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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
2C_46/2011 
{T 0/2} 
 
Arrêt du 7 juin 2011 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Zünd, Président, 
Aubry Girardin et Donzallaz. 
Greffier: M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________ Architecture SA, 
2. B.________ d'ingénieurs, comprenant 
C.________ et associés SA et D.________ et associés SA, 
3. E.________ Engineering SA, 
tous trois représentés par Me Denis Merz, avocat, 
recourants, 
 
contre 
 
armasuisse Immobilier, 
représentée par Me Benoît Bovay, avocat, 
intimée, 
 
G.________, 
H.________ AG, 
I.________, 
J.________ AG, 
tous formant le groupement lauréat, 
 
Objet 
Marchés publics, concours de projets Payerne base aérienne, nouveau complexe des opérations et tour de contrôle, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour II, du 15 décembre 2010. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 23 mars 2010, armasuisse Immobilier (ci-après : le pouvoir adjudicateur) a publié dans le Système d'information sur les marchés publics en Suisse (simap.ch) un appel d'offres, lancé selon une procédure ouverte, pour un concours de projets relatif à un marché de services d'architecture et d'ingénierie intitulé "Payerne - Base aérienne / nouveau complexe des opérations et tour de contrôle". 
 
Dans le délai de clôture pour le dépôt des projets, fixé au 30 juillet 2010, dix-neuf projets ont été déposés. Parmi ceux-ci figurait le projet "X.________" du groupement formé des sociétés A.________ Architecture SA, B.________ Ingénieurs, comprenant C.________ et associés SA + D.________ et associés SA et E.________ Engineering SA (ci-après: le soumissionnaire évincé). 
 
Dans son rapport final de septembre 2010, le jury a accordé cinq prix et deux mentions, le premier prix étant décerné au projet "X.________". Les mentions ont été accordées à deux projets, écartés de la répartition des prix, au motif qu'ils dérogeaient à la règle de "plafond constructible", mais néanmoins admis au jugement. La première mention a été décernée au projet "Y.________" présenté par le groupement de mandataires formé de G.________, H.________ AG, I.________ et J.________ AG (ci-après : l'adjudicataire). 
 
Au classement final, le projet "Y.________" a obtenu le premier rang et le projet "X.________" le deuxième rang. Enfin, le jury a recommandé, à l'unanimité, au pouvoir adjudicateur de poursuivre les études et la réalisation avec les auteurs du projet "Y.________". 
 
B. 
Par décision du 5 octobre 2010, le pouvoir adjudicateur a suivi la recommandation du jury et adjugé le marché aux auteurs du projet classé au premier rang, "Y.________". 
 
C. 
Par écritures du 14 octobre 2010, mises à la poste le même jour, le soumissionnaire évincé a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral à qui il a demandé de réformer la décision du 5 octobre 2010, dans le sens où le projet de l'adjudicataire est écarté et le premier rang lui est attribué. Le recours était assorti d'une requête d'octroi de l'effet suspensif. A l'appui de ses conclusions, le soumissionnaire évincé a fait valoir en substance que le projet de l'adjudicataire aurait dû être écarté d'entrée de cause, dès lors qu'il violait les règles impératives relatives à la hauteur des bâtiments situés à proximité de la piste, fixées au ch. 3.5 du programme du concours. 
 
D. 
Par arrêt du 15 décembre 2010, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours déposé par le soumissionnaire évincé. Il a jugé en substance qu'il s'agissait d'un marché de service initié par l'administration fédérale portant sur un concours de projet d'architecture et d'ingénierie d'une valeur de 250'000 fr. fondé sur le règlement SIA-142/2009, qui entrait dans le champ d'application de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics (LMP, RS 172.056.1). Le projet de l'adjudicataire dérogeait à la règle de sécurité dite du "plafond constructible" aux abords d'un aéroport contenue au ch. 3.5 du programme du concours. Cette règle n'étant pas qualifiée d'impérative par le programme du concours, le jury y avait suppléé considérant qu'il s'agissait bien d'une règle matérielle essentielle, dont la violation avait pour conséquence d'exclure la proposition dérogatoire de l'adjudicataire de la répartition des prix. Bien qu'en principe, seuls les projets conformes au programme pouvaient figurer au classement selon l'art. 21.2 SIA-142/2009, l'art. 22.3 SIA-142/2009, en lien avec l'art. 52 al. 2 de l'ordonnance du 11 décembre 1995 sur les marchés publics (OMP; RS 172.056.11), autorisait le jury à classer des travaux de concours mentionnés et, si l'un d'eux se trouvait au premier rang, il pouvait être recommandé pour une poursuite du travail, pour autant, condition réalisée en l'espèce, que cette possibilité ait été expressément notifiée dans le programme du concours (ch. 2.3 du règlement) et que la décision du jury soit prise au moins à la majorité des trois quarts des voix et avec l'accord explicite de tous les membres du jury qui représentent le maître de l'ouvrage. Le jury avait en l'espèce recommandé le projet de l'adjudicataire à l'unanimité, conformément aux exigences de l'art. 52 al. 2 OMP, et non pas seulement à la majorité des 2/3 du jury comme prévu par le règlement du concours, ce qui était conforme au droit fédéral. 
 
E. 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, le soumissionnaire évincé demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt rendu le 15 décembre 2010 en ce sens que le projet "Y.________" présenté par le groupement de mandataires formé de G.________, H.________ AG, I.________ et J.________ AG soit éliminé, le classement final des projets étant modifié en conséquence. 
 
Le pouvoir adjudicateur et G.________, agissant sans l'aide d'un mandataire professionnel, concluent, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. G.________, H.________ AG, I.________ et J.________ AG, bien qu'invitées séparément à se prononcer, n'ont pas déposé d'observations sur le recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle donc librement la recevabilité des recours qui sont déposés devant lui (ATF 136 II 470 consid. 1 p. 472). 
 
1.2 La cause relève du droit des marchés publics (art. 82 let. a et 83 let. f LTF) et l'arrêt attaqué émane du Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF). Il peut donc, en principe, faire l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, à condition qu'il ne tombe pas sous le coup de l'une des exceptions prévues à l'art. 83 LTF. En vertu de l'art. 113 LTF a contrario, le recours constitutionnel subsidiaire n'est pas ouvert contre un arrêt du Tribunal administratif fédéral. 
 
2. 
2.1 Selon l'art. 83 let. f LTF, le recours en matière de droit public n'est recevable contre les décisions en matière de marchés publics qu'à la double condition que la valeur estimée du mandat à attribuer soit supérieure ou égale aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics et que la décision attaquée soulève une question juridique de principe (ATF 135 II 49; 134 II 192 consid. 1.2 p. 194 s.; ATF 133 II 396 consid. 2.1 p. 398). 
 
L'existence d'une question juridique de principe s'apprécie en fonction du contenu de l'objet litigieux soumis au Tribunal fédéral et doit n'être admise que de manière restrictive. Ainsi, lorsque le point soulevé ne concerne que l'application de principes jurisprudentiels à un cas particulier, il ne peut être qualifié de question juridique de principe. La seule circonstance que la question n'ait encore jamais été tranchée ne suffit pas non plus à réaliser cette condition. Il faut encore qu'il s'agisse d'une question juridique dont l'importance pratique est telle qu'elle nécessite d'être éclaircie par la plus haute instance judiciaire. A l'inverse, il peut arriver qu'une question déjà résolue par le Tribunal fédéral revête néanmoins la qualité d'une question juridique de principe. Tel est notamment le cas si la jurisprudence rendue sur le sujet n'est pas claire, n'est pas constante ou qu'elle suscite d'importantes critiques dans la doctrine (cf. ATF 135 II 49; 134 III 354 consid. 1.3 p. 357 et les nombreuses références citées). 
 
Il incombe à la partie recourante, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer la réalisation de ces deux conditions cumulatives (art. 42 al. 2 LTF; cf. ATF 133 II 396 consid. 2.2 p. 398 s.). 
 
2.2 En l'espèce, la valeur estimée (250'000 fr. selon les constatations de l'instance précédente; art. 105 al. 1 LTF) du mandat à attribuer est supérieure à 230'000 fr. (cf. art. 1 let. b de l'ordonnance du DFE du 11 juin 2010 sur l'adaptation des valeurs seuils des marchés publics pour le deuxième semestre de l'année 2010 et l'année 2011; RS 172.056.12), de sorte que la recevabilité du recours en matière de droit public dépend à ce stade de l'existence d'une question juridique de principe. 
 
2.3 Selon les recourants, "la question juridique de principe qu'il y a lieu d'aborder est celle de savoir si une procédure fondée sur la LMP, visant à l'adjudication d'un mandat, peut aboutir à l'adjudication d'un tel mandat à un participant dont le projet viole une règle matérielle essentielle importante instaurée par le pouvoir adjudicateur, dont le non-respect en matière constructive [recte: de construction] constituerait manifestement une faute professionnelle". En d'autres termes, les recourants demandent que soit contrôlée la conformité de l'art. 52 al. 2 OMP au droit supérieur, lorsque, comme en l'espèce, le règlement du concours prévoit que le mandat d'étude et de réalisation est ensuite confié à l'auteur du projet recommandé par le jury, mais écarté de la répartition des prix pour avoir enfreint les prescriptions du programme. La question de savoir s'il s'agit bien d'une question juridique de principe peut demeurer indécise en l'espèce, au vu de ce qui suit. 
 
3. 
Aux termes de l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant. L'acte de recours doit donc, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation (ATF 136 I 229 consid. 4.1 p. 235). Le Tribunal fédéral n'a pas à vérifier de lui-même si l'acte entrepris est en tous points conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans le mémoire de recours. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 136 II 304 consid. 2.5 p. 314). 
 
4. 
En vertu de l'art. 190 Cst., le Tribunal fédéral est tenu d'appliquer les lois fédérales et le droit international. Cette disposition l'autorise à examiner la constitutionnalité des lois fédérales et du droit international. Elle lui interdit en revanche de refuser d'appliquer les lois fédérales (ATF 136 II 120 consid. 3.5.1 p. 130; 131 II 562 consid. 3 p. 565 s.) et, par voie de conséquence, les normes de délégation qu'elles contiennent. Lorsqu'il se prononce sur une ordonnance du Conseil fédéral fondée sur une délégation législative, le Tribunal fédéral ne peut pas contrôler si la délégation elle-même est admissible, mais doit se contenter d'examiner si le Conseil fédéral reste dans les limites des pouvoirs conférés par la loi. Il lui incombe d'examiner si le but fixé dans la loi peut être atteint et si le Conseil fédéral a usé de son pouvoir conformément au principe de la proportionnalité (ATF 122 II 411 consid. 3b 416 s.; 118 Ib 367 consid. 4 p. 372 et les arrêts cités). En outre, lorsque, comme en l'espèce (13 al. 3 LMP, cf. ci-dessous consid. 5), la délégation accorde au Conseil fédéral un très large pouvoir d'appréciation pour réglementer la matière, le Tribunal fédéral n'est pas habilité à substituer sa propre appréciation à celle du Conseil fédéral. Il se limite à contrôler si l'ordonnance s'écarte manifestement des limites fixées par la loi ou s'avère pour d'autres motifs contraire à la Constitution (cf. ATF 131 II 562 consid. 3 p. 565 s.; 124 II 581 consid. 2a p. 583; 121 II 465 consid. 2a p. 467; 120 Ib 97 consid. 3a p. 102; 118 Ib 367 consid. 4 p. 372 et les références citées). 
 
5. 
5.1 Sous le titre "Types de procédures et choix de la procédure", l'art. 13 al. 3 LMP prévoit que le Conseil fédéral règle le concours de projets et le concours portant sur les études et la réalisation. Le Conseil 
fédéral a fait usage de cette délégation en édictant les art. 40 à 57 OMP. 
 
D'après l'art. 40 OMP, les concours de projets et les concours portant sur les études et la réalisation permettent à l'adjudicateur d'évaluer diverses solutions, notamment sous l'angle conceptuel, structurel, écologique, économique ou technique. L'art. 42 OMP distingue les "con-cours de projets" ("Planungswettbewerbe"), comme celui qui est en cause en l'espèce, des "concours portant sur les études et la réalisation" ("Gesamtleistungswettbewerbe"). 
 
L'art. 52 OMP exige du jury qu'il établisse un classement des projets conformes aux conditions formelles (al. 1). D'après l'art. 52 al. 2 let. a et b OMP (en version française et italienne), dans le cas des "con-cours portant sur les études et la réalisation" (la version allemande qui utilise la notion de "Planungswettbewerbe" de l'art. 42 al. 1 OMP, soit de concours de projet, et non pas celle de "Gesamtleistungs-wettbewerbe" de l'art. 42 al. 2 OMP diverge sur ce point des versions française et italienne), le jury peut également classer des projets différant sur des points essentiels des dispositions du programme s'il en décide ainsi à l'unanimité et si cette possibilité est mentionnée expressément dans le programme du concours. En revanche, il ne peut attribuer des prix que pour des projets conformes au programme (art. 52 al. 3 OMP). Les prix ne peuvent pas consister en marchés ou en indemnités au sens de l'art. 55 (art. 52 al. 4 OMP). Selon l'art. 53 OMP, l'adjudicateur est en principe tenu de suivre la recommandation du jury au sens de l'art. 51 al. 2. Il peut toutefois se libérer à titre exceptionnel de cette obligation moyennant le versement d'une indemnité au sens de l'art. 55 al. 2 OMP, et le lancement d'une nouvelle procédure. 
 
5.2 L'art. 13 al. 3 LMP conférant une très grande liberté au Conseil fédéral pour réglementer les concours, il appartenait en l'espèce aux recourants de démontrer en quoi l'ordonnance sur les marchés publics s'écarte manifestement de la loi sur les marchés publics, ce qui revient à la démonstration de l'arbitraire, ou en quoi la réglementation qu'elle contient violerait pour d'autres motifs le droit supérieur, notamment la Constitution fédérale. Or, sur ce point, le recours n'expose pas précisément quelles garanties constitutionnelles ou éventuellement conventionnelles sont invoquées ni concrètement en quoi, le cas échéant, le Tribunal administratif fédéral les aurait violées: il ne précise notamment pas en quoi les dispositions de l'art. 52 OMP, qui, selon le Tribunal administratif fédéral, permet au jury de déclarer lauréat d'un concours un projet enfreignant le programme à la double condition, réalisée en l'espèce, d'unanimité des voix et de mention expresse dans le règlement du concours, serait contraire au droit constitutionnel ou éventuellement conventionnel. 
 
Ne répondant pas aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, le recours est irrecevable. 
 
6. 
Succombant, les recourants doivent supporter un émolument judiciaire, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 4 LTF). Ils n'ont pas droit à des dépens. Le pouvoir adjudicateur, armasuisse Immobilier, qui obtient gain de cause dans l'exercice de ses attributions officielles, n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). G.________ ayant gain de cause sans l'aide d'un mandataire professionnel n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours en matière de droit public est irrecevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, de armasuisse Immobilier, ainsi qu'à G.________, H.________ AG, I.________, J.________ AG et au Tribunal administratif fédéral, Cour II. 
 
Lausanne, le 7 juin 2011 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Zünd Dubey