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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_154/2018  
 
 
Arrêt du 20 juillet 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Chaix et Kneubühler. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
 A.________, représenté par 
Me Jacques Michod, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
 Anthony Kalbfuss, Procureur auprès du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois, quai Maria-Belgia 18, 1800 Vevey, 
intimé, 
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens. 
 
Objet 
Procédure pénale; récusation, 
 
recours contre la décision de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 1er février 2018 (76 - PE10.024730-AKA). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A la suite d'une plainte déposée le 13 octobre 2010, une instruction pénale a été ouverte contre A.________ notamment pour extorsion et chantage par métier, ainsi que pour escroquerie par métier. La Procureure en charge de cette enquête au sein du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois a été dessaisie le 16 septembre 2016 par le Procureur général en faveur du Procureur Anthony Kalbfuss. 
Après avoir sollicité sa réaudition par le Procureur, A.________ a été convoqué à une audience fixée au 8 février 2017. Deux jours avant cette date - le 6 février 2017 -, il en a sollicité le report, produisant un certificat médical. Ce même jour, le Procureur a recueilli les déterminations de A.________, ainsi que celles des autres parties. Il n'y a pas eu d'autre suite. 
Au regard de l'impatience manifestée par les autres parties et de la production, le 21 novembre 2017, par A.________ d'un nouveau certificat médical, le Procureur a cité, par courrier du 6 décembre 2017, le prévenu à comparaître le 24 janvier 2018, estimant que celui-ci serait apte à se rendre à cette audition. Le 22 janvier 2018, A.________, agissant par son conseil, a produit un nouveau certificat médical et a sollicité le report de l'audience. Cette requête a été rejetée ce même jour par le Procureur. Le 24 janvier 2018, une heure avant l'audience appointée, le mandataire de A.________ a informé le Procureur que son client ne comparaîtrait pas, ce dont le magistrat a pris note par avis du même jour, indiquant qu'il en déduirait "les conséquences qui s'imposent". Le conseil du prévenu s'est présenté seul à cette audience. 
Le 25 janvier 2018, le Procureur a émis un mandat d'amener contre A.________ et celui-ci, après avoir été interpellé à son arrivée à l'aéroport de Genève le 25 janvier 2018, a été entendu le lendemain. Selon le procès-verbal de cette audition, le prévenu était "très bronzé" et a reconnu avoir réservé des billets pour Dubaï préalablement à la réception du mandat de comparution; pour le surplus, A.________ a fait valoir son droit de se taire. 
 
B.   
Le 25 janvier 2018, A.________ a déposé une demande de récusation du Procureur, lui reprochant le ton utilisé dans ses courriers, ainsi que d'être prévenu à son encontre. Relevant le caractère abusif de cette requête, le Procureur a conclu à son rejet. 
La Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté cette demande par arrêt du 1er février 2018. 
 
C.   
Par acte du 22 mars 2018, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant à sa réforme en ce sens que sa demande de récusation du 25 janvier 2018 du Procureur Anthony Kalbfuss dans la procédure PE10.024730-AKA soit admise et que la cause soit transmise au Procureur général du canton de Vaud afin qu'il désigne un autre procureur pour l'instruire. A titre subsidiaire, le recourant demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Invitée à se déterminer, la cour cantonale s'est référée à ses considérants et le Procureur intimé a conclu au rejet du recours. Le 9 mai 2018, le recourant a persisté dans ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision relative à la récusation d'un magistrat pénal peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale. Le recourant, prévenu dont la demande de récusation a été rejetée, a qualité pour recourir en vertu de l'art. 81 al. 1 LTF. Pour le surplus, le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en instance cantonale unique (art. 80 al. 2 in fine LTF) et les conclusions prises sont recevables (art. 107 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Le recourant reproche à l'autorité précédente une violation de l'art. 56 let. f CPP. Il soutient en substance qu'en raison de son incapacité de comparaître médicalement attestée, la fixation en date du 6 décembre 2017 d'une audition au 24 janvier 2018, ainsi que le refus de reporter cette audience démontreraient la prévention du Procureur intimé; tel serait également le cas du mandat d'amener émis à son encontre, ainsi que les conditions dans lesquelles il avait été interpellé par la police. 
 
2.1. Un magistrat est récusable, aux termes de l'art. 56 let. f CPP, lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil, sont de nature à le rendre suspect de prévention. Cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes. Il n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 143 IV 69 consid. 3.2 p. 74).  
Des décisions ou des actes de procédure qui se révèlent par la suite erronés ne fondent pas en soi une apparence objective de prévention; seules des erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constitutives de violations graves des devoirs du magistrat, peuvent fonder une suspicion de partialité, pour autant que les circonstances dénotent que la personne en cause est prévenue ou justifient à tout le moins objectivement l'apparence de prévention. En effet, la fonction judiciaire oblige à se déterminer rapidement sur des éléments souvent contestés et délicats. Il appartient en outre aux juridictions de recours normalement compétentes de constater et de redresser les erreurs éventuellement commises dans ce cadre. La procédure de récusation n'a donc pas pour objet de permettre aux parties de contester la manière dont est menée l'instruction et de remettre en cause les différentes décisions incidentes prises notamment par la direction de la procédure (ATF 143 IV 69 consid. 3.2 p. 74 s.). 
 
2.2. La cour cantonale a considéré qu'elle ne discernait pas dans les différentes décisions prises par le Procureur intimé - qui n'avaient au demeurant pas été contestées par les voies de droit idoines - d'indices de prévention de la part du magistrat. Elle a estimé que l'appréciation de ce dernier, ainsi que le ton employé dans ses courriers étaient impartiaux et objectifs, ne prêtant pas le flanc à la critique. Selon l'autorité précédente, il en allait de même de l'appréciation par le Procureur de l'aptitude du recourant à comparaître pour être réentendu, à sa demande, cela malgré les certificats médicaux; cette appréciation était confirmée par le fait que le recourant avait pu partir en vacances à Dubaï - ce qu'il avait omis de dire à la direction de la procédure - et que, le 26 janvier 2018, il était apparu parfaitement à même de comparaître lorsqu'il avait été amené devant le Procureur.  
 
2.3. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique. En particulier, on ne voit toujours pas quels actes du Procureur intimé démontreraient une apparence de prévention à l'encontre du recourant. Il entre en effet dans ses prérogatives d'apprécier les éléments de preuve qui lui sont soumis et de rendre, le cas échéant, des décisions. Si celles-ci ne correspondent pas à la volonté du recourant ou sont annulées sur recours, cela ne constitue pas en soi un motif de récusation. Le recourant, sans citer le moindre terme précis des écritures du magistrat intimé, se limite d'ailleurs à substituer sa propre appréciation du contenu des certificats médicaux produits.  
S'agissant en particulier de ces documents, ils ont été pris en compte par le Procureur intimé, ce malgré le défaut d'information sur la pathologie dont souffrait le recourant et/ou le traitement suivi, puisque l'audience fixée au 8 février 2017 n'a pas eu lieu. Le magistrat intimé n'a pas non plus ignoré les problèmes de santé du recourant dans la suite de la procédure puisqu'il lui a expliqué pourquoi il ne considérait pas que les certificats médicaux produits en novembre 2017 et janvier 2018 justifieraient de ne pas fixer de séance le 24 janvier 2018, respectivement de prononcer son renvoi (cf. ses courriers du 6 décembre 2017 et du 22 janvier 2018). On relèvera au demeurant que le recourant, bien qu'averti le 6 décembre 2017 de cette date, n'a réagi que le 22 janvier 2018; s'il soutient avoir immédiatement effectué des démarches en vue d'obtenir une attestation médicale complémentaire (cf. p. 7 du mémoire de recours), cela ne ressort pas de l'arrêt cantonal et le recourant ne prétend pas que l'autorité précédente aurait, de manière arbitraire, omis de prendre en compte les pièces produites attestant de telles démarches, le Tribunal fédéral étant dès lors lié par les faits constatés dans le jugement entrepris (art. 105 al. 1 LTF). Dans la mesure où le recourant considérait que l'appréciation du contenu des certificats médicaux était arbitraire ou violait l'art. 114 CPP, il pouvait faire valoir ses droits, non pas par le biais de la procédure de récusation, mais en déposant un recours au sens de l'art. 393 al. 1 let. a CPP. Dès lors qu'il n'appartenait pas à l'autorité précédente en tant que juge de la récusation de procéder à cet examen, le grief de déni de justice - dans la mesure où il serait recevable vu l'existence d'une décision - et celui de violation du droit d'être entendu en lien avec le défaut de discussion du contenu des certificats médicaux peuvent être écartés. C'est le lieu également de rappeler au recourant qu'une autorité peut procéder à une appréciation anticipée des preuves (ATF 141 I 60 consid. 3.3 p. 64; 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299), ainsi que limiter son examen aux griefs pertinents (ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183). 
Dès lors que le Procureur intimé a motivé ses refus de reporter l'audience en raison d'une incapacité du recourant (cf. les courriers des 6 décembre 2017 et 22 janvier 2018), que le mandat de comparution du 6 décembre 2017 mentionnait les conséquences d'un défaut de comparution (cf. art. 205 al. 4 CPP) et que l'avocat du recourant a confirmé que ce dernier ne se présenterait pas le 24 janvier 2018 (cf. sa télécopie de ce jour), le mandat d'amener émis le 25 suivant ne démontre pas non plus une apparence de prévention à l'égard du recourant, mais constitue tout au plus une étape subséquente de la procédure, au demeurant non ignorée du recourant (cf. le mandat de comparution faisant état de l'art. 205 CPP et le courrier du 24 janvier 2018 du mandataire du recourant p. 2). 
En tout état de cause, le principe de la bonne foi, concrétisé à l'art. 3 al. 2 let. a CPP, ne concerne, en procédure pénale, pas seulement les autorités pénales mais le cas échéant les différentes parties, y compris le prévenu; on en déduit en particulier l'interdiction des comportements contradictoires (ATF 143 IV 117 consid. 3.2 p. 121). Or, celui adopté par le recourant n'est de loin pas dénué de toute critique, frisant même parfois la témérité. Ainsi, il ne réagit pas aux mandats de comparution qui lui sont adressés et attend, tant en février 2017 qu'en janvier 2018, d'être à deux jours de la date des audiences prévues pour en demander le report; il se prévaut de plus, la première fois, d'un motif connu depuis septembre 2016 et ne donne, en novembre 2017, aucune information complémentaire quant à l'évolution de sa maladie. Enfin, indépendamment de son état de santé, le recourant savait, en date du 6 décembre 2017, qu'il serait à l'étranger le 24 janvier 2018, renseignement qu'il n'a pourtant pas jugé utile de transmettre à la direction de la procédure; cet élément paraît au demeurant pouvoir confirmer - certes postérieurement - l'appréciation effectuée par le Procureur intimé quant à la capacité de comparaître du recourant, respectivement le cas échéant pouvoir justifier un mandat d'amener (cf. art. 207 al. 1 let. a ou b CPP). 
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Chambre des recours pénale n'a pas violé le droit fédéral en rejetant la requête de récusation déposée le 25 janvier 2018 par le recourant. 
 
3.   
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
  
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Ministère public central du canton de Vaud, à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi que, par le biais de leur mandataire, à B.________, à C.________ et à D.________. 
 
 
Lausanne, le 20 juillet 2018 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Kropf