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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.251/2006 /col 
 
Arrêt du 12 mai 2006 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aemisegger, Nay, Aeschlimann et Reeb. 
Greffier: M. Jomini. 
 
Parties 
Me A.________, avocat, 
recourant, représenté par Me Charles Poncet, avocat, 
 
contre 
 
Juge d'instruction B.________, 
case postale 3344, 1211 Genève 3, 
Collège des Juges d'instruction de la République 
et canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, 
case postale 3344, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
procédure pénale, récusation, 
 
recours de droit public contre la décision du Collège 
des Juges d'instruction de la République et canton de Genève du 29 mars 2006. 
 
Faits: 
A. 
Me A.________ a été inculpé le 25 janvier 2006 à Genève des infractions de diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP) et, alternativement, d'avantages accordés à certains créanciers (art. 167 CP), en raison d'actes qu'il avait accomplis en sa qualité d'administrateur de la société anonyme X.________, en faillite. Le Juge d'instruction B.________ est en charge de cette procédure pénale (n° P/19229/2005). 
B. 
Le 16 février 2006, par le truchement de son mandataire, Me A.________ a écrit au Juge B.________. Il se présentait comme "rapporteur de la commission judiciaire de l'UDC", laquelle militerait activement pour que les magistrats élus sur proposition du parti Alliance de gauche - en particulier le Juge d'instruction B.________ - soient invités à quitter la magistrature lors des prochaines élections judiciaires. Il déclarait avoir lui-même, "potentiellement du moins, les moyens politiques de priver [le magistrat précité] de sa fonction". 
Le même jour, Me A.________ a adressé au Président du Collège des Juges d'instruction de la République et canton de Genève une requête en récusation du Juge B.________. Il y affirmait avoir "des responsabilités politiques au sein de l'UDC genevoise et plus précisément de sa commission judiciaire, chargée de définir et d'appliquer la politique du parti concerné en matière judiciaire". L'objectif de son parti consistait à convaincre d'autres partis de ne pas réélire, au début de l'année 2008, les magistrats du pouvoir judiciaire élus sur la base d'une présentation par l'Alliance de gauche. Dans ces circonstances, le Juge B.________ ne pourrait pas "instruire objectivement à l'égard d'un prévenu conduisant par ailleurs des démarches qui, si elles aboutiss[aient], entraîner[aient] pour le magistrat concerné la perte de sa fonction, sa non-réélection dans la magistrature et la perte de son traitement". Il en déduisait que, dans diverses hypothèses, le juge visé aurait "forcément tendance à se montrer plus sévère ou plus exigeant", ou bien chercherait à "amadouer" l'inculpé, voire à créer une "situation d'inaction dans la procédure pénale". Il précisait que les motifs invoqués étaient strictement objectifs, l'honorabilité et l'honnêteté du magistrat n'étant pas en cause. 
C. 
Après avoir recueilli les observations du Juge B.________ et du Procureur général, le Collège des Juges d'instruction a rejeté la requête en récusation par une décision rendue le 29 mars 2006. 
D. 
Agissant par la voie du recours de droit public, Me A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du Collège des Juges d'instruction. Il se plaint d'une violation des art. 29 al. 1 Cst. et 30 al. 1 Cst. 
Le recourant requiert que l'effet suspensif soit ordonné. 
Il n'a pas été demandé de réponses au recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le présent arrêt rend sans objet la requête d'effet suspensif. 
2. 
Le recourant invoque une situation de prévention objective, en se prévalant dans son acte de recours de sa "qualité d'homme politique actif au sein de la commission judiciaire de l'UDC", et même "le plus actif pour faire prévaloir un accord entre les partis politiques concernés" au sujet de la présentation des candidats lors de la prochaine élection générale des magistrats du pouvoir judiciaire cantonal. Selon ses allégations, les commissions judiciaires des partis seraient, dans le "système politico-judiciaire genevois", chargées de préparer les élections des magistrats, de choisir les candidats, puis - en cas d'élection tacite (art. 50 al. 5 Cst./GE [RS 131.234], en relation avec l'art. 132 Cst./GE) - de régler entre elles l'attribution des différents sièges dans la magistrature au prorata de la représentation politique de chaque parti. Le recourant affirme que grâce à ses démarches, il est fort possible que les partis politiques genevois s'entendent pour exclure de la magistrature le Juge d'instruction intimé; cette situation serait sans précédent. 
Il ressort en substance de la jurisprudence du Tribunal fédéral, au sujet des garanties des art. 29 et 30 Cst., que tout plaideur peut exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur son impartialité. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat, mais seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles du plaideur ne sont pas décisives (ATF 131 I 24 consid. 1.1 p. 25 et les arrêts cités). 
Dans un système connaissant une élection puis une réélection périodique des magistrats de l'ordre judiciaire par une autorité politique - le parlement ou, comme dans le canton de Genève, le Conseil général, à savoir l'ensemble des électeurs (art. 132 al. 1 Cst./GE) -, le fait qu'un justiciable participe à ce processus à caractère politique, en sa qualité de citoyen ou le cas échéant de responsable d'un parti politique, n'est à l'évidence pas un élément susceptible de mettre objectivement en doute l'impartialité du magistrat traitant une affaire judiciaire dans laquelle ce justiciable est impliqué. Dans un tel système institutionnel, aucun magistrat n'est assuré de sa réélection et le risque d'un échec à la prochaine élection générale n'est pas une circonstance justifiant la récusation du juge dans toutes les causes auxquelles seraient parties des citoyens prenant part, à un titre ou à un autre (comme membres de l'assemblée générale ou d'une commission thématique d'un parti, par exemple), au processus aboutissant à la désignation des candidats. Les circonstances spéciales invoquées par le recourant ne donnent pas lieu à une autre appréciation. 
Cela étant, le rôle que s'attribue le recourant au sein de son parti - une responsabilité éminente dans le processus de désignation des magistrats de l'ordre judiciaire - est allégué sans preuves. On ne saurait donc, formellement, exclure une attribution différente des responsabilités ou des délégations dans les commissions, décidée par les organes du parti, tenant compte de la situation nouvelle créée par l'inculpation du recourant. 
Le recours de droit public, mal fondé, doit donc être rejeté. 
3. 
L'émolument judiciaire est mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit public est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction intimé, au Procureur général (pour information) et au Collège des Juges d'instruction de la République et canton de Genève. 
Lausanne, le 12 mai 2006 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: