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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_350/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 1er novembre 2017  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Eusebio et Chaix. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, représenté par 
Me Robert Ayrton, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, Division criminalité économique, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens, 
 
1. B.________, 
2. C.________, 
 
Objet 
Procédure pénale; révocation de la nomination d'avocat d'office; recevabilité du recours cantonal, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 3 juillet 2017 (438 - PE16.009100-BEB). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Dans le cadre d'une enquête liée à l'obtention frauduleuse d'indemnités en cas d'insolvabilité, B.________, associé-gérant ou administrateur d'au moins deux sociétés en liquidation, a été mis en prévention d'escroquerie, de tentative d'escroquerie, de fabrication de fausse monnaie et de faux dans les titres. Selon le rapport d'investigation de la Brigade financière de la Police de sûreté du 15 mars 2017, la caisse de chômage en cause aurait versé 68'324 fr. 90 à cinq employés fictifs de l'une des sociétés du prévenu et ce dernier aurait tenté d'obtenir, par l'entremise de dix-neufs employés fictifs de la seconde société, le versement de 323'052 fr. 21. 
Le 6 mai 2017, B.________ a été appréhendé et placé en détention provisoire. 
Par ordonnance du 9 mai 2017, le Ministère public central - Division criminalité économique - du canton de Vaud a désigné A.________ en tant qu'avocat d'office de B.________. Le 23 mai 2017, le prévenu a requis le remplacement de son avocat d'office par C.________, invoquant une rupture du lien de confiance. Par courrier du 31 mai 2017, le Procureur a requis de A.________ la production de sa liste de frais, afin de l'indemniser dans le cadre de la décision à intervenir qui le relèverait de son mandat. L'avocat a produit, le 1er juin suivant, une nouvelle procuration signée ce même jour par son client rencontré en prison et a précisé que le lien de confiance n'était pas rompu. Sur requête du Ministère public, B.________ a confirmé le 8 juin 2017 que le lien de confiance avec l'avocat A.________ était irrémédiablement rompu, que la procuration établie le 1er juin 2017 en faveur de celui-ci avait uniquement trait à une demande de mise en liberté et qu'il désirait la nomination de C.________ en tant qu'avocat d'office. 
Le 14 juin 2017, le Ministère public a relevé A.________ de son mandat d'office en faveur de B.________ et a désigné C.________ en cette qualité. 
 
B.   
Le 3 juillet 2017, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a déclaré irrecevable le recours intenté par A.________ contre cette décision, faute d'intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. 
 
C.   
Par acte du 15 août 2017, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à sa réforme en ce sens que la décision du Ministère public révoquant sa nomination en tant qu'avocat d'office de B.________ soit annulée. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. Le recourant sollicite également l'effet suspensif au recours, en ce sens que la désignation de C.________ en tant qu'avocat d'office soit suspendue et que lui-même soit maintenu dans cette position. 
Le Ministère public s'est opposé à l'octroi de l'effet suspensif et a conclu au rejet du recours. La cour cantonale s'en est remise à justice s'agissant de la première problématique et a renoncé à se déterminer pour le surplus. Quant à C.________, il a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, et s'est en substance également opposé à l'octroi de l'effet suspensif. Le 8 septembre 2017, cet avocat a précisé se rallier aux conclusions du Ministère public. Par courrier du 22 septembre 2017, le recourant a persisté dans ses conclusions. Invité personnellement à se déterminer, B.________ n'a pas déposé d'observations. 
Par ordonnance du 6 septembre 2017, le Président de la Ire Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale dans le cadre d'une instruction pénale. Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF, est donc en principe ouvert. L'autorité cantonale ayant toutefois refusé d'entrer en matière, seule la question de la recevabilité du recours cantonal peut être portée devant le Tribunal fédéral, qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation, la conclusion principale du recourant étant donc irrecevable. Tel n'est en revanche pas le cas de celle prise à titre subsidiaire, puisqu'elle tend au renvoi de la cause à l'autorité précédente. 
Le recours porte sur le refus de reconnaître l'existence d'un droit de recourir sur le plan cantonal, ce qui équivaut à un déni de justice formel. Il y a donc lieu d'entrer en matière indépendamment de l'existence d'un éventuel préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 138 IV 258 consid. 1.1 p. 261; voir également ATF 133 IV 335 consid. 5 p. 339 s'agissant de la nature de la décision révoquant un mandat d'office lorsqu'elle concerne un avocat). 
La cour cantonale n'étant pas entrée en matière sur le recours déposé par le recourant contre la révocation de son mandat d'office, celui-ci dispose d'un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 81 al. 1 LTF). Le recours a été déposé en temps utile (art. 46 al. 1 let. b et 100 al. 1 LTF). 
 
2.   
Invoquant l'art. 9 Cst., le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré qu'il ne disposerait pas d'un intérêt propre et juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision rendue par le Ministère public révoquant son mandat d'office. 
Selon la jurisprudence, un avocat dispose uniquement d'un intérêt de fait à une nomination comme avocat d'office et non pas d'un intérêt juridique; il ne peut par conséquent pas recourir contre un refus de désignation (arrêt 1B_187/2013 du 4 juillet 2013 consid. 1.2 publié in SJ 2014 I 205). 
Il en va différemment lorsque l'avocat a été désigné défenseur d'office, puisqu'il bénéficie alors des prérogatives attachées à cette nomination (droit de représentation et droit à une indemnisation notamment); partant, un intérêt juridique à l'annulation ou la modification de la décision révoquant son mandat d'office au sens de l'art. 81 al. 1 LTF doit lui être reconnu (ATF 133 IV 335 consid. 5 p. 340; arrêt 1B_187/2013 du 4 juillet 2013 consid. 1.2 publié in SJ 2014 I 205; voir également NIKLAUS SCHMID, Handbuch des schweizerischen Strafprozessordnung, 3e éd. 2017, n° 1679 p. 753, mais critique à la note de bas de page n° 536 p. 739 s.; VIKTOR LIEBER, in DONATSCH/HANSJAKOB/LIEBER (éd.), Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnunug [StPO], 2e éd. 2014, n° 26 ad art. 134 CPP; AEMISEGGER/DOLGE, in S PÜHLER/ AEMISEGGER/DOLGE/VOCK (éd.), Bundesgerichtsgesetz, Praxiskommentar, 2 e éd. 2013, n° 47 ad art. 81 LTF; MARC THOMMEN, in Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 2e éd. 2011, n° 75 ad art. 81 LTF; BOHNET/MARTENET, Droit de la profession d'avocat, 2009, n° 1748 p. 719 et n° 1751 p. 720; YVES DONZALLAZ, Loi sur le Tribunal fédéral, Commentaire, 2008, n° 2650 ad art. 81 LTF). En particulier, un avocat dispose d'un intérêt propre, pratique et actuel à faire vérifier les motifs de la décision de révocation. Il en va ainsi notamment lorsque l'autorité pénale se prononce d'office (cf. en particulier art. 134 al. 2 CPP); soutenir le contraire équivaudrait à permettre à cette autorité de procéder ainsi à chaque fois que la stratégie de défense suivie ne lui paraît, de son point de vue, pas adéquate, respectivement pourrait l'entraver dans son enquête. Cela se justifie aussi quand les raisons retenues dans le prononcé de révocation sont susceptibles d'engager la responsabilité professionnelle de l'avocat (cf. art. 128 CPP et 12 de la loi fédérale du 23 juin 2000 sur la libre circulation des avocats [LLCA; RS 935.61]; BOHNET/MARTENET, op. cit., n° 1748 in fine p. 719); dans cette seconde situation, peu importe alors qui est à l'origine de la procédure de révocation (la personne défendue, l'autorité pénale ou un tiers).  
En raison de l'unité de la procédure ancrée à l'art. 111 al. 1 LTF, la qualité pour recourir devant les autorités cantonales ne peut pas s'apprécier de manière plus restrictive que celle pour recourir devant le Tribunal fédéral (ATF 135 II 338 consid. 2.1 p. 344; arrêt 1B_7/2013 du 14 mars 2013 consid. 2.1). Par conséquent, l'intérêt juridique requis par l'art. 382 al. 1 CPP ne saurait être interprété dans un sens plus étroit que celui prévalant pour l'art. 81 al. 1 LTF. En refusant d'entrer en matière sur le recours déposé devant elle par l'avocat dont le mandat d'office a été révoqué, la Chambre des recours pénale a violé le droit fédéral et ce grief doit être admis. 
 
3.   
Vu l'issue du litige, il n'y a pas lieu d'examiner la violation éventuelle du droit d'être entendu reprochée au Ministère public. 
 
4.   
Il s'ensuit que le recours est admis dans la mesure où il est recevable. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle entre en matière sur le recours déposé le 23 juin 2017 devant elle. 
Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF); au regard de la motivation retenue pour admettre le recours, ceux-ci seront mis à la charge du canton de Vaud. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à B.________ ou à l'avocat C.________; le premier n'a pas procédé et le second succombe vu les conclusions prises. Pour le même motif que susmentionné, il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 4 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. L'arrêt du 3 juillet 2017 de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
2.   
Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée au recourant, à la charge du canton de Vaud. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud, Division criminalité économique, à B.________, à C.________ et à la Chambre des recours pénale au Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 1 er novembre 2017  
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Kropf