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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.615/2004/col 
 
Arrêt du 15 novembre 2004 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Juge présidant, 
Reeb et Fonjallaz. 
Greffier: M. Parmelin. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Olivier Couchepin, avocat, 
 
contre 
 
Juge d'instruction du canton du Valais, 
Office du Juge d'instruction cantonal, 
Palais de Justice, case postale, 1950 Sion 2, 
Chambre pénale du Tribunal cantonal 
du canton du Valais, 
Palais de Justice, 1950 Sion 2. 
 
Objet 
détention préventive, 
 
recours de droit public contre la décision de la 
Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton 
du Valais du 23 septembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
A.________, ressortissant angolais né le 7 août 1954, a été arrêté le 14 mars 2004 et placé en détention préventive sous les inculpations d'escroquerie et de tentative d'escroquerie. Il est soupçonné d'être impliqué dans un trafic de chèques volés et falsifiés portant sur plus de 800'000 fr. et impliquant plusieurs ressortissants africains, son épouse et l'un de ses amis de longue date, B.________, qui aurait mis à disposition ses comptes pour l'encaissement des chèques. 
Le 21 avril 2004, A.________ a déposé une demande de mise en liberté provisoire que le Juge d'instruction cantonal en charge du dossier a rejetée par décision du 28 avril 2004. La Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: la Chambre pénale) a confirmé cette décision, le 24 mai 2004, sur plainte de l'intéressé, en raison du risque de collusion. 
Le 19 août 2004, A.________ a présenté une nouvelle demande de libération immédiate que le Juge d'instruction cantonal a rejetée le 26 août 2004 pour le même motif. La Chambre pénale a confirmé cette décision sur plainte du prévenu au terme d'une décision prise le 23 septembre 2004. 
B. 
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cette décision et d'ordonner sa libération immédiate. Il requiert l'assistance judiciaire. 
La Chambre pénale et le Juge d'instruction cantonal se réfèrent aux considérants de la décision attaquée. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ. Par exception à la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion du recourant tendant à ce que le Tribunal fédéral ordonne sa mise en liberté immédiate est recevable (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). 
2. 
Une mesure de détention préventive est compatible avec la liberté personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, pour autant qu'elle repose sur une base légale, qu'elle réponde à un intérêt public et qu'elle respecte le principe de la proportionnalité (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271). 
Selon l'art. 72 ch. 1 du Code de procédure pénale valaisan (CPP val.), la détention préventive peut être ordonnée lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'un crime ou d'un délit et que, compte tenu des circonstances, il est sérieusement à craindre qu'il ne se dérobe à la procédure ou à la sanction attendue en prenant la fuite (let. a), qu'il ne compromette la procédure en influençant des personnes, en brouillant des pistes ou en perturbant des preuves (let. b) ou qu'il ne commette de nouvelles infractions graves (let. c). Cette disposition reprend en substance les conditions subordonnées par l'art. 65 al. 1 CPP val. à l'arrestation du prévenu. 
3. 
Le recourant prétend que la détention préventive aurait été ordonnée en violation de la condition de l'existence d'une sérieuse présomption de culpabilité posée par les art. 65 al. 1 et 72 ch. 1 CPP val. et qu'elle dépasserait largement la peine privative qui pourrait le frapper, lésant ainsi le principe de la célérité. 
3.1 Appelé à se prononcer sur la constitutionnalité d'une décision de placement en détention préventive, le Tribunal fédéral n'a pas à procéder, à l'instar du juge du fond, à une pesée complète des éléments à charge et à décharge, ni à apprécier la crédibilité des personnes ou des éléments de preuve mettant en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons encore peu précis, renforcés par exemple par des mensonges de l'inculpé ou des variations dans ses déclarations, peuvent être considérés comme suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit paraître fortement vraisemblable après l'accomplissement de tous les actes d'instruction envisageables (ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Les mesures provisoires en procédure civile, administrative et pénale, RDS 116/1997 II p. 43/44 et les arrêts cités). 
3.2 En l'occurrence, le dossier révèle des charges sérieuses de culpabilité à l'encontre du recourant des chefs d'escroquerie et de tentative d'escroquerie. L'appartement de la famille A.________ a servi de lieu de partage d'une somme de 350'000 fr. transférée le 17 février 2004 sur l'un des comptes de B.________ en exécution d'un ordre de virement volé et falsifié en faveur de celui-ci. Sur cette somme, B.________, A.________, par l'intermédiaire de son épouse, et C.________ auraient reçu chacun 40'500 fr., le solde étant remis à un certain D.________. Selon les déclarations de B.________ et de E.________, tous deux présents lors du partage, A.________ jouait un rôle décisionnel dans cette affaire. Aux dires de E.________, D.________ se serait expressément référé au prévenu lorsqu'il l'a contacté pour coordonner la répartition des 350'000 fr. Il ressort en outre du dossier que C.________, également impliqué dans le trafic de chèques volés mis en place par A.________ et B.________, disposait des coordonnées téléphoniques du prévenu en Angola et lui a téléphoné à deux ou trois reprises pour, selon ses dires, l'informer qu'il ne pouvait pas prendre les responsabilités dans cette affaire, car il recevait trop d'appels de personnes qu'il ne connaissait pas. Enfin, selon les premières déclarations de l'épouse du recourant, celui-ci l'aurait avisée qu'elle devrait réceptionner une certaine somme d'argent que B.________ devait lui remettre. Elle devait en outre reverser la moitié de la somme reçue à C.________. Elle a par la suite exposé que ce dernier lui avait remis deux chèques à l'attention de B.________ durant l'absence de son mari, en précisant que le second devait être réparti entre lui-même, B.________ et A.________. 
Le recourant ne se prononce nullement sur ces différents éléments, relevés par la Chambre pénale et qui étaient propres à établir un soupçon fondé de sa participation au trafic de chèques volés et falsifiés pour lequel il est poursuivi. Il se borne à faire valoir qu'il n'a pas pu matériellement se rendre coupable des infractions qui lui sont reprochées, parce qu'il était absent à l'étranger au moment des faits incriminés, et que les conditions de l'astuce ne sont pas réalisées. Ce faisant, il perd de vue qu'on lui reproche non pas d'avoir volé ou falsifié des chèques ou cherché à les encaisser, mais d'avoir mis en contact des personnes intéressées à écouler des chèques ou des ordres de paiement volés et falsifiés avec B.________ pour les encaisser. Le fait qu'il était absent de Suisse lorsque celui-ci a reçu des chèques volés ou tenté de les encaisser n'exclut nullement sa culpabilité en tant que coauteur. Pour le surplus, les objections du recourant quant à l'absence de tromperie ou d'astuce relèvent de l'examen du fond auquel l'autorité de jugement devra, le cas échéant, se livrer. 
Vu ce qui précède, l'implication du recourant dans les escroqueries et tentatives d'escroquerie qui lui sont reprochées ne peut être exclue au stade actuel de la procédure sans doute possible, ce qui suffit à tenir pour réalisée la première condition posée à une détention préventive selon l'art. 72 ch. 1 CPP val. 
4. 
Le recourant prétend que le risque de collusion aurait disparu avec la libération de B.________ intervenue le 24 août 2004. Il se plaint à ce propos d'une inégalité de traitement. 
4.1 Le maintien du prévenu en détention peut être justifié par l'intérêt public lié aux besoins de l'instruction en cours, par exemple lorsqu'il est à craindre que l'intéressé ne mette sa liberté à profit pour faire disparaître ou altérer les preuves, ou qu'il prenne contact avec des témoins ou d'autres prévenus pour tenter d'influencer leurs déclarations. On ne saurait toutefois se contenter d'un risque de collusion abstrait, car ce risque est inhérent à toute procédure pénale en cours et doit, pour permettre à lui seul le maintien en détention préventive, présenter une certaine vraisemblance (ATF 128 I 149 consid. 2.1 p. 151; 123 I 31 consid. 3c p. 36; 117 Ia 257 consid. 4c p. 261). L'autorité doit ainsi indiquer, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction elle doit encore effectuer, et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement (cf. ATF 123 I 31 consid. 2b p. 33/34). 
4.2 La Chambre pénale a considéré que le maintien du recourant en détention se justifiait afin d'éviter qu'il ne prenne contact avec D.________ pour discuter d'une ligne de défense commune. La décision attaquée n'est pas critiquable sur ce point. D.________ est en effet le principal bénéficiaire de la répartition de la somme de 350'000 fr. intervenue au domicile du recourant. Il aurait par ailleurs déjà été impliqué dans des vols de chèques et se serait connecté au trafic de chèques volés par l'intermédiaire de A.________, aux dires de E.________. Dans ces conditions, il n'était pas arbitraire d'admettre un risque concret de collusion par rapport à D.________ si le prévenu était remis en liberté. La Chambre pénale a estimé que ce risque subsistait aussi longtemps que D.________ n'aurait pas été arrêté et entendu. Là encore, la décision attaquée échappe à toute critique, pour autant que ces opérations puissent intervenir dans un délai raisonnable. Il ne serait en effet pas tolérable de prolonger indéfiniment une détention préventive pour ce seul motif, alors que tous les autres actes d'enquête auraient été effectués. On observera que le dénommé F.________ a été interpellé en France et a consenti à son extradition, laquelle devrait intervenir à bref délai, permettant ainsi de l'entendre sur son implication dans le trafic de chèques litigieux et ses relations avec le recourant; quant à D.________, il a été identifié récemment et fait l'objet d'un mandat d'arrêt international décerné le 31 août 2004, qui permet raisonnablement d'envisager son arrestation à court terme. 
Enfin, la cour cantonale pouvait à juste titre retenir que le risque de collusion n'avait pas disparu avec la libération de l'épouse du recourant intervenue le 7 avril 2004, dans la mesure où aucun élément du dossier ne permet d'admettre qu'elle aurait tenu un rôle de chef de file et qu'elle disposerait des moyens d'entrer en contact avec D.________. Pour le surplus, le recourant ne s'est nullement prévalu de la libération de B.________, survenue le 24 août 2004, à l'appui de la plainte qu'il a adressée à la Chambre pénale, pour contester le risque de collusion. La recevabilité du recours sur ce point est pour le moins douteuse au regard de la règle de l'épuisement préalable des instances cantonales déduites de l'art. 86 al. 1 OJ. Peu importe en définitive, car le grief est de toute manière mal fondé. Le risque de collusion n'a pas disparu avec la remise en liberté provisoire de B.________. Il ressort en effet de ses auditions qu'il ne connaissait pas les ressortissants africains qui lui remettaient les chèques volés pour encaissement, mais que ceux-ci lui avaient été présentés par C.________, lequel est toujours en détention préventive. Dans ces conditions, la Chambre pénale pouvait apprécier la situation du recourant de manière différente, sans violer le droit de ce dernier à l'égalité de traitement. Au demeurant, à supposer que B.________ ait été remis en liberté à tort, le recourant ne pourrait s'en prévaloir, car la loi a été correctement appliquée à son cas (cf. ATF 127 I 1 consid. 3a p. 2; 127 II 113 consid. 9b p. 121, 125 II 152 consid. 5 p. 166 et les arrêts cités). 
Aussi, en l'état actuel de la procédure, la Chambre pénale pouvait justifier le maintien du recourant en détention préventive par un risque de collusion sans violer l'art. 72 ch. 1 let. b CPP val. Pour le surplus, l'on ne constate aucun retard inadmissible dans la conduite de la procédure propre à exposer les autorités pénales cantonales à un quelconque reproche au regard du principe de la célérité. Le grief formulé à cet égard, pour peu qu'il soit motivé conformément aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, est également mal fondé. Enfin, le recourant ne prétend pas que la durée de la détention préventive subie à ce jour serait disproportionnée par rapport à la peine à laquelle il s'exposerait en cas de condamnation; il n'appartient pas au Tribunal fédéral, en l'absence de tout grief à ce sujet, d'examiner d'office cette question (cf. ATF 122 I 70 consid. 1c p. 73). 
5. 
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ étant réunies, il convient de faire droit à la demande d'assistance judiciaire et de statuer sans frais. Me Olivier Couchepin est désigné comme avocat d'office du recourant pour la présente procédure et une indemnité lui sera versée à titre d'honoraires par la Caisse du Tribunal fédéral (art. 152 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Olivier Couchepin est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est versée à titre d'honoraires, à payer par la Caisse du Tribunal fédéral. 
3. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à l'Office du Juge d'instruction cantonal et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais. 
Lausanne, le 15 novembre 2004 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: Le greffier: