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Urteilskopf

118 Ib 277


35. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 28 juillet 1992 dans la cause S. contre Préposé spécial au traitement des documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat (recours de droit administratif).

Regeste

Einsicht in Karteikarten und Dossiers des Polizeidienstes der Bundesanwaltschaft. Unzulässigkeit der Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen Entscheide des Sonderbeauftragten für die Behandlung der Staatsschutzakten des Bundes. Vereinbarkeit des Rechtsschutzes nach StaVo mit Art. 13 EMRK.
1. Entscheide des Sonderbeauftragten betreffend die Einsicht in Karteikarten (Fichen) des Polizeidienstes der Bundesanwaltschaft, welche in Anwendung von Art. 5 ff. der Verordnung über die Behandlung von Staatsschutzakten des Bundes (StaVo, SR 172.014) getroffen werden, betreffen die (innere und äussere) Sicherheit des Landes im Sinne von Art. 100 lit. a OG und können daher nicht mit Verwaltungsgerichtsbeschwerde angefochten werden. Es steht einzig die Beschwerde an den Bundesrat nach Art. 14 StaVo in Verbindung mit Art. 72 VwVG offen (E. 2).
2. Zuständigkeit des Bundesgerichts zur Prüfung der Vereinbarkeit von Art. 100 lit. a OG mit Art. 13 EMRK (E. 3).
3. Die behördliche Erhebung von Daten über das Privatleben von Bürgern, deren Aufbewahrung zu Staatsschutzzwecken und die Verweigerung der Einsichtnahme stellen Eingriffe in das von Art. 8 EMRK geschützte Privatleben dar (E. 4).
4. Tragweite des Anspruchs auf eine wirksame Beschwerde vor einer nationalen Instanz im Sinne von Art. 13 EMRK (E. 5).
5. Der Rechtsschutz, wie er gestützt auf die StaVo mit den Entscheiden des Sonderbeauftragten, des Ombudsmannes und des Bundesrates gewährt wird, genügt im vorliegenden Fall den Anforderungen von Art. 13 EMRK (E. 6).

Sachverhalt ab Seite 279

BGE 118 Ib 277 S. 279
S. a demandé au Ministère public de la Confédération l'accès aux fiches et dossiers le concernant. Le Préposé spécial au traitement des documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat a remis à S. une photocopie de sa fiche, en masquant les données relatives aux informateurs. Cette décision indique la voie de la réclamation au médiateur et celle du recours au Conseil fédéral.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, S. demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du Préposé spécial en tant qu'elle limite son droit de consulter les fiches et dossiers du Ministère public constitués à son sujet, et de lui faire remettre ces documents dans leur forme originale et intégrale. Sous l'angle des art. 4 Cst. et 6 CEDH, il invoque le droit de consulter le dossier et se plaint d'un déni de justice. Il allègue en outre une violation de la liberté personnelle, ainsi que des art. 8 à 10 et 13 CEDH.
Le Tribunal fédéral a déclaré le recours de droit administratif irrecevable et l'a transmis au Conseil fédéral comme objet de sa compétence.

Erwägungen

Extrait des considérants:

2. a) A teneur de l'art. 97 al. 1 OJ, le Tribunal fédéral connaît en dernière instance des recours de droit administratif contre des décisions au sens de l'art. 5 PA. La décision attaquée est fondée sur le droit public fédéral, soit les art. 5 ss de l'ordonnance du 5 mars 1990 relative au traitement des documents de la Confédération établis pour assurer la sécurité de l'Etat (ODSE; RS 172.014). Elle est donc en principe attaquable par la voie du recours de droit administratif, sous réserve des exceptions prévues aux art. 98 ss OJ.
b) De l'avis du Préposé spécial, le recours de droit administratif ne serait pas recevable au regard de l'art. 100 let. a OJ; seule serait ouverte la voie du recours administratif au Conseil fédéral, en vertu de l'art. 14 al. 2 ODSE, en relation avec l'art. 73 (recte: 72) let. b PA.
BGE 118 Ib 277 S. 280
Le recourant estime au contraire que la notion de "décision touchant à la sécurité intérieure ou extérieure du pays" au sens de l'art. 100 let. a OJ devrait être interprétée restrictivement; elle ne viserait pas le cas d'espèce.
Dans ses arrêts du 29 mai 1991, concernant les réclamations de droit public formées respectivement par le canton de Genève contre la Confédération et la Confédération contre le canton de Bâle-Campagne, le Tribunal fédéral a jugé que les données dont le traitement et la consultation sont réglés par l'ODSE concernent en premier lieu la sûreté intérieure et extérieure de la Confédération, domaine qui relève de sa propre compétence (ATF 117 Ia 217 /218 consid. 6, 232 consid. 4c et d). La décision attaquée, prise en vertu de cette ordonnance, entre ainsi dans le champ d'application de l'exception prévue à l'art. 100 let. a OJ; au regard du droit interne, elle ne peut, partant, faire l'objet d'un recours de droit administratif, et c'est le Conseil fédéral qui est en principe compétent pour en connaître selon l'art. 72 let. b PA.
La jurisprudence citée par le recourant (ATF 104 Ib 131 /132) va dans le même sens. Elle souligne que l'art. 100 let. a OJ vise exclusivement les mesures touchant à la sécurité intérieure et extérieure de la Suisse, et notamment les "actes de gouvernement" (cf. aussi ATF 110 Ib 4 consid. 1b). Cette notion recouvre aussi les mesures prises par les autorités de police fédérale et cantonales pour assurer la surveillance et la prévention d'actes de nature à mettre en péril la sûreté intérieure ou extérieure de la Confédération, notamment la lutte contre le terrorisme, l'espionnage, l'extrémisme violent et le crime organisé (cf. art. 4 al. 2 et 5 al. 3 ODSE; ATF 117 Ia 231 consid. 4a). Le traitement et la consultation des fichiers et dossiers constitués dans l'accomplissement de cette tâche relèvent donc de la sécurité de l'Etat. La procédure instituée par l'ODSE a précisément pour but de garantir le droit constitutionnel à la consultation du dossier dans les limites inhérentes à la protection de la sécurité de l'Etat. Les décisions rendues en vertu de cette ordonnance par le Préposé spécial touchent ainsi à la sûreté de l'Etat, ce qui exclut le recours de droit administratif au Tribunal fédéral, eu égard au texte clair de l'art. 100 let. a OJ.

3. Dans sa réplique du 8 décembre 1990, le recourant fait valoir que la voie du recours au Conseil fédéral ne garantirait pas le droit à un "recours effectif devant une instance nationale" au sens de l'art. 13 CEDH, en relation avec l'art. 8 CEDH.
a) En vertu des art. 113 al. 3 et 114bis al. 3 Cst., le Tribunal fédéral
BGE 118 Ib 277 S. 281
doit se conformer aussi bien aux lois et arrêtés de portée générale votés par l'Assemblée fédérale qu'aux traités que cette Assemblée a ratifiés. La Constitution ne règle toutefois pas de manière expresse le cas où, comme en l'espèce, le Tribunal fédéral est saisi du grief qu'une loi fédérale violerait un traité.
b) Le Tribunal fédéral est compétent pour examiner le grief de la violation d'un traité international invoqué conjointement avec la violation de dispositions de droit administratif fédéral (ATF 99 Ib 42 /43 consid. 1). De manière générale, le droit international l'emporte sur les lois fédérales (ATF 113 Ib 186 consid. 3, ATF 112 V 151 consid. 2c, ATF 111 Ib 71 consid. 3, ATF 111 V 202 consid. 2b, ATF 110 V 76 consid. 2b, ATF 109 Ib 173 consid. 7b), à moins que le législateur fédéral n'ait sciemment voulu s'écarter de la norme internationale en édictant une norme postérieure contraire au traité liant la Suisse; cette volonté s'impose au Tribunal fédéral en vertu de l'art. 113 al. 3 Cst. (ATF 99 Ib 44 consid. 3, ATF 111 V 202 /203 consid. 2b, ATF 112 II 13 consid. 8).
L'Assemblée fédérale a édicté les art. 100 let. a OJ et 72 ss PA dans leur teneur actuelle le 20 décembre 1968, soit avant la ratification par la Suisse de la Convention européenne des droits de l'homme, le 28 novembre 1974. Le Tribunal fédéral doit par conséquent procéder à l'examen de la conformité de ces règles internes au droit conventionnel. Point n'est besoin dès lors de rechercher si la restriction apportée par l' ATF 99 Ib 44 doit être maintenue.

4. a) Le droit de consulter les dossiers de police est l'un des aspects du droit d'être entendu garanti par l'art. 4 Cst. (ATF 113 Ia 3 consid. 2, 262 consid. 4a, ATF 112 Ia 100 /101 consid. 5b). Il se trouve aussi en relation étroite avec la liberté personnelle (ATF 113 Ia 5 /6 consid. 4 b/bb, 263/264 consid. 4c) et la protection de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance au sens de l'art. 8 CEDH (ATF 113 Ia 6 /7 consid. 4b/bb; cf. aussi ATF 109 Ia 279 /280 consid. 4a), ainsi qu'avec la liberté d'opinion et d'expression.
b) Selon la jurisprudence des organes de Strasbourg, le fait de collecter des données relatives à la vie privée d'un citoyen, de les conserver dans un registre secret, de les communiquer à d'autres services de l'Etat et d'en refuser la consultation par la personne concernée, constitue une "ingérence" dans l'exercice d'un droit garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 26 mars 1987 dans la cause Leander, Série A/No 116, par. 48; cf. aussi l'arrêt du 7 juillet 1989 dans la cause Gaskin, Série A/No 160, par. 37; la question avait été laissée indécise dans le rapport de la Commission européenne des droits de l'homme
BGE 118 Ib 277 S. 282
du 4 mai 1979 dans la cause X., DR 16 p. 145 ss; STEPHAN BREITENMOSER, Der Schutz der Privatsphäre gemäss Art. 8 EMRK, thèse Bâle, 1986, p. 240 ss, 244, 246; LUZIUS WILDHABER, EMRK-Kommentar, No 323-337, 739-744 ad art. 8).
c) A teneur de l'art. 8 par. 2 CEDH, il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice des droits résultant de l'art. 8 par. 1 CEDH que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Dans l'affaire Leander déjà citée, le recourant soutenait que ses antécédents personnels ou politiques ne justifiaient pas que l'autorité compétente, en l'occurrence le Conseil national de la police, l'inscrive dans le registre des personnes dangereuses en raison de leurs opinions extrémistes, et lui refuse l'accès à un emploi touchant la sécurité nationale. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que cette ingérence répondait à un but légitime, qu'elle reposait sur une base légale suffisante, et que, compte tenu des garanties procédurales offertes au requérant, cette atteinte n'était pas disproportionnée. La Cour a ainsi conclu à l'absence de violation de l'art. 8 CEDH (arrêt cité, par. 68).
d) Avant l'adoption de l'ODSE, le Conseil fédéral, statuant comme autorité de recours, avait aussi eu l'occasion de dire que le refus de consulter les dossiers établis pour assurer la sécurité de l'Etat constitue une ingérence dans les droits des citoyens compatible avec l'art. 8 par. 2 CEDH (décision du 28 septembre 1983, JAAC 1983.40).
e) Dans un domaine proche, on relèvera que, selon la Cour européenne des droits de l'homme, les mesures de surveillance secrète de la vie privée des citoyens (notamment les écoutes téléphoniques et le contrôle du courrier) portent atteinte aux droits garantis par l'art. 8 par. 1 CEDH (arrêts du 6 septembre 1978, en la cause Klass et consorts, Série A/No 28, par. 41; du 2 août 1984, en la cause Malone, Série A/No 82, par. 64; du 24 avril 1990, en la cause Kruslin, Série A/No 176-A, par. 26). Il est à relever que dans l'affaire Leander, la Commission européenne des droits de l'homme avait déclaré irrecevable le grief tiré de la violation de l'art. 6 par. 1 CEDH, invoqué parallèlement à l'art. 13 et en relation avec l'art. 8 CEDH.
L'atteinte à la liberté personnelle dont se plaint le recourant se confond matériellement avec le grief tiré de la violation de l'art. 8
BGE 118 Ib 277 S. 283
CEDH
. Il reste à examiner si la procédure de recours instituée par le droit interne en ce domaine répond aux exigences de l'art. 13 CEDH.

5. a) A teneur de l'art. 13 CEDH, toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la Convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.
b) Le Tribunal fédéral a déjà jugé que la voie du recours administratif au Département fédéral de justice et police contre les décisions rendues par l'autorité inférieure, en matière d'asile et de police des étrangers, satisfait à l'exigence d'un recours effectif devant une instance nationale au sens de l'art. 13 CEDH, dès lors que le recourant qui se plaint d'une atteinte à ses droits peut faire valoir ses arguments devant une autorité statuant avec une cognition pleine et investie du pouvoir d'annuler ou de réformer la décision attaquée (ATF 111 Ib 73 consid. 4; JAAC 1983.40; cf. aussi les arrêts non publiés B., du 12 mai 1989, S., du 12 juin 1990 et A., du 26 mars 1991; ARTHUR HAEFLIGER, Das Erfordernis einer nationalen Beschwerde bei Verletzung der Europäischen Menschenrechtskonvention, in: Die schweizerische Rechtsordnung in ihren internationalen Bezügen, Berne, 1988, p. 27 ss, 29, 31; THOMAS A. WETZEL, Das Recht auf eine wirksame Beschwerde bei einer nationalen Instanz (Art. 13 EMRK) und seine Ausgestaltung in der Schweiz, thèse Bâle, 1983, p. 156-158; critique à cet égard: PETER SALADIN, Völkerrechtliches ius cogens und schweizerisches Landesrecht, in: Die schweizerische Rechtsordnung in ihren internationalen Bezügen, Berne, 1988, p. 67 ss, 94-96).
c) La jurisprudence des organes de Strasbourg a connu un nouveau développement dans l'arrêt Leander. Dans l'interprétation de l'art. 13 CEDH, il convient désormais de respecter les principes suivants:
"... a) un individu qui, de manière plausible, se prétend victime d'une violation des droits reconnus dans la Convention doit disposer d'un recours devant une "instance" nationale afin de voir statuer sur son grief et, s'il y a lieu, d'obtenir réparation (...);
b) l'"instance" dont parle l'art. 13 n'a pas besoin d'être une institution judiciaire, mais alors ses pouvoirs et les garanties qu'elle présente entrent en ligne de compte pour apprécier l'efficacité du recours s'exerçant devant elle; c) l'ensemble des recours offerts par le droit interne peut remplir les conditions de l'art. 13 même si aucun d'entre eux n'y répond en entier à lui seul;
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d) l'art. 13 n'exige pas un recours par lequel on peut dénoncer, devant une autorité nationale, les lois d'un Etat contractant comme contraires en tant que telles à la Convention ou à des normes juridiques nationales équivalentes)..."
(Arrêt cité, par. 77).
La Cour a aussi précisé qu'un "recours effectif" au sens de l'art. 13 CEDH "doit s'entendre d'un recours aussi effectif que possible, eu égard aux limitations inhérentes à tout système de contrôle secret des candidats à des postes importants du point de vue de la sécurité nationale" (par. 78-79 et 84). La Cour a jugé que la procédure de plainte au gouvernement contre une décision de refus par le Conseil national de la police de l'autorisation de consulter les dossiers de la Sûreté, envisagée isolément, n'était pas suffisante au regard de l'art. 13 CEDH (par. 84). Cette norme conventionnelle n'avait toutefois pas été violée en l'occurrence, car Leander disposait non seulement du droit de recourir auprès du gouvernement, mais aussi de la faculté de s'adresser au Chancelier de la Justice et au médiateur parlementaire. Or, ces deux autorités peuvent connaître des réclamations individuelles, et contrôler l'activité du Conseil national de la police. Qu'elles ne disposent pas d'un pouvoir de décision contraignant, mais seulement celui d'émettre des recommandations, n'y change rien (par. 76 ss, 81 et 82; cf. l'opinion dissidente sur ce point des juges Ryssdal, Pettiti et Russo, ainsi que celles de MM. Frowein, Opsahl, Jörundsson, Trechsel, Kiernan et Batliner, membres de la Commission; aussi critique à cet égard, GÉRARD COHEN-JONATHAN, La Convention européenne des droits de l'homme, Paris, 1989 p. 269 ss, 272/273).
d) Dans ce contexte, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté, le 17 septembre 1987, une Recommandation R (87)15 visant à réglementer l'utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police. Ce texte, fondé notamment sur l'art. 8 CEDH, pose le principe que chaque Etat membre devrait disposer d'une autorité indépendante et extérieure à la police, chargée de veiller au respect des principes définis dans la Recommandation et touchant à la collecte, à l'enregistrement, à l'utilisation et à la communication à des fins de police des données à caractère personnel qui font l'objet d'un traitement automatisé (1.1). La collecte de telles données devrait se limiter à ce qui est nécessaire à la prévention d'un danger concret ou à la répression d'une infraction pénale déterminée (2.1). La Recommandation, qui contient en outre des principes relatifs à l'enregistrement,
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l'utilisation, la communication, la conservation, la mise à jour et la sécurité de ces données, prévoit aussi que l'autorité de contrôle devrait prendre les mesures propres à assurer la publicité de l'existence de fichiers et l'information du public (6.1), notamment en ce qui concerne le droit d'avoir accès au fichier de police (6.2) et la rectification des données inexactes ou non pertinentes (6.3). L'exercice de ce droit ne pourrait faire l'objet de restrictions que dans la mesure nécessaire pour l'accomplissement d'une tâche légale de la police ou pour la protection de la personne concernée ou des droits et libertés d'autrui (6.4). La décision motivée refusant l'accès au fichier devrait être notifiée par écrit et pouvoir être attaquée devant une autorité indépendante qui s'assurera du bien-fondé du refus (6.6).
Le 11 mars 1992, l'Assemblée du Conseil de l'Europe a adopté une Recommandation 1181 (1992) invitant le Conseil des Ministres à élaborer une convention consacrant les principes énoncés dans la Recommandation R (87) 15 et à promouvoir l'application de ces principes dans la coopération policière entre les Etats membres et entre ceux-ci et les Etats tiers. Selon l'Assemblée, cette convention devrait notamment prévoir la création dans les Etats d'une "autorité indépendante, en dehors du secteur de la police, chargée d'assurer le respect des principes énoncés dans une telle convention".
C'est à la lumière de cette jurisprudence et de ces recommandations qu'il faut examiner la conformité à l'art. 13 CEDH des voies de plainte et de recours instituées par l'ODSE, en relation avec l'art. 100 let. a OJ.

6. A teneur de son art. 1, l'ODSE a pour but de garantir aux personnes au sujet desquelles la police fédérale possède des documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat le droit de défendre leurs droits de la personnalité sans que soit entravée l'exécution des tâches de protection de l'Etat (al. 1). Les documents de la Confédération établis pour assurer la sécurité de l'Etat sont placés sous la garde du Préposé spécial qui statue sur les demandes de consultation de ces documents en lieu et place du Ministère public de la Confédération (al. 2). Ses décisions peuvent être soumises au médiateur institué à cet effet (al. 3). Le Préposé spécial est nommé par le Conseil fédéral (art. 12 al. 1), ainsi que le médiateur, qui veille au respect de l'ordonnance, sur requête de la personne qui a demandé la consultation des documents la concernant (art. 13 al. 1). Le médiateur peut consulter tous les documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat en possession du Service de police du Ministère public de la Conféderation et demander
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tout renseignement utile au Préposé spécial, au Ministère public de la Confédération ou à d'autres services de la Confédération; l'administration ne peut invoquer le secret de fonction envers le médiateur (art. 13 al. 2). A teneur de l'art. 14, celui qui fait valoir que sa demande de consultation n'a pas été traitée conformément à l'ordonnance peut s'adresser dans les trente jours au médiateur (al. 1). Si celui-ci estime que l'ordonnance a été respectée, il en fait part au requérant, qui peut interjeter recours au Conseil fédéral (al. 2). Si en revanche le médiateur estime que l'ordonnance n'a pas été respectée, il en fait part au Préposé spécial et au requérant; le Préposé spécial rend alors une nouvelle décision qui peut faire l'objet d'un recours au Conseil fédéral (al. 3).
Le Préposé spécial et le médiateur sont indépendants des autorités de police qui ont constitué les documents dont la consultation peut être demandée par les citoyens concernés. Ils ne sont pas subordonnés hiérarchiquement au Ministère public ou au Département fédéral de justice et police, pas plus qu'ils ne reçoivent d'instructions de la part du Conseil fédéral. Ces agents publics investis de pouvoirs autonomes remplissent une mission spéciale de contrôle de l'activité administrative, qui les place au-dessus des fonctionnaires de police et leur garantit l'indépendance nécessaire pour procéder équitablement à la pesée des intérêts en présence. Certes, le médiateur ne peut pas annuler ni modifier les décisions du Préposé spécial, mais seulement l'amener à reconsidérer sa décision. De même, le système institué par l'ordonnance ne prévoit pas l'intervention d'autres organes indépendants de l'administration, comme c'est le cas en droit suédois, équivalents au Chancelier de la Justice ou Conseil national de la police, au sein duquel siègent des parlementaires; or, la Cour européenne des droits de l'homme a accordé une certaine importance à cet élément, dans son appréciation d'ensemble du système examiné dans le cadre de l'affaire Leander (par. 82). Cela étant, l'ordonnance offre au citoyen des garanties de procédure importantes. La décision relative à la consultation des documents émane d'un Préposé spécial indépendant de l'administration; elle est ensuite soumise au contrôle du médiateur, et, le cas échéant, du Conseil fédéral statuant comme autorité de recours. Dans le cadre de cette procédure du recours administratif devant le Conseil fédéral, l'instruction des recours dirigés contre les décisions rendues en vertu de l'ODSE est confiée à un autre département que celui de justice et police (art. 75 al. 2 PA). Le Conseil fédéral constate les faits d'office (art. 12 PA); il dispose d'une cognition pleine et d'un pouvoir de décision libre
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sur toutes les questions (art. 62). Les parties ont le droit d'être entendues (art. 18, 26, 29 ss PA). Considéré dans son ensemble, le système de protection juridique mis en place par l'ordonnance prend suffisamment en compte le droit du citoyen de faire contrôler par une autorité indépendante l'activité de la police dans l'accomplissement de ses tâches de protection de l'Etat. L'intervention successive du Préposé spécial, du médiateur et du Conseil fédéral assure au citoyen une protection suffisante de ses droits de la personnalité et le met pratiquement à l'abri de toute action intempestive des organes de police. Les voies de plainte et de recours prévus par l'ODSE répondent ainsi aux exigences minimales de l'art. 13 CEDH et des Recommandations R (87) 15 et 1811 du Conseil de l'Europe.
Le recours de droit administratif est par conséquent irrecevable; il doit être transmis au Conseil fédéral, seule autorité compétente pour en connaître (cf. art. 96 al. 1 OJ).

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