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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
5A_312/2009 
 
Arrêt du 30 juin 2009 
IIe Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges Hohl, Présidente, Escher, 
L. Meyer, Marazzi et Jacquemoud-Rossari. 
Greffier: M. Fellay. 
 
Parties 
X.________, 
recourante, représentée par Me Urs Van Stiphout, avocat, 
 
contre 
 
Y.________ SA, 
intimée, représentée par Me Thomas Barth, avocat. 
 
Objet 
action en contestation de l'état de collocation, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 20 mars 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
X.________, ancienne cliente de Y.________ SA (ci-après: Y.________), a fait valoir une créance de 330'247 fr. dans le cadre de l'inventaire de la succession de A.________, administrateur et président du conseil d'administration de ladite société de 1963 à 1991 et décédé le 18 décembre 2002. Elle estimait avoir été lésée par les agissements de cet organe. 
Y.________ a également fait valoir une créance dans la succession de son ancien administrateur, à hauteur de 373'068 fr., pour le même motif. La succession en question ayant été répudiée, sa faillite a été prononcée et l'Office des faillites de Genève chargé de sa liquidation. 
Le 30 mars 2005, cet office a procédé à la publication du dépôt de l'état de collocation et a informé les deux intervenantes que leurs créances avaient été écartées. Le dividende maximal prévisible pour les créances colloquées en 3ème classe était alors de 100 %. 
 
B. 
Les deux intervenantes ont agi en contestation de l'état de collocation pour faire admettre leur qualité de créancières conformément à l'art. 250 al. 1 LP
Le 20 décembre 2005, le Tribunal de première instance de Genève a entériné un accord intervenu entre la masse en faillite et Y.________ aux termes duquel la créance de celle-ci serait inscrite en 3ème classe de l'état de collocation, à hauteur du montant produit. Une modification de l'état de collocation en ce sens a fait l'objet d'une publication le 19 décembre 2007 avec la mention que la modification serait considérée comme acceptée faute pour les créanciers de la contester dans les 20 jours. 
A une date indéterminée, la masse en faillite et X.________ sont convenues que la créance de celle-ci serait admise en 3ème classe de l'état de collocation, à hauteur de 119'800 fr. 35. Cette modification a également fait l'objet d'une publication le 9 avril 2008 avec la même mention. L'office a précisé à cette occasion que le dividende maximum prévisible pour les créances colloquées en 3ème classe était de 30 %. 
Le 19 avril 2008, X.________ a ouvert action en contestation de l'état de collocation selon l'art. 250 al. 2 LP, concluant à ce que la créance de Y.________ en soit écartée et à ce que l'acte en question soit rectifié en conséquence. Par jugement du 2 octobre 2008, le Tribunal de première instance a déclaré la contestation irrecevable pour cause de tardiveté, l'action n'ayant pas été déposée dans le délai de 20 jours suivant la publication de l'admission de la créance de Y.________ à l'état de collocation. 
Sur appel de X.________, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance par arrêt du 20 mars 2009, notifié le 27 du même mois à l'appelante. 
 
C. 
Par acte du 7 mai 2009, X.________ a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant à l'annulation de l'arrêt de la cour cantonale et au renvoi de la cause à cette autorité « pour qu'elle statue sur la recevabilité de l'action en contestation de l'état de collocation ». La recourante invoque la violation des art. 250 al. 2 LP et 29 al. 1 Cst. La recourante sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Le dépôt d'une réponse n'a pas été requis. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le recours est dirigé contre la décision d'une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF) qui statue sur une contestation de l'état de collocation dans la faillite portant non pas sur le rang auquel, selon l'art. 219 LP, doit être colloquée la créance litigieuse, mais sur l'existence ou le montant de cette prétention de droit civil fédéral. Une telle décision est sujette au recours en matière civile en vertu de l'art. 72 al. 1 LTF (arrêt 5A_802/2008 du 6 mars 2009 consid.1.1 et les arrêts cités). Le recours a en outre été interjeté dans le délai légal (art. 100 al. 1 en liaison avec 46 al. 1 let. a LTF) et dans la forme requise (art. 42 LTF) par la partie qui a succombé dans ses conclusions devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF). Quant à la valeur litigieuse, équivalant selon la jurisprudence au dividende probable qui serait attribué à la prétention qui fait l'objet du différend (ATF 135 III 127 consid. 1.2; 87 II 190 p. 193; 82 III 94 p. 95 et les arrêts cités), elle s'élève en l'espèce à 111'920 fr. (30 % de 373'068 fr.). Le seuil fixé par l'art. 74 al. 1 let. b LTF est donc atteint. 
La cour cantonale a statué sur la recevabilité de l'action et confirmé que celle-ci était irrecevable pour cause de tardiveté. En concluant à ce que la cour cantonale « statue sur la recevabilité de l'action », la recourante entend manifestement que la cour « admette » cette recevabilité. 
Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le recours. 
 
2. 
Aux termes de l'art. 250 LP, le créancier qui conteste l'état de collocation parce que sa production a été écartée en tout ou en partie ou parce qu'elle n'a pas été colloquée au rang qu'il revendique intente action contre la masse dans les 20 jours qui suivent la publication du dépôt de l'état de collocation (al. 1); s'il conteste une créance ou le rang auquel elle a été colloquée, il dirige l'action contre le créancier concerné (al. 2). La question litigieuse est celle de savoir si un créancier dont la production a été écartée de l'état de collocation, mais qui a recouru contre cette éviction (art. 250 al. 1 LP), doit immédiatement contester, avant qu'il ne soit définitivement statué sur sa propre qualité de créancier et sous peine de forclusion, la collocation d'une autre créance (art. 250 al. 2 LP). 
Cette question du dies a quo du délai pour agir en contestation de l'état de collocation, telle qu'elle est posée en l'espèce, n'a pas encore été tranchée par le Tribunal fédéral. 
 
2.1 Ainsi qu'il ressort de l'abondante doctrine sur laquelle s'est fondée la cour cantonale, la qualité pour contester un état de collocation est acquise à l'intervenant dont le droit a été inscrit à cet état, indépendamment du fait de savoir s'il a été admis ou écarté par l'administration. En effet, l'opposant ne perd pas sa qualité pour agir du simple fait que son statut de créancier lui est disputé. Aussi longtemps que la prétention d'un créancier n'a pas été définitivement écartée, ce créancier doit être traité à l'égal des intervenants dont les prétentions ont été admises au passif. Le créancier dont la réclamation a été entièrement refusée, mais qui procède contre la masse en faillite pour être colloqué, a ainsi qualité pour agir en élimination de la créance d'un tiers; toutefois, le procès en élimination doit être suspendu jusqu'à droit connu sur l'issue du procès en collocation. Les deux actions étant soumises au même dies a quo (la publication du dépôt de l'état de collocation), le délai pour agir en élimination court dès la publication de l'inscription à celui-ci de la créance litigieuse et non pas seulement dès que l'action en collocation est admise. Il en va de même pour le créancier reconnu qui voit sa créance contestée par un tiers: il doit, s'il veut lui-même contester la production d'un autre créancier colloqué, agir immédiatement et ne pas attendre que soit déterminée sa qualité de créancier à l'issue du premier procès; le second procès devra être suspendu dans cette attente (A. DE GUMOENS, De la procédure de collocation en cas de faillite et de saisie, thèse Lausanne 1913, p. 120 s.; R. GÖSCHKE, Kollokationsplan und Kollokationsklage im schweizerischen Betreibungsrecht, thèse Berne 1915, p. 185 ss; C. JAEGER, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 1920, n. 1 ad art. 250 LP; J.-F. PIGUET, Les contestations de droit matériel dans la poursuite pour dettes et la faillite, thèse Lausanne 1950, p. 152 n. 194 s.; ERNEST BRAND, For des actions en matière de poursuite pour dettes et de faillite V, FJS 1172 p. 7; DANIEL SPICHTY, Gegenstand, Rechtsnatur und Rechtskraftwirkung des Kollokationsplanes im Konkurs, thèse Bâle 1979, p. 85; VIKTOR URS FURRER, Die Kollokationsklagen nach schweizerischem Recht, 1979, p. 66; NICOLAS JEANDIN, Poursuite pour dettes et faillite: état de collocation, FJS n° 990b p. 17; A. BRUNNER/M.A. REUTTER, Kollokations- und Widerspruchsklagen nach SchKG, 2e éd. 2002, p. 42 s; P.-R. Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 106 ad art. 250 LP; ANDREA BRACONI, La collocation des créances en droit international suisse de la faillite, thèse Zurich 2004, p. 128 n. 1.2 s.; DIETER HIERHOLZER, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, n. 23 et 28 ad art. 250 LP; CHARLES JAQUES, Commentaire romand de la LP, n. 39 s. ad art. 250 LP; AMONN/WALTHER, Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 8e éd., Berne 2008, § 46 n. 52). 
 
2.2 A l'instar de l'autorité précédente, le Tribunal fédéral peut se rallier à la solution préconisée par les nombreux auteurs précités. Cette solution est d'ailleurs parfaitement conforme au texte légal, l'art. 250 LP prévoyant pour les deux actions un seul et même délai de 20 jours à compter de la publication du dépôt de l'état de collocation (art. 249 LP). Elle répond en outre à l'intérêt public d'une liquidation rapide de la faillite (cf. art. 270 LP), étant rappelé à cet égard que le tableau définitif de distribution des deniers ne pourra être dressé que lorsque tous les procès ayant trait à la fixation de l'actif et du passif de la masse auront été terminés (art. 261 LP et 83 al. 1 OAOF). La recourante a tort lorsqu'elle soutient que le dépôt de son action en élimination dans ledit délai n'aurait aucunement eu pour résultat une accélération de la procédure du fait de la suspension de ladite action jusqu'à droit connu sur l'action en collocation. Il y a de toute évidence gain de temps si l'action en cause doit simplement être reprise sitôt après sa suspension, plutôt que d'être alors seulement introduite dans les 20 jours. En outre, il est dénué de pertinence que, comme le prétend la recourante, le retard de son action n'ait pas causé d'inconvénients à l'intimée, dès lors que le délai d'ouverture d'action est un délai de déchéance (ou forclusion) procédural (BRACONI, op. cit., p. 122 n. 2.2 et les références citées aux notes 28 et 32) qui doit être impérativement respecté dans l'intérêt général des créanciers du failli. 
 
2.3 La recourante conteste vainement la solution susmentionnée en faisant valoir que la doctrine soit ne préconiserait pas l'introduction simultanée des deux actions, ce qui serait le cas de JEANDIN, soit ne s'exprimerait pas clairement en ce sens, soit se baserait sur des réflexions incomplètes. 
Elle a tort, tout d'abord, parce que l'auteur précité, après avoir exposé que le créancier dont la production a été écartée peut non seulement agir en collocation de sa propre créance, mais encore remettre en cause la créance d'un tiers, dit clairement que le procès en contestation de la collocation du tiers « devra être introduit tout comme l'autre dans les 20 jours de la publication de l'art. 249 II LP » et « sera suspendu en attendant droit définitivement jugé quant à l'admission de la propre production du demandeur ». C'est dire que Jeandin confirme la solution préconisée par le restant de la doctrine et retenue par la décision attaquée. 
Ensuite, même si elle ne s'exprime pas toujours clairement ou complètement sur la question, voire suggère une simple possibilité et non une obligation d'introduire les deux actions simultanément, la doctrine va généralement dans le sens de la solution critiquée et, comme le retient l'autorité cantonale sans être sérieusement démentie par la recourante, elle ne contient aucun avis venant la battre en brèche. 
2.4 
C'est à raison que la décision attaquée mentionne également dans ce contexte le principe de l'immutabilité de l'état de collocation. Dicté par l'intérêt public (ATF 108 III 23), ce principe implique qu'une fois écoulé le délai de contestation de 20 jours, les créances qui y sont admises ne peuvent plus être remises en cause (cf. ATF 113 III 17 consid. 2 p. 18; 102 III 155 consid. 3; arrêt 7B.94/2003 du 24 juin 2003 consid. 3). Le but de l'état de collocation consistant à déterminer de manière rapide et durable le passif d'une masse en faillite, les créanciers ont un intérêt manifeste à ne plus être inquiétés au sujet de l'admission de leurs productions une fois écoulé le délai légal de 20 jours suivant la publication du dépôt de l'état de collocation. Admettre que chaque nouveau créancier puisse remettre en question les collocations antérieures serait contraire à l'intérêt public. On doit donc attendre d'un créancier dont la production a été écartée de l'état de collocation, mais qui a agi contre cette éviction, qu'il conteste, avant qu'il ne soit définitivement statué sur sa propre qualité de créancier et sous peine de forclusion, la production d'un tiers créancier dans le délai de 20 jours. 
En l'espèce, l'admission de la créance de l'intimée à l'état de collocation a fait l'objet d'une publication le 19 décembre 2007. La recourante, qui avait contesté sa propre éviction de l'état de collocation en avril 2005 et avait donc qualité pour agir en élimination de la créance de l'intimée, devait agir contre celle-ci dans les 20 jours suivant la publication du 19 décembre 2007. Le juge saisi aurait alors suspendu l'examen de cette seconde action jusqu'à droit connu sur sa qualité de créancière. Déposée le 19 avril 2008 seulement, la demande de la recourante était donc tardive, partant irrecevable. 
 
3. 
Le grief de violation de l'art. 29 Cst. soulevé par la recourante doit être rejeté pour le motif indiqué par la cour cantonale, à savoir que le délai d'action en contestation de l'état de collocation poursuit un intérêt public et que l'appliquer strictement, de manière conforme à ce but, ne saurait constituer un formalisme excessif. La recourante ne démontre pas que la décision attaquée consacrerait un tel formalisme prohibé par l'art. 29 Cst. 
L'introduction simultanée de deux procédures implique certes l'engagement de frais de procédure dont une partie risque de s'avérer après coup inutile. Une telle conséquence est cependant inhérente au système et l'on ne saurait voir là un formalisme excessif: si le procès suspendu doit être repris, l'avance de frais requise l'a été à juste titre; s'il doit être abandonné, les frais judiciaires sont généralement réduits ou remis (cf. art. 66 al. 2 LTF). 
 
4. 
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté. 
Les conclusions du recours étant apparues d'emblée vouées à l'échec, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et la recourante condamnée aux frais (art. 66 al. 1 LTF). 
Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre au recours. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
La demande d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée. 
 
3. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
Lausanne, le 30 juin 2009 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente: Le Greffier: 
 
Hohl Fellay