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[AZA 3] 
 
4P.107/2000 
 
Ie COUR CIVILE 
**************************** 
 
1er septembre 2000 
 
Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et Corboz, 
juges. Greffier: M. Carruzzo. 
 
__________ 
 
Statuant sur le recours de droit public 
formé par 
Henri de Cambiaire, à Vésenaz, représenté par Me Bertrand Reich, avocat à Genève, 
 
contre 
l'arrêt rendu le 12 janvier 2000 par la Chambre d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève dans la cause qui oppose le recourant à AAA Capital Trust S.A., à Genève, représentée par Me Gérald Page, avocat à Genève; 
(art. 9 Cst. ; appréciation des preuves, procédure civile ge- nevoise) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- a) AAA Capital Trust S.A. (ci-après: AAA CT) est une société anonyme de droit suisse ayant son siège à Genève. 
Elle a pour but la gestion de fortune et les opérations qui s'y rapportent, notamment le commerce de titres. John Miles est son administrateur, avec signature individuelle. 
 
Le 10 décembre 1996, AAA CT a conclu avec Henri de Cambiaire un "contrat d'agent", d'une durée minimum de trois ans, par lequel elle lui a confié le soin de promouvoir tous ses services auprès des clients potentiels, moyennant rémunération sous la forme exclusive de commissions. 
 
b) En date du 16 septembre 1997, John Miles et les deux autres actionnaires d'AAA CT ont signé, avec cinq autres personnes, dont Henri de Cambiaire, un "pacte d'associés" en vue de créer un lien indissoluble entre eux, en leur qualité de membres fondateurs de la société AAA Capital Securities BVI (ci-après: AAA CS BVI). Cette société, soumise au droit des Iles Vierges Britanniques, devait recueillir des capitaux et les gérer, en recourant pour ce faire aux services d'une autre société - AAA CS Bahamas - qui mandaterait à son tour différents "traders" spécialisés dans un segment de marché et les contrôlerait. 
 
Pratiquement à la même date, soit le 15 septembre 1997, AAA CS Bahamas et AAA CT ont signé un contrat, intitulé "mandat général exclusif de représentation", par lequel la première confiait à la seconde la mission de rechercher des clients et de nouveaux actionnaires pour AAA CS BVI. AAA CT devait assumer tous les frais liés à l'exécution du mandant, y compris le paiement des salaires, et les facturer ensuite à AAA CS Bahamas avec une marge bénéficiaire. 
AAA CT et ses trois actionnaires, disposant chacun d'un certificat d'actions de 100 000 fr., ont signé, le 19 septembre 1997, une "convention de stock option" avec Henri de Cambiaire et le dénommé Riadh Abed. Il y était stipulé que ces deux personnes pourraient acquérir chacune le 20% du capital-actions d'AAA CT, pour la somme de 100 000 fr., dans un délai de douze mois. Selon l'art. 2 de ce contrat, les nouveaux actionnaires percevraient un salaire au sein d'AAA CT, lequel serait le même que celui des actionnaires actuels, soit 16 000 fr. brut par mois, sauf pour les trois premiers mois (octobre à décembre 1997) où il se monterait à 9000 fr. 
L'art. 6 de ladite convention liait celle-ci au pacte d'associés susmentionné. 
 
Le 4 décembre 1997, les trois actionnaires d'AAA CT ainsi que Riadh Abed et Henri de Cambiaire ont signé un contrat intitulé "convention d'associés", qui concrétisait la convention de stock option. Selon ce contrat, les nouveaux actionnaires disposeraient d'une signature collective à deux et auraient droit à une part des profits de la société calculée au prorata de leurs actions. Toute décision importante pouvant engager la société serait prise à l'unanimité des cinq actionnaires et, dans l'intervalle, les anciens actionnaires s'engageaient à solliciter l'avis des deux futurs actionnaires avant de prendre une telle décision. Plus généralement, les cinq associés déclaraient unir leurs efforts de marketing dans le but essentiel d'amener à la société de la clientèle pour des affaires financières. 
 
Les cinq associés ont signé le procès-verbal d'une réunion de direction d'AAA CT, du 10 février 1998, aux termes duquel John Miles faisait à la société une avance de trésorerie de 200 000 fr. en attendant qu'il soit procédé à l'augmentation du capital-actions convenue, celle-ci n'étant désormais prévue qu'à hauteur de 150 000 fr. en dérogation aux accords passés précédemment. Il était en outre prévu que le ou les souscripteurs recevraient un bonus sous forme d'augmentation de leur rémunération de 6000 fr. par mois en cas de souscription totale. 
 
Les 26 mars et 30 juin 1998, des procès-verbaux de réunions de direction, faisant état de la présence des cinq associés, ont été dressés; Henri de Cambiaire indique cependant qu'il n'a pas assisté en tout cas à la réunion du 30 juin 1998 au cours de laquelle décision avait été prise de supprimer la rémunération des associés en raison des difficultés de trésorerie qui avaient déjà conduit ceux-ci, lors de la réunion précédente, à abandonner le système de rémunération fixe au profit d'un salaire calculé en fonction des revenus d'AAA CS Bahamas. 
 
c) Henri de Cambiaire, qui était devenu le directeur d'AAA CS Bahamas, a ainsi été actif au sein de ce groupe depuis le 1er octobre 1997, étant apparemment chargé d'y développer le secteur des placements conservateurs. Selon un décompte établi par AAA CT, il a perçu, entre janvier et juin 1998, un total de 100 000 fr. 
 
Le 17 septembre 1998, Henri de Cambiaire a indiqué à la direction d'AAA CT qu'il démissionnait d'AAA CS Bahamas en raison du manque de transparence existant dans le domaine des "commodities". AAA CT a accepté cette démission et signifié à l'intéressé qu'il devait quitter ladite société. 
 
Le 6 octobre 1998, Henri de Cambiaire, par l'intermédiaire de son conseil, a réclamé le versement d'un salaire de juin à septembre 1998. 
 
Le 7 octobre 1998, John Miles a déclaré mettre fin, de manière unilatérale, aux rapports entre Henri de Cambiaire et la société. 
 
Par lettre du 8 octobre 1998, Henri de Cambiaire a formellement fait opposition au congé, tout en réitérant ses prétentions salariales et en y ajoutant celles afférentes aux mois d'octobre à décembre 1998. 
 
Le 20 octobre 1998, Henri de Cambiaire a signé un écrit, daté de la veille, aux termes duquel il admettait que les rapports de travail avaient cessé au 30 septembre 1998 et que toutes les obligations financières à son égard avaient été dûment remplies. Il a ajouté à la main la précision selon laquelle les rapports de travail en question étaient ceux qui le liaient à la société AAA CS Bahamas. Selon lui, cette lettre avait été rédigée par John Miles en personne, qui l'avait contraint à la signer contre la promesse de lui verser de l'argent. Effectivement, Henri de Cambiaire a touché, les 19 et 20 octobre 1998, respectivement, 5000 fr. et 15 000 fr. 
 
B.- Par demande du 20 octobre 1998, Henri de Cambiaire a assigné AAA CT devant la juridiction des prud'hommes genevoise en paiement de 90 000 fr., plus intérêts, à titre d'arriérés de salaire (juin à septembre 1998), de salaire durant le délai de préavis (octobre à décembre 1998) et d'indemnité pour congé abusif. Il a également réclamé la délivrance d'un certificat de travail, puis a retiré ce chef de conclusion après avoir reçu cette attestation. 
 
La défenderesse a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement, au remboursement de 23 835 fr.60, intérêts en sus, montant correspondant, selon ses dires, à des sommes prises à titre d'avances par le demandeur. Elle a réclamé, par ailleurs, la restitution de documents relatifs à sa clientèle. 
 
Par jugement du 29 juin 1999, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a condamné la défenderesse à verser au demandeur la somme brute de 63 000 fr., à titre de salaire pour la période allant de juin à décembre 1998, et la somme nette de 9000 fr., à titre d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié, le tout avec intérêts. Il a débouté les parties de toute autre conclusion. Les premiers juges ont considéré, en substance, que le demandeur avait bien été l'employé de la défenderesse, que son salaire brut s'élevait à 9000 fr. par mois et qu'il n'en avait pas accepté la suspension à partir du mois de juin 1998, sa présence à la réunion du 30 juin 1998 n'étant pas établie. Partant, l'intéressé avait droit à son salaire pour les mois de juin à septembre 1998 (36 000 fr.). Toujours selon eux, la défenderesse n'avait pas démontré l'existence de justes motifs de licenciement immédiat, de sorte qu'elle devait verser au demandeur la somme de 27 000 fr., correspondant à ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l'échéance du délai de congé (31 décembre 1998), ainsi que le montant de9000 fr. à titre d'indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO
Quant à la demande reconventionnelle, les juges prud'homaux l'ont rejetée, faute pour la défenderesse d'avoir établi que le demandeur aurait perçu des avances sur salaires et qu'il aurait emporté les fichiers-clients et d'autres documents en quittant la société. 
 
Statuant le 12 janvier 2000, sur appel de la défenderesse, la Chambre d'appel des prud'hommes a annulé le jugement de première instance, rejeté la demande et débouté les parties de toutes autres conclusions. Son arrêt repose, en résumé, sur les motifs suivants: il incombait au demandeur de démontrer l'existence d'un contrat de travail entre la défenderesse et lui-même. Les premiers juges n'ont pas examiné la nature des liens juridiques noués par le demandeur avec l'une ou l'autre des sociétés du groupe AAA. La question est particulièrement délicate en raison de la complexité de la structure mise en place par les animateurs de ces sociétés, de l'absence de contrat écrit, de l'insuffisance des témoignages recueillis et du caractère confus des explications fournies par les parties. L'existence d'un lien de subordination entre le travailleur et l'employeur est le principal élément distinctif du contrat de travail. En l'occurrence, les seules affirmations du demandeur ne suffisent pas à démontrer la réalité d'un tel lien. Fondateur d'AAA CS BVI, aux côtés d'autres personnes, président-directeur d'AAA CS Bahamas et actionnaire virtuel de la défenderesse, le demandeur était plus vraisemblablement un partenaire qu'un subalterne au sein de cette structure complexe dont il était l'un des initiateurs. 
Preuve en est, d'ailleurs, le fait qu'il percevait, au même titre que les actionnaires de la défenderesse, une rémunération identique à la leur, qui était liée aux résultats financiers enregistrés par le groupe. Le demandeur n'a du reste pas été licencié, contrairement à ce qu'il soutient, mais il a décidé de quitter le groupe, précisément en raison d'une divergence d'optique avec ses partenaires quant à la politique d'investissements conduite par l'entreprise. Les courriers subséquents, émanant de John Miles, et faisant état d'un licenciement, ne sont pas déterminants à cet égard, car ils sont essentiellement le reflet des prétentions salariales élevées par le demandeur. Au demeurant, l'instruction de la cause n'a pas permis d'établir l'existence d'un cahier des charges, ni même quelle activité l'intéressé avait effectivement exercée. Il n'est pas non plus établi que le demandeur se serait vu imposer des horaires déterminés ou accorder un droit à des vacances. Ses activités pourraient fort bien avoir été accomplies au titre d'un apport en industrie effectué en sa qualité de partenaire et de futur associé ou, plus généralement, dans le cadre d'une relation de mandat. Dans ces conditions, la déclaration faite par la défenderesse auprès de l'AVS, faisant apparaître le demandeur comme un employé, subsiste comme un indice unique et insuffisant pour démontrer l'existence d'un contrat de travail. 
 
C.- Parallèlement à un recours en réforme, le demandeur a déposé un recours de droit public pour violation de l'art. 9 Cst. En plus de l'annulation de l'arrêt rendu par la Chambre d'appel, il requiert, à titre principal, la confirmation du jugement de première instance et, subsidiairement, la constatation que les parties étaient liées par un contrat de travail ainsi que le renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle décision. 
 
L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours, voire au rejet de celui-ci et à la confirmation de l'arrêt attaqué. 
 
Dans ses observations, la Chambre d'appel concède au recourant que le dispositif de son arrêt aurait dû indiquer qu'elle se déclarait incompétente. Elle y voit une inadvertance et déclare persister, pour le surplus, dans la motivation de sa décision. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Sous réserve d'exceptions dont les conditions ne sont pas réalisées en l'espèce, le recours de droit public ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée (ATF 124 I 327 consid. 4a et les références). Les conclusions du recourant sont donc irrecevables dans la mesure où elles visent à la confirmation du jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes ou à la constatation de la nature juridique du rapport de droit ayant lié les parties et au renvoi subséquent de la cause à la Chambre d'appel. Pour la même raison, la conclusion de l'intimée tendant à la confirmation de l'arrêt entrepris est, elle aussi, irrecevable. 
 
2.- a) Lorsqu'il statue sur un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés (ATF 122 I 70 consid. 1c, 121 IV 317 consid. 3b). 
 
Selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit contenir un exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation alléguée (ATF 117 Ia 393 consid. 3). Le Tribunal fédéral, saisi d'un recours de droit public, ne doit ainsi examiner que les griefs exposés de manière claire et détaillée (ATF 115 Ia 183 consid. 3 et les arrêts cités). S'il invoque une violation de l'art. 9 Cst. , le recourant ne peut se contenter de prétendre que la décision entreprise est arbitraire. Il lui faut démontrer que la décision attaquée est manifestement insoutenable, qu'elle est en contradiction flagrante avec la situation de fait ou viole gravement un principe de droit incontesté ou encore contredit de manière choquante le sentiment de la justice (ATF 116 II 21 consid. 5, 114 Ia 25 consid. 3b, 216 consid. 2a, 111 Ia 17 consid. 2 et les arrêts cités). Une critique de nature purement appellatoire est irrecevable (ATF 107 Ia 186). S'il s'en prend à l'appréciation des preuves, le recourant doit démontrer que le juge cantonal a abusé du large pouvoir qui lui est reconnu dans ce domaine (ATF 112 Ia 371 consid. 3), en parvenant à des conclusions manifestement insoutenables (ATF 101 Ia 306 consid. 5, 100 Ia 468, 98 Ia 142 consid. 3a et les arrêts cités). 
 
 
b) En l'espèce, le recours ne satisfait nullement à ces exigences en tant qu'il s'en prend à l'état de fait de l'arrêt cantonal. Son auteur se contente, en effet, "par souci de clarté", de soumettre au Tribunal fédéral sa propre version des faits, sous la forme de 26 allégués, comme s'il plaidait devant une juridiction d'appel, sans tenter de démontrer ce qu'il pourrait y avoir d'arbitraire dans celle qui a été retenue par l'autorité intimée. Est également trop vague, au regard des exigences rappelées plus haut, l'affirmation du recourant selon laquelle l'autorité intimée aurait écarté sans aucune motivation les témoignages recueillis sous la foi du serment, qui confirmaient son statut de salarié. 
Dans cette mesure, le présent recours est irrecevable. 
 
3.- Le recourant fait principalement grief à la cour cantonale d'avoir refusé arbitrairement d'appliquer l'art. 319 CO alors que tous les éléments de fait dont elle disposait auraient dû, selon lui, la conduire à admettre l'existence d'un contrat de travail. 
 
En argumentant ainsi, le recourant invoque la violation du droit fédéral dans une contestation civile portant sur une valeur qui dépasse le seuil de 8000 fr. fixé à l'art. 46 OJ. Il dispose donc de la voie du recours en réforme pour faire sanctionner par le Tribunal fédéral la violation alléguée (art. 43 al. 1 OJ). Son recours de droit public est, dès lors, irrecevable sur ce point en raison du caractère subsidiaire de ce moyen de droit (art. 84 al. 2 OJ). Il en va de même, par identité de motif, du grief tiré de la violation de l'art. 320 al. 2 CO
 
 
4.- La Chambre d'appel se voit, en outre, reprocher d'avoir méconnu l'art. 189 de la loi de procédure civile genevoise en ne retenant pas l'aveu judiciaire fait par l'intimée quant au statut de salarié du recourant. 
 
Le moyen ne résiste pas à l'examen. Il est unanimement admis que l'aveu ne peut porter que sur un fait (Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi de procédure civile du canton de Genève du 10 avril 1987, vol, II, n. 1 ad art. 187). Or, qualifier un rapport juridique sur la base des éléments de preuve recueillis en procédure et des constatations de fait qui en ont été tirées est une question de droit qu'il appartient au juge de trancher librement, en vertu du principe "jura novit curia", quel que soit le point de vue exprimé par les parties à ce sujet. Que l'intimée ait fondé ses conclusions libératoires et reconventionnelles sur les dispositions relatives au contrat de travail en première instance ne s'opposait, dès lors, pas à ce que la juridiction d'appel qualifiât elle-même le rapport de droit en cause sur la base des faits retenus par elle, d'autant moins que l'art. 18 al. 1 CO lui commandait de ne pas s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont les parties avaient pu se servir. 
 
 
5.- A suivre le recourant, la Chambre d'appel aurait encore méconnu l'art. 38 al. 1 (depuis le 1er mars 2000: 
art. 29) de la loi genevoise sur la juridiction des prud'hommes du 21 juin 1990 (aLJP), applicable en vertu du renvoi de l'art. 65 aLJP (depuis le 1er mars 2000: art. 66), qui lui prescrivait d'établir d'office les faits, en considérant qu'il incombait au recourant "de démontrer l'existence d'un contrat de travail entre lui-même et AAA CT". Il n'en est rien. 
 
L'opinion émise par la cour cantonale est conforme à la jurisprudence fédérale concernant la répartition du fardeau de la preuve en la matière (ATF 125 III 78 consid. 3b et les références). Pour le surplus, le recourant n'indique pas quelle est l'étendue de la maxime d'office instituée par l'art. 38 al. 1 aLJP et il ne prétend pas que celle-ci irait au-delà de la maxime d'office à laquelle le droit fédéral soumet les contestations relevant du contrat de travail dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 20 000 fr. (art. 343 al. 4 CO). Or, selon la jurisprudence relative à cette dernière disposition, l'obligation pour le juge d'établir d'office les faits ne dispense pas les parties d'une collaboration active à la procédure (ATF 107 II 233 consid. 2c p. 236). Aussi le grief, fait à la Chambre d'appel, de n'avoir pas suffisamment instruit la cause ne pourrait qu'être rejeté, si sa recevabilité n'était pas déjà sujette à caution. 
6.- Pour le recourant, si certains aspects du dossier n'ont pas été éclaircis, en particulier les relations entre les différentes sociétés du groupe AAA, c'est qu'ils n'étaient pas pertinents aux yeux des parties, lesquelles n'avaient aucune raison de s'attendre à ce que la Chambre d'appel les prît en considération. Ainsi, le droit du recourant d'être traité conformément aux règles de la bonne foi (art. 9 Cst.) aurait été violé en l'espèce. En effet, à l'en croire, l'intéressé n'aurait pas manqué d'interroger ses témoins sur ce point, voire d'en citer d'autres, s'il avait pu se douter un seul instant qu'il lui incombait d'expliquer les différents liens noués par l'intimée avec ses sociétés apparentées. 
 
 
Le moyen n'est pas pertinent. Il appartenait au recourant d'établir les éléments de fait permettant aux juridictions saisies de conclure, en droit, à l'existence d'un contrat de travail. Cela supposait, en l'espèce, que la lumière fût faite sur la structure complexe du groupe de sociétés au sein duquel il avait oeuvré dans la mesure où sa position juridique à l'égard de l'une de ces sociétés - la défenderesse - ne pouvait pas être appréciée correctement en faisant abstraction d'un tel contexte. Au reste, l'intimée avait contesté, en première instance déjà, sa légitimation passive en tirant argument de l'organisation mise en place au sein du groupe AAA et des tâches dévolues aux différentes sociétés qui en faisaient partie. Par conséquent, le recourant ne saurait venir prétendre aujourd'hui qu'il ne pouvait se rendre compte à l'époque de l'importance qu'était susceptible de revêtir cette question pour le sort du litige. 
 
7.- a) Dans un dernier moyen, le recourant fait grief à la Chambre d'appel de l'avoir débouté sur le fond, alors que, selon l'art. 49 al. 3 aLJP applicable par renvoi de l'art. 65 aLJP, elle aurait dû se déclarer d'office incompétente. 
Il y voit une violation arbitraire de la première de ces deux dispositions. 
 
L'intimée souligne, à cet égard, que l'arrêt attaqué n'empêche pas le recourant de faire valoir ses droits devant la juridiction civile ordinaire, étant donné que la Chambre d'appel n'a statué que sur l'existence d'un contrat de travail, et non pas sur "le bien-fondé de manière générales" des prétentions du recourant. Pour cette raison, elle met aussi en doute le caractère final de l'arrêt cantonal et nie de surcroît que cette décision puisse causer au recourant un dommage irréparable. 
 
Pour sa part, la Chambre d'appel admet, dans ses observations, qu'elle aurait dû se déclarer incompétente dans le dispositif de son arrêt, sur le vu des motifs retenus par elle, et qu'elle a donc commis une inadvertance en déboutant le demandeur de toutes ses conclusions. 
 
b) Constitue une décision finale, au sens de l'art. 87 OJ, celle qui met un point final à la procédure, qu'il s'agisse d'une décision sur le fond ou d'une décision qui clôt l'affaire pour un motif tiré des règles de la procédure (ATF 123 I 325 consid. 3b p. 327 consid. 3b et les arrêts cités). L'arrêt attaqué met un point final à la procédure introduite par le recourant devant la juridiction des prud'hommes; il ne permet pas à l'intéressé de soumettre derechef la même prétention à cette juridiction et revêt donc le caractère d'une décision finale, au sens de l'art. 87 OJ. Contrairement à ce que soutient l'intimée, une telle décision peut ainsi faire l'objet d'un recours de droit public. Il n'en irait d'ailleurs pas autrement s'il fallait y voir une décision incidente sur la compétence (cf. art. 87 al. 1 OJ). 
 
 
Aux termes de l'art. 49 al. 3 aLJP, applicable en instance d'appel en vertu de l'art. 65 de la même loi, en cas d'incompétence à raison de la litispendance ou de la matière, le tribunal doit se déclarer d'office incompétent. La compétence du tribunal saisi étant une condition de recevabilité de la demande, la Chambre d'appel, après avoir exclu l'existence d'un contrat de travail, aurait dû déclarer irrecevable la demande formée devant elle par le recourant au lieu de débouter ce dernier de toutes ses conclusions, autrement dit de rejeter l'action introduite par lui. Elle est d'ailleurs la première à reconnaître son erreur sur ce point. Cela étant, le recourant - il ne prétend pas que la Chambre d'appel aurait dû transmettre d'office le dossier à la juridiction ordinaire, sans interruption de la litispendance - ne subit aucun préjudice du fait que sa demande a été rejetée plutôt que déclarée irrecevable. En effet, ce rejet formel ne l'empêche pas de porter ses prétentions devant la juridiction civile ordinaire - en l'occurrence, le Tribunal de première instance du canton de Genève - en les fondant sur un autre titre juridique que le contrat de travail. Aussi bien, il ressort clairement des motifs de l'arrêt cantonal que la Chambre d'appel n'a examiné la cause que sous l'angle du contrat de travail, conformément aux limites assignées à son pouvoir de cognition par la législation genevoise, et qu'elle a expressément réservé une autre qualification du rapport de droit litigieux (société simple ou mandat). En pareille hypothèse, le recourant ne saurait se voir opposer l'exception de chose jugée s'il ouvrait une nouvelle action devant la juridiction civile ordinaire en invoquant des dispositions autres que celles relatives au contrat de travail (Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 202, ad note 48 et note 48), nonobstant la jurisprudence voulant que la seule modification du fondement juridique de l'action ne suffise en principe pas à changer l'objet du litige (arrêt non publié du 1er mai 1997, dans la cause 4C.384/1995, consid. 2e). L'intimée en convient du reste elle-même, qui suggère au recourant de saisir les tribunaux ordinaires; et si, d'aventure, elle venait à soulever l'exception de chose jugée devant ceux-ci, elle agirait contrairement aux règles de la bonne foi. 
 
Sur ce point, le recours de droit public est, dès lors, irrecevable puisque son auteur n'a pas un intérêt juridiquement protégé à la seule modification de la formulation du dispositif de l'arrêt cantonal et qu'il n'est donc pas lésé au sens de l'art. 88 OJ
 
8.- La valeur litigieuse dépasse 20 000 fr. Dès lors, la présente procédure ne serait pas gratuite (art. 343 al. 3 CO a contrario), à supposer que l'on puisse la traiter comme une contestation résultant du contrat de travail (dans ce sens, cf. l'arrêt non publié du 22 mars 1999, dans la cause 4P.18/1999, consid. 2c). En conséquence, le recourant, qui succombe, devra payer l'émolument judiciaire (art. 156 al. 1 OJ). Quant à l'intimée, elle a droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable; 
 
2. Met un émolument judiciaire de 3000 fr. à la charge du recourant; 
 
3. Dit que le recourant versera à l'intimée une indemnité de 4000 fr. à titre de dépens; 
 
4. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Chambre d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève (Cause n° C/27278/98-9). 
 
__________ 
Lausanne, le 1er septembre 2000 ECH 
 
Au nom de la Ie Cour civile 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,