Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.659/2003 /col 
 
Arrêt du 17 février 2004 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Fonjallaz et Eusebio. 
Greffier: M. Thélin. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Xavier Wenger, avocat, 
 
contre 
 
Association des Commis de Genève, 
intimée, représentée par Me Olivier Derivaz, avocat, 
Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II, Palais de Justice, 1950 Sion 2. 
 
Objet 
condamnation pénale; appréciation des preuves 
 
recours de droit public contre le jugement du Tribunal cantonal du 26 septembre 2003. 
 
Faits: 
A. 
L'Association des Commis de Genève est demeurée longtemps propriétaire de la parcelle n° xxx de la commune de Vionnaz, avec un chalet qu'elle utilisait ou remettait en location pour l'organisation de camps de vacances. Sur une parcelle voisine, située en amont, un autre chalet appartient aux époux A.________. Dès fin août 1997, A.________ a écrit à l'Association pour demander l'enlèvement de treize sapins existant à cette époque sur la parcelle n° xxx, au motif que ces arbres gênaient la vue de chez lui sur la vallée du Rhône et que leur ombre, en hiver, favorisait la présence de verglas sur le chemin d'accès. L'Association n'a jamais répondu à ses demandes. Dans une dernière lettre datée du 25 mars 1999, A.________ annonçait qu'à défaut de réponse avant le 25 avril suivant, il entreprendrait les travaux. Plusieurs fois, il a téléphoné et s'est ainsi entretenu avec la secrétaire de l'Association; la teneur des propos alors échangés est contestée. Au début de juin 1999, enfin, A.________ s'est rendu sur la parcelle n° xxx avec trois personnes pour lui prêter main-forte; l'équipe formée dans ce but a travaillé trois jours et demi pour abattre et évacuer environ cent vingt arbres et arbustes. 
A la suite de cette intervention, l'Association a déposé plainte. 
B. 
Par jugement du 17 janvier 2002, le Juge de district de Monthey a reconnu A.________ coupable de dommages à la propriété, selon l'art. 144 al. 1 CP, et lui a infligé une amende de 15'000 fr. Statuant sur les prétentions civiles de la plaignante, le Juge de district l'a également condamné au versement, à titre de dommages-intérêts, de 16'674 fr.80 avec intérêts à 5 % dès le 1er juin 1999. 
A.________ a appelé du jugement pour réclamer son acquittement pur et simple quant à l'accusation pénale, et le renvoi au for civil des prétentions en dommages-intérêts. Selon sa propre version des faits, l'adverse partie l'avait autorisé oralement ou tacitement à supprimer les arbres concernés. Le 26 septembre 2003, jugeant que l'ampleur du dommage était insuffisamment établie, le Tribunal cantonal du canton du Valais lui a donné gain de cause au sujet des dommages-intérêts et a renvoyé la plaignante à agir devant les tribunaux civils. Pour le surplus, dans la cause pénale, le Tribunal cantonal a confirmé le verdict de culpabilité et le montant de l'amende. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public pour violation des art. 9 et 32 al. 1 Cst., A.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler ce dernier prononcé. Il reproche au Tribunal cantonal d'avoir constaté arbitrairement, et en violation de la présomption d'innocence, qu'il avait supprimé les arbres sans l'accord de la propriétaire du terrain. 
Invités à répondre, l'association intimée conclut au rejet du recours; le Tribunal cantonal a renoncé à présenter des observations. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
En vertu de l'art. 84 al. 2 OJ, le recours de droit public n'est recevable que dans la mesure où les griefs soulevés ne peuvent pas être présentés au Tribunal fédéral par un autre moyen de droit, tel que le pourvoi en nullité à la Cour de cassation du Tribunal fédéral. Celui-ci est ouvert contre les jugements relatifs à des infractions de droit pénal fédéral, rendus en dernière instance cantonale (art. 247 al. 1, 268 ch. 1 PPF); il peut être formé pour violation du droit fédéral, sauf les droits constitutionnels (art. 269 PPF; ATF 124 IV 137 consid. 2e p. 141). 
2. 
Consacrée par les art. 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH, selon l'adage in dubio pro reo, la présomption d'innocence interdit au juge de prononcer une condamnation alors qu'il éprouve des doutes sur la culpabilité de l'accusé. Des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent cependant pas à exclure une condamnation. Pour invoquer utilement la présomption d'innocence, le condamné doit donc démontrer que le juge de la cause pénale, au regard de l'ensemble des preuves à sa disposition, aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles au sujet de la culpabilité (ATF 127 I 38 consid. 2 p. 40; 124 IV 86 consid. 2a p. 87/88; 120 Ia 31 consid. 2e p. 38, consid. 4b p. 40). 
L'appréciation des preuves est arbitraire, donc contraire à l'art. 9 Cst., lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'invalide l'appréciation retenue par le juge de la cause que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective ou adoptée sans motifs objectifs. Il ne suffit pas que les motifs du verdict soient insoutenables; il faut en outre que l'appréciation soit arbitraire dans son résultat. Il ne suffit pas non plus qu'une solution différente puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 58; 127 I 38 consid. 2 p. 40, 126 I 168 consid. 3a p. 170; voir aussi ATF 129 I 8 consid. 2.1 in fine p. 9). 
3. 
Interrogés par la police judiciaire ou par le Juge d'instruction, le recourant et la secrétaire de l'association plaignante ont fait des déclarations divergentes au sujet des propos que cette employée avait tenus au téléphone. D'après le recourant, lors de son dernier appel, la secrétaire lui a dit que tout était en ordre, que les travaux d'abattage pouvaient débuter et que le président de l'association allait prochainement lui téléphoner pour le lui confirmer. Selon la version de la secrétaire, celle-ci a seulement dit au recourant que sa demande était notée, que le comité de l'association allait l'examiner et qu'il lui communiquerait sa décision. La secrétaire n'a pas formellement interdit au recourant d'entreprendre les travaux, mais elle estimait avoir tenu des propos suffisamment dissuasifs, bien compris de son interlocuteur. Elle n'était d'ailleurs pas habilitée à autoriser elle-même l'enlèvement des arbres. 
La juridiction intimée a apprécié ces déclarations et a retenu que celles de la secrétaire correspondaient à la vérité. En particulier, elle a jugé hautement vraisemblable que l'employée s'était comportée comme toute personne consciencieuse placée dans la même situation, indiquant à l'interlocuteur qu'elle allait soumettre la demande à son employeur, compétent pour prendre une décision. 
4. 
Invoquant la présomption d'innocence, le recourant fait valoir que selon les termes du jugement attaqué, les versions en présence ne sont que "sensiblement différentes"; il fait aussi valoir que la secrétaire était une employée de l'association plaignante et qu'elle se trouvait donc dans un rapport de dépendance; il en déduit qu'ils avaient tous deux, lui-même et l'employée, un intérêt prétendument évident à présenter les faits de manière "sensiblement" différente, et que dans ces conditions, le Tribunal cantonal devait l'acquitter au bénéfice du doute. Cette argutie ne convainc pas. En effet, si l'on admet que la secrétaire n'a pas donné de réponse à la demande exprimée par le recourant, conformément à sa version de leurs entretiens téléphoniques, il est hors de doute que ce dernier a coupé les arbres sans autorisation expresse. 
Le recourant soutient encore que même s'il avait peut-être, au téléphone, mal compris les paroles de la secrétaire, le Tribunal cantonal devait déduire de l'ensemble des circonstances qu'il s'était cru au bénéfice d'une autorisation tacite d'exécuter les travaux. Il se plaint d'arbitraire à ce sujet, mais il omet de préciser quelles sont les constatations du jugement à considérer comme manifestement erronées. En réalité, cette critique ne tend qu'à dénoncer une application éventuellement incorrecte des art. 19 al. 1 et 20 CP relatifs aux erreurs sur la situation de fait ou de droit. Elle aurait pu être soulevée par la voie du pourvoi en nullité; elle est donc irrecevable par celle du recours de droit public. Au demeurant, elle est tout à fait inconsistante car le recourant n'a pas pu sérieusement comprendre le silence de l'association propriétaire, ou les paroles tenues pour ambiguës de son employée, comme une autorisation d'exécuter des travaux bien plus importants que ceux demandés par écrit. 
5. 
A titre de partie qui succombe, le recourant doit acquitter l'émolument judiciaire et les dépens à allouer à son adverse partie. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Le recourant acquittera les sommes suivantes: 
2.1 Un émolument judiciaire de 2'000 fr.; 
2.2 Une indemnité de 500 fr. à verser à l'intimée à titre de dépens. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais. 
Lausanne, le 17 février 2004 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: