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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_845/2010 
 
Arrêt du 25 janvier 2011 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Favre, Président, Schneider, Wiprächtiger, Mathys et Jacquemoud-Rossari. 
Greffière: Mme Cherpillod. 
 
Participants à la procédure 
Ministère public de l'Etat de Fribourg, 
case postale, 1700 Fribourg, 
recourant, 
 
contre 
 
X.________, 
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de non-lieu (violation de la loi fédérale sur le transport de voyageurs), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Chambre pénale, du 18 août 2010. 
 
Faits: 
 
A. 
Lors d'un contrôle effectué le 5 janvier 2010 dans un bus des transports publics fribourgeois (ci-après TPF) de la ligne Vignettaz - Schöneberg, il a été constaté que X.________ voyageait sans titre de transport. 
Sur dénonciation des TPF, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, le 1er juin 2010. 
 
B. 
Par arrêt du 18 août 2010, la chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a rejeté le recours du Ministère public. 
En bref, la chambre pénale a retenu que l'interprétation de l'art. 57 al. 1 let. a LTV, à la lumière des principes découlant de l'art. 1 CP, ne permettait pas de sanctionner le comportement de X.________. 
 
C. 
Le Ministère public forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral. Invoquant la violation de l'art. 57 al. 1 let. a LTV, il conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
D. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le recourant reproche aux instances cantonales de n'avoir pas appliqué l'art. 57 al. 1 let. a LTV à l'intimé. A l'appui de ce grief, il invoque l'interprétation littérale du terme "valider" contenu dans cette disposition et l'interprétation historique de cette norme, soulignant que le législateur n'a jamais voulu dépénaliser le fait de voyager sans titre de transport valable. 
 
1.1 La loi du 20 mars 2009 sur le transport de voyageurs (RS 745.1; ci-après LTV) et l'ordonnance du 4 novembre 2009 sur le transport de voyageurs (RS 745.11; ci-après OTV) sont entrées en vigueur le 1er janvier 2010. L'art. 57 al. 1 LTV punit d'une amende de 10'000 francs au plus toute personne qui, intentionnellement ou par négligence, voyage à bord d'un véhicule sur un tronçon pour lequel elle aurait dû valider elle-même son titre de transport (let. a) ou contrevient à une décision fondée sur la loi ou sur une disposition d'exécution qui lui a été adressée et qui porte la mention de la sanction visée au présent article (let. b). Aux termes de l'art. 57 OTV, les voyageurs doivent être munis de titres de transport valables (al. 1 1ère phrase). Les tarifs peuvent prévoir l'obligation pour le voyageur d'oblitérer son billet. Cette obligation doit être signalée au public dans les stations et si possible sur les véhicules (al. 2). 
 
1.2 Conformément à une jurisprudence constante, la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique) (ATF 136 III 283 consid 2.3.1 p. 284; 135 II 416 consid. 2.2 p. 418; 134 I 184 consid. 5.1 p. 193 et les arrêts cités). 
L'interprétation de la loi pénale par le juge est dominée par le principe "nulla poena sine lege" posé par l'art. 1 CP. Le juge peut toutefois, sans violer ce principe, donner du texte légal une interprétation même extensive, afin d'en dégager le sens véritable, celui qui est seul conforme à la logique interne et au but de la disposition en cause. Si une interprétation conforme à l'esprit de la loi peut s'écarter de la lettre du texte légal, le cas échéant au détriment de l'accusé, il reste que le principe "nulla poena sine lege" interdit au juge de se fonder sur des éléments que la loi ne contient pas, c'est-à-dire de créer de nouveaux états de fait punissables. Lorsqu'il constate une lacune proprement dite de la loi, le juge a le devoir de la combler avec cette réserve qu'en matière pénale, sa démarche ne saurait que profiter à l'accusé (ATF 103 IV 129 consid. 3a et références citées). 
 
1.3 Selon la lettre de l'art. 57 al. 1 let. a LTV, cette disposition n'est applicable que si une condition claire est réalisée: l'auteur voyage sur un tronçon pour lequel il aurait dû valider lui-même son titre de transport. L'état de fait établi par le juge d'instruction, que le recourant ne conteste pas, retient que l'intimé ne voyageait pas sur un tel tronçon (ordonnance de non-lieu du 1er juin 2010, p. 1). En effet, le billet de transport qui aurait dû être acquis par l'intimé est un billet valable, sans autre opération, dès l'émission par la machine, celle-ci indiquant automatiquement la durée de validité du billet sur celui-ci (Recours, ch. 2 p. 3 et billet annexé au recours). Il ne s'agit donc pas d'un billet que le voyageur doit acquérir ("son" titre de transport, art. 57 al. 1 let. a LTV) puis, lui-même, valider (art. 57 al. 1 let. a LTV, soit oblitérer au sens de l'art. 57 al. 2 OTV). La condition posée par l'art. 57 al. 1 let. a LTV n'est par conséquent pas réalisée. Indépendamment de l'interprétation à donner au terme "valider" contenu à l'art. 57 al. 1 let. a LTV, cette disposition n'est pas applicable à la présente cause. 
 
1.4 L'interprétation historique et systématique de l'art. 57 al. 1 LTV n'aboutit pas à un autre résultat. 
1.4.1 La LTV et l'OTV ont été adoptées dans le cadre de la réforme des chemins de fer 2, qui a notamment conduit à l'abrogation, le 1er janvier 2010, de la loi fédérale du 4 octobre 1985 sur les transports publics (RO 1993 3128; ci-après aLTP) et de son ordonnance du 5 novembre 1986 (RO 1986 II 1991; ci-après aOTP). 
1.4.2 L'art. 51 al. 1 aLTP sanctionnait d'une amende, sur plainte, celui qui, intentionnellement ou par négligence, contrevient aux dispositions d'exécution édictées par le Conseil fédéral et relatives à l'admission au transport de personnes et d'objets (let. a) ou utilise un véhicule sur le parcours pour lequel il aurait dû oblitérer son billet (let. b). Aux termes de l'art. 1 aOTP, le voyageur doit être muni d'un billet valable (al. 1 1ère phrase). Les tarifs peuvent prévoir l'obligation pour le voyageur d'oblitérer son billet. Cette obligation est signalée au public dans les gares et si possible sur les véhicules (al. 2). 
Ces dispositions distinguaient ainsi deux états de fait: d'une part la violation d'une obligation posée par une disposition d'exécution édictée par le Conseil fédéral, notamment l'art. 1 al. 1 aOTP, sanctionnée par l'art. 51 al. 1 let. a aLTP (cf. arrêt 6B_930/2008 du 15 janvier 2009, consid. 3.2; Weissenberger, in Basler Kommentar, Strafrecht vol. II, 2e éd. 2007, n° 15 ad art. 150 CP), d'autre part la violation de l'obligation d'oblitérer soit-même son billet posée par les tarifs et visée par l'art. 1 al. 2 aOTP, réprimée par l'art. 51 al. 1 let. b aLTP. 
1.4.3 Dans le cadre de la réforme des chemins de fer 2, le Conseil fédéral a indiqué résumer en un seul article les contraventions issues des trois lois déterminantes dont l'ancienne LTP. En réalité, il a traité les états de fait visés par l'art. 51 aLTP sous deux dispositions, l'une sanctionnant les contraventions, l'autre les délits (Message du 23 février 2005 sur la réforme des chemins de fer 2, FF 2005 2269 s, ch. 2.2.11 ad titres des art. 64 et 65 et Message complémentaire du 9 mars 2007 sur la réforme des chemins de fer 2 [Révision des actes normatifs concernant les transports publics], FF 2007 2517 s, section 11 ad titres des art. 56 et 57). La contravention visée par l'art. 51 al. 1 let. b aLTP a été reprise sans changement autre que rédactionnel et ayant trait au mode de poursuite. Le Conseil fédéral a en revanche proposé de punir la violation de dispositions d'exécution comme délit et à la condition (let. a) que la violation de la disposition ait été déclarée punissable par le Conseil fédéral ou (let. b) que par cette violation, l'auteur contrevienne à une injonction qui lui avait été adressée sur la base de la loi ou d'une disposition d'exécution sous menace d'une peine privative de liberté ou d'une amende (art 65 al. 1 1er projet de loi sur le transport des voyageurs [ci-après P-LTV], respectivement 57 al. 1 2ème P-LTV). Dans la mesure où l'article traitant des contraventions reprenait tous les états de fait prévus par l'art. 51 aLTP, à l'exception de la violation de dispositions d'exécution (art 64 1er P-LTV, respectivement 56 2ème P-LTV), il ne fait pas de doute que c'est bien cette infraction que le Conseil fédéral visait lorsqu'il a rédigé l'art. 65 al. 1 1er P-LTV, respectivement l'art. 57 al. 1 2ème P-LTV traitant des délits. Dans le cadre des discussions parlementaires, il fut décidé, d'une part, de revenir pour cette infraction à la qualification de contravention et, d'autre part, d'abandonner la première condition, peu claire notamment pour les justiciables. Le texte adopté par les chambres figure aujourd'hui à l'art. 57 al. 1 let. b LTV
1.4.4 Contrairement à ce que soutient le recourant, le législateur, bien qu'il n'ait pas repris mot à mot la lettre a de l'art. 51 al. 1 aLTP, a bel et bien maintenu la contravention aux dispositions d'exécution, désormais uniquement sanctionnée aux conditions posées par l'art. 57 al. 1 let. b LTV (dans ce sens Union des transports publics, Newsletter für Unternehmensleiterinnen und - leiter du 10 juin 2010, figurant au dossier pénal, p. 2). 
1.4.5 La distinction opérée par le législateur, que ce soit sous l'empire de l'ancienne LTP, durant les travaux parlementaires ou sous l'empire de la LTV, entre violation de l'obligation tarifaire d'oblitérer soit-même son billet et violation de dispositions d'exécution interdit aujourd'hui d'assimiler le deuxième comportement au premier et d'appliquer à celui-là la disposition sanctionnant celui-ci. 
 
1.5 Il peut paraître étonnant que le législateur ait décidé de sanctionner directement la violation de l'obligation tarifaire d'oblitérer soit-même son billet, rappelée dans les stations et, seulement à certaines conditions, la violation de la loi ou de ses dispositions d'exécution. Cela étant, la volonté du législateur comme le texte adopté sont clairs. Au risque de violer le principe "nulla poena sine lege" en (re)créant un nouvel état de fait punissable, le juge ne saurait condamner celui qui voyage sans titre de transport valable sur un tronçon sur lequel il n'a pas l'obligation de valider lui-même son billet, sans qu'une décision au sens de l'art. 57 al. 1 let. b LTV lui ait été préalablement adressée. 
La cour cantonale n'a ainsi pas violé la loi en considérant que le comportement de l'intimé ne violait pas l'art. 57 al. 1 let. a LTV. Le grief du recourant est mal fondé. 
 
2. 
Le Tribunal fédéral applique le droit fédéral d'office (art. 106 al. 1 LTF), sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF). Il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante soulève conformément aux exigences légales relatives à la motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF). 
En l'espèce, le recourant, que ce soit par devant la cour cantonale ou dans son recours en matière pénale, a uniquement invoqué la violation de l'art. 57 al. 1 let. a LTV. Les faits constatés par la décision attaquée, que le recourant ne conteste pas, ne permettent pas de retenir que l'intimé aurait, par son comportement, violé d'autres dispositions fédérales. Ainsi l'état de fait établi par la cour cantonale ne retient pas qu'il aurait adopté, lors du contrôle, un comportement frauduleux au sens de l'art. 150 CP (cf. ATF 117 IV 449 consid. 6bcc p. 451; également 6B_930/2008 du 15 janvier 2009 consid. 3.2). Il ne retient pas non plus que l'intimé aurait reçu une décision au sens de l'art. 57 al. 1 let. b LTV. En première instance, le juge d'instruction a clairement retenu qu'aucun de ces éléments n'était réalisé, ce qui n'a pas non plus été contesté par le recourant auprès de la cour cantonale. Dans ces circonstances, on ne saurait reprocher aux autorités cantonales d'avoir clos la procédure par un non-lieu. 
 
3. 
Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires, puisque le recourant agit dans l'exercice de ses attributions officielles sans que son intérêt patrimonial soit en cause (art. 66 al. 4 LTF). L'intimé, qui n'a pas été amené à se déterminer dans la procédure devant le Tribunal fédéral, n'a pas droit à des dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Chambre pénale. 
 
Lausanne, le 25 janvier 2011 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Favre Cherpillod