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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_206/2007 /rod 
 
Arrêt du 30 août 2007 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. les Juges Wiprächtiger, Juge présidant, 
Favre et Zünd. 
Greffière: Mme Angéloz. 
 
Parties 
X.________, 
recourante, représentée par Me Catherine Jaccottet Tissot, avocate, 
 
contre 
 
Y.________, 
intimé, représenté par Me Daniel Pache, avocat, 
Ministère public du canton de Vaud, 
case postale, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Ordonnance de non-lieu (lésions corporelles 
simples par négligence), 
 
recours en matière pénale contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 31 janvier 2007. 
 
Faits : 
A. 
A une date que la décision attaquée n'indique pas, mais le 9 décembre 2003 selon ses dires, X.________ a déposé plainte pénale, notamment pour lésions corporelles simples par négligence, contre Y.________. Elle lui reprochait d'avoir laissé, à la suite d'une opération pratiquée le 23 septembre 2003, une compresse dans son vagin, provoquant ainsi une inflammation douloureuse. 
 
Par ordonnance du 15 décembre 2006, le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne a prononcé un non-lieu, considérant qu'il n'était pas établi que le Dr Y.________ ait laissé une compresse dans le vagin de la plaignante après l'opération, ni, au demeurant, que l'inflammation dont celle-ci s'était plainte soit la conséquence d'un éventuel oubli d'une compresse. 
B. 
Sur recours de la plaignante, la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal vaudois, par ordonnance du 31 janvier 2007, a confirmé la décision de non-lieu. Elle a justifié ce prononcé en se référant au dossier et, pour le surplus, en faisant sienne la motivation du magistrat instructeur. 
C. 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, pour arbitraire dans l'appréciation des preuves. Elle conclut à l'annulation de la décision attaquée. 
 
L'intimé conclut au rejet du recours. Le Ministère public a renoncé à se déterminer. L'autorité cantonale se réfère à son arrêt. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La décision attaquée, qui est finale (art. 90 LTF), a été rendue en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF), par une autorité cantonale de dernière instance (art. 80 al. 1 LTF). Elle peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 ss LTF). 
2. 
La recourante a manifestement participé à la procédure devant l'autorité précédente. Elle prétend, ce qui en l'occurrence suffit (cf. ATF 126 IV 147 consid. 1 p. 149; 125 IV 79 consid. 1c p. 81/82), avoir été victime d'une atteinte directe à son intégrité corporelle et revêt ainsi la qualité de victime au sens de l'art. 2 LAVI. La procédure n'ayant pas été menée jusqu'à un stade qui aurait permis de le faire, on ne peut lui reprocher de n'avoir pas pris de conclusions civiles. Certes, elle n'indique pas, comme il lui incombait en pareil cas, quelles conclusions civiles elle entendrait faire valoir dans le procédure pénale. Compte tenu, notamment, de la nature de l'infraction dénoncée, on peut toutefois discerner d'emblée et sans ambiguïté quelles prétentions civiles elle pourrait élever contre l'intimé et en quoi la décision attaquée est susceptible de les influencer (ATF 127 IV 185 consid. 1a p. 187 et les arrêts cités). La recourante a donc qualité pour recourir (art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 5 LTF). 
3. 
Le recours peut notamment être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Il ne peut critiquer les constatations de fait qu'au motif que les faits ont été établis de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (cf. Message du 28 février 2001 relatif à la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale; FF 2001, 4000 ss, 4135) ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments du recourant ni par la motivation de l'autorité précédente. Toutefois, compte tenu, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs invoqués et n'est dès lors pas tenu de traiter des questions qui ne sont plus discutées devant lui. Il ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). 
4. 
La recourante se plaint d'une appréciation arbitraire des preuves, en bref, au motif que, sauf arbitraire, les éléments de preuve recueillis ne pouvaient aboutir au prononcé d'un non-lieu. 
4.1 De jurisprudence constante, une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable. Il faut qu'elle soit manifestement insoutenable, et cela non seulement dans sa motivation mais dans son résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178). 
4.2 Pour retenir qu'il n'était pas établi que l'intimé ait effectivement mis, puis oublié, la compresse, l'autorité cantonale s'est fondée sur la lecture du dossier et a renvoyé pour le surplus à la motivation du magistrat instructeur. 
4.2.1 Dans la mesure où l'autorité cantonale a, de manière toute générale, tiré argument de "la lecture du dossier", sans que l'on sache à quelles pièces elle entend se référer et comment elle les a appréciées, sa motivation est manifestement insuffisante à faire admettre le bien-fondé du non-lieu prononcé. 
 
Reste à examiner ce qu'il en est des motifs du magistrat instructeur, auxquels renvoie pour le surplus l'autorité cantonale. 
4.2.2 Dans son ordonnance du 15 décembre 2006, ce magistrat a d'abord observé que, selon le rapport opératoire, la seule compresse utilisée par l'intimé était un tampon imbibé d'iode, introduit dans le vagin au moyen d'une pince, au début de l'intervention, afin de désinfecter la région à opérer. 
 
Faute d'indication plus précise de la part du magistrat instructeur, on en est réduit à compulser le dossier, qui comporte plusieurs dizaines de pièces, pour retrouver le "rapport opératoire" auquel il se réfère. Il n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral, qui est un juge du droit, de passer en revue toutes les pièces d'un dossier pour parvenir à retrouver celle sur laquelle l'autorité cantonale entend se fonder. Au demeurant, à supposer qu'il s'agisse de la pièce 29/5 du dossier, force serait de constater qu'elle ne contient aucune indication venant étayer la conclusion du magistrat instructeur. 
4.2.3 Ce dernier a ensuite relevé qu'il était difficilement imaginable qu'un praticien effectue le type d'intervention en question (curetage, biopsies, électrocautérisation), sans être entravé par la présence d'une compresse dans le vagin. Il n'indique cependant pas ce qui lui permet de retenir que la compresse aurait été utilisée au début ou au cours de l'intervention, et non au terme de celle-ci, comme il le laisse entendre. Le bien-fondé de sa décision sur ce point n'est dès lors pas vérifiable. 
4.2.4 Le magistrat instructeur a retenu que la recourante, après l'opération, avait renoncé d'elle-même à prendre les ovules qui lui avaient été remises par l'intimé, prétextant à tort que la date de péremption était échue, alors que ces ovules avaient pour but d'activer la cicatrisation et la guérison. 
 
De la pièce 4 du dossier 3 à laquelle se réfère la recourante à ce sujet, il résulte que, lors de son audition du 29 janvier 2004, elle a déclaré avoir pris la première ovule le lendemain de l'opération et avoir alors ressenti de fortes douleurs. Ensuite de quoi, elle avait contrôlé la date de péremption du médicament et, pour avoir lu à tort la date 2003.06 au lieu de 2006.03, elle avait cru qu'il était effectivement périmé. C'est en raison de ses douleurs et de cette erreur qu'elle avait renoncé à prendre les autres ovules. Dès lors, si le magistrat instructeur entendait retenir que la recourante n'avait, de son propre chef et sans raison sérieuse, pris aucune des ovules qui lui avaient été remises, il devait exposer pourquoi il n'accordait pas crédit aux explications de celle-ci et sur quels éléments il se fondait pour s'en écarter. A plus forte raison devait-il le faire, s'il entendait ensuite tirer argument de l'omission qu'il retient pour conclure qu'il n'était pas établi que l'inflammation dont se plaignait la recourante soit en lien de causalité naturelle avec l'oubli d'une compresse. 
4.2.5 Toujours selon le magistrat instructeur, la recourante a fourni plusieurs versions des faits quant à la date et au mode d'expulsion de la compresse plusieurs jours après l'opération. 
 
Là encore, le magistrat instructeur n'indique pas de quelles pièces du dossier il tire cette conclusion. Dans la mesure où il entendrait ainsi se référer aux procès verbaux d'auditions de la recourante, la contradiction retenue apparaît spécieuse. Le 29 janvier 2004, la recourante a déclaré "cet emballage contient la compresse que j'ai perdu plus tard". Le 13 janvier 2005, alors qu'il lui était objecté que "ce n'est pas la même chose perdre ou retirer", elle a indiqué, après avoir précisé qu'elle ne parlait pas très bien le français, qu'elle expliquait clairement avoir retiré la compresse avec ses doigts, ajoutant que cela s'était passé chez elle dans la salle de bain. 
4.2.6 Le magistrat instructeur a encore observé que l'expertise mise en oeuvre avait certes confirmé que la recourante avait été en contact avec la compresse, mais qu'elle n'avait pas apporté d'éléments nouveaux, de sorte qu'il n'était pas exclu que la recourante ait pu introduire elle-même la compresse dans son vagin, dès lors que, de par sa profession, elle aurait pu avoir accès à du matériel médical de ce type. 
 
A défaut de plus amples explications de sa part à ce propos, on peut penser que le magistrat instructeur entend se référer à l'expertise figurant sous pièce 27 du dossier, à moins qu'il ne s'agisse de la pièce 57. De la première de ces pièces, il ressort notamment que, d'après l'expert, la compresse de gaze en question est une gaze médicale utilisée lors des opérations et qu'il pourrait effectivement s'agir d'une compresse laissée dans le vagin après l'intervention du 23 septembre 2003. Quant à la pièce 57 - qui est une analyse par des méthodes de cytopathologie, effectuée près de 1 ½ an plus tard -, si elle n'apporte rien de nouveau par rapport à la première expertise, elle n'infirme aucunement son contenu. 
 
Au demeurant, en considérant qu'il n'était pas exclu que la recourante ait pu introduire elle-même la compresse dans son vagin, le magistrat instructeur ne fait qu'émettre une supposition. Il n'en va pas différemment du fait que la recourante - qui fait valoir qu'elle travaille dans un EMS, où il n'y a pas de compresses chirurgicales - aurait pu se procurer la compresse litigieuse dans le cadre de son travail. Le fait contesté repose donc sur une simple hypothèse. 
4.2.7 Au vu de ce qui précède, il n'était pas soutenable de prononcer un non-lieu sur la base des éléments retenus. Pour les uns, ces éléments ne trouvent aucun appui dans les pièces du dossier. D'autres se réduisent à des suppositions ou à des affirmations non vérifiables, voire contredites, sans explication, par les pièces dont elles semblent avoir été tirées. D'autres encore ont conduit à des conclusions que n'autorisent pas les pièces dont elles ont été déduites. 
 
Au demeurant, même en admettant que l'autorité cantonale, du moins dans la mesure où elle formule des hypothèses, n'aurait voulu qu'exprimer qu'elle conservait des doutes quant aux faits, ceux-ci devaient, au stade de l'instruction, conduire au renvoi de la cause en jugement, et non à mettre un terme à la procédure par un non-lieu. 
 
Dans ces conditions, le grief fait à l'autorité cantonale d'avoir prononcé la mesure litigieuse sur la base d'une appréciation arbitraire des preuves est fondé. 
5. 
Le recours doit ainsi être admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. L'intimé, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF) et versera une indemnité de dépens à la recourante (art. 68 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge de l'intimé. 
3. 
L'intimé est astreint à verser une indemnité de dépens de 3000 fr. à la recourante. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
Lausanne, le 30 août 2007 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: La greffière: