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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 1/2} 
5C.63/2006 /frs 
 
Arrêt du 12 juin 2006 
IIe Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Raselli, Président, 
Hohl et Marazzi. 
Greffier: M. Abrecht. 
 
Parties 
Colliers Asset Management Immobilier (Suisse) SA, 
demanderesse et recourante, représentée par Me Didier Bottge, avocat, 
 
contre 
 
Plurality Presse SA, 
défendeur et intimé, représenté par Me Charles Poncet, avocat, 
 
Objet 
droit de réponse, 
 
recours en réforme contre l'arrêt de la première Section de la Cour de justice du canton de Genève du 12 janvier 2006. 
 
Faits: 
A. 
Dans son édition du 31 octobre 2005, la brochure hebdomadaire gratuite "Tout l'Immobilier", éditée à 200'000 exemplaires par la société Plurality Presse SA, publiait le texte suivant : 
"Affaire du 25, rue du Stand 
 
Un dernier coup de bluff illusoire 
 
Révélée en novembre 2003 par «Tout l'Immobilier», l'affaire du 25, rue du Stand est loin de se terminer deux ans plus tard, contrairement à ce que le Conseil administratif, drapé dans une feinte unité derrière un Christian Ferrazino ébranlé et un Pierre Muller évanescent, tente de faire croire aux Genevois, en sacrifiant au passage la réputation d'un ou deux fonctionnaires. 
 
L'affaire a pris de telles proportions qu'il devient ardu de la résumer. En pas moins de 20 articles sur 2 ans, nous en avons exploré les aspects les plus variés. La chronologie en page 8 permet d'en retrouver les principales étapes. Documents à l'appui, nous allons éclairer quelques points qui forment l'origine du scandale. 
 
1. L'immeuble a été acheté beaucoup trop cher 
 
M. Ferrazino prétend toujours que l'achat de l'immeuble a été «une bonne affaire», il n'en est rien. 
 
Le 2 septembre 2003, l'Union bancaire privée, propriétaire de l'immeuble, déclare au Registre foncier et au fisc le 2 septembre 2003 une valeur de 16 millions. Valeur attestée par la fiduciaire renommée Ernst & Young. (doc. 1) 
 
Le 8 septembre - six jours plus tard - Christian Ferrazino et Pierre Muller annoncent au Conseil municipal qu'il faut acheter d'urgence l'immeuble pour 30 millions - près d'un million de frais. Il est impensable d'avancer que ces deux magistrats et leurs collaborateurs ignorent l'existence du Registre foncier. Les conseillers municipaux renâclent, mais se laissent convaincre le 7 octobre suivant par une expertise d'un peu plus de 26 millions que brandit le Maire Ferrazino. Celui-ci a dit à la Commission des finances que l'expert avait «largement sous-estimé le matériel informatique», ce qui explique le prix de 30 millions au lieu de 26. Cette expertise a été commandée à l'avance par la Ville, qui a donc bel et bien disposé du temps nécessaire à examiner l'immeuble. L'expert a agi le 30 avril 2003, aboutissant à un prix de 22,5 à 22,6 millions de francs. Il précise: (doc. 2) 
 
Le même expert revient le 9 juin 2003, et ajoute benoîtement: (doc. 3) 
 
Le nouveau total est de 26,2 à 26,5 millions! Ainsi, situation invraisemblable, on assiste aux efforts étranges d'un acheteur pour faire... monter le prix à payer. Mieux: les prétendus 4 millions de matériel électrique ont été payés deux fois (une fois parce que l'expert a été invité à les ajouter, et une autre fois sous prétexte de sous-estimation), ils devaient finir à la casse dès le début des travaux. 
 
 
Nous avons, en outre, découvert que plusieurs expertises avaient été faites par des privés intéressés par l'immeuble, et que l'une aboutissait à 16,2 millions + 12 millions de travaux. Une troisième concluait à une valeur de 18 millions. 
 
Par acquit de conscience, nous avons soumis la fameuse expertise (obtenue de la Ville après une bataille juridique d'un an) à 5 cabinets d'experts et consultants reconnus à Genève. Deux ont refusé pour éviter les représailles et/ou les conflits d'intérêt. Trois ont rendu leur verdict: il est accablant pour ce document constellé d'erreurs. Pourquoi le Conseil administratif n'a-t-il vu ni le Registre foncier, ni l'existence d'autres expertises, ni l'évidence de travaux à réaliser? Parce que les courtiers - la société AMI-Colliers - ont intelligemment utilisé l'intérêt réel ou supposé de l'État pour cet immeuble comme un moyen de piéger Christian Ferrazino, trop heureux de «souffler» cet immeuble à son confrère Moutinot. Convaincu que l'État était en lice, le Maire s'est lancé les yeux fermés dans l'aventure. [...]" 
Cet article était signé par Thierry Oppikofer, administrateur délégué de Plurality Presse SA. Il était accompagné des photos des documents visés ainsi que d'un tableau chronologique des événements. 
B. 
Le 9 novembre 2005, Colliers Asset Management Immobilier (Suisse) SA (ci-après: Colliers AMI) a adressé une demande de droit de réponse à Plurality Presse SA. Celle-ci a répondu par pli du 16 novembre 2005 que cette demande ne remplissait pas les conditions légales, de sorte que seule une partie du texte serait publiée sous forme de lettre de lecteur dans l'édition suivante, ce qui a été fait dans l'édition du 21 novembre 2005. 
 
Insatisfaite du sort réservé à sa demande, Colliers AMI a déposé le 12 décembre 2005 une requête en droit de réponse auprès de la Cour de justice du canton de Genève, en concluant à la condamnation de Plurality Presse SA à diffuser dans la brochure "Tout l'Immobilier" le texte suivant : 
"DROIT DE RÉPONSE 
 
A la demande de la Société Colliers Asset Management Immobilier (Suisse) SA (Colliers AMI), en relation avec un article paru dans Tout l'Immobilier le 31 octobre 2005 : 
 
Colliers AMI, société de services en matière immobilière, mandatée par l'établissement bancaire vendeur de l'immeuble 25, rue du Stand, n'a recouru à aucun moyen destiné à piéger M. Christian Ferrazino, Conseiller administratif de la Ville de Genève ou tout autre représentant de la Ville de Genève. 
 
Colliers AMI n'a pas incité la Ville de Genève à négliger ou surseoir à l'accomplissement des vérifications usuelles en matière d'acquisition immobilière. 
 
 
Dans l'accomplissement du mandat confié par la venderesse, Colliers AMI n'est pas intervenue dans le processus décisionnel de l'acheteur, à savoir la Ville de Genève, s'étant contentée de chercher, conformément à ses obligations de mandataire, la meilleure valorisation possible de l'immeuble, ayant mis à cet effet en concurrence plusieurs acheteurs potentiels, dont la Ville de Genève, l'État de Genève et un privé. 
 
S'agissant des allégations et avis d'experts selon lesquels l'immeuble aurait été acheté trop cher, Colliers AMI précise qu'elle a reçu, en juin 2003, trois offres d'achat concurrentes à hauteur de 25, 30 et 32 millions de francs. Ces niveaux de prix ont du reste été retenus comme conformes au marché dans le rapport d'audit du contrôle financier de la Ville de Genève du 27 octobre 2005." 
Plurality Presse SA a conclu avec suite de dépens au rejet de la requête. 
C. 
Statuant par arrêt du 12 janvier 2006, la première Section de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté la requête avec suite de dépens. La motivation de cet arrêt, dans ce qu'elle a d'utile à retenir pour l'examen du recours, est en substance la suivante : 
C.a Selon l'art. 28g al. 1 CC, celui qui est directement touché dans sa personnalité par la présentation que font des médias à caractère périodique, notamment la presse, la radio et la télévision, de faits qui le concernent, a le droit de répondre. On entend par faits tout ce qui se produit dans la réalité et peut théoriquement être l'objet d'une observation. Il s'agit donc de quelque chose de perceptible, susceptible d'être objectivement établi, contrairement à l'opinion ou au jugement de valeur qui repose sur une appréciation subjective (ATF 118 IV 41 consid. 3). Si la distinction entre ce qui relève du fait et ce qui n'en relève pas est parfois difficile à opérer (ATF 119 II 104 consid. 3b; 114 II 385 consid. 4b), l'exercice du droit de réponse n'est justifié que si, à l'évidence, un fait est perçu comme tel par un lecteur moyen ou s'impose à la grande majorité des lecteurs (ATF 114 II 385 consid. 4b; 112 II 465 consid. 2b p. 469). 
C.b La qualité pour solliciter le droit de réponse est reconnue à celui qui est directement touché dans sa personnalité, soit lorsque la relation des faits est différente de la version donnée par la personne concernée et que l'information délivrée laisse de celle-ci dans le public une image peu favorable. Une connotation négative doit en ressortir, qui doit s'apprécier en fonction de critères objectifs (ATF 119 II 104 consid. 3c; 114 II 388 consid. 2). 
C.c En l'occurrence, le passage incriminé a le contenu suivant : 
"Pourquoi le Conseil administratif n'a-t-il vu ni le Registre foncier, ni l'existence d'autres expertises, ni l'évidence de travaux à réaliser? Parce que les courtiers - la société AMI-Colliers - ont intelligemment utilisé l'intérêt réel ou supposé de l'État pour cet immeuble comme un moyen de piéger Christian Ferrazino, trop heureux de «souffler» cet immeuble à son confrère Moutinot. Convaincu que l'État était en lice, le Maire s'est lancé les yeux fermés dans l'aventure." 
Selon la requérante, ce passage de l'article justifierait un droit de réponse parce que l'auteur de l'article laisse entendre publiquement qu'elle aurait eu un comportement trompeur et déloyal à l'égard des autorités municipales, ce qui justifierait qu'elle puisse donner sa version des faits. Toutefois, il apparaît à la lecture de l'article de presse en question que celui-ci ne contient aucun fait stricto sensu imputable à la recourante, mais un jugement de valeur basé sur une hypothèse, ce qui ne permet pas un droit de réponse, lequel doit se limiter aux faits. 
C.d À titre surérogatoire, à supposer que l'assertion incriminée constitue un fait, il y a lieu de considérer qu'un lecteur moyen retiendra que, pris dans son ensemble, cet article ne fait pas apparaître la requérante sous un faux jour, ni ne la décrit de manière déshonorante ou méprisable et propre à la rabaisser dans l'estime du public. 
 
Toute critique ou ironie ne tombe pas nécessairement sous le coup de la loi. C'est dans ce sens qu'un lecteur moyen aura certainement compris l'expression "... comme un moyen de piéger...", l'article précisant que la requérante intervenait pour le compte de la venderesse et que l'édile pouvait s'appuyer sur l'avis de ses services. 
 
Il ne fait aucun doute que, pour un lecteur moyen, l'article en cause ne laissera que le souvenir des tribulations des édiles relatives à une acquisition immobilière controversée. Somme toute, l'article incriminé a un but d'information générale et présente la requérante comme une société active dans le domaine immobilier intervenue dans ce contexte. Dès lors, en l'absence d'assertion concernant des faits susceptibles de toucher la requérante dans sa personnalité, le droit de réponse doit être refusé. 
D. 
Contre cet arrêt, Colliers AMI exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut, avec suite de frais et dépens des procédures cantonale et fédérale, à la réforme de cet arrêt en ce sens que Plurality Presse SA soit condamnée, sous la menace des peines prévues par l'art. 292 CP, à diffuser le texte du droit de réponse (cf. lettre B supra) dans l'édition de "Tout l'Immobilier" qui suivra la notification de l'arrêt, ainsi qu'à payer une astreinte de 500 fr. par jour de retard dans la publication du droit de réponse. À titre subsidiaire, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Une réponse au recours n'a pas été demandée. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 L'arrêt déféré est une décision finale prise par le tribunal suprême d'un canton (art. 48 al. 1 OJ) dans une contestation civile portant sur un droit de nature non pécuniaire (art. 44 OJ). Partant, il peut être attaqué par la voie du recours en réforme (ATF 112 II 193 consid. 1b; 122 III 301 consid. 1a). Par ailleurs, la recourante attaque les deux motivations indépendantes sur lesquelles la cour cantonale a fondé le rejet de la requête (cf. lettre C.c et C.d supra), se conformant ainsi aux exigences découlant de l'art. 55 al. 1 let. c OJ (ATF 115 II 300 consid. 2a; 111 II 397 et 398; cf. ATF 121 III 46 consid. 2). Il s'ensuit que le recours, interjeté en temps utile (art. 54 al. 1 OJ), est recevable. 
1.2 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a; 119 II 353 consid. 5c/aa). Dans la mesure où la recourante, tout en déclarant se fonder sur les faits retenus par la Cour de justice, entend y apporter des compléments ou des précisions sans se prévaloir de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c; 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4). 
2. 
2.1 Le droit de réponse de l'art. 28g CC permet à la personne touchée dans sa personnalité par la présentation de faits qui la concernent d'obliger l'entreprise de médias à caractère périodique qui l'a donnée à diffuser gratuitement, par le même canal, sa propre version des faits; la réponse n'existe donc qu'en ce qui concerne la présentation de faits, soit de quelque chose qui est susceptible d'être prouvé, à l'exclusion des commentaires, opinions ou jugements de valeur, qui reposent sur une appréciation subjective (ATF 118 II 369 consid. 4a; 130 III 1 consid. 2.2; arrêt non publié 5C.250/1994 du 27 juin 1995, consid. 3a). Il est parfois difficile de procéder à cette distinction (ATF 119 II 104 consid. 3b; 114 II 385 consid. 4b et les références citées). On entend par faits tout ce qui se produit dans la réalité et peut théoriquement être l'objet d'une observation; il s'agit donc de quelque chose de perceptible, susceptible d'être objectivement établi, contrairement à l'opinion qui relève de la pensée ou des sentiments de l'individu (ATF 118 IV 41 consid. 3; arrêt non publié 5C.250/1994 du 27 juin 1995, consid. 3a et les références citées; Tercier, Le nouveau droit de la personnalité, 1984, n. 1406 ss; Deschenaux/Steinauer, Personnes physiques et tutelle, 4e éd. 2001, n. 691; Schwaibold, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, 2e éd. 2002, n. 2 ad art. 28g CC). Il faut tenir compte à cet égard de la manière dont l'information en question est perçue par la grande majorité des destinataires de la diffusion (ATF 112 II 465 consid. 2b p. 469; 114 II 385 consid. 4b). 
 
Le droit de réponse découle de la protection de la personnalité et suppose que celui qui l'exerce soit "directement touché dans sa personnalité" par la présentation de faits le concernant. Tel n'est en principe le cas que si la présentation des faits, alors même qu'elle ne lèse pas nécessairement la personnalité, fait naître dans le public une image défavorable de la personne physique ou morale visée, la place sous un jour équivoque (ATF 119 II 104 consid. 3c; 114 II 388 consid. 2 et les références citées; arrêt 5C.93/1997 du 23 juin 1997, reproduit in sic! 5/1997 p. 473, consid. 2a; Schwaibold, op. cit., n. 4 ad art. 28g CC). En outre, il faut que la relation des faits par l'entreprise de médias soit différente de la version donnée par la personne concernée (Deschenaux/Steinauer, op. cit., n. 688; Tercier, op. cit., n. 1424). Le droit de réponse ne saurait donc être accordé lorsque le requérant tente uniquement de préciser la présentation de faits litigieuse ou de l'accentuer autrement (arrêt non publié 5C.250/1994 du 27 juin 1995, consid. 3b et les références citées). 
2.2 La recourante reproche en premier lieu aux juges cantonaux d'avoir violé l'art. 28g al. 1 CC en considérant que le passage de l'article litigieux au sujet duquel elle demandait un droit de réponse était un jugement de valeur (cf. lettre C.c supra). Selon elle, l'article litigieux lui prêterait clairement le fait de s'être livrée à des manoeuvres pour que Christian Ferrazino, conseiller administratif de la Ville de Genève, propose un prix d'achat plus élevé que celui qu'il avait initialement prévu pour l'immeuble sis 25, rue du Stand, et ne se livre pas aux vérifications usuelles, telles que déterminer si des travaux étaient nécessaires, vérifier le Registre foncier ou recourir à d'autres expertises du bien immobilier. Le lecteur moyen ne pourrait que comprendre par là que la recourante a, au cours de réunions ou d'échanges de correspondances, incité activement Christian Ferrazino à conclure la transaction le plus rapidement possible et, ainsi, à négliger de procéder à certaines vérifications élémentaires. Ce passage de l'article litigieux serait objectivable, de la même manière qu'il est possible d'objectiver l'affirmation selon laquelle l'État aurait eu un intérêt pour l'immeuble. 
 
La recourante reproche en outre aux juges cantonaux d'avoir violé l'art. 28g al. 1 CC en considérant que l'article litigieux n'avait pas de connotation négative pour la recourante et que celle-ci n'était ainsi pas directement touchée dans sa personnalité (cf. lettre C.d supra). Selon elle, le lecteur moyen ne pourrait que comprendre à la lecture de cet article - qui va même jusqu'à dire que la recourante aurait "piégé" Christian Ferrazino - que la recourante s'est livrée à une tromperie ayant conduit Christian Ferrazino à payer, avec de l'argent public, un immeuble beaucoup trop cher. L'article litigieux, en laissant ainsi entendre que la recourante se serait livrée à des agissements confinant à l'escroquerie, aurait incontestablement une connotation négative pour la recourante. 
2.3 À la lecture de l'article de presse incriminé, il apparaît que celui-ci relate essentiellement, dans un but d'information générale, les tribulations des édiles relatives à l'acquisition de l'immeuble sis 25, rue du Stand, laquelle a suscité une vaste controverse publique en raison notamment du prix de vente de l'immeuble et des conditions dans lesquelles la Ville de Genève a décidé de procéder à son acquisition. La recourante n'y est que brièvement citée, comme étant la société de courtage qui avait été mandatée par l'établissement bancaire propriétaire de l'immeuble pour vendre celui-ci. Il n'apparaît pas que l'explication donnée par l'auteur de l'article aux conditions dans lesquelles l'acquisition de l'immeuble par la Ville de Genève a eu lieu - à savoir que la recourante aurait "intelligemment utilisé l'intérêt réel ou supposé de l'État pour cet immeuble comme un moyen de piéger Christian Ferrazino, trop heureux de «souffler» cet immeuble à son confrère [le conseiller d'État] Moutinot" -, telle que l'aura comprise le lecteur moyen, touche la recourante dans sa personnalité en donnant d'elle une image défavorable. 
 
On ne saurait suivre la recourante lorsqu'elle affirme que le lecteur moyen ne pouvait que comprendre qu'elle aurait, au cours de réunions ou d'échanges de correspondances, incité activement Christian Ferrazino à conclure la transaction le plus rapidement possible, et qu'elle se serait ainsi livrée à des agissements confinant à l'escroquerie (cf. consid. 2.2 supra). Considéré objectivement et dans son contexte, le passage litigieux ne suggère pas que la recourante aurait activement incité le Conseil administratif à agir dans la précipitation et à négliger de procéder à certaines vérifications élémentaires, mais bien plutôt que le conseiller administratif Ferrazino, sachant que l'État était également intéressé, aurait été aveuglé par son désir de "souffler" l'immeuble au conseiller d'État Moutinot. Nonobstant l'utilisation dans ce contexte particulier du verbe "piéger", le passage incriminé met clairement l'accent sur les tribulations de l'édile Ferrazino, et le lecteur moyen n'en gardera pas d'autre impression, en particulier pas d'image défavorable de la recourante. Au demeurant, si l'affirmation selon laquelle l'État aurait eu un intérêt pour l'immeuble peut bien être objectivée, comme l'expose la recourante (cf. consid. 2.2 supra), cette dernière ne donne pas sur ce point une version différente, puisqu'elle expose elle-même que, conformément à son obligation de chercher, comme mandataire de la venderesse, la meilleure valorisation possible de l'immeuble, elle a mis à cet effet en concurrence plusieurs acheteurs potentiels, dont la Ville de Genève et l'État de Genève (cf. lettre B supra). 
 
Il résulte de ce qui précède que la cour cantonale n'a pas violé l'art. 28g al. 1 CC en considérant que la recourante n'était pas directement touchée dans sa personnalité par une présentation de faits la concernant. 
3. 
En définitive, le recours, mal fondé en tant qu'il est recevable (cf. consid. 1.2 supra), doit être rejeté dans cette même mesure. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer de dépens, puisque l'intimée n'a pas été invitée à répondre au recours et n'a ainsi pas assumé de frais pour la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 159 al. 1 et 2 OJ; Poudret/Sandoz-Monod, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. V, 1992, n. 2 ad art. 159 OJ). 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la première Section de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 12 juin 2006 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: