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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_880/2022  
 
 
Arrêt du 30 janvier 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, 
Hurni et Hofmann, Juge suppléant. 
Greffière : Mme Klinke. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Luana Roberto, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
intimé. 
 
Objet 
Opposition tardive à une ordonnance pénale, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 10 juin 2022 (P/6083/2021 ACPR/410/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décision du 2 février 2022, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a constaté l'irrecevabilité de l'opposition formée par A.________ à l'encontre de l'ordonnance pénale rendue le 13 septembre 2021 par le Ministère public genevois et dit que celle-ci était assimilée à un jugement entré en force. 
 
B.  
Par arrêt du 10 juin 2022, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours interjeté par A.________ contre cette décision. 
La cour cantonale a en substance retenu les faits suivants. 
 
B.a. A.________ réside, depuis novembre 2019, dans un appartement situé au numéro xxx de la rue U.________, à V.________.  
 
B.b.  
 
B.b.a. Courant 2021, une procédure pénale a été ouverte contre lui des chefs de faux dans les titres (art. 251 CP) et infractions à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (art. 115 al. 1 let. a et b ainsi que art. 118 al. 1 LEI).  
 
B.b.b. Par ordonnance pénale du 13 septembre 2021 - expédiée sous pli recommandé à l'adresse suivante: "Monsieur A.________, rue U.________ xxx/yyy, V.________" -, ce dernier a été reconnu coupable des trois infractions précitées et condamné à une peine pécuniaire, avec sursis, ainsi qu'au paiement d'une amende de 2'700 francs.  
D'après le suivi postal relatif à cet envoi, la missive a été expédiée le 14 septembre 2021 et le destinataire avisé pour retrait le lendemain. Le délai de garde de sept jours est arrivé à échéance le 22 du même mois. 
La Poste a retourné ce pli au Ministère public genevois le 26 septembre 2021 avec la mention "non réclamé", étant précisé que le sticker apposé par l'office postal prévoit deux autres possibilités, à savoir "refusé" et "voir mention sur l'envoi". 
 
B.c. Par lettre du 21 novembre 2021 - expédiée en recommandé à l'adresse suivante: "Monsieur A.________, rue U.________ xxx, V.________" -, le Service des contraventions a adressé au prénommé un bordereau après jugement, lui réclamant, notamment, le paiement de l'amende de 2'700 francs.  
Le 9 décembre suivant, A.________ a, sous la plume de son conseil, formé opposition à l'ordonnance pénale précitée. 
 
C.  
Le recourant forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 10 juin 2022. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à ce que l'opposition qu'il a formée le 9 décembre 2021 à l'encontre de l'ordonnance pénale du 13 septembre 2021 soit déclarée recevable. Subsidiairement, il requiert le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF est ouvert contre un arrêt de la Chambre pénale de recours genevoise qui confirme l'irrecevabilité d'une opposition à une ordonnance pénale (cf. arrêt 6B_401/2019 du 1er juillet 2019 consid. 1). 
 
2.  
Le recourant, invoquant l'art. 85 CPP, fait valoir qu'il ne devait pas s'attendre à la notification d'un acte judiciaire du seul fait qu'il a été auditionné par la police. 
 
2.1. Selon l'art. 85 al. 4 let. a CPP, un prononcé est également réputé notifié lorsque, expédié par lettre signature, il n'a pas été retiré dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de remise du pli, si la personne concernée devait s'attendre à une telle remise.  
La personne concernée ne doit s'attendre à la remise d'un prononcé que lorsqu'il y a une procédure en cours qui impose aux parties de se comporter conformément aux règles de la bonne foi, à savoir de faire en sorte, entre autres, que les décisions relatives à la procédure puissent leur être notifiées. Le devoir procédural d'avoir à s'attendre avec une certaine vraisemblance à recevoir la notification d'un acte officiel naît avec l'ouverture d'un procès et vaut pendant toute la durée de la procédure (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3; arrêt 6B_1455/2021 du 11 janvier 2023 consid. 1.1). 
Il est admis que la personne concernée doit s'attendre à la remise d'un prononcé lorsqu'elle est au courant qu'elle fait l'objet d'une instruction pénale au sens de l'art. 309 CPP (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2; arrêts 6B_1455/2021 précité consid. 1.1; 6B_428/2022 du 14 décembre 2022 consid. 1.1 et les arrêts cités). Ainsi, un prévenu informé par la police d'une procédure préliminaire le concernant, de sa qualité de prévenu et des infractions reprochées, doit se rendre compte qu'il est partie à une procédure pénale et donc s'attendre à recevoir, dans ce cadre-là, des communications de la part des autorités, y compris un prononcé (arrêts 6B_1455/2021 précité consid. 1.1; 6B_1154/2021 du 10 octobre 2022 consid. 1.1; 6B_1391/2021 du 25 avril 2022 consid. 1.1 et les arrêts cités). 
De jurisprudence constante, celui qui se sait partie à une procédure judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir notification d'actes du juge est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. A ce défaut, il est réputé avoir eu, à l'échéance du délai de garde, connaissance du contenu des plis recommandés que le juge lui adresse. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2; 141 II 429 consid. 3.1; 139 IV 228 consid. 1.1 et les références citées). 
 
2.2. En l'espèce, le recourant a été entendu en qualité de prévenu par la police le 12 août 2021. A cette occasion, il a été informé des charges qui pesaient sur lui (faux dans les titres et infractions à la LEI) et a confirmé avoir pris connaissance du document contenant ses droits et obligations et l'a signé. Il a également signé le formulaire concernant sa situation personnelle et financière, dans lequel figure son adresse (art. 105 al. 2 LTF). Aussi, conformément à la jurisprudence constante déduite de l'art. 85 al. 4 let. a CPP, le recourant devait s'attendre à recevoir notification d'actes du juge et était tenu de relever ou faire suivre son courrier, ce d'autant que l'ordonnance pénale a été rendue dans le mois suivant son audition. Le recourant ne saurait rien déduire en sa faveur d'un arrêt du Tribunal fédéral rendu avant l'entrée en vigueur du CPP, ensuite d'un recours contre un arrêt d'une cour cantonale administrative (arrêt 6A.100/2006 du 28 mars 2007 consid. 2.2.1; cf. s'agissant de l'intervention de la police dans la poursuite pénale: notamment arrêt 6B_281/2012 du 9 octobre 2012 consid. 1.1 et 1.3).  
 
3.  
Le recourant soutient que la cour cantonale aurait dû retenir que l'invitation à retirer l'ordonnance pénale n'avait jamais été distribuée, en raison d'erreurs dans l'adressage du courrier. Il considère que l'opposition formée le 9 décembre 2021 était dès lors recevable. 
 
3.1.  
 
3.1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 p. 91 s.; 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.; 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 p. 91 s.; 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 p. 91 s.; 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.).  
 
3.1.2. Il existe une présomption de fait - réfragable - selon laquelle, pour les envois recommandés, l'employé postal a correctement inséré l'avis de retrait dans la boîte à lettres ou la case postale du destinataire et la date de ce dépôt, telle qu'elle figure sur la liste des notifications, est exacte. Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire. Si ce dernier ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa case postale au jour attesté par le facteur, la remise est censée être intervenue en ces lieu et date. Du fait notamment que l'absence de remise constitue un fait négatif, le destinataire est admis à démontrer, au stade de la vraisemblance prépondérante, que l'avis n'a pas été remis correctement dans sa boîte aux lettres. La simple éventualité qu'une erreur soit possible ne suffit pas. Il faut bien plus que le destinataire apporte des éléments concrets mettant en exergue l'existence d'une erreur. Savoir si la contre-preuve a été apportée ou non relève de l'appréciation des preuves (ATF 142 IV 201 consid. 2.3 p. 204 s.; arrêt 6B_233/2017 du 12 décembre 2017 consid. 2.3.2).  
 
3.2. La cour cantonale a considéré que l'indication "xxx/yyy rue U.________" faisait référence à deux immeubles situés dans cette même rue. La mention du numéro xxx, où vivait le recourant, était exacte. En revanche, la référence au numéro yyy procédait manifestement d'une inadvertance; pour autant, l'on ne voyait pas que celle-ci aurait pu être source de confusion; en effet, le recourant ne prétendait pas, ni a fortiori ne rendait vraisemblable, qu'un autre A.________ résiderait dans ce dernier immeuble. Si tel avait été le cas, l'employé postal n'aurait d'ailleurs pas pu notifier le pli concerné, ne sachant auquel des homonymes il était effectivement destiné, et la missive aurait été immédiatement retournée à l'expéditeur. Les juges cantonaux en ont dès lors conclu qu'il n'existait aucun indice concret d'erreur permettant d'envisager la non-distribution de l'invitation à retirer l'ordonnance pénale. Contrairement à l'opinion du recourant, si le destinataire avait été inconnu, le facteur aurait mentionné ce fait sur l'enveloppe et coché la case "voir mention sur l'envoi".  
 
3.3. Le recourant expose que l'erreur dans l'adressage de l'ordonnance pénale litigieuse empêchait la cour cantonale de retenir qu'un avis de notification avait été laissé dans sa boîte aux lettres et dès lors que ledit acte avait été notifié. Ce faisant, il livre sa propre appréciation des preuves, dans une démarche strictement appellatoire, partant irrecevable. Autrement dit, il ne parvient pas à démontrer, ni même ne tente de démontrer, que l'appréciation des preuves opérée par la cour cantonale serait arbitraire. Du reste, il est constant que l'adresse complète et exacte du recourant figurait sur la lettre, même si à côté du numéro de rue xxx, correct, figurait le numéro de rue yyy, incorrect. Dans ces conditions et dans la mesure où la Poste a retourné ce pli au ministère public avec la mention "non réclamé" alors que le sticker apposé par l'office postal prévoyait deux autres possibilités, soit "refusé" et "voir mention sur l'envoi", la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, considérer qu'il n'existait aucun indice concret d'erreur permettant d'envisager la non-distribution de l'invitation à retirer l'ordonnance pénale.  
C'est en vain que le recourant se réfère à nouveau à l'arrêt 6A.100/2006 du 28 mars 2007, rendu avant l'entrée en vigueur du CPP, dans des circonstances de fait différentes, pour faire valoir que le fardeau de la preuve de l'absence de notification incombait à l'autorité qui entendait en tirer une conséquence juridique. La jurisprudence récente topique (cf. supra consid. 3.1.2) prévoit en ce sens une présomption de fait selon laquelle, pour les envois recommandés, l'employé postal a correctement inséré l'avis de retrait dans la boîte à lettres ou la case postale du destinataire, présomption entraînant un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire. On ne perçoit donc guère ce que le recourant entend tirer de cette référence.  
Cela étant, et dans la mesure où la notification était valable, il n'y a pas lieu d'examiner les griefs constitutionnels, dépourvus de développements circonstanciés (cf. art. 106 al. 2 LTF), concernant la base légale permettant d'admettre la fiction de notification aux ordonnances pénales "adressées à des adresses incorrectes". 
Au vu de ce qui précède, la cour cantonale pouvait, sans violer le droit fédéral, confirmer que l'opposition à l'ordonnance pénale était irrecevable car tardive (cf. art. 354 al. 1 CPP). 
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 30 janvier 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
La Greffière : Klinke