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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5D_78/2022, 5D_79/2022  
 
 
Arrêt du 31 octobre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Marazzi, von Werdt, Schöbi et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
5D_78/2022 
A.________, 
représenté par Me Laurent Roulier, avocat, 
recourant, 
 
et 
 
5D_79/2022 
B.________, 
représentée par Me Romain Rochani, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. C.________, 
2. D.D.________, 
3. E.D.________, 
4. F.________, 
5. G.________, 
6. H.________, 
7. I.________ Sàrl, 
8. J.________ SA, 
9. K.________, 
10. L.________, 
11. M.________, 
12. N.________ SA, 
tous représentés par Me Daniel Guignard, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
frais et dépens (expulsion, mesures provisionnelles, action en revendication, art. 641 al. 2 CC), 
 
recours constitutionnels contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours civile, du 23 mars 2022 (JP21.044120-220206 JP21.044120-220207 73). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Les intimés sont propriétaires de différentes parcelles de la Commune de U.________. Plusieurs bâtiments y sont érigés.  
Le samedi 16 octobre 2021, plusieurs personnes ont pénétré sans droit et sans autorisation sur lesdites parcelles, avec l'intention de s'y installer contre la volonté des propriétaires de celles-ci. Plusieurs personnes ont également pénétré et logent à l'intérieur du bâtiment sis sur la parcelle des intimés D.D.________ et E.D.________. Ces derniers ont à cet égard reçu un courriel de la part du " Collectif O.________ ", le 17 octobre 2021, les informant que le logement dont ils sont propriétaires à la rue V.________ était occupé. 
 
A.b. Les 18 octobre 2021 et 1 er novembre 2021, les intimés ont déposé une plainte pénale auprès du Ministère public de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, à l'encontre du Collectif O.________ et tout occupant sans droit de leurs parcelles.  
 
B.  
 
B.a.  
 
B.a.a. Par requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles du 19 octobre 2021 dirigée contre le " Collectif O.________ et tous les occupants sans droit des parcelles nos 6456-1, 6459-1, 6560-1, 6457-1, 6460-3, 6460-2, 6459-2, 6460-4, 6457-2, 6456-2 et 6461 du cadastre de la Commune de et à U.________ ", les intimés 1 à 11 ont requis en substance l'évacuation immédiate des lieux qu'ils occupent dès notification de l'ordonnance, ceci sous menace de la sanction de l'amende de l'article 292 CP pour insoumission à une décision de l'autorité.  
 
B.a.b. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 20 octobre 2021, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois (ci-après: président) a ordonné au Collectif O.________, à ses membres et tous les occupants sans droit des parcelles précitées d'évacuer immédiatement les lieux qu'ils occupaient dès notification de l'ordonnance, sous la menace de la sanction de l'amende de l'art. 292 CP pour insoumission à une décision de l'autorité (I), a dit que les frais suivaient le sort des mesures provisionnelles (II), a déclaré l'ordonnance immédiatement exécutoire, en précisant qu'elle resterait en vigueur jusqu'à la décision sur la requête de mesures provisionnelles (III), et a rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (IV).  
 
B.a.c. Par requête de mesures provisionnelles du 1 er novembre 2021, l'intimée N.________ SA a pris des conclusions identiques aux autres intimés concernant ses parcelles nos 6458, 6462, 6463 et 6464 du cadastre de la commune de et à U.________.  
Par ordonnance d'instruction du 4 novembre 2021, la jonction des deux causes introduites par les requêtes de mesures provisionnelles des 19 octobre et 1 er novembre 2021 précitées a été ordonnée.  
 
B.a.d. Il ressort du dossier (art. 105 al. 2 LTF) que, par ordonnance du 20 octobre 2021, le président a cité " Collectif O.________ et tous les occupants sans droit " à comparaître à l'audience du 16 novembre 2021.  
 
B.a.e. Le 16 novembre 2021, juste avant l'audience de mesures provisionnelles du même jour, les " Membres du Collectif O.________ et consorts ", représentés par Me B.________, avocate, ont déposé des déterminations, dans lesquelles ils ont conclu, avec suite de frais et dépens, au rejet des conclusions prises au pied des requêtes précitées. Cette écriture a été signée par Me A.________, avocat, excusant (" Exct. ") Me B.________.  
La procuration produite, établie le 15 novembre 2021, indique que " [c]haque membre du 'Collectif O.________' personnellement, tous domiciliés à la rue V.________, U.________ " a donné mandat à titre individuel à Me B.________ afin de les représenter et d'agir en leur nom pour défendre leurs intérêts dans le cadre de cette procédure. Les six signatures figurant au pied de ce document ne permettent pas d'identifier leurs auteurs. 
 
B.a.f. L'audience de mesures provisionnelles a eu lieu le 16 novembre 2021 en présence, d'une part, du requérant H.________ assisté de son conseil, et, d'autre part, de Me A.________ en remplacement de Me B.________. Me A.________ a annoncé représenter certains membres du collectif; interpellé par le conseil du requérant présent et la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois (ci-après: présidente) au sujet du nom de ses clients, il a refusé de les donner au motif que la citation à comparaître ne comportait aucun nom. Il a requis, en vain, que l'un de ses mandants, un prétendu "P.________", puisse assister aux débats, alors que son identité n'avait pas pu être vérifiée par l'huissier du tribunal. La présidente a indiqué à cet égard que le dénommé "P.________", dont Me A.________ ne connaissait pas le nom de famille, n'avait pas pu présenter de pièce d'identité attestant de son nom et de son prénom et a relevé que les signatures figurant sur la procuration signée le 15 novembre 2021 étaient illisibles et que Me A.________ avait refusé de lui donner l'identité de ses mandants. La témoin Q.________ a par ailleurs été entendue, à la demande de Me A.________ qui a déclaré se porter fort pour le paiement de l'avance de frais en lien avec cette audition.  
 
B.a.g. Par ordonnance de mesures provisionnelles du 8 décembre 2021, adressée aux intéressés pour notification le même jour, la présidente a ordonné au " Collectif O.________ ", à tous ses membres et à tous les occupants sans droit des parcelles nos 6456-1, 6456-2, 6457-1, 6457-2, 6458, 6459-1, 6459-2, 6460-1, 6460-2, 6460-3, 6460-4, 6461, 6462, 6463 et 6464 de la Commune de U.________, d'évacuer ces immeubles d'ici au 27 décembre 2021, sous la menace de la peine d'amende de l'art. 292 CP (I), a ordonné, à défaut d'exécution spontanée, en tout ou partie, de l'ordre figurant au chiffre I précité, sur réquisition écrite des requérants ou de leur mandataire adressée au Président du Tribunal d'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, l'exécution forcée de l'ordonnance par la Police cantonale vaudoise, sous l'autorité de ce magistrat, en précisant qu'ordre était déjà donné à tout agent de la force publique de concourir à ladite exécution forcée, s'il en était requis (II), a imparti un délai au 1 er mai 2022 aux requérants pour déposer une demande au fond, à défaut de quoi les mesures provisionnelles ordonnées seraient caduques (III), a mis les frais judiciaires, par 1'900 fr., à la charge des avocats B.________ et A.________, solidairement entre eux (IV), a dit que les avocats B.________ et A.________, solidairement entre eux, devaient payer aux requérants, créanciers solidaires, les sommes de 1'800 fr. à titre de remboursement des avances de frais judiciaires et de 2'700 fr. à titre de dépens (V), a dit que les avocats B.________ et A.________, solidairement entre eux, pourraient réclamer le paiement de la somme de 4'500 fr. aux clients qu'ils avaient représentés dans le cadre de la présente procédure (VI), a rejeté toute autre ou plus ample conclusion (VII) et a déclaré l'ordonnance immédiatement exécutoire, nonobstant appel ou recours (VIII).  
 
B.b. Par arrêt du 23 mars 2022, notifié le 12 avril 2022, le Tribunal cantonal vaudois a joint les procédures de recours (I), rejeté les recours interjetés par B.________ et A.________ (II), confirmé l'ordonnance de mesures provisionnelles du 8 décembre 2021 (III), déclaré sans objet les requêtes d'effet suspensif (IV), mis les frais judiciaires de deuxième instance, arrêtés à 200 fr. à la charge des recourants B.________ et A.________, solidairement entre eux (V), et renoncé à allouer des dépens de deuxième instance (VI).  
 
C.  
Par actes séparés postés le 24 mai 2022, B.________ et A.________ interjettent un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire contre cet arrêt. Ils concluent au préalable à ce que leurs procédures de recours soient jointes, puis, principalement, à la réforme de l'arrêt attaqué, en ce sens que l'ordonnance du 8 décembre 2021 soit modifiée en ce sens que les frais judiciaires par 1'900 fr. soient mis solidairement à charge des intimés et à ce que les chiffres V et VI du dispositif de l'arrêt entrepris soient abrogés. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Plus subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. En substance, ils se plaignent, dans leur recours en matière civile, de la violation des art. 29 al. 2 Cst., art. 106 et 108 CPC, et, dans leur recours constitutionnel subsidiaire, de la violation des art. 5 al. 3, 9, 13 et 29 al. 2 Cst. 
Invités à se déterminer, tant l'autorité cantonale que les intimés s'en sont remis à justice. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Les deux recours sont dirigés contre la même décision, reposent sur le même complexe de faits et soulèvent les mêmes questions juridiques; dans ces circonstances, il y a lieu, par économie de procédure, de joindre les deux causes et de statuer à leur sujet par un seul arrêt (art. 24 PCF, applicable par analogie en raison du renvoi de l'art. 71 LTF).  
 
1.2. En l'espèce, l'autorité cantonale a confirmé le dispositif de l'ordonnance de mesures provisionnelles mettant solidairement à la charge des recourants, les frais judiciaires, par 1'900 fr., et une indemnité de dépens, par 2'700 fr. L'objet du litige était limité à cette seule question, le recours cantonal ayant été interjeté uniquement contre la décision sur les frais et dépens, conformément à l'art. 110 CPC qui ouvre au niveau cantonal un recours séparé sur cette question. Or, le recours contre une question accessoire est soumis à la même voie de droit que celle qui est ouverte contre la décision sur le fond du litige, dans la mesure où aucune procédure spéciale n'est prévue (ATF 134 V 138 consid. 3; 134 I 159 consid. 1.1). Une telle décision sur les frais et dépens doit ainsi être qualifiée de la même manière que la décision principale à laquelle elle se rattache et dont elle est l'accessoire (ATF 138 III 94 consid. 2.2; 134 I 159 consid. 1.1; arrêt 5D_81/2019 du 27 août 2019 consid. 1.2.2). Cette dernière, qui ordonne des mesures provisionnelles pour la durée de la procédure portant sur la revendication des parcelles en cause, constitue une décision sur mesures provisionnelles rendue dans une matière civile (art. 72 al. 1 LTF; arrêts 5A_226/2022 du 22 juin 2022 consid. 1.1; 5A_340/2017 du 11 décembre 2018 consid. 2, non publié aux ATF 145 III 121). Le litige est par ailleurs de nature pécuniaire. En cas de recours au Tribunal fédéral dont l'objet porte uniquement sur les frais et dépens alors que seuls ces derniers étaient litigieux devant l'autorité cantonale, à l'exclusion du fond de la cause, la valeur litigieuse devant l'instance fédérale se détermine selon ces seules conclusions relatives aux frais et dépens (ATF 143 III 46 consid. 1; arrêts 5D_199/2014 du 23 décembre 2014 consid. 3.2; 5A_261/2013 du 19 septembre 2013 consid. 1). La valeur litigieuse nécessaire pour former un recours en matière civile - dans le cas présent 30'000 fr. - n'est ainsi pas atteinte en l'espèce (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF; ATF 137 III 47 consid. 1.2.2). Le recours constitutionnel subsidiaire est donc ouvert (art. 113 ss LTF), alors que le recours en matière civile doit être déclaré irrecevable (arrêt 5D_165/2015 du 22 avril 2016 consid. 1). Les questions relatives à la valeur litigieuse et l'existence d'une question juridique de principe sont toutefois sans incidence étant donné que, dans le domaine des mesures provisionnelles, la cognition du Tribunal fédéral est de toute façon limitée à la violation des droits constitutionnels (art. 98 LTF).  
A cet égard, il sied d'emblée de constater que les griefs par lesquels les recourants ne dénoncent la violation d'aucun droit constitutionnel mais uniquement du droit matériel (art. 106 et 108 CPC) sont irrecevables. 
 
1.3. Pour ce qui est des autres conditions de recevabilité, les recours ont été interjetés dans le délai prévu par la loi (art. 100 al. 1 cum 46 al. 1 let. a et 117 LTF), par les recourants qui ont pris part à la procédure devant l'autorité précédente et ont succombé dans leurs conclusions (art. 115 LTF), devant une autorité de dernière instance cantonale statuant sur recours (art. 75 et 114 LTF), de sorte qu'ils sont en principe recevables.  
 
2.  
L'autorité cantonale a tout d'abord jugé que le fait de mettre les frais de la procédure à la charge du conseil d'une partie refusant de s'identifier n'était pas insolite, étant donné que ce genre d'affaires avait donné lieu à une jurisprudence constante, certes en matière pénale, mais dont il ne pouvait échapper aux recourants qu'elle était susceptible de s'appliquer en matière civile également, d'autant qu'elle se fondait notamment sur des considérations relatives au falsus procurator. A cela s'ajoutait que les dispositions du CPC sur la répartition et le règlement des frais, en particulier les art. 106 et 108 CPC, étaient d'application directe et que, de toute manière, en refusant de révéler l'identité de leurs mandants, les recourants devaient être conscients qu'ils étaient exposés à devoir assumer des frais de justice pour le compte de ceux-ci, à défaut pour le juge de pouvoir les mettre à la charge de leurs clients inconnus, si ces derniers devaient succomber.  
Ensuite, elle a retenu que la procuration produite par les recourants en première instance comportait en son pied six signatures qui ne permettaient pas d'identifier leurs auteurs. Il ressortait par ailleurs du procès-verbal de l'audience du 16 novembre 2021 qu'interpellé au sujet du nom de ses clients, le recourant avait refusé de les donner. En outre, il y était protocolé que la présidente avait relevé que les signatures figurant dans la procuration signée le 15 novembre 2021 étaient illisibles et que le recourant avait refusé de lui donner l'identité de ses mandants. Ainsi, faute pour les mandants des recourants de pouvoir être identifiés, l'autorité précédente n'était pas en mesure de vérifier leur pouvoir de représentation et les recourants avaient sciemment refusé de décliner l'identité de leurs mandants malgré l'injonction de la présidente. Dans ces conditions, les recourants avaient agi sans droit, comme falsi procuratores, étant précisé que les recourants se devaient, en leur qualité d'avocats, de refuser de représenter des clients non identifiables. Sur la base de ces éléments, l'autorité cantonale a jugé que les recourants ayant agi en qualité de falsi procuratores, les frais judiciaires et les dépens de la procédure pouvaient être mis à leur charge en application de l'art. 106 al. 1 CPC, la partie non identifiable qu'ils représentaient prétendument ayant succombé à celle-ci.  
Elle a précisé, par surabondance, que les recourants falsi procuratores, en se prévalant d'une procuration manifestement invalide car ne comportant pas le nom des représentés, avaient causé par leurs actes - soit le dépôt par la recourante de déterminations, signées par le recourant, pour s'opposer aux requêtes de mesures provisionnelles et la participation du recourant à l'audience, lors de laquelle il avait formulé deux réquisitions et fait entendre un témoin - des frais inutiles au sens de l'art. 108 CPC, qui devaient être mis à leur charge en vertu de cette disposition, étant retenu que les circonstances du cas d'espèce pouvaient justifier que la totalité des frais de la procédure fussent mis à la charge des recourants.  
L'autorité cantonale a conclu que le comportement fautif des recourants justifiait de mettre les frais judiciaires et les dépens de la procédure de première instance à leur charge tant selon l'art. 106 al. 1 que selon l'art. 108 CPC
 
3.  
 
3.1. Selon la jurisprudence, la nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement décelables; sa constatation ne doit pas mettre sérieusement en danger la sécurité du droit (ATF 138 II 501 consid. 3.1; 137 I 273 consid. 3.1; 132 II 342 consid. 2.1). Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4).  
Une décision d'emblée inexécutable est frappée de nullité (cf. arrêt 5A_360/2018 du 4 décembre 2018 consid. 3.4.4). 
Si la jurisprudence a coutume de dire que la nullité peut être constatée " par toute autorité ", cela tient au fait qu'il existe une grande diversité de situations dans lesquelles une décision nulle peut influer sur la validité de décisions postérieures relevant d'autres autorités. On ne peut donc pas énumérer toutes les autorités qui, amenées à rendre une décision ultérieure (par exemple une décision d'exécution), pourront constater à titre préjudiciel que la décision initiale est affectée d'un tel vice. La théorie de la nullité n'implique toutefois pas que n'importe quelle autorité est compétente pour constater la nullité, au mépris des règles gouvernant sa saisine (arrêt 4A_142/2016 du 25 novembre 2016 consid. 2.2). 
 
3.2. Le procès civil oppose deux parties: le demandeur et le défendeur. Les parties doivent être clairement désignées dans les actes judiciaires (HOHL, Procédure civile, tome I, 2 ème éd., 2016, n° 842 et 845; cf. pour la demande en procédure ordinaire: art. 221 al. 1 let. a CPC). Cette exigence vaut aussi pour la requête en justice en procédure sommaire (BOHNET, in Commentaire romand, CPC, 2 ème éd., 2019, n° 7 ad art. 252 CPC; dans ce sens, cf. ATF 137 III 617 consid. 4.2.2 par le renvoi à l'art. 221 par 219 CPC pour les conclusions). Pour pouvoir procéder en justice, les parties doivent notamment avoir la capacité d'être partie (art. 66 CPC), qui est une condition de recevabilité de la demande, et la qualité pour agir (légitimation active), pour l'une, et pour défendre (légitimation passive) pour l'autre, qui est une condition de fond de l'action (ATF 142 III 782 consid. 3.1.4).  
Plus précisément, en application de l'art. 641 al. 2 CC, le Tribunal fédéral a considéré que l'opposabilité de l'exécution forcée à des occupants sans droit qui ne seraient pas parties à la procédure civile ne paraît pas d'emblée exclue. Il n'en demeure pas moins que l'action en revendication en tant que telle ne peut être intentée que contre celui qui possède la chose au moment de l'ouverture de l'action, soit une personne déterminée (cf. arrêt 1P.109/2006 du 22 juin 2006 consid. 4.2, publié in SJ 2007 I p. 41). En droit du bail également, le Tribunal fédéral a considéré que la notion de dépendance de tiers à expulser doit se déterminer en fonction d'une partie défenderesse déterminée (arrêt 4P.133/1999 du 24 août 1999 consid. 2, publié in SJ 2000 I p. 6; cf. aussi LACHAT et alii, Le bail à loyer, 2019, p. 1051 n° 7.3). Admettre le contraire conduirait à passer outre l'examen d'une condition tant de recevabilité que matérielle de l'action, le juge ne pouvant contrôler ni la capacité d'être partie ni la légitimation des personnes en cause.  
Une décision qui serait rendue à l'encontre d'une partie défenderesse indéterminée est inexécutable et le but du procès civil n'est pas réalisable. Une telle décision est donc frappée de nullité. 
 
3.3.  
 
3.3.1. En l'espèce, la décision de mesures provisionnelles a été rendue contre le " Collectif O.________ ", tous ses membres et tous les occupants sans droit. Il ne ressort pas du dossier que le collectif en question serait une personne morale, de sorte qu'il n'a pas la capacité d'être partie. Quant aux personnes physiques qui le constituent, leur identité reste totalement inconnue.  
Il suit de là que le premier juge aurait dû d'emblée déclarer la requête de mesures provisionnelles irrecevable. Rendue contre inconnus, il faut constater la nullité de la décision de première instance qui viole l'essence même du procès civil. Cette nullité entraîne également celle de l'arrêt attaqué, qui statue sur un accessoire d'une décision nulle. 
Le Tribunal fédéral est fondé à procéder à cette constatation de la nullité. En effet, étant donné que la décision de mesures provisionnelles a été rendue contre des personnes inconnues, il n'y avait pas de partie légitimée à recourir, faute d'intérêt. Les recourants n'ont d'intérêt au recours qu'en ce qui concerne les frais mis à leur charge. 
Dans un arrêt récent (6B_1325/2021 du 27 septembre 2022, destiné à la publication), le Tribunal fédéral a consacré une solution similaire en droit pénal, concernant les exigences fixées à l'art. 353 al. 1 let. b CPP pour désigner le prévenu. Il a jugé que, si la procédure pénale peut être ouverte contre inconnu, l'identification et la désignation du prévenu en tant qu'objet de la procédure pénale représentent une condition sine qua non aussi bien pour rendre une ordonnance pénale que pour engager l'accusation et ces éléments revêtent dès lors un caractère essentiel (consid. 6.3.2). Toutefois, lorsque les données personnelles du prévenu demeurent en tout ou en partie inconnues, rien n'exclut, pour pallier ces carences, de recourir à une désignation générique accompagnée de données signalétiques, pourvu que l'on puisse être certain que la personne qui fait l'objet de la procédure est bien celle que désigne l'ordonnance pénale, à l'exclusion de toute autre. Sous ces conditions, la désignation peut être qualifiée de suffisante, malgré l'absence de données nominatives complètes (consid. 6.3.2.5). Dans l'affaire qu'il avait à traiter, le type de désignation précitée existait - notamment le genre de l'intéressée et la référence à un numéro de profil signalétique étaient établis -, de sorte que l'ordonnance pénale litigieuse n'était pas nulle et que l'art. 353 al. 1 let. b CPP n'avait pas été violé (consid. 6.4). La question de savoir si ce mode d'identification est aussi suffisant en procédure civile peut rester ouverte, aucun des éléments précités permettant d'identifier les personnes ayant éventuellement violé le droit de propriété des intimées ne ressortant du dossier.  
 
3.3.2. Au demeurant, il est brièvement rappelé que, dans tous les cas, l'art. 107 al. 1 CPC ne règle la répartition des frais, en dérogeant au principe prévu par l'art. 106 CPC, qu'entre les parties au procès. Cette disposition dérogatoire ne peut pas être appliquée pour mettre les frais à la charge d'un tiers (ATF 141 III 426 consid 2.3). L'analogie avec les arrêts rendus en procédure pénale à laquelle l'autorité cantonale a procédé pour retenir que l'avocat est une partie en procédure civile au sens des art. 106 s. CPC n'est pas pertinente. En effet, par cette jurisprudence, le Tribunal fédéral entend appliquer en procédure pénale devant les instances cantonales le principe général consacré à l'art. 66 al. 3 LTF, dont la teneur est semblable à celle de l'art. 108 CPC, malgré le libellé plus restreint de l'art. 417 CPP (arrêt 6B_364/2018 du 26 juillet 2018 consid. 3.3.3). Il est erroné d'en déduire, en procédure civile, que ce serait en raison de sa qualité de partie, et non uniquement en application du principe de causalité prévu à l'art. 108 CPC, qu'un avocat peut se voir imposer des frais, de sorte que l'on pourrait aussi appliquer l'art. 107 CPC à son égard pour lui faire supporter des frais en équité.  
Enfin, s'agissant de l'art. 108 CPC, cette norme consacre, pour les frais inutiles, le principe de causalité (ATF 141 III 426 consid. 2.4.1). Les frais causés inutilement sont en effet mis à la charge de la personne - y compris les tiers qui ne sont pas parties - qui les a engendrés, indépendamment du sort de la cause (ATF 141 précité consid. 2.4.2). L'art. 108 CPC ne vise pas à protéger la partie gagnante du risque lié à l'encaissement, lorsque des dépens lui ont été alloués à la charge d'une partie adverse indigente (arrêt 4A_612/2014 du 3 mars 2015 consid. 2.2). Sont inutiles les frais qui ne servent aucunement à la résolution du litige ou occasionnés de manière contraire au principe d'économie de la procédure. Il s'agit en premier lieu de ceux qui, par le comportement d'une partie ou d'un tiers pendant le procès, viennent s'ajouter aux frais usuels ou qui seraient de toute façon encourus (ATF 141 précité consid. 2.4.3). Ainsi, les frais engendrés dans une procédure qui a été menée par un falsus procurator pour une partie qui ne l'a pas mandaté sont à la charge du représentant sans pouvoirs (ATF 84 II 403 consid. 2; arrêts 2C_545/2021 du 10 août 2021 consid. 2.2 et les références; 5A_252/2014 du 10 juin 2014 consid. 2.1). Toutefois, même dans le cas du falsus procurator, le principe de causalité s'applique. En conséquence, seuls les frais que celui-ci a inutilement causés peuvent être mis à sa charge, au sens de l'art. 108 CPC. Or, en l'espèce, même si le premier juge avait, au moment de rendre sa décision, retenu l'irrecevabilité de la requête, aucuns frais n'auraient pu être mis à la charge des avocats. En effet, la requête engagée sans connaître l'identité de la partie intimée et l'instruction menée par le premier juge contre des personnes inconnues - la citation à comparaître ne comportait aucun nom et ce magistrat n'a nullement signifié aux recourants que, leur procuration ne mentionnant pas les noms des personnes représentées, il n'accepterait pas qu'ils procèdent et ne prendrait pas en considération leurs déterminations - relèguent à l'arrière-plan le comportement des recourants, qui se sont du reste limités à comparaître à l'audience déjà prévue et à déposer des déterminations sur la requête. On ne voit dès lors pas quels frais causés inutilement doivent être imputés aux recourants, étant précisé que la causalité ne peut se juger que par rapport à leur propre comportement de représenter une partie qui ne veut pas dévoiler son identité, et non par rapport au comportement illicite de la partie qui a donné lieu à la procédure d'évacuation, l'art. 108 CPC n'ayant nullement vocation à protéger le justiciable des difficultés de recouvrement contre sa partie adverse.  
 
4.  
En définitive, les recours en matière civile sont irrecevables. Les recours constitutionnels subsidiaires sont admis. La nullité de l'ordonnance de mesures provisionnelles rendue le 8 novembre 2021 par la Présidente du Tribunal d'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois, ainsi que celle de l'arrêt attaqué sont constatées. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis solidairement à la charge des intimés, qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). Ceux-ci verseront en outre solidairement une indemnité de 1'000 fr. à chaque recourant, à titre de dépens (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 5D_78/2022 et 5D_79/2022 sont jointes. 
 
2.  
Les recours en matière civile sont irrecevables. 
 
3.  
Les recours constitutionnels subsidiaires sont admis. La nullité de l'ordonnance de mesures provisionnelles rendue le 8 novembre 2021 par la Présidente du Tribunal d'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois, ainsi que celle de l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours civile, du 23 mars 2022 sont constatées. 
 
4.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis solidairement à la charge des intimés. 
 
5.  
Une indemnité de dépens de 1'000 fr. en faveur de chaque recourant est mise solidairement à la charge des intimés. 
 
6.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 31 octobre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari