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Eidgenössisches Versicherungsgericht 
Tribunale federale delle assicurazioni 
Tribunal federal d'assicuranzas 
 
Cour des assurances sociales 
du Tribunal fédéral 
 
Cause 
{T 7} 
C 179/02 
C 182/02 
 
Arrêt du 19 décembre 2002 
Ire Chambre 
 
Composition 
MM. les Juges Schön, Président, Borella, Lustenberger, Kernen et Frésard. 
Greffier : M. Wagner 
 
Parties 
Service cantonal des arts et métiers et du travail du canton du Jura, rue du 24-Septembre 1, 2800 Delémont, recourant, 
 
contre 
 
C.________ SA, intimée, représentée par Me Martine Lang, avocate, chemin de la Gare 27, 2900 Porrentruy 1 
 
Instance précédente 
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, Porrentruy 
 
(Jugements du 27 juin 2002) 
 
Faits : 
A. 
L'entreprise C.________ SA, dont le champ d'activité s'étend au placement de personnel fixe et temporaire ainsi qu'à l'évaluation et à la sélection de cadres, a déposé le 30 janvier 2002 un préavis de réduction de l'horaire de travail en ce qui concerne son agence de A.________ et un autre préavis de réduction de l'horaire de travail en ce qui concerne son agence de B.________. Sous la rubrique relative à l'état du personnel, elle indiquait que, parmi les quatorze personnes liées à l'entreprise par un contrat de travail de durée indéterminée, quatre personnes de l'agence de A.________ et une de l'agence de B.________ étaient touchées par la réduction de l'horaire de travail d'une durée probable du 11 février au 25 juillet 2002. 
Par deux décisions du 6 février 2002, le Service cantonal des arts et métiers et du travail du canton du Jura s'est opposé au versement de l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail en ce qui concerne toute l'entreprise C.________ SA. 
B. 
Dans deux mémoires séparés, l'entreprise C.________ SA, agences de A.________ et de B.________, a recouru contre ces décisions devant la Chambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura. Admettant les recours, cette juridiction, par jugements du 27 juin 2002, a annulé les deux décisions, dit que l'entreprise en cause avait droit à des indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail pour son agence de A.________ et pour celle de B.________ et invité la Caisse d'assurance-chômage de la Communauté sociale interprofessionnelle à verser à l'entreprise les indemnités dues. Dans chaque cause, elle a condamné le Service cantonal des arts et métiers et du travail du canton du Jura à allouer à C.________ SA une indemnité de dépens de 1000 fr. 
C. 
Le Service cantonal des arts et métiers et du travail du canton du Jura interjette recours de droit administratif contre ces deux jugements, en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de ceux-ci. 
Dans deux mémoires de réponse, l'entreprise C.________ SA, agences de A.________ et de B.________, conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. Elle relève que les mémoires de recours du 22 juillet 2002 comportent la signature de C.________, qui travaille en qualité de juriste au Service des arts et métiers et du travail (SAMT), et qu'en procédure cantonale le SAMT était représenté et engagé par son chef de service D.________. Elle est d'avis qu'il appartient au SAMT d'établir que le recours satisfait aux exigences formelles. Dans le cas contraire, le Tribunal fédéral des assurances est invité à ne pas entrer en matière sur celui-ci. 
Invité par le juge délégué à se déterminer sur ce qui précède, le SAMT a produit une écriture complémentaire du 30 octobre 2002, signée par D.________, chef du service. Dans le délai qui lui a été imparti pour déposer ses observations, l'entreprise C.________ SA a pris position dans une écriture complémentaire du 18 novembre 2002. 
 
Considérant en droit : 
1. 
Les deux causes, qui opposent la même société (pour chacun de ses bureaux) au même office, qui posent un problème identique et pour lesquels deux jugements motivés en tous points de la même manière ont été rendus, peuvent être jointes (ATF 123 V 215 consid. 1, 120 V 466 consid. 1 et les références; cf. aussi ATF 127 V 33 consid. 1, 157 consid. 1, 126 V 285 consid. 1; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. I, p. 343 s.). 
2. 
La question de savoir si C.________ (juriste au Service des arts et métiers et du travail ; cf. Annuaire officiel de la République et canton du Jura 2001/2002, p. 61) est habilité à signer un recours de droit administratif émanant de l'autorité cantonale au sens de l'art. 102 al. 2 let. b LACI peut rester indécise. Lorsque le signataire n'est pas autorisé à signer, un délai convenable est imparti à l'intéressé pour réparer le vice (art. 30 al. 2 OJ; cf. aussi RAMA 2002 p. 180 consid. 4a/cc). Or, il y a lieu de constater que l'écriture complémentaire de l'office recourant, signée par le chef du service, est de nature, si besoin était, à régulariser le vice. 
3. 
Sur le fond, il s'agit de savoir si le personnel propre d'une entreprise de travail temporaire (et non les employés dont les services sont loués à des tiers) peut bénéficier de l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail. D'emblée, il y a lieu de constater que l'art. 33 al. 1 let. e in fine LACI n'est pas applicable, puisqu'il vise le travail temporaire comme tel (auquel la jurisprudence assimile le travail en régie), c'est-à-dire les travailleurs temporaires eux-mêmes (ATF 119 V 357; Thomas Nussbaumer, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, p. 156 ch. 406; Gerhards, Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz, vol. I, note 105 ad art. 32-33 LACI). 
4. 
Les premiers juges retiennent en substance que l'importante baisse du nombre de placements intérimaires à effectuer (40 pour cent de diminution) par l'intimée ne constitue pas une perte usuelle de travail due à des fluctuations économiques qu'une entreprise de travail temporaire est à même de prévoir. Il ne s'agit pas de risques normaux d'exploitation, mais de circonstances exceptionnelles. La perte de travail est due à une baisse générale d'activité, qui peut être qualifiée d'extraordinaire, compte tenu du faible niveau de l'emploi dans le canton du Jura et du fait que les entreprises utilisatrices de main-d'oeuvre temporaire sont actives dans les secteurs de l'horlogerie, de la mécanique et du bâtiment, qui sont également les secteurs économiques les plus touchés et cela de façon très rapide et imprévisible. 
5. 
Aux termes de l'art. 33 al. 1 let. a dernière partie de la phrase LACI, la perte de travail n'est pas prise en considération lorsqu'elle est due à des circonstances inhérentes aux risques normaux d'exploitation que l'employeur doit assumer. Selon la jurisprudence, doivent être considérés comme des risques normaux d'exploitation, les pertes de travail habituelles, c'est-à-dire celles qui, d'après l'expérience de la vie, surviennent périodiquement et qui, par conséquent, peuvent faire l'objet de calculs prévisionnels. Les pertes de travail susceptibles de toucher chaque employeur sont des circonstances inhérentes aux risques d'exploitation généralement assumés par une entreprise; ce n'est que lorsqu'elles présentent un caractère exceptionnel ou extraordinaire qu'elles ouvrent droit à une indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail. La question du risque d'exploitation ne saurait par ailleurs être tranchée de manière identique pour tous les genres d'entreprises, ce risque devant au contraire être apprécié dans chaque cas particulier, compte tenu de toutes les circonstances liées à l'activité spécifique de l'exploitation en cause (p. ex. DTA 1995 n° 20 p. 119 s. consid. 1b). 
6. 
Du point de vue du marché de l'emploi, les entreprises de travail temporaire ont pour but de mettre à disposition dans de très brefs délais des effectifs de travailleurs que les institutions publiques, notamment les offices du travail ne sont guère en mesure d'assurer dans de telles proportions. En période de récession économique, c'est la main-d'oeuvre temporaire qui est en premier lieu touchée et, par contre-coup, les entreprises de travail temporaire. Mais à l'inverse, il arrive aussi, en période de récession, que du personnel faisant défaut doive être remplacé à court terme ou que l'entreprise utilisatrice doive faire face à des pointes d'activité que le personnel permanent n'est pas à même de maîtriser (voir à ce sujet le message du Conseil fédéral concernant la révision de la LF sur le service de l'emploi et la location de services du 27 novembre 1985 ([FF 1985 III 535]). Comme le relève avec raison le recourant, l'entreprise de travail temporaire a pour vocation d'absorber les fluctuations du volume de travail des entreprises clientes. Dans une certaine mesure tout au moins, les entreprises utilisatrices transfèrent aux sociétés de travail temporaire les risques liés à ces fluctuations, lesquelles se répercutent forcément sur les secondes. C'est dire que la branche intérimaire est extrêmement sensible à la conjoncture. Elle l'anticipe généralement en accusant l'amplitude des variations de celle-ci (Luc Thévenoz, Le travail intérimaire, thèse Genève 1987 p. 20). De telles variations, amplifiées par la nature-même de l'activité, apparaissent ainsi inhérentes aux risques d'exploitation d'une entreprise de location de services (voir, à propos de l'activité de location de services, Rémy Wyler avec la collab. de Raphaël Tatti -, Droit du travail, Berne, Staempfli 2002 p. 74). C'est est une des raisons d'ailleurs pour lesquelles le législateur a astreint les bailleurs de services au dépôt de sûretés (Thévenoz, La nouvelle réglementation du travail intérimaire, in le Droit du travail en pratique, Journée 1992 du droit du travail et de la sécurité sociale, Zurich, Schulthess 1994 p. 14). Sauf circonstances exceptionnelles non liées à ces risques, les conditions du droit à l'indemnité ne sont pas réalisées pour ce type d'entreprise. 
 
On notera aussi, dans ce contexte, que les entreprises de travail temporaire sont soumises à une concurrence accrue. Comme le démontre le recourant, en produisant un tableau concernant le nombre des agences de placement et de locations de services agréés par le seco et enregistrées auprès de cet office, le nombre de ces agences a sensiblement augmenté entre 1996 et 2000 (ce nombre est passé de 1034 à 1320); cela s'explique par la bonne conjoncture économique durant ces années et aussi par le fait que la création d'une entreprise de travail intérimaire nécessite peu de ressources en personnel et en investissement par rapport à la masse salariale qu'elle peut être appelée à gérer. En cas de ralentissement économique, la concurrence est d'autant plus forte entre ces entreprises que le nombre de celle-ci s'est accru. Cette situation peut conduire à des revers très sévères, comme par exemple durant la récession des années 1975/76 (message précité, p. 535) et, dans une moindre mesure, durant les années 1982 et 1983 (Thévenoz, Le travail intérimaire, op. cit. p. 21 et les données chiffrées à la note n° 4 en bas de page). Cette concurrence accrue est également un risque lié à l'exploitation des entreprise de ce genre. 
7. 
En l'espèce, les premiers juges ne font état d'aucune circonstance exceptionnelle qui permettrait de conclure que la perte de travail invoquée a pour origine une cause extraordinaire qui ne soit pas inhérente au risque d'exploitation. Une diminution, même importante, de l'activité ne représente pas un telle circonstance extraordinaire. La baisse générale d'activité dans les différents secteurs de l'économie jurassienne ne fait que se répercuter - dans de plus grandes proportions - sur l'activité de l'intimée. Celle-ci, du reste, ne prétend pas qu'elle serait touchée plus durement qu'une autre entreprise de la même branche. A titre de comparaison, on peut relever que la Cour de céans a jugé que dans une situation conjoncturelle difficile pour les finances publiques, on ne saurait tenir le report de délais d'ouvertures de chantiers par des collectivités publiques pour des circonstances exceptionnelles; les pertes de travail qui peuvent en découler doivent donc être considérées comme des circonstances inhérentes aux risques normaux d'exploitation d'une entreprise de construction (arrêt F.T.H. du 18 mars 1997 [C 316/96]; DTA 1995 n° 20 p. 120 consid. 2b). 
8. Il s'ensuit que les recours doivent être admis. 
Le recourant, qui obtient gain de cause conclut à des dépens. Ceux-ci ne peuvent toutefois pas lui être alloués (art. 159 al. 2 in fine en corrélation avec l'art. 135 OJ; ATF 126 II 62 consid. 8, 118 V 169 s. consid. 7). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce : 
 
1. 
Les causes C 179/02 et C 182/02 sont jointes. 
2. 
Les recours sont admis et les jugements de la Chambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, du 27 juin 2002, sont annulés. 
3. 
Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de dépens. 
4. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Caisse d'assurance-chômage de la Communauté Sociale Interprofessionnelle, Porrentruy, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, et au Secrétariat d'Etat à l'économie. 
Lucerne, le 19 décembre 2002 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances 
Le Président de la Ire Chambre: Le Greffier: