP.  
Invitées à répondre, la chambre de surveillance s'est référée aux considérants de sa décision et C.________ a conclu au rejet du recours. La recourante a renoncé à répliquer. 
 
 
D.   
Par ordonnance présidentielle du 19 octobre 2020, l'effet suspensif a été attribué au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours a été déposé dans le délai légal (art. 100 al. 2 let. a LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF en relation avec l'art. 19 LP) par une autorité de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF); il est ouvert indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). La recourante a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).  
 
1.2. Le recours en matière civile étant une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF), la partie recourante doit, sous peine d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige (ATF 137 II 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3; 133 III 489 consid. 3.1). Les conclusions réformatoires doivent en outre être déterminées et précises, c'est-à-dire indiquer exactement quelles modifications sont demandées (parmi plusieurs: arrêt 5A_171/2020 du 20 mai 2020 consid. 1.2 et les références). Cette règle souffre quelques exceptions. Parmi celles-ci, la pratique réserve le cas où la motivation du recours fait clairement apparaître en quoi l'arrêt attaqué doit être modifié (parmi plusieurs: arrêt 4A_297/2017 du 30 avril 2018 consid. 1.2 et les références).  
 
En l'occurrence, la recourante se limite à conclure sur le fond, sans autre précision, à l'admission de sa plainte. Il ne fait cependant aucun doute que son recours tend au constat de la nullité, subsidiairement à l'annulation, des notifications intervenues les 14 novembre et 12 décembre 2019 Le défaut de conclusions réformatoires précises ne fait donc pas obstacle à la recevabilité du recours. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de la juridiction précédente, ni par les moyens des parties; en conséquence, il peut admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux qu'a invoqués la partie recourante, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 144 III 462 consid. 3.2.3 et les références). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.4; 134 III 102 consid. 1.1). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (art. 42 al. 2 LTF; ATF 140 III 86 consid. 2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
 
3.   
Quant à la recevabilité de la plainte, la chambre de surveillance a considéré qu'en déposant son acte le 7 février 2020, la plaignante avait agi dans le délai de dix jours suivant la prise de connaissance des mesures contestées, le 30 janvier 2020. 
 
Au fond, la chambre de surveillance a tout d'abord établi que les actes litigieux - le commandement de payer et la commination de faillite - notifiés l'un le 14 novembre et l'autre le 12 décembre 2019 l'avaient été au domicile de la plaignante, en son absence, en mains de E.D.________. Ensuite, elle a jugé que le déroulement formel de la notification avait respecté la loi. Enfin, elle a retenu qu'il existait un lien de subordination entre E.D.________ et la plaignante, de la même manière qu'il en existait un entre cette dernière et D.D.________, lui aussi formellement employé par B.B.________ mais appelé, lorsque la plaignante le lui demandait, à l'assister pour certaines tâches ménagères. 
La chambre de surveillance a jugé sur base de ces éléments que E.D.________ revêtait par rapport à la plaignante la qualité d'employée au sens de l'art. 64 al. 1 LP. En conséquence, les actes de poursuite litigieux pouvaient valablement être notifiés à la seconde en mains de la première et la plainte devait être rejetée. 
 
 
4.   
La recourante se plaint, entre autres griefs, de la violation de l'art. 64 al. 1 LP, en tant que la notification d'un acte de poursuite à un employé ne peut se faire que sur le lieu où le poursuivi exerce habituellement sa profession. Il convient de traiter cette question avant toute autre, en tant qu'elle permet de clore le litige à elle seule. 
A cet égard, l'intimée soutient que l'employé de maison du débiteur est autorisé à recevoir des actes de poursuite à condition qu'il exerce son activité au sein de la communauté domestique du débiteur. La chambre de surveillance précise pour sa part que la recourante a allégué elle-même dans sa plainte du 7 février 2020 que la notification des actes de poursuite litigieux était intervenue en mains de E.D.________. 
 
4.1. Aux termes de l'art. 64 al. 1 LP, les actes de poursuite sont notifiés au débiteur dans sa demeure ou à l'endroit où il exerce habituellement sa profession. S'il est absent, l'acte peut être remis à une personne adulte de son ménage ou à un employé.  
 
4.1.1. Il n'y a pas de hiérarchie entre les deux lieux de notification et le débiteur n'a aucun droit d'exiger qu'un lieu soit privilégié par rapport à l'autre (ATF 91 III 41 consid. 3; arrêt 5A_87/2018 du 21 septembre 2018 consid. 2.3, publié  in BlSchK 2019 p. 89). Le but de la norme est d'atteindre personnellement le débiteur par tous les moyens pour garantir la remise effective de l'acte de poursuite. D'ailleurs, la liste des lieux n'est pas exhaustive, la notification à l'office étant notamment possible (ATF 136 III 155 consid. 3.1).  
Quant aux tiers mentionnés, le législateur a considéré qu'il s'agit de ceux qui se trouvent objectivement dans une relation suffisamment étroite avec le débiteur pour que l'on puisse présumer qu'ils lui remettront l'acte (JEANNERET/LEMBO,  in Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 22 ad art. 64 LP).  
 
4.1.2. Plus précisément, s'agissant des employés, le Tribunal fédéral a jugé qu'entre dans cette catégorie toute personne qui collabore avec le poursuivi dans l'exercice de sa profession en qualité de subordonné. Peu importe en revanche le type de salarié dont il s'agit, de la durée déterminée ou indéterminée de son engagement; il peut même s'agir d'une personne qui se charge bénévolement d'assurer le service de bureau du débiteur pendant ses vacances (ATF 72 III 78 [80]; 61 III 157 consid. 2; cf. aussi: ANGST,  in Basler Kommentar, SchKG I, 2ème éd., 2010, n° 20 ad art. 64 LP; JEANNERET/LEMBO,  op. cit., n° 25 ad art. 64 LP; PENON/WOHLGEMUTH,  in SK Kommentar SchKG, 4ème éd., 2017, n° 13 ad art. 64 LP). S'agissant des personnes habilitées à recevoir l'acte en lieu et place du destinataire lui-même lorsque la signification est faite au domicile de l'intéressé, le Tribunal fédéral a par ailleurs précisé que celle-ci peut se faire à toute personne qui fait ménage commun avec le destinataire, sans égard au fait qu'elle soit liée ou non à lui par un rapport de parenté. La signification à un employé de maison est ainsi valable, mais une réelle cohabitation est cependant nécessaire. La remise de l'acte à une personne qui se trouve occasionnellement dans les locaux n'est pas possible (arrêt 5P.18/2006 du 3 mai 2006 consid. 3.2).  
La doctrine va dans le même sens: certains affirment que les actes de poursuite peuvent être notifiés aux employés du poursuivi seulement au lieu où le débiteur exerce son activité professionnelle (GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Art. 1-88, 1999, n° 28 ad art. 64 LP; JAQUES, De la notification des actes de poursuite,  in BlSchK 2011 p. 177 ss [184]); d'autres précisent que si l'employé - comme un employé de maison - exerce son activité au sein de la communauté domestique du débiteur, les deux hypothèses de l'art. 64 al. 1 in fine LP (personne faisant partie du ménage et employé) se superposent (JEANNERET/LEMBO,  op. cit., n° 25 ad art. 64 LP; PENON/WOHLGEMUTH,  op. cit., n° 13 ad art. 64 LP).  
Il résulte de ce qui précède que, si la notification à un employé de maison au domicile du débiteur est possible, il faut toutefois que cet employé fasse ménage commun avec lui à ce domicile. Cette règle se justifie eu égard au caractère hétéroclite des contrats relatifs à ce type d'emploi, tant au niveau de leurs modalités que de leurs parties. 
 
4.2. En l'espèce, il ne ressort pas de la décision attaquée qu'il aurait été allégué, et encore moins établi, que E.D.________ forme une communauté domestique avec la recourante, ni que le domicile de celle-ci se confond avec son lieu de travail. En conséquence, la notification à cette employée de maison, à supposer même qu'on puisse considérer qu'un tel lien la lie à la recourante, et pas seulement à l'époux de celle-ci, viole l'art. 64 al. 1 LP.  
Le grief est donc admis, de sorte que les autres deviennent sans objet. 
 
 
5.   
Il reste à examiner les conséquences de la notification viciée. 
 
5.1. La notification irrégulière des actes de poursuite n'est pas frappée de nullité absolue; l'acte est simplement annulable dans le délai de plainte de 10 jours de l'art. 17 al. 2 LP (ATF 136 III 571 consid. 6.1). Ce n'est que si l'acte n'est pas parvenu en mains du poursuivi que la poursuite est absolument nulle, et que sa nullité peut et doit être constatée en tout temps. Si, malgré le vice de la notification, le commandement de payer est néanmoins parvenu en mains du poursuivi, il produit ses effets dès que celui-ci en a eu connaissance; dans un tel cas, le délai pour porter plainte (contre la notification), ou pour former opposition, commence à courir du moment où le poursuivi a eu effectivement connaissance de l'acte (ATF 128 III 101 consid. 2; 465 consid. 1; 120 III 114 consid. 3b; 112 III 81 consid. 2b; 110 III 9 consid. 2; arrêt 5A_403/2017 du 11 septembre 2018 consid. 6.3.2.2 et les autres références).  
 
5.2. En l'espèce, la chambre de surveillance a constaté que la recourante avait eu connaissance des mesures contestées le 30 janvier 2020 et que sa plainte avait été déposée en temps utile, soit dans les dix jours suivant cette prise de connaissance. La recourante n'est donc pas forclose à solliciter l'annulation des notifications viciées et il peut être donné suite à cette requête.  
 
6.   
En définitive, le recours est admis. L'arrêt attaqué est réformé, en ce sens que la plainte formée le 7 février 2020 par la recourante est admise et que les notifications intervenues les 14 novembre et 12 décembre 2019 sont annulées. La procédure de plainte étant gratuite, il n'y a pas lieu de renvoyer la cause à la chambre de surveillance sur la question des frais judiciaires et des dépens de la procédure qui s'est déroulée devant elle. Les frais judiciaires de la procédure fédérale, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée qui succombe (art. 66 al. 1 LTF), le canton de Genève, par l'office des poursuites, en étant exempté (art. 66 al. 4 LTF). L'intimée et le canton de Genève sont condamnés solidairement à verser à la recourante une indemnité de dépens de 2'000 fr. pour la procédure fédérale (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la plainte formée le 7 février 2020 par la recourante est admise, les notifications intervenues les 14 novembre et 12 décembre 2019 étant annulées. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.   
L'intimée et le canton de Genève verseront solidairement à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office des poursuites de Genève et à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 28 janvier 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari