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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_578/2021  
 
 
Arrêt du 30 décembre 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Juge présidant, 
Haag et Müller. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Daniel Känel, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Secrétariat d'Etat aux migrations, 
Quellenweg 6, 3003 Berne. 
 
Objet 
Annulation de la naturalisation facilitée, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour VI, du 23 août 2021 (F-23/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 29 juillet 2005, A.________, ressortissant égyptien né le 22 février 1974, s'est marié en Egypte avec B.________, de nationalité suisse. 
 
En 2011, les époux sont venus s'installer en Suisse avec leurs deux enfants, nés de cette union. 
 
B.  
En date du 28 octobre 2012, A.________ a déposé une demande de naturalisation facilitée. Le 16 avril 2014, il a contresigné une déclaration aux termes de laquelle il a notamment attesté avoir respecté l'ordre juridique suisse au cours des dix dernières années. Il a également été rendu attentif au fait que sa naturalisation pouvait être annulée en cas de fausse déclaration formulée à ce sujet. 
 
Par décision du 22 avril 2014, entrée en force le 29 mai 2014, le requérant a été mis au bénéfice d'une naturalisation facilitée, lui conférant le droit de cité du canton de Fribourg, dont son épouse était titulaire. 
 
C.  
Par acte du 16 novembre 2016, les autorités fribourgeoises ont transmis au Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) une copie du jugement du 20 avril 2016 du Tribunal pénal de l'arrondissement de la Sarine, condamnant l'intéressé à une peine privative de liberté de dix-huit mois avec sursis et à une amende de 400 francs, pour voies de fait, contrainte et actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance. Il ressort dudit jugement que A.________ a commis, entre le 18 décembre 2013 et le 14 juillet 2014, des attouchement à caractère sexuel sur plusieurs femmes dans le cadre de son activité de masseur professionnel au sein de son institut de massage. Le 17 janvier 2017, le SEM a ouvert une procédure en matière d'annulation de naturalisation facilitée à l'encontre de A.________. 
 
 
D.  
Par décision du 18 novembre 2020, le SEM a prononcé, avec l'assentiment de l'autorité compétente du canton de Fribourg, l'annulation de la naturalisation facilitée accordée à l'intéressé, retenant que l'octroi de cette dernière avait eu lieu sur la base de déclarations mensongères et d'une dissimulation des faits essentiels. 
Par arrêt du 23 août 2021, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours déposé par A.________ contre la décision du 18 novembre 2020 précitée. 
 
E.  
Par acte du 28 septembre 2021, A.________ forme un recours en matière de droit public par lequel il demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif fédéral et la décision du SEM. Il requiert qu'une équitable indemnité de dépens lui soit allouée pour ses frais d'avocats relatifs aux procédures devant le Tribunal fédéral et le Tribunal administratif fédéral. Il sollicite également l'assistance judiciaire. 
 
Invités à se déterminer sur le recours, le Tribunal administratif fédéral renonce à prendre position tandis que le SEM observe que le recours ne contient aucun élément propre à remettre en cause l'arrêt attaqué. Le recourant n'a pas déposé d'autres écritures. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Dirigé contre la décision du Tribunal administratif fédéral qui confirme l'annulation de la naturalisation facilitée accordée au recourant, le recours est recevable comme recours en matière de droit public (art. 82 let. a et 86 al. 1 let. a LTF). Le motif d'exclusion de l'art. 83 let. b LTF n'entre pas en ligne de compte, dès lors qu'il s'agit en l'espèce de la naturalisation facilitée et non pas de la naturalisation ordinaire. Pour le surplus, le recourant a la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.  
 
1.2. Le recourant conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et de la décision du SEM. Conformément à l'art. 86 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral est notamment recevable contre les décisions du Tribunal administratif fédéral. La conclusion du recourant tendant à ce que le Tribunal fédéral annule la décision du SEM est irrecevable, en raison de l'effet dévolutif complet du recours déposé auprès du Tribunal administratif fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. a LTF; ATF 136 II 539 consid. 1.2; arrêts 1C_464/2019 du 5 décembre 2019 consid. 1.2; 2C_428/2019 du 20 août 2019 consid. 1.3). La conclusion principale purement cassatoire, portant sur l'arrêt querellé, est toutefois admissible dans la mesure où elle porte sur une décision défavorable au recourant, dont l'annulation éliminerait les effets (cf. arrêts 2C_214/2020 du 9 juillet 2020 consid. 1.3; 2C_342/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3 et les arrêts cités).  
 
1.3. Il convient, dans cette mesure, d'entrer en matière sur le recours.  
 
2.  
L'entrée en vigueur, au 1er janvier 2018, de la nouvelle loi sur la nationalité suisse du 20 juin 2014 (LN; RS 141.0) a entraîné l'abrogation de la loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse (aLN, RO 1952 1115), conformément à l'art. 49 LN (en relation avec le chiffre I de son annexe). En vertu de la réglementation transitoire prévue par l'art. 50 LN, l'acquisition et la perte de la nationalité suisse sont régies par le droit en vigueur au moment où le fait déterminant s'est produit. Dans la présente cause, les faits déterminants pour l'annulation de la naturalisation facilitée se sont déroulés sous l'empire de l'ancien droit. De plus, la procédure d'annulation a été introduite par le SEM avant le 1er janvier 2018, de sorte qu'il y a lieu d'appliquer l'aLN, même si l'annulation a été prononcée après cette date (cf. arrêt 1C_104/2021 du 7 juillet 2021 consid. 1 et les réf. cités). Cela n'est du reste pas contesté par le recourant. 
 
3.  
Selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours au Tribunal fédéral doivent indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuves, et être signés. En particulier, le recourant doit motiver son recours en exposant succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit (cf. art. 42 al. 2 LTF). Pour satisfaire à cette exigence, il appartient au recourant de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse et d'expliquer en quoi ceux-ci seraient contraires au droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1); la motivation doit être topique, c'est-à-dire se rapporter à la question juridique tranchée par l'autorité inférieure (ATF 123 V 335; arrêt 1B_252/2021 du 28 septembre 2021 consid. 3). De plus, le Tribunal fédéral est lié par les faits retenus par l'arrêt entrepris (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire (art. 9 Cst.; sur cette notion v. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1) dans la constatation des faits. Le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; arrêt 1C_591/2020 du 11 novembre 2021 consid. 3). 
 
Dès lors, en tant que l'exposé des faits figurant au début du mémoire de recours diverge des faits constatés dans l'arrêt attaqué et que ceux-ci ne sont pas critiqués sous l'angle de l'arbitraire, il n'en sera pas tenu compte. En outre, seuls les arguments répondant aux exigences de motivation susmentionnées seront examinés. 
 
4.  
Le recourant se plaint d'une violation des art. 26 al. 1 let. b et 41 al. 1 aLN ainsi que d'un abus du pouvoir d'appréciation. 
 
4.1. Selon l'art. 26 al. 1 let. b aLN, la naturalisation facilitée est accordée à condition que le requérant se conforme à la législation suisse.  
 
Le critère du respect de l'ordre juridique suisse au sens de l'art. 26 al. 1 let. b aLN a été précisé par le Conseil fédéral en ce sens que le requérant doit avoir une bonne réputation du point de vue du droit pénal et du droit des poursuites, d'une part, et que son comportement lors de l'exercice de ses droits et de l'accomplissement de ses devoirs doit pouvoir être pris en compte, d'autre part (Message du 26 août 1987 relatif à la modification de la loi sur la nationalité, FF 1987 III 296 et 301; cf. aussi ATF 140 II 65 consid. 3.3; arrêt 1C_378/2021 du 8 novembre 2021 consid. 3.2.1) 
 
4.2. Conformément à l'art. 41 al. 1 aLN, le SEM peut, avec l'assentiment de l'autorité du canton d'origine, annuler la naturalisation facilitée obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels.  
Pour qu'une naturalisation facilitée soit annulée, il ne suffit pas qu'elle ait été accordée alors que l'une ou l'autre de ses conditions n'était pas remplie; il faut qu'elle ait été acquise grâce à un comportement déloyal et trompeur. S'il n'est point besoin que ce comportement soit constitutif d'une escroquerie au sens du droit pénal, il est nécessaire que l'intéressé ait donné sciemment de fausses informations à l'autorité ou qu'il l'ait délibérément laissée dans l'erreur sur des faits qu'il savait essentiels (ATF 140 II 65 consid. 2.2). Le comportement déloyal et trompeur du requérant doit ainsi porter sur l'allégation de faits mensongers ou la dissimulation de faits décisifs pour décider de l'octroi de la naturalisation facilitée (arrêt 1C_618/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1). 
 
La nature potestative de l'art. 41 al. 1 aLN confère une certaine liberté d'appréciation à l'autorité compétente, qui doit toutefois s'abstenir de tout abus dans l'exercice de celle-ci. Commet un abus de son pouvoir d'appréciation l'autorité qui se fonde sur des critères inappropriés, ne tient pas compte de circonstances pertinentes ou rend une décision arbitraire, contraire au but de la loi ou non conforme au principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1; 134 III 323 consid. 2). 
 
4.3. En l'occurrence, le Tribunal administratif fédéral a retenu que le recourant avait signé, en avril 2014, une déclaration selon laquelle il attestait avoir respecté l'ordre juridique suisse au cours des dix dernières années, alors qu'il avait précédemment commis des actes d'ordre sexuel sur des clientes de son institut de massage dont il ne pouvait ignorer la gravité et la pertinence dans le cadre de la procédure de naturalisation. Le Tribunal administratif fédéral a ainsi estimé que le recourant avait caché des infractions non encore découvertes et menti en déclarant avoir respecté l'ordre juridique suisse. C'est pourquoi, il a jugé que les conditions pour l'annulation de la naturalisation facilitée étaient remplies. En outre, il a considéré qu'il n'y avait pas lieu d'examiner la situation de la communauté conjugale, dès lors qu'une des conditions indispensable à la naturalisation facilitée n'avait pas été respectée.  
 
4.4. Par une argumentation essentiellement appellatoire, le recourant prétend en substance qu'on ne saurait lui reprocher d'avoir considéré qu'il avait respecté l'ordre juridique suisse jusqu'en avril 2014, car la procédure pénale n'avait été ouverte qu'au mois d'août 2014 et qu'il n'avait pas d'antécédent pénal.  
Le recourant méconnaît toutefois la jurisprudence du Tribunal fédéral qui précise que les conditions pour l'annulation de la naturalisation facilitée sont remplies lorsque le candidat a caché avoir commis des infractions non encore découvertes et a menti en déclarant avoir respecté l'ordre juridique suisse (cf. ATF 140 II 65 consid. 3.3.2). Contrairement à l'avis du recourant, le critère du respect de l'ordre juridique ne dépend pas de la connaissance par les autorités de poursuites pénales de la commission d'actes constitutifs d'infractions, ni de l'ouverture d'une instruction ou du prononcé d'un jugement pénal antérieurement à la signature de la déclaration d'attestation du respect de l'ordre juridique. Au contraire, l'élément déterminant à cet égard est le comportement effectif du candidat à la naturalisation. Si ce dernier ne peut pas douter du caractère punissable de ses actes, il trompe l'autorité compétente sur une condition de naturalisation en omettant d'indiquer les éventuelles conséquences pénales que pourraient avoir ceux-ci (cf. ATF 140 II 65 consid. 3.3.2; arrêts 1C_324/2020 du 23 septembre 2020 consid. 4.2; 1C_264/2015 du 27 août 2015 consid. 3.4). Or, lorsque le recourant a déclaré, en avril 2014, avoir respecté l'ordre juridique suisse au cours des dix dernières années, il avait déjà commis des actes d'ordre sexuel sur plusieurs de ses clientes dont il ne pouvait douter du caractère pénal. Son argument selon lequel il n'avait commis que deux actes répréhensibles en 2014 ne change rien à ce qui précède. 
 
4.5. Le recourant soutient encore que l'autorité inférieure aurait manifestement abusé de son pouvoir d'appréciation en écartant purement et simplement de nombreux faits pertinents constatés pendant plusieurs années: il cite notamment à cet égard l'absence de nouvelles infractions, la radiation de la condamnation avec sursis au casier judiciaire, l'exercice continu de sa profession de masseur, l'absence de recours à l'aide social et le fait qu'il aurait toujours assumé ses responsabilités paternelles. Selon lui, ces éléments démontreraient son intégration en Suisse, qui ne saurait être niée à cause d'une seule condamnation pénale avec sursis prononcée en avril 2016, de sorte que l'arrêt attaqué serait arbitraire.  
 
Toutefois son argumentation ne démontre pas encore que la prise en compte de ces faits, pour lesquels aucun grief d'arbitraire n'a été soulevé conformément aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra consid. 3), permettrait de conclure à un abus de pouvoir d'appréciation de l'autorité précédente, respectivement à l'arbitraire de l'arrêt entrepris. En effet, le Tribunal administratif fédéral a fondé sa décision sur des critères appropriés et a tenu compte des circonstances pertinentes, soit la condamnation pénale du recourant et la gravité de l'ensemble des infractions commises. 
Le recourant semble également perdre de vue que sa condamnation ne concerne pas des délits mineurs qui, selon les circonstances, peuvent ne pas constituer des motifs de refus ou d'annulation de naturalisation (cf. Message du 21 novembre 2001 concernant le droit de la nationalité des jeunes étrangers et révision de la loi sur la nationalité, FF 2002 1815, p. 1831), mais qu'il a été condamné pour des infractions contre l'intégrité sexuelle: comme l'a relevé le Tribunal administratif fédéral, il ressort du jugement pénal que l'ensemble des infractions commises par l'intéressé était extrêmement grave, que sa faute était particulièrement lourde et que ce dernier niait systématiquement les faits qui lui étaient reprochés. Il était ainsi hautement vraisemblable que l'autorité compétente n'aurait pas octroyé la naturalisation facilitée à l'intéressé si elle avait eu connaissance de ces faits. Qui plus est, les conditions posées par l'art. 26 al. 1 aLN ne sont pas alternatives mais cumulatives: ce n'est pas parce que le recourant soutient être intégré qu'il s'est conformé à la législation suisse. 
 
4.6. Pour le surplus, les arguments développés par le recourant en lien avec l'existence d'une communauté conjugale tombent à faux: l'autorité inférieure n'a pas examiné cette condition étant donné que celle du respect de l'ordre juridique n'était pas remplie.  
 
4.7. Au vu de ce qui précède, l'autorité inférieure n'a pas violé le droit fédéral ni abusé de son pouvoir d'appréciation en jugeant que les conditions pour l'annulation de la naturalisation facilitée étaient remplies. Par conséquent, les griefs du recourant doivent être rejetés.  
 
5.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
Comme les conclusions étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, devra donc supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Tribunal administratif fédéral, Cour VI. 
 
 
Lausanne, le 30 décembre 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Chaix 
 
La Greffière : Nasel