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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 1/2} 
5C.237/2002 /frs 
 
Arrêt du 18 février 2003 
IIe Cour civile 
 
MM. et Mme les Juges fédéraux Raselli, Président, Meyer et Hohl. 
Greffier: M. Fellay 
 
Bernard Rappaz, 3977 Granges VS, 
demandeur et recourant, représenté par Me Aba Neeman, avocat, case postale 1224, 1870 Monthey 2, 
 
contre 
 
Imprimerie Moderne SA Sion, rue de l'Industrie 13, 1950 Sion, 
défenderesse et intimée, représentée par Me Hildebrand de Riedmatten, avocat, avenue Ritz 33, case postale 2135, 1950 Sion 2. 
 
droit de réponse selon les art. 28g ss CC
 
recours en réforme contre le jugement de la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais du 2 octobre 2002. 
 
Faits: 
A. 
Dans le courant du printemps 2002, le journal "Le Nouvelliste" a publié plusieurs articles en relation avec le chanvre, intitulés "A l'école des joints", "Trouver un joint", "Dealer en liberté", "Le stock de Bernard Rappaz est à la centrale de Chavalon", "Le stock de Rappaz caché à 'Chanvralon'!", "Les 100 jours du juge" et "Indésirables joints!". 
 
A une date indéterminée, Bernard Rappaz a sollicité du journal un droit de réponse, produisant un texte à publier de 9 pages A4 manuscrites (environ 16'000 caractères). 
 
Le 16 mai 2002, la société Imprimerie Moderne SA, éditrice du journal (ci-après: la société) a refusé de publier le texte proposé à titre de droit de réponse, aux motifs que celui-ci ne pouvait porter sur un ensemble d'articles, qu'il était plus un "plaidoyer complet pour le chanvre et la libéralisation du cannabis" qu'un droit de réponse, et qu'il était trop long. 
B. 
Le 10 juin 2002, Bernard Rappaz a déposé devant le Tribunal cantonal du canton du Valais une demande en exécution du droit de réponse contre la société, concluant à la publication de son texte dans la teneur que justice dirait. 
 
Par jugement du 2 octobre 2002, la Cour civile II du Tribunal cantonal a rejeté l'action dans la mesure où elle était recevable. Elle a considéré en substance que les droits de la personnalité du demandeur n'avaient nullement été mis en cause, car soit l'article incriminé ne mentionnait pas son nom, soit il contenait un jugement de valeur (trafiquant, "enfumer des milliers de consommateurs", chanvrier), soit il relatait des faits notoires confirmés par la police (50 tonnes de chanvre saisies, le dossier Rappaz), soit il faisait état d'une appréciation (40 millions de francs). En outre, le texte de réponse proposé ne se bornait pas à opposer la version des faits du demandeur, mais contenait des jugements de valeur. De plus, il n'était pas concis et consistait en un plaidoyer pour la libéralisation du cannabis en Suisse et pour présenter son auteur sous un jour favorable. Enfin, il y avait abus de droit de la part du demandeur, qui cherchait à utiliser le droit de réponse à des fins manifestement étrangères à la protection de la personnalité. La cour cantonale a estimé par ailleurs qu'elle ne pouvait modifier le texte proposé, car elle aurait dû le reformuler complètement en jouant les écrivains publics. 
C. 
Par acte du 4 novembre 2002, le demandeur a interjeté un recours en réforme au Tribunal fédéral contre le jugement cantonal. Il conclut principalement à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle détermine les modalités du droit de réponse. Subsidiairement, il requiert le Tribunal fédéral d'ordonner la publication du texte suivant: 
 
Bernard Rappaz conteste les faits présentés le concernant dans le Nouvelliste entre le mois de mars et d'avril de cette année et notamment ceux mentionnés dans l'article intitulé "Le Stock de Bernard Rappaz caché à 'Chanvralon'". L'intéressé tient à souligner que sur les 40 tonnes de chanvre saisies, 26 tonnes de chanvre en vrac de la récolte de 2001, étaient destinées à la production de 130 kilos d'huile essentielle, produit à teneur extrêmement faible en THC valant environ 300'000 francs. La valeur du stock total est donc bien inférieure à celle donnée par la police qui estime cette marchandise à sa valeur sur le marché des stupéfiants. 
Sur le principe du droit à une réponse, le recourant ne s'en prend plus qu'à quatre articles. Invoquant une violation de l'art. 28g al. 1 CC, il soutient que le terme "trafiquant", le "taux de THC" indiqué, la "valeur du stock saisi" sont bien des faits et que, partant, la décision cantonale doit être annulée ou réformée. Invoquant l'art. 28h CC, il estime qu'il a la faculté de modifier le texte de sa réponse même au stade du recours en réforme au Tribunal fédéral; le texte qu'il avait proposé contenait certes des éléments qui ne relevaient pas des faits, mais d'appréciations personnelles; cependant, le juge n'avait pas le droit de le débouter de sa demande qui était partiellement justifiée. 
 
Une réponse au recours n'a pas été demandée. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Les litiges concernant le droit de réponse sont considérés comme des contestations civiles portant sur un droit de nature non pécuniaire au sens de l'art. 44 OJ; le recours en réforme est donc en principe ouvert (ATF 112 II 193 consid. 1b; 122 III 301 consid. 1a). Interjeté, par ailleurs, en temps utile contre une décision finale prise par le tribunal suprême du canton, le recours est recevable au regard des art. 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ. 
2. 
2.1 Une fois la demande en exécution du droit de réponse déposée en justice (art. 28l CC), la modification du texte de la réponse, qui constitue une modification des conclusions, est réglée par le droit de procédure cantonal (ATF 117 II 1 consid. 2e). Conformément au principe de disposition, le demandeur peut réduire librement ses conclusions, à savoir abréger le texte de sa réponse ou en restreindre le contenu. En revanche, il ne peut modifier ses conclusions, à savoir étoffer son texte ou en changer le contenu, qu'à certaines conditions fixées par le droit de procédure cantonal. 
2.2 Dans le recours en réforme au Tribunal fédéral, les conclusions nouvelles sont prohibées par l'art. 55 al. 1 let. b OJ. Comme cette voie de droit a pour but de contrôler et, le cas échéant, de modifier la décision du tribunal cantonal suprême, il est normal que seules les conclusions prises devant celui-ci puissent être soumises au Tribunal fédéral. Le recourant peut certes réduire les conclusions qu'il avait prises en dernière instance cantonale; en revanche, il ne peut pas les augmenter, c'est-à-dire en prendre de plus étendues ou portant sur un montant plus élevé, ni les modifier, savoir réclamer un objet différent, ni en ajouter de nouvelles (Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. I, Berne 1990, n. 1.4.3. ad art. 55 OJ). C'est dans ce sens qu'il y a lieu de comprendre la jurisprudence rendue en matière de droit de réponse lorsqu'elle permet au demandeur de procéder encore à certains changements (ATF 117 II 1 consid. 2e). Lorsque la version initiale du texte de la réponse est simplement raccourcie, sans modification de son contenu, il s'agit d'une réduction des conclusions, qui est admissible; en revanche, lorsque le nouveau texte diffère de la version initiale au point que l'objet du litige est tout différent de celui qui a été soumis à l'autorité cantonale, il y a modification inadmissible des conclusions. 
2.3 Saisi d'une action en exécution du droit de réponse tendant à la diffusion d'un texte, le juge - et même le Tribunal fédéral sur recours en réforme - peut le "réduire, voire le modifier et même le compléter", à certaines conditions, afin de l'adapter aux exigences légales. 
 
Il est évident que le juge peut raccourcir le texte de façon qu'il soit conforme à la loi, car cela correspond à l'admission partielle de la demande. La faculté qu'il a de le modifier et de le compléter entre également dans son pouvoir de réduction: du point de vue du contenu du texte, la modification ou le complètement du texte sont en réalité une réduction; il s'agit, en effet, de diminuer la portée de la réponse, c'est-à-dire d'admettre un énoncé plus restreint que celui qui avait été demandé au départ. De telles réductions ou adjonctions ne peuvent certes être admises que dans la mesure où le contenu du texte n'en devient pas plus étendu que le texte initialement soumis à l'entreprise de médias. Elles ne peuvent qu'affaiblir le droit de réponse original. Du point de vue de son contenu, et non en ce qui concerne le nombre de mots, le texte modifié représente une simple réduction du texte d'origine. Ainsi comprises, ces modifications ne constituent qu'une admission partielle de la demande et ne dérogent d'aucune manière aux principes du droit de procédure (ATF 117 II 1 consid. 2 b/bb et cc; 119 II 104 consid. 3e). 
 
Le juge ne peut toutefois admettre partiellement la demande que lorsque le texte de la réponse est formulé de telle sorte qu'il puisse être modifié sans difficulté pour respecter les exigences légales. On ne saurait, en effet, exiger du juge qu'il rédige lui-même le texte du droit de réponse (ATF 117 II 1 consid. 2c, 115 consid. 3c p. 121; 119 II 104 consid. 3e). 
3. 
3.1 En l'espèce, le nouveau texte de 8 lignes est en substance fondamentalement différent de celui de 9 pages A4 présenté à la défenderesse. Alors que le texte initial était, comme l'a constaté la cour cantonale, un plaidoyer pour la libéralisation du cannabis en Suisse et était destiné à présenter le demandeur sous un jour favorable, les 8 lignes nouvellement proposées se limitent à la présentation de la version des faits du demandeur concernant un seul objet: les 40 tonnes de chanvre de "Chanvralon". 
 
Même si les termes de ces 8 lignes figurent sous une autre forme dans le texte de 9 pages A4, ce nouveau texte ne peut pas être considéré comme une simple réduction des conclusions initiales. Ce nouveau chef de conclusions, bien qu'il repose sur le même complexe de faits, modifie totalement l'objet du litige. Celui-ci est fondamentalement différent de celui qui a été soumis à l'autorité cantonale et jugé par elle. En présence d'une telle modification, la juridiction de réforme ne peut pas remplir sa tâche, qui est de contrôler l'application du droit fédéral par l'autorité cantonale. Tant les motifs de l'autorité cantonale, en particulier l'abus de droit qu'il y a à utiliser le droit de réponse à des fins étrangères à la protection de la personnalité, que les griefs invoqués dans le recours en réforme en deviennent sans objet. Le chef de conclusions subsidiaire tendant à la condamnation à la publication du texte de réponse modifié est donc irrecevable. 
3.2 Contrairement à ce que soutient le recourant, la cour cantonale ne pouvait pas admettre partiellement sa demande en rédigeant elle-même un nouveau texte, dans le sens souhaité aujourd'hui par lui. On ne saurait, en effet, exiger du juge qu'il remanie un texte de 9 pages A4 pour en extraire un texte de quelques lignes respectant les exigences légales. Il n'y a là aucune violation du droit fédéral. Partant, le chef de conclusions principal tendant à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à la cour cantonale doit être rejeté. 
4. 
Vu le sort du recours les frais de la procédure doivent être mis à la charge du demandeur (art. 156 al. 1 OJ). La défenderesse n'ayant pas été invitée à répondre, il n'y a pas lieu de lui allouer des dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du demandeur. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais. 
Lausanne, le 18 février 2003 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: Le greffier: