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[AZA 0/2] 
 
4C.331/2001 
 
Ie COUR CIVILE 
**************************** 
 
12 février 2002 
 
Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Corboz, 
Mme Klett, M. Nyffeler et M. Favre, juges. Greffière: 
Mme Godat Zimmermann. 
 
_________________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par Me Mike Hornung, avocat à Genève, 
 
et 
A.________, demandeur et intimé; 
 
(contrat de travail; résiliation; 
école de recrues anticipée; offre de services) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- En mars 1998, X.________ S.A. a engagé A.________, né le 4 juin 1981, en qualité d'apprenti peintre en bâtiment. Ce dernier a obtenu son certificat de capacité en été 1999; il est resté au service de X.________ S.A. 
 
A.________ a obtenu la nationalité suisse le 16 février 2000. Le 17 mars 2000, il a déposé une demande afin d'accomplir l'école de recrues de manière anticipée, soit à partir de l'été suivant. Il en a informé son employeur en mai 2000, après avoir passé le recrutement le 8 mai 2000. 
B.________, directeur de X.________ S.A., l'a enjoint à renoncer à ce projet, car l'entreprise avait besoin de ses services; il a fait savoir au travailleur qu'il risquait de perdre son emploi. A.________ n'a pas obtempéré. 
 
Le 30 mai 2000, X.________ S.A. a résilié le contrat de travail pour le 30 juin 2000. Dès le lendemain, A.________ ne s'est plus présenté sur son lieu de travail, sauf une fois début juin, pour encaisser son salaire de mai; il estimait en effet disposer d'un solde de vacances jusqu'à fin juin, ce qui a été contesté par l'employeur, qui fixait ledit solde à 9,5 jours. 
 
Par lettre du 7 juin 2000, le syndicat Z.________, au nom de A.________, a fait savoir à X.________ S.A que le congé était soumis en l'espèce à un délai de préavis de deux mois et que le terme du contrat était reporté au 30 novembre 2000 en raison de l'école de recrues que le travailleur devait prochainement effectuer. Le 15 juin 2000, l'employeur a répondu dans les termes suivants: 
"Pour faire suite à votre lettre du 7 juin dernier, et notre entretien téléphonique du 9 juin dernier, je vous informe que Monsieur A.________ n'a pas été renvoyé à cause du service militaire, mais aussi pour d'autres raisons, qui concernent son attitude envers les clients et envers nous même (sic), et des problèmes d'heures de travail. 
Concernant le service militaire, à ce jour nous n'avons toujours pas vu sa convocation. Comme vous le dites dans votre lettre, le 19 mai dernier il nous a informé qu'il allait partir à l'école de recrue (sic) le 10 juillet prochain, alors qu'il doit partir en 2001, car il a passé la toise le 9 mai de cette année. 
Donc Monsieur A.________ ne nous averti (sic) même pas 2 mois à l'avance de son départ pour l'armée, alors que plus loin dans votre lettre vous nous dites que nous devons l'avertir 2 mois à l'avance en cas de congé. 
Ceci voudrait dire que Monsieur A.________ a le droit de faire comme bon lui semble, vu que c'est lui qui a décidé de partir une année à l'avance à l'armée, et que suite au congé que nous lui avons envoyé en date du 30 mai pour fin juin 2000, il n'est pas revenu travailler. 
Il a donc abandonné son poste de travail le 31 mai 2000 et a à ce jour nous n'avons aucune nouvelle, à part votre lettre. 
Nous estimons donc que la lois (sic) doit aller dans les deux sens, et non toujours dans le sens de l'employé, qui lui croit avoir tous les droits.. " 
 
A.________ a accompli l'école de recrues du 10 juillet au 20 octobre 2000. Il a retrouvé un emploi à la mi-janvier 2001. 
 
B.- Le 17 novembre 2000, A.________ a ouvert action contre X.________ S.A. en paiement, d'une part, d'un montant de 30 279 fr.95, représentant le salaire du 1er juillet 2000 au 31 janvier 2001 et une indemnité pour les vacances 1999 et 2000, et, d'autre part, d'un montant de 27 667 fr.50 à titre d'indemnité pour licenciement abusif, le tout avec intérêts. 
 
Par jugement du 14 février 2001, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a débouté le demandeur de toutes ses conclusions. 
 
Statuant le 9 juillet 2001 sur appel de A.________, la Cour d'appel des prud'hommes a annulé le jugement de première instance et condamné X.________ S.A. à payer au travailleur la somme brute de 23 196 fr., plus intérêts à 5% dès le 1er octobre 2000. En appel, le demandeur avait notamment renoncé à réclamer une indemnité pour congé abusif. L'arrêt cantonal a été expédié pour notification le 4 septembre 2001. 
 
C.- X.________ S.A. interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au déboutement du demandeur de toutes ses conclusions. 
 
A.________ a déposé deux réponses, dans lesquelles il propose l'irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté et, subsidiairement, son rejet. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- L'arrêt attaqué a été notifié à la défenderesse en date du 10 septembre 2001. Le délai de recours de trente jours venait donc à échéance le mercredi 10 octobre 2001 (art. 54 al. 1 OJ). Contrairement à ce que le demandeur soutient, le recours remis à la poste ce jour-là est intervenu en temps utile (art. 32 al. 3 OJ). 
 
Il en est de même du complément à la réponse, expédié le 6 janvier 2002; en effet, en raison des féries, le terme du délai de trente jours, courant dès le 29 novembre 2001, a été reporté au 14 janvier 2002 (art. 32 al. 1 et 2 et art. 34 al. 1 let. c OJ). 
 
2.- a) Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral fonde son arrêt sur les faits tels qu'ils ont été constatés par la dernière autorité cantonale, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252; 126 III 59 consid. 2a et les arrêts cités). 
Ces exceptions mises à part, il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait; de même, la juridiction de réforme ne tiendra pas compte de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme ne permet pas de remettre en cause l'appréciation des preuves à laquelle l'autorité cantonale s'est livrée (ATF 126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid. 3a). 
 
Au demeurant, s'il ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, le Tribunal fédéral n'est lié ni par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par les considérants de la décision cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c p. 252/253; 126 III 59 consid. 2a). 
 
b) En l'espèce, sur plusieurs points, la défenderesse complète à sa guise l'état de fait retenu par la cour cantonale; par exemple, elle se réfère directement au témoignage de Mme B.________ pour affirmer que le demandeur était en congé maladie lorsqu'il s'est annoncé à l'arsenal, que le solde de vacances du travailleur s'élevait à 9,5 jours ou encore qu'une mise en demeure orale est intervenue en juin 2000. Conformément aux principes rappelés ci-dessus, il ne sera pas tenu compte de ces éléments. 
 
3.- Il convient d'examiner en premier lieu à quelle date le contrat de travail liant les parties a pris fin. 
 
a) A juste titre, la défenderesse ne conteste plus que le délai de congé applicable en l'espèce était de deux mois (cf. art. 335c al. 1 CO); en effet, l'apprentissage effectué chez le même employeur est pris en compte pour déterminer la durée des rapports de travail (cf. arrêt non publié du 8 octobre 1997 dans la cause 4C.93/1997, consid. 3c, reproduit in JAR 1998 p. 282 ss). En revanche, la défenderesse reproche à la cour cantonale d'avoir mal interprété la notion de service militaire obligatoire au sens de l'art. 336c al. 1 let. a CO. Invoquant l'art. 60 de l'ordonnance sur les services d'instruction (OSI; RS 512. 21), l'employeur considère qu'une école de recrues accomplie de manière anticipée est facultative. Au surplus, il fait valoir un abus de droit de la part du demandeur, qui n'a pas pris en compte les intérêts légitimes de l'entreprise, ni jugé bon de faire part de ses intentions à temps. 
 
b) L'art. 336c al. 1 let. a CO interdit à l'employeur, après le temps d'essai, de résilier le contrat pendant que le travailleur accomplit un service militaire obligatoire, en vertu de la législation fédérale, ou pendant les quatre semaines qui précèdent et qui suivent ce service pour autant qu'il ait duré plus de onze jours. La notion de service obligatoire se définit par rapport à la législation sur le service militaire; l'accomplissement d'un service volontaire, comme un cours de sport ("Wehrsport") par exemple, ne donne pas naissance à une période de protection (Streiff/von Kaenel, Leitfaden zum Arbeitsvertragsrecht, 5e éd., n. 6 ad art. 336c CO, p. 360). Le Tribunal fédéral a jugé qu'un service militaire volontaire, effectué en remplacement d'un service civil obligatoire, ne tombait pas sous le coup de l'art. 336c al. 1 let. a CO, en tout cas pas lorsque l'ordre de marche intervenait après que le congé avait été signifié (arrêt non publié du 20 juillet 1995 dans la cause 4C.444/1994, consid. 2, reproduit in JAR 1996, p. 221). En ce qui concerne le service militaire anticipé, en particulier l'école de recrues, la plupart des auteurs le considèrent comme obligatoire au sens de l'art. 336c al. 1 let. a CO (Staehelin, Zürcher Kommentar, n. 5 ad art. 336c CO, qui ne mentionne que le déplacement du service, cf. néanmoins n. 28 ad art. 324a CO où l'auteur nie toute faute du travailleur pour avoir demandé à effectuer l'école de recrues un an plus tôt; Denis Weber, La protection des travailleurs contre les licenciements en temps inopportun, thèse Lausanne 1992, p. 85; Denis Humbert, Der neue Kündigungsschutz im Arbeitsrecht, thèse Zurich 1991, p. 
 
 
91; contra: Urs Sigrist, Die ordentliche Beendigung des Arbeitsverhältnisses unter besonderer Berücksichtigung des Kündigungsschutzes, thèse Bâle 1982, p. 80). Une décision bernoise va dans le même sens (JAR 1987, p. 220). 
 
Selon l'art. 12 al. 1 de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire (ci-après: LAAM; RS 510. 10), toute personne qui a été recrutée est astreinte au service militaire; en règle générale, le recrutement a lieu au cours de la 19e année (art. 8 al. 3 LAAM). Le service militaire comprend notamment les services d'instruction (art. 12 al. 2 let. b LAAM), dont l'école de recrues (art. 41 al. 1 LAAM). 
Les personnes astreintes au service militaire accomplissent l'école de recrues en règle générale pendant l'année au cours de laquelle ils (recte: elles) atteignent 20 ans (art. 49 al. 1 LAAM). L'art. 60 OSI reprend cette règle (al. 1), tout en précisant, à son alinéa 3, que les personnes dont le recrutement a été anticipé peuvent effectuer l'école de recrues l'année où elles ont 18 ou 19 ans. Les motifs d'un service anticipé et la procédure sont réglementés aux art. 45 ss OSI
 
 
L'école de recrues correspond indubitablement à un service militaire obligatoire. A cet égard, la possibilité offerte par la loi de demander l'anticipation ou le report du service militaire ne change rien au caractère obligatoire du service lui-même. Par rapport au but de protection visé par l'art. 336c CO, aucune raison fondamentale ne justifie de traiter moins bien le travailleur qui effectue son service militaire de manière anticipée. Même si le demandeur n'était alors âgé que de 19 ans, l'école de recrues qu'il a accomplie en été 2000 constitue par conséquent une période de protection au sens de l'art. 336c al. 1 let. a CO
 
c) Contrairement à l'opinion de la défenderesse, un abus de droit ne peut non plus être reproché au demandeur (art. 2 al. 2 CC). Certes, le travailleur n'a avisé son employeur qu'en mai 2000 de ses démarches, entreprises en mars 2000, tendant à anticiper l'école de recrues. La simple demande d'anticipation sans information préalable de l'employeur n'est toutefois pas constitutive d'abus de droit; en effet, les règles de la bonne foi ne commandaient pas d'avertir l'employeur assez tôt pour qu'il puisse mettre un terme au contrat avant le début de la période de protection de l'art. 336c al. 1 let. a CO. Au surplus, l'état de fait établi souverainement par la cour cantonale ne laisse pas apparaître l'intention prêtée par la défenderesse au demandeur de résilier le contrat juste après l'école de recrues et de pouvoir ainsi percevoir encore son salaire pendant quatre mois sans fournir sa prestation de travail. 
 
d) Selon la cour cantonale, le contrat de travail a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2000. Le calcul de la prolongation est fixé à l'art. 336c al. 2 CO: si le congé a été donné avant l'une des périodes de protection de l'alinéa 1 et que le délai de congé n'a pas expiré avant cette période, ce délai est suspendu et ne continue à courir qu'après la fin de la période. Conformément à la jurisprudence, le délai - légal ou conventionnel - de congé au sens de l'art. 336c al. 2 CO ne commence pas à courir dès la réception de la résiliation; il doit être calculé rétroactivement à partir de l'échéance du contrat (ATF 119 II 449 consid. 2a p. 450; 115 V 437 consid. 3). Le point est sans importance en l'occurrence puisque le congé a été notifié juste deux mois avant la fin présumée des rapports de travail. Au surplus, les jours du délai de congé à reporter sont ceux qui se superposent à la période de protection (cf. ATF 121 III 107 consid. 2a). 
 
 
En l'espèce, la période de protection a débuté quatre semaines avant l'entrée à l'école de recrues, soit le 12 juin 2000. Le terme du contrat était normalement le 31 juillet 2000, de sorte que le délai légal de congé a été suspendu durant cinquante jours. La période de protection s'est achevée quatre semaines après la fin du service militaire, soit le 17 novembre 2000. Le délai de congé a donc recommencé de courir pour cinquante jours à partir du 18 novembre 2000, soit jusqu'au 6 janvier 2001; le terme du contrat s'est trouvé ainsi reporté au 31 janvier 2001 (art. 336c al. 3 CO), et non au 31 décembre 2000, comme la cour cantonale l'a admis à tort. Le demandeur n'a toutefois déposé ni recours en réforme, ni recours joint, si bien que l'erreur de la Cour d'appel demeure sans conséquence. 
 
4.- La prolongation du contrat en application de l'art. 336c CO ne signifie pas encore que le travailleur dispose d'une prétention de salaire jusqu'à l'échéance reportée. 
 
a) A ce propos, la défenderesse se plaint d'une violation de l'art. 324b CO. A la suivre, le demandeur a commis une faute grave le privant de son salaire, car il a, d'une part, omis d'informer l'employeur de son intention d'anticiper l'école de recrues et, d'autre part, refusé de reporter ledit service militaire alors que l'entreprise avait besoin de ses services; il s'agirait là d'une méconnaissance flagrante de l'obligation de diligence incombant au travailleur et consacrée aux art. 321a et 321e CO. La défenderesse fait également grief à la cour cantonale de n'avoir pas exigé du travailleur qu'il prouve son absence de faute, conformément à l'art. 8 CC
 
L'employeur reproche enfin aux juges précédents d'avoir admis qu'une offre de services de la part du travailleur se serait révélée superflue dans les circonstances de l'espèce. 
 
b) Le droit au salaire en cas d'empêchement de travailler est régi par les art. 324a et 324b CO. Il suppose que le travailleur soit empêché, sans faute de sa part, de fournir sa prestation pour une cause inhérente à sa personne; à titre d'exemples, l'art. 324a al. 1 CO cite la maladie, l'accident, l'accomplissement d'une obligation légale ou d'une fonction publique. Le service militaire est le cas typique de l'exercice d'une obligation légale (Brunner/Bühler/Waeber, Commentaire du contrat de travail, 2e éd., p. 71). Le Tribunal fédéral a également admis que l'accomplissement d'une mesure d'astreinte au travail pour objection de conscience, d'une durée plus longue que le service militaire, n'était pas fautive au sens de l'art. 324a al. 1 CO, à l'instar de l'engagement - facultatif - d'une femme de servir dans l'armée; en effet, dans les cas de ce genre, une faute doit être niée lorsque les intérêts du travailleur à l'exercice de ses droits constitutionnels ou l'intérêt public à l'accomplissement d'obligations légales l'emportent sur celui de l'employeur à obtenir la prestation de travail (ATF 122 III 268). 
En ce qui concerne le service militaire obligatoire, on peut se demander du reste si le recours à la notion de faute a vraiment un sens (cf. Rehbinder, Schweizerisches Arbeitsrecht, 15e éd., n. 198, p. 99/100). 
 
En l'espèce, le fait que le travailleur ait cherché à avancer son école de recrues ne constitue pas une faute. 
Dès l'instant où les autorités militaires ont accepté que l'école de recrues soit effectuée de manière anticipée, ce service équivaut à celui accompli à la date ordinaire, de sorte qu'un traitement différencié dans le cadre des art. 324a et 324b CO ne se justifie pas. Cette conclusion s'impose d'autant plus que, selon la jurisprudence rappelée ci-dessus, un engagement volontaire peut également constituer un empêchement non fautif de travailler. Par conséquent, le demandeur peut en principe prétendre à percevoir une partie de son salaire (cf. art. 324b CO) pour la période passée à l'école de recrues. 
 
 
c) Cela étant, la prolongation des rapports de travail sur la base de l'art. 336c al. 2 CO ne modifie pas les droits et obligations des parties. Le travailleur doit fournir sa prestation dès qu'il a recouvré sa capacité de travail alors que l'employeur reste tenu de payer le salaire (art. 319 al. 1 CO). S'il n'exécute pas sa prestation de travail sans être empêché par un motif reconnu, le travailleur est en demeure (art. 102 ss CO) et l'employeur peut alors refuser de payer le salaire (art. 82 CO). De même, les règles sur la demeure de l'employeur sont applicables. S'il empêche par sa faute l'exécution du travail ou se trouve en demeure de l'accepter pour d'autres motifs, l'employeur doit payer le salaire sans que le travailleur doive encore fournir sa prestation (art. 324 al. 1 CO). La demeure de l'employeur suppose en principe que le travailleur ait offert ses services, en vain (ATF 115 V 437 consid. 5a p. 444; arrêt non publié du 23 octobre 1992 dans la cause 4C.383/1991, consid. 3c, reproduit in SJ 1993, p. 365). Le travailleur ayant recouvré sa capacité de travail ne peut toutefois se voir reprocher de n'avoir pas offert ses services lorsque l'employeur l'a libéré de l'obligation de travailler jusqu'au terme du délai de congé (ATF 118 II 139 consid. 1a p. 140 et les références; arrêt non publié du 20 juillet 1994 dans la cause 4C.66/1994, consid. 3b, reproduit in SJ 1995 p. 801). 
 
 
 
Au surplus, le travailleur ne peut en principe se prévaloir de sa méconnaissance de la loi pour justifier une absence d'offre de services, l'employeur n'ayant, en règle générale, pas l'obligation d'informer l'employé sur ses droits en matière de protection contre les licenciements (ATF 115 V 437 consid. 6d p. 446/447; arrêt précité du 23 octobre 1992, consid. 3d; critiques notamment de Brunner/Bühler/Waeber, op. cit. , p. 221). La question demeure toutefois ouverte de savoir si, en vertu du principe de la bonne foi ou de son obligation de diligence, l'employeur n'assume pas un devoir d'information lorsqu'il se rend compte ou devrait se rendre compte de l'erreur du travailleur, tout en étant conscient que celui-ci subira un préjudice irréparable en ne faisant pas valoir les droits découlant de la protection contre les congés (ATF 115 V 437 consid. 6b p. 447). 
 
En l'occurrence, le demandeur a cessé de travailler pour la défenderesse le 31 mai 2000. Depuis lors, il n'a jamais offert ses services; en particulier, aucune offre de la sorte n'a été formulée dans la lettre du syndicat du 7 juin 2000. Or, jusqu'à son départ à l'école de recrues le 10 juillet 2000 et dès son retour en octobre 2000, le travailleur ne pouvait se prévaloir d'aucun empêchement de travailler. 
Par ailleurs, il connaissait ses droits et a fait valoir la prolongation du contrat de travail. La situation n'est donc pas comparable à celle du travailleur ignorant les conséquences légales d'une résiliation en temps inopportun. Dans l'hypothèse où le contrat se terminait le 30 juin 2000, le demandeur estimait avoir droit à un solde de vacances courant jusqu'à la fin du mois; selon la défenderesse, le solde n'était que de 9,5 jours. Ce point n'a pas été éclairci dans l'état de fait cantonal. Il n'est cependant pas déterminant. 
En effet, dès l'instant où il se prévalait d'une prolongation du contrat pour plusieurs mois, le travailleur ne pouvait ainsi fixer unilatéralement la date de ses vacances, au mépris de l'art. 329c al. 2 CO, et prendre son solde de congés immédiatement. Il apparaît ainsi qu'en juin 2000, le demandeur se trouvait en demeure d'exécuter sa prestation. 
 
Dès juillet 2000, la question se pose de savoir si le demandeur était tenu d'offrir encore ses services ou si, comme la cour cantonale l'a admis, l'attitude adoptée par la défenderesse démontrait que celle-ci n'était de toute façon pas prête à accepter la prestation de travail. Certes, dans sa lettre du 15 juin 2000, l'employeur s'indigne du choix du travailleur d'anticiper d'une année l'école de recrues; il s'insurge en outre contre le fait de devoir respecter un délai de congé de deux mois alors que le travailleur lui a annoncé moins de deux mois auparavant qu'il accomplirait l'école de recrues de manière anticipée. Mais, juste après, il fait remarquer que, en tout état de cause, le demandeur n'est pas revenu travailler depuis la notification du congé, qu'il a donc abandonné son emploi le 31 mai 2000 et n'a donné aucune nouvelle à ce jour. Comme on l'a vu, ce reproche est fondé. En outre, il n'apparaît nulle part que l'employeur aurait renoncé expressément à la prestation de travail. On ne peut dès lors déduire du courrier du 15 juin 2000 qu'une offre de services intervenue début juillet 2000 aurait été rejetée à coup sûr par la défenderesse, qui se serait trouvée à son tour en demeure. Le même raisonnement vaut pour la période suivant le service militaire. Dans ces conditions, force est de conclure que, s'il entendait recevoir son salaire, le travailleur ne pouvait se dispenser d'offrir ses services durant la période où il n'accomplissait pas l'école de recrues. 
 
Le demandeur réclame son salaire à partir du 1er juillet 2000. A cette date, il était en demeure de sorte que la défenderesse n'avait pas l'obligation de lui verser le salaire. En revanche, du 10 juillet au 20 octobre 2000, le travailleur était dans l'incapacité de fournir sa prestation puisqu'il accomplissait l'école de recrues. Il s'agit d'une impossibilité subséquente sans faute; conformément à l'art. 119 al. 1 CO, l'obligation du débiteur s'éteint et la demeure cesse (Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 696). Il s'ensuit que, pendant le service militaire, l'obligation de l'employeur de verser le salaire au moins en partie subsistait en vertu des art. 324a et 324b CO. Dès le 21 octobre 2000, le travailleur est à nouveau tombé en demeure puisqu'il n'a ni exécuté sa prestation de travail, ni offert ses services. Il ne peut ainsi prétendre à son salaire jusqu'à la fin des rapports de travail. 
 
 
Selon le calcul de la cour cantonale, qui n'a fait l'objet d'aucune critique, le salaire à verser pendant la période du service militaire s'élève à 11 508 fr.50, somme à laquelle il convient d'ajouter des intérêts à 5% dès le 1er octobre 2000, ce qui n'est pas contesté. Pour le surplus, le principe de l'exclusion des nova (art. 55 al. 1 let. b et c OJ) interdit à la cour de céans d'examiner si le demandeur peut prétendre à une indemnité pour les vacances. En effet, dans son mémoire d'appel du 30 avril 2001, le travailleur a conclu uniquement au paiement du salaire jusqu'au 31 janvier 2001, sans autre précision et sans reprendre le montant de 29 946 fr.10 articulé en première instance, qui englobait expressément l'indemnité pour les vacances de l'an 2000. L'indemnisation des vacances n'était dès lors plus litigieuse en appel. 
En conclusion, le recours doit être partiellement admis, la prétention du demandeur étant ramenée au montant brut de 11 508 fr.50, plus intérêts. 
 
5.- Comme les conclusions de la demande dépassent 30 000 fr., la procédure n'est pas gratuite (art. 343 al. 2 CO dans sa teneur en vigueur depuis le 1er juin 2001). La dette de la défenderesse été réduite de moitié environ en instance de réforme. Dans ces conditions, il se justifie de partager les frais judiciaires par moitié; par ailleurs, chaque partie supportera les frais liés à la défense de ses intérêts (art. 156 al. 3 et art. 159 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Admet partiellement le recours et réforme l'arrêt attaqué en ce sens que la défenderesse est condamnée à payer au demandeur la somme brute de 11 508 fr.50, plus intérêts à 5% l'an dès le 1er octobre 2000; 
 
2. Met un émolument judiciaire de 2000 fr. par moitié à la charge de chaque partie; 
 
3. Renvoie la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens cantonaux; 
 
4. Communique le présent arrêt en copie aux parties et à la Cour d'appel de la juridiction des prud'hommes du canton de Genève. 
 
____________ 
Lausanne, le 12 février 2002 ECH 
 
Au nom de la Ie Cour civile 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
La Greffière,