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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1C_268/2015  
   
   
 
 
 
Arrêt du 9 février 2016  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, 
Karlen et Chaix. 
Greffier : M. Alvarez. 
 
Participants à la procédure 
 A.________ SA, 
recourante, 
 
contre  
 
Commune de Bagnes, Administration communale, route de Clouchèvre 30, 1934 Le Châble, 
Conseil d'Etat du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion. 
 
Objet 
refus d'autoriser la construction d'une halle de stockage hors zone à bâtir, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 17 avril 2015. 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________ SA exploite une menuiserie à la route X.________ dans la commune de Bagnes; cette exploitation est sise en zone artisanale. 
Le bois nécessaire à l'activité de cette entreprise est entreposé - depuis plus de vingt ans, aux dires des organes de la société - sur la parcelle n° 16098, située à 170 m à vol d'oiseau de la menuiserie. Ce bien-fonds, classé en zone agricole, est propriété de B.________, président de A.________ S.A. 
Le 9 juin 2011, la Commission cantonale des constructions (ci-après: la CCC) a ordonné la remise en état des lieux, décision contestée par A.________ SA; cette procédure est pendante devant le Conseil d'Etat du canton du Valais. 
 
B.   
Parallèlement à cette première procédure, A.________ SA a requis l'autorisation de construire sur la parcelle concernée une halle de stockage. Ce projet, mis à l'enquête publique par publication officielle du 3 juin 2011, a suscité deux oppositions de propriétaires voisins. La Commune de Bagnes a en revanche préavisé favorablement le projet. Quant au Service du développement territorial (SDT), consulté en cours d'instruction, il a émis un préavis négatif, considérant que la halle projetée n'était pas imposée par sa destination en zone agricole, d'une part, et que celle-ci pouvait, d'autre part, être construite dans l'une des zones adéquates sises à proximité. 
Par décision du 23 janvier 2014, la CCC a refusé de délivrer le permis de construire requis au motif que les conditions justifiant l'octroi d'une dérogation hors de la zone à bâtir n'étaient pas réalisées. Sur recours, sans procéder à l'inspection locale requise par la société intéressée, le Conseil d'Etat a confirmé cette décision, le 13 août 2014. 
Par arrêt du 17 avril 2015, la Cour de droit public du Tribunal cantonal du Valais a confirmé cette décision. La cour cantonale a en substance considéré que la construction de la halle projetée sur la parcelle n° 16098, hors de la zone à bâtir, n'était pas imposée par sa destination; elle a par ailleurs estimé que ce projet heurtait l'intérêt public important poursuivi par l'interdiction - de principe - de construire hors de la zone à bâtir. Le Tribunal cantonal a enfin refusé de faire droit à la requête d'inspection locale de la société intéressée, jugeant que l'impossibilité de stocker le bois à proximité de l'atelier ou ailleurs sur le territoire communal, alléguée par celle-ci, était sans influence sur le sort de la cause. 
 
C.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ SA demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt attaqué et qu'en conséquence l'autorisation requise lui soit délivrée. 
Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer. Le Conseil d'Etat se rallie aux considérants de l'arrêt entrepris. La CCC a signalé, par l'intermédiaire du Conseil d'Etat, renoncer à présenter des observations. Se référant à ses déterminations cantonales, la Commune de Bagnes conclut à l'admission du recours. Egalement appelé à se déterminer, l'Office fédéral du développement territorial ARE en demande le rejet. Aux termes d'une ultime écriture, la société recourante a maintenu ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La recourante a pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. En tant que destinataire du refus du permis de construire requis, elle peut se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué. Elle a dès lors qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité sont par ailleurs réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond. 
 
2.   
A titre préalable, la recourante requiert l'édition de l'entier du dossier du Tribunal cantonal. Sa requête est satisfaite, l'instance précédente ayant déposé le dossier cantonal complet dans le délai imparti par la Cour de céans (cf. art. 102 al. 2 LTF). 
 
3.  
 
3.1. Sur le plan formel, invoquant les art. 9 et 29 al. 2 Cst., la recourante se plaint d'une constatation inexacte des faits et d'une violation de son droit d'être entendue. Elle prétend qu'il aurait été nécessaire que le Tribunal cantonal procède à l'inspection locale requise formellement et constate, à cette occasion, qu'il n'existe aucune autre possibilité de stocker le bois nécessaire à l'activité de la menuiserie qu'un entreposage sur la parcelle n° 16098.  
 
3.1.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Quant au droit pour le justiciable de proposer et de fournir des preuves, qui découle du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst, il est également circonscrit aux faits susceptibles d'influencer la décision à intervenir (cf. ATF 141 V 557 consid. 3.1 p. 564; 135 I 279 consid. 2.3 p. 282).  
 
3.2. La recourante estime que c'est à tort que le Tribunal cantonal aurait déduit de l'existence d'une zone artisanale comportant des terrains non bâtis, située à l'ouest de l'atelier, la possibilité d'y implanter la halle projetée, plutôt que d'envisager celle-ci hors de la zone constructible. Selon la recourante, ces parcelles ne répondraient pas aux besoins de son entreprise, tout particulièrement s'agissant de leur accès - impraticable pour ses camions de transport -, ce que l'instance précédente aurait aisément pu constater en procédant à l'inspection locale sollicitée. La recourante soutient qu'en raison de cette impossibilité la construction de la halle - nécessaire, selon elle, à son exploitation -, sur la parcelle agricole n° 16098, répondrait aux conditions dérogatoires de l'art. 24 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT; RS 700).  
On ne saurait suivre la recourante dans cette voie: le Tribunal cantonal n'a en effet pas - contrairement à ce qu'elle affirme - tenu compte des parcelles voisines artisanales libres de constructions pour fonder sa décision, mais a jugé que l'ouvrage litigieux pouvait objectivement être autorisé dans l'une des zones constructibles de la commune ou, plus largement, de la région; l'impossibilité prétendue d'ériger le dépôt à bois sur un terrain situé dans une zone à bâtir adéquate, respectivement l'indisponibilité de telles surfaces n'apparaît d'ailleurs en l'espèce pas décisive pour l'examen des conditions de l'art. 24 LAT, plus particulièrement - comme on le verra ci-dessous (cf. consid. 4.2) - pour déterminer si l'implantation de la halle en zone agricole est imposée par sa destination (let. a). 
Dans ces circonstances, faute de porter sur des faits susceptibles d'influer sur le sort de la cause, les griefs formels tirés de l'arbitraire et d'une violation du droit d'être entendu doivent être écartés. 
 
4.   
Prévu dans la zone agricole, le projet de construction d'une halle destinée à l'entreposage du bois pour une entreprise de menuiserie n'est pas conforme à l'affectation de cette zone (cf. art. 22 al. 2 let. a LAT). Il ne peut dès lors être autorisé que s'il remplit les conditions dérogatoires de l'art. 24 LAT
 
4.1. En vertu de l'art. 24 LAT, une autorisation dérogatoire peut être délivrée pour de nouvelles constructions ou installations hors de la zone à bâtir lorsque l'implantation de ces constructions ou installations est imposée par leur destination (let. a) et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (let. b).  
Selon la jurisprudence, une construction est imposée par sa destination au sens de l'art. 24 let. a LAT lorsqu'elle est adaptée aux besoins qu'elle est censée satisfaire et qu'elle ne peut remplir son rôle que si elle est réalisée à l'endroit prévu: une nécessité particulière, tenant à la technique, aux conditions d'exploitation d'une entreprise, ou encore à la configuration ou à la nature du sol, doit imposer le choix de l'endroit. De même, l'implantation hors de la zone à bâtir peut se justifier si l'ouvrage en question ne peut être édifié à l'intérieur de celle-ci en raison des nuisances qu'il occasionne (ouvrage négativement imposé par sa destination, cf. à ce sujet ZEN-RUFFINEN/GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, n. 575 p. 267). Seuls des critères particulièrement importants et objectifs sont déterminants, à l'exclusion de points de vue subjectifs du constructeur ou de motifs de convenance personnelle (cf. ATF 136 II 214 consid. 2.1 p. 218; 129 II 63 consid. 3.1. p. 68; 123 II 256 consid. 5a p. 261). L'application de la condition de l'art. 24 let. a LAT doit être stricte, dès lors que cette dernière contribue à l'objectif de séparation du bâti et du non-bâti (cf. ATF 124 II 252 consid. 4a p. 256; 117 Ib 270 consid. 4a p. 281, 379 consid. 3a p. 383; arrêt 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1; voir également RUDOLF MUGGLI, Commentaire LAT, 2010, n. 3 ad art. 24 LAT). 
 
4.2.  
 
4.2.1. La recourante soutient que le territoire communal ne renfermerait pas de zone susceptible d'accueillir la halle litigieuse; il en irait de même s'agissant des communes de la région, raison pour laquelle son projet aurait dû être autorisé en zone agricole. En dépit des termes utilisés, on doit comprendre de cette critique - au demeurant largement appellatoire et à la limite de la recevabilité (cf. ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356 et les arrêts cités) - que la recourante ne se fonde en réalité pas sur l'absence de zones à bâtir appropriées pour conclure que l'implantation de son dépôt serait imposée par sa destination, mais sur une prétendue inexistence de surfaces à bâtir disponibles. La recourante évoque en effet dans son écriture l'impossibilité de trouver des terrains à une "distance raisonnable" de son exploitation, prétendant qu'il n'en existe ni sur le territoire de la commune ni dans les communes voisines; elle affirme qu'il s'imposait de vérifier que ces communes soient effectivement en mesure de lui proposer des emplacements répondant à ses besoins avant d'interdire son projet.  
Ce faisant, la recourante se méprend quant aux motifs ayant conduit la cour cantonale à rejeter son recours. En effet, l'instance précédente ne s'est à juste titre pas fondée sur une pénurie de terrains à bâtir, respectivement sur une indisponibilité de telles surfaces, mais a, au contraire, jugé que la halle litigieuse pouvait objectivement être autorisée dans l'une des zones constructibles de la commune de Bagnes (ou, plus largement, des communes voisines) pour nier que son implantation en zone agricole soit imposée par sa destination. 
Cette appréciation ne prête pas le flanc à la critique. Il faut, avec la cour cantonale, reconnaître que la halle litigieuse est une construction courante qui, au regard de ses dimensions et des immissions qu'elle est susceptible de générer, pourrait objectivement être autorisée dans l'une des zones artisanales définies par le plan d'affectation des zones de la Commune de Bagnes ou, plus largement, dans une zone constructible de la région. La recourante ne le conteste d'ailleurs pas; au contraire, en arguant d'une prétendue inexistence de terrains appropriés disponibles, elle admet implicitement que le dépôt devrait en principe prendre place dans une zone constructible. Elle estime cependant que cette pénurie devrait conduire à l'autorisation de son projet. Cette argumentation ne peut toutefois être suivie: une éventuelle pénurie ou indisponibilité de terrains à bâtir demeure en effet sans conséquence sur la réalisation de la condition de l'implantation imposée par sa destination (RUDOLF MUGGLI, op. cit., n. 12 ad art. 24 LAT). Que cette carence découle, comme le prétend la recourante, d'un manque d'anticipation des autorités communales n'y change rien: le but du régime dérogatoire n'est pas de compléter les plans d'affectation qui ne répondent pas, ou plus, aux exigences de l'art. 15 al. 4 let. b LAT (prévoyant la possibilité de classer des terrains nécessaires à la construction dans les quinze prochaines années; cf. RUDOLF MUGGLI, op. cit., n. 12 ad art. 24 LAT); admettre le contraire reviendrait à soustraire la révision des plans à la procédure d'aménagement, respectivement à l'enquête publique obligatoire (art. 33 al. 1 LAT), ce qui contreviendrait aux art. 75 Cst. et 2 LAT (  ibid.).  
Par ailleurs, et même si l'on comprend les motivations de la recourante à vouloir implanter son dépôt à une "distance raisonnable" de son atelier, celles-ci relèvent - quoi qu'elle en dise - de considérations subjectives d'ordre économique visant à assurer une gestion plus rationnelle de son exploitation, ou à tout le moins de convenance personnelle; or celles-ci sont impropres à justifier une construction en zone agricole (cf. ATF 123 II 256 consid. 5a p. 261; 108 Ib 359 consid. 4 p. 362). 
 
4.2.2. La recourante estime enfin que, dès lors que le bâtiment abritant sa menuiserie est conforme à l'affectation de la zone artisanale dans laquelle il se situe, le Tribunal cantonal aurait dû reconnaître que l'aménagement d'une installation auxiliaire - que la recourante prétend nécessaire à son activité -, à proximité directe de l'exploitation principale, est imposée par sa destination.  
Ce point de vue ne saurait cependant être suivi: au risque sinon de déplacer la limite de la zone à bâtir, ce critère de rattachement ne peut s'appliquer que pour autant que l'exploitation principale se trouve en zone agricole et y soit elle-même imposée par sa destination; dans ce cas de figure la réalisation, en zone agricole, d'une installation auxiliaire répondant à un besoin technique ou économique particulier de l'exploitation principale peut être imposée par sa destination, à titre dérivé (ou indirect) (cf. ATF 124 II 252 consid. 4c p. 256; 114 Ib 317 consid. 4d p. 320; voir également RUDOLF MUGGLI, op. cit., n. 13 ad art. 24 LAT). Ces conditions n'étant pas réalisées en l'espèce, la recourante ne peut rien déduire de la conformité de son atelier avec l'affectation de la zone artisanale. 
 
4.3. Il s'ensuit que l'implantation du hangar à bois hors de la zone constructible n'est pas imposée par sa destination. Les conditions définies par l'art. 24 LAT pour l'octroi d'une autorisation dérogatoire étant cumulatives (ATF 124 II 252 consid. 4 p. 255 et les arrêts cités), il est superflu d'examiner le grief par lequel la recourante conteste l'existence d'un intérêt prépondérant, au sens de l'art. 24 let. b LAT, s'opposant à la délivrance de l'autorisation requise.  
 
5.   
En définitive, les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité, au frais de la recourante, qui succombe (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais de justice, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à la Commune de Bagnes, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 9 février 2016 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Fonjallaz 
 
Le Greffier : Alvarez