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Urteilskopf

125 II 497


50. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 2 novembre 1999 dans la cause Claude Tamborini contre Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (recours de droit administratif)

Regeste

Art. 55bis BV; Art. 3, 4, 5 und 26 Abs. 2 RTVG; Anspruch auf bestimmte Sendezeit und bestimmte Sendebedingungen; Wahl in eine kantonale Exekutive.
Eintretensvoraussetzungen; Zuständigkeit der Unabhängigen Beschwerdeinstanz für Radio und Fernsehen, eine Wahlsendung auf ihre Rahmenbedingungen und die den Teilnehmern zugestandene Redezeit zu prüfen (E. 1).
Umfang der Programmautonomie der SRG bei Wahl- und Abstimmungssendungen, insbesondere bei Regierungsrats- bzw. Staatsratswahlen. Anwendung des Grundsatzes der Chancengleichheit (E. 2 u. 3).
Wer sich weigert, an einer Sendung teilzunehmen, kann nicht mehr verlangen, als dass seine Gründe hierfür sachlich dargelegt werden (E. 4).

Sachverhalt ab Seite 498

BGE 125 II 497 S. 498
Le 3 novembre 1997, la Télévision suisse romande a consacré son émission «Droit de Cité» à l'élection du Conseil d'Etat genevois du 16 novembre 1997.
Tous les candidats à cette élection avaient été invités à y participer, y compris Claude Tamborini, lui-même candidat sur la liste de l'Alliance des citoyens contribuables, et avaient été informés du déroulement des débats: les dix candidats des partis représentés au Parlement cantonal seraient présents sur le plateau, tandis que les candidats des deux formations restantes, dont l'Alliance des citoyens contribuables, se verraient assigner des sièges dans le public et disposeraient d'un temps d'intervention limité sur chacun des thèmes abordés dans l'émission.
Par lettre du 24 octobre 1997, Claude Tamborini a refusé de participer à l'émission, expliquant en substance qu'on ne lui réservait pas une place équitable.
En introduction de l'émission, le présentateur a informé le public de l'absence de l'intéressé en mentionnant les motifs de celle-ci. Il n'a toutefois pas donné lecture du courrier précité, contrairement à ce que lui avait demandé Claude Tamborini.
Par décision du 3 avril 1998, l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (ci-après: l'Autorité de plainte) a rejeté la plainte par laquelle Claude Tamborini critiquait en particulier, sous l'angle du reflet équitable de la diversité des opinions, le traitement différent que le diffuseur avait réservé aux divers candidats à l'élection du Conseil d'Etat.
Agissant le 9 septembre 1998 par la voie du recours de droit administratif, Claude Tamborini demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 3 avril 1998 de l'Autorité de plainte, de constater la violation du droit des programmes faisant l'objet du présent recours
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et de décider des mesures administratives à prendre pour empêcher qu'une telle violation ne puisse se reproduire à l'avenir.

Erwägungen

Extrait des considérants:

1. a) Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 125 I 14 consid. 2a p. 16, 253 consid. 1a p. 254).
aa) Selon la jurisprudence, l'Autorité de plainte est habilitée à examiner les plaintes concernant les émissions diffusées (voir art. 58 al. 2, 60 al. 1 de la loi fédérale du 21 juin 1991 sur la radio et la télévision [LRTV; RS 784.40] et Message du Conseil fédéral du 28 septembre 1987 relatif à la LRTV, FF 1987 III 688), mais est incompétente pour traiter des litiges portant sur le droit d'accès aux médias.
En l'espèce, l'Autorité de plainte a reconnu à juste titre sa compétence, car l'objet du litige n'est pas le droit d'antenne - la SSR ayant offert au recourant de participer à l'émission incriminée -, mais bien la manière dont ladite émission a été aménagée quant aux conditions et au temps de parole octroyés aux participants.
bb) La qualité pour recourir contre une décision de l'Autorité de plainte se détermine exclusivement selon l'art. 103 OJ et ne résulte pas simplement de la participation à la procédure devant cette autorité. Conformément à l'art. 103 lettre a OJ, le recourant doit être touché par la décision attaquée plus que la généralité des administrés et le rapport qu'il a avec l'objet du litige doit être particulier et digne d'être pris en considération; le recourant doit avoir un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (ATF 123 II 115 consid. 2a p. 117; ATF 121 II 359 consid. 1a p. 361, 454 consid. 1a p. 455; BERNARD CORBOZ, Le contrôle populaire des émissions de la radio et de la télévision, Mélanges Patry, Lausanne 1988, p. 279 ss spéc., p. 291 ss).
En l'espèce, le recourant est personnellement touché par la décision attaquée, plus qu'un quelconque téléspectateur. En effet, il a été invité à participer aux débats litigieux en raison de sa candidature à l'élection traitée par l'émission et son absence a fait l'objet d'une information en début d'émission.
Le droit de recours suppose encore, conformément à la jurisprudence relative à l'art. 103 lettre a OJ, un intérêt actuel et pratique à obtenir l'annulation de la décision attaquée, à moins que la contestation ne puisse se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues et que sa nature ne permette pas de la soumettre
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aux autorités de recours successives avant qu'elle ne perde son actualité (ATF 123 II 285 consid. 4 p. 286 ss; ATF 111 Ib 56 consid. 2b p. 59, 182 consid. 2 p. 184/185; voir aussi, pour le recours de droit public, ATF 125 II 86 consid. 5b p. 97 et ATF 124 I 231 consid. 1b p. 233).
En l'occurrence, s'il est vrai que l'émission incriminée a déjà été diffusée, la question litigieuse, à savoir la manière selon laquelle les conditions et le temps de parole des partis, soit de leurs candidats, sont déterminés, pourrait se présenter à nouveau sans que le Tribunal fédéral puisse trancher à temps, l'intervalle entre la préparation d'une émission électorale et sa diffusion étant généralement trop bref à cet effet. Il convient dès lors de renoncer en l'espèce à l'exigence de l'intérêt actuel au recours.
Le recourant a donc qualité pour déposer un recours de droit administratif contre la décision attaquée.
cc) En conséquence, les autres conditions de recevabilité du recours de droit administratif étant réalisées, le présent recours est recevable en vertu des art. 97 ss OJ, ainsi que de la règle particulière de l'art. 65 al. 2 LRTV.
b) aa) Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 125 III 209 consid. 2 p. 211; ATF 124 II 132 consid. 2a p. 137, 517 consid. 1 p. 519; ATF 122 IV 8 consid. 1b p. 11). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 121 II 473 consid. 1b p. 477; ATF 117 Ib 114 consid. 4a p. 117).
En revanche, lorsque le recours est dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ). En outre, il ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).
bb) Le Tribunal fédéral, comme l'Autorité de plainte, doit respecter le fait que l'art. 55bis al. 3 Cst. - dans le cadre des exigences de l'al. 2 - garantit l'autonomie dans la conception des programmes. Lorsqu'il s'agit de tracer la limite entre ce qui est encore permis
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dans le cadre de cette liberté de conception et ce qui contrevient à la concession, l'Autorité de plainte dispose d'une certaine marge d'appréciation, dont le Tribunal fédéral doit tenir compte (ATF 119 Ib 166 consid. 2a/bb p. 169; ATF 116 Ib 37 consid. 2a p. 40; FRANZISKA BARBARA GROB, Die Programmautonomie von Radio und Fernsehen in der Schweiz, thèse Zurich 1994, p. 336/337; cf. aussi CORBOZ, op.cit., p. 293).
Par ailleurs, l'Autorité de plainte doit être assimilée à une autorité judiciaire depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la radio et la télévision, le 1er avril 1992 (ATF 122 II 471 consid. 2a p. 475; ATF 121 II 359 consid. 2b p. 363; ATF 119 Ib 166 consid. 2b p. 169/170), de sorte que le Tribunal fédéral est en principe lié par les faits qu'elle a retenus (MARTIN DUMERMUTH, Die Programmaufsicht bei Radio und Fernsehen in der Schweiz, 1992, no 8.4 p. 258).

2. a) Selon les art. 3 et 4 LRTV, qui concrétisent l'art. 55bis Cst., la radio et la télévision doivent dans l'ensemble contribuer à la libre formation de l'opinion des auditeurs et des téléspectateurs, leur fournir une information générale diversifiée et fidèle, pourvoir à leur formation générale et à leur divertissement, et développer leurs connaissances civiques (art. 3 al. 1 lettre a LRTV). Considérés dans leur ensemble, les programmes offerts dans une zone de diffusion ne doivent privilégier aucun parti ou groupe d'intérêts, ni aucune idéologie ou doctrine (art. 3 al. 2 LRTV). Les programmes présentent fidèlement les événements; ils reflètent équitablement la pluralité de ceux-ci ainsi que la diversité des opinions (art. 4 al. 1er LRTV); les vues personnelles et les commentaires doivent être identifiables comme tels (art. 4 al. 2 LRTV). Par ailleurs, selon l'art. 26 al. 2 LRTV, la SSR tient compte, au travers de l'ensemble de ses programmes, des particularités du pays et des besoins des cantons. Elle contribue en particulier, par une conception équilibrée des programmes, à la libre formation de l'opinion publique, notamment en adoptant une politique d'information fidèle qui accorde la priorité aux événements d'intérêt national ou aux événements relatifs à la région linguistique concernée (lettre b) (voir aussi ATF 123 II 402 consid. 2b p. 406 ss et ATF 122 II 471 consid. 4 p. 478 ss).
L'indépendance et l'autonomie de la SSR en matière de programmes est de plus régie par l'art. 5 LRTV, selon lequel:
"1 Les diffuseurs conçoivent librement leurs programmes. Ils en assument la responsabilité.
2 Sauf disposition contraire du droit fédéral, les diffuseurs ne sont liés par aucune instruction des autorités fédérales, cantonales ou communales.
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3 Nul ne peut se prévaloir de la présente loi pour exiger d'un diffuseur la diffusion d'une production ou d'une information déterminée."
b) En l'espèce, s'agissant de la participation des candidats aux émissions électorales précédant les élections au Conseil d'Etat genevois, la SSR déclare s'être fondée par analogie sur les instructions de son directeur général du 7 décembre 1994 concernant les émissions sur les élections au Conseil national de 1995 (SSR no 94.144). D'après lesdites instructions, les partis présents aux Chambres fédérales, même avec une force numérique inférieure à celle du groupe, ont le droit de participer aux émissions électorales ou d'être présentés dans ce cadre. En revanche, les partis ou mouvements non encore présents aux Chambres fédérales sont admis à participer ou peuvent être présentés dans le cadre des émissions électorales uniquement s'ils disposent d'une force numérique minimale dans un certain nombre de parlements cantonaux ou s'ils ont déposé des listes dans un certain nombre de cantons.

3. a) Le recourant soutient en premier lieu que la SSR a violé son devoir d'objectivité en ne lui accordant pas les mêmes conditions de parole, de présence et d'intervention à l'écran que celles octroyées aux autres candidats provenant des partis représentés au Grand Conseil. Or, le candidat, inconnu, d'un nouveau parti politique doit justement se faire connaître comme tel - contrairement aux élus qui ont eu la durée de leur mandat pour se manifester - et mériterait même, de ce fait, un temps d'antenne supérieur. Par ailleurs, le mode de faire adopté par la SSR est d'autant moins admissible en l'occurrence que le nombre peu élevé des candidats (quatorze) permettait un tour de table dont la durée n'aurait pas excédé les limites du temps de l'émission. Enfin, les directives de la SSR en matière d'élections fédérales ne sauraient s'appliquer aux élections cantonales.
b) aa) L'indépendance et l'autonomie de la SSR dans la conception de ses programmes ne peuvent s'exercer que dans le cadre des prescriptions étatiques (art. 55bis Cst., art. 5 LRTV). En particulier, ainsi qu'on l'a vu, la SSR a pour mandat de contribuer à la libre formation de l'opinion publique, par une information fidèle notamment (art. 26 al. 2 lettre b LRTV). Elle n'est donc pas déliée d'une responsabilité spécifique dans le processus de formation de la volonté politique, d'autant que les émissions de caractère politique ont une action certaine sur l'opinion et sont de nature à influencer les résultats des votations et élections (cf. ATF 98 Ia 73 consid. 3c p. 82;
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ETIENNE GRISEL, Initiative et référendum populaires, Berne 1997, no 261 p. 116). Savoir si et sous quelle forme les émissions politiques doivent être présentées avant les élections ou votations relève de l'appréciation du diffuseur. Toutefois, cette latitude est circonscrite non seulement par les prescriptions légales régissant le mandat d'informer le public, mais aussi par des restrictions particulières fondées sur les droits politiques du citoyen. La définition de ces secondes limites et le contrôle de leur respect incombent en dernière instance au Tribunal fédéral qui, en tant qu'autorité compétente pour connaître des recours en matière de droits politiques au sens de l'art. 85 lettre a OJ, dispose à cet égard du même pouvoir d'examen que l'Autorité de plainte.
bb) Le principe essentiel à la base d'un Etat de droit fondé sur la liberté et la démocratie est la libre expression des opinions favorables et défavorables. Ce qui caractérise la manière dont se forme la volonté populaire en démocratie, c'est notamment le fait que les groupements d'intérêts et les partis qui s'opposent les uns aux autres peuvent faire connaître sans entrave à un large public les opinions qui leur tiennent à coeur (cf. ATF 98 Ia 73 consid. 3b p. 79, 3c p. 82). Le citoyen appelé à voter ou à élire doit disposer, pour pouvoir se décider en connaissance de cause, des éléments du dossier sous leur forme la plus complète, à l'abri d'influences unilatérales (DENIS BARRELET, Droit de la communication, Berne 1998, no 786 p. 223).
cc) Le responsable d'une émission dispose d'une marge d'appréciation relativement importante dans l'aménagement de celle-ci, même lorsqu'il s'agit d'émissions traitant d'élections ou de votations en cours (cf. ATF 98 Ia 73 consid. 3c p. 82/83).
Toutefois, le diffuseur qui présente des émissions consacrées à des élections ou à des votes populaires, ou encore traitant d'un sujet en rapport avec des votes imminents, doit présenter une information fidèle et s'abstenir d'exercer une influence illicite sur la volonté populaire, par exemple en faisant état de faits inexacts et trompeurs (cf. ATF 98 Ia 73 consid. 3b p. 79 ss). En outre, il doit permettre l'expression des opinons favorables et défavorables. Toutes les mesures doivent ainsi être prises pour que les diverses opinions puissent s'exprimer à égalité, dans la même émission si c'est possible, ou dans le même genre d'émission (cf. BARRELET, loc.cit.; GABRIEL BOINAY, La contestation des émissions de la radio et de la télévision, Porrentruy 1996, no 201 p. 75; voir aussi, sur le principe du reflet équitable de la diversité des opinons, DUMERMUTH, Rundfunkrecht, in: Koller/Müller/Rhinow/Zimmerli [éd.], Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht,
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Bâle 1996, nos 91 ss p. 38 ss et GROB, op.cit., p. 172 ss).
Notamment, et surtout s'il s'agit d'une émission-débats où les sources principales d'information ne sont pas les journalistes, mais les invités, le devoir de diligence journalistique commande une prudence particulière, qui doit porter entre autres sur le choix des participants, sur la manière de poser les questions au cours de la discussion ainsi que sur les mesures à prendre pour garantir le déroulement correct de la discussion et permettre aux opinions en présence de s'exprimer librement. L'animateur doit ainsi rester objectif et assurer l'égalité des armes entre les participants à la discussion. Il doit éviter des discriminations choquantes quant au temps de parole et s'abstenir d'aborder avec certains des questions dénuées de véritable intérêt politique tout en traitant avec d'autres des thèmes beaucoup plus porteurs (BOINAY, op.cit., no 220 p. 82).
dd) En matière d'élections, le diffuseur doit de plus prendre en compte le principe selon lequel chaque candidat (et chaque parti) doit pouvoir participer à l'élection à égalité de chances (cf. ATF 124 I 55 consid. 2a p. 57; ATF 113 Ia 291 consid. 3a p. 294). Ce principe de l'égalité des chances électorales est plus exigeant que le principe général régissant la conception des programmes, selon lequel le diffuseur doit présenter une information objective reflétant équitablement la diversité des opinions (cf. art. 4 al. 1 LRTV).
Cela étant, le diffuseur n'est pas tenu de traiter les partis et candidats d'une manière absolument identique, en ignorant le degré d'intérêt présumé de la population à leur égard. En effet, de telles émissions électorales doivent non seulement assurer une égalité des chances mais, surtout, répondre aux besoins d'information du téléspectateur (ou auditeur).
Dans ces conditions, il n'apparaît pas inadmissible que des émissions électorales accordent une place plus importante aux partis ou candidats sur lesquels se concentre le débat politique, partant, les besoins effectifs d'information de la majorité des téléspectateurs (ou auditeurs), qu'à des candidats ou à des formations politiques présumés moins significatifs. Si le responsable d'une émission-débats électorale choisissait les participants ou aménageait les conditions de parole et de présence indépendamment de telles différences de fait, à savoir en traitant l'ensemble des groupements politiques d'une manière formellement semblable, cette méthode répondrait parfaitement au principe de l'égalité des chances électorales, mais ne correspondrait
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vraisemblablement pas aux besoins effectifs d'information des citoyens, alors que cette exigence est également importante. Du reste, même l'Etat peut faire dépendre, dans une certaine mesure, l'étendue d'éventuelles prestations aux partis politiques de leur succès aux élections et limiter ce soutien aux groupements qui disposent d'une importance et d'une continuité minimales (ATF 124 I 55 consid. 5c/cc p. 67/68). A fortiori, des différences de traitement fondées sur des critères similaires peuvent aussi être admises dans la conception d'émissions électorales. Du reste, le respect du principe de l'égalité des chances ne doit pas être apprécié au regard d'une émission isolée, mais de l'ensemble des programmes diffusés pendant la campagne, un déséquilibre formel créé par une émission pouvant être compensé par la diffusion d'autres émissions.
Ainsi, appelé à procéder à un contrôle abstrait des directives adoptées par la SSR le 24 janvier 1991 (SSR no 90.175a) en vue de régler les émissions relatives aux élections législatives fédérales 1991, le Tribunal fédéral a constaté qu'il était admissible d'accorder aux plus petits partis ou mouvements politiques un temps d'écoute moins grand et à des heures moins favorables que celui octroyé aux formations plus importantes (définies comme celles qui présentaient une liste dans au moins un des cantons de la région linguistique concernée et qui disposaient d'un représentant aux Chambres fédérales ou de 7% des sièges dans un Parlement cantonal). Les choix opérés par la SSR résultaient des autres obligations (divertissement, éducation, etc.) qu'elle devait poursuivre pendant la durée de la campagne, ainsi que du nombre de partis susceptibles d'y participer. S'il était certes essentiel que l'auditeur et le téléspectateur puissent prendre connaissance de la diversité des idées, il n'était toutefois pas nécessaire de donner le même espace à toutes les idées pour que leur diversité soit convenablement reflétée (ATF 119 Ib 250 consid. 3c p. 252/253; voir aussi BARRELET, op.cit., no 243 p. 69 et ATF 97 I 731).
ee) S'agissant d'élections à un exécutif cantonal, on peut se demander si le refus d'accorder au représentant d'un nouveau groupement politique les mêmes conditions de présence et de parole qu'aux candidats de partis représentés au Parlement cantonal, est conforme au principe de l'égalité des chances électorales. En effet, dans de telles élections, la personnalité des candidats joue un plus grand rôle que dans des élections législatives. L'appartenance à un parti marginal ou peu connu ne constitue pas une barrière aussi difficilement franchissable. Dans ces conditions, on ne saurait dénier d'emblée une importance politique à de tels candidats, ni faire
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dépendre leur participation à une émission électorale de leur appartenance à un parti représenté au Parlement cantonal.
En ce sens, les directives de la SSR applicables aux élections législatives fédérales ne peuvent être transposées sans autre examen sur le plan des élections aux exécutifs cantonaux. En outre, une telle application par analogie est d'autant plus délicate lorsque, comme en l'espèce, les élections cantonales exécutives se déroulent suivant le système majoritaire.
c) En l'espèce, la manière dont la SSR a limité l'accès à l'écran des représentants des formations politiques absentes du Parlement cantonal - par l'assignation d'une place dans le public et la réduction du temps de parole - est encore compatible avec le principe de l'égalité des chances électorales. Cet aménagement répondait en effet aux besoins présumés d'information du public, dès lors que le groupement que soutient le recourant avait été créé quelques mois avant les élections cantonales législatives et exécutives de l'automne 1997, tandis que les candidats siégeant sur le plateau provenaient de partis déjà représentés au Parlement cantonal, ce qui constituait un indice élevé d'un intérêt accru de la population à leur égard. Certes, le recourant a finalement obtenu 8.75% des voix lors des élections exécutives qui ont suivi le 16 novembre 1997, score qui aurait éventuellement pu justifier une participation plus substantielle à l'émission. Toutefois, l'appréciation de l'envergure politique présumée d'un candidat ou d'un parti ne peut se fonder que sur la situation existant avant les élections concernées. Or, la liste de l'Alliance des citoyens contribuables, qui comprenait encore un autre mouvement, avait recueilli seulement 4.5% des suffrages aux élections législatives précédentes du 12 octobre 1997, alors que le quorum s'élève à 7%. Ce groupement était donc numériquement faible, de sorte que la SSR était justifiée à réduire les conditions et le temps d'antenne accordés à son candidat. Peu importe à cet égard que la liste en question ait alors présenté septante-quatre candidats. Un tel chiffre révèle certes que les deux formations en cause comptent au moins autant d'adhérents mais n'établit nullement l'étendue de l'intérêt qu'elles trouveraient dans la population.
Le recours doit ainsi être rejeté sur ce point.
d) Il convient toutefois de relever que le mode de faire contesté reste discutable, comme le relève la décision attaquée elle-même. Les candidats évincés de certaines émissions électorales devraient au moins avoir droit à une compensation dans le cadre d'autres émissions électorales.
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4. En second lieu, le recourant se plaint de ce que seul un résumé de sa lettre d'explication du 24 octobre 1997 a été présenté à l'antenne. Il souligne à cet égard que le temps qui lui avait été imparti initialement aurait dû être utilisé intégralement à cet effet.
Cependant, l'exigence d'objectivité et de reflet équitable des opinions n'obligeait en rien le diffuseur à réserver un droit d'antenne au recourant en dépit du refus de celui-ci de participer à l'émission, ni à transmettre aux téléspectateurs l'intégralité du courrier en cause (art. 5 al. 3 LRTV). Il était en tout cas suffisant que l'animateur en expose la substance, pourvu que ce compte-rendu soit objectif, ce que le recourant n'a pas contesté (cf. ATF 119 Ib 166 consid. 3b p. 171, selon lequel le public doit être informé de manière appropriée de la motivation d'une personne qui refuse sa collaboration ou s'oppose à la diffusion d'une émission qui lui est consacrée).
Ce grief doit donc également être écarté. En conséquence, le recours est mal fondé et doit être rejeté.

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