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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
5P.383/2006 /frs 
 
Arrêt du 20 décembre 2006 
IIe Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Raselli, Président, 
Hohl et Marazzi. 
Greffier: M. Braconi. 
 
Parties 
Dame X.________, 
recourante, représentée par Me Franck Ammann, avocat, 
 
contre 
 
X.________, 
intimé, représenté par Me Olivier Flattet, avocat, 
Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne, Palais de Justice de Montbenon, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
art. 9 Cst. (mesures protectrices), 
 
recours de droit public [OJ] contre l'arrêt du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne du 29 juillet 2006. 
 
Faits : 
A. 
X.________ et dame X.________, se sont mariés en 1985. Deux enfants sont issues de cette union: A.________, née en 1985, et B.________, née en 1990. En novembre 2003, le mari a été condamné à deux ans de prison ferme du chef d'homicide par négligence; il a alors quitté le territoire suisse et y est revenu seulement en été 2005, pour être incarcéré le 15 août 2005. 
B. 
B.a Statuant le 10 septembre 2004 par voie de mesures protectrices de l'union conjugale, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a, notamment, autorisé l'épouse à vivre séparée pour une durée indéterminée (ch. I), attribué à la mère la garde de l'enfant B.________ (ch. II) et dit que, en l'état, il ne se justifiait pas d'astreindre le mari au versement d'une contribution à l'entretien des siens (ch. V). 
B.b L'épouse a requis de nouvelles mesures protectrices en novembre 2005. 
 
Par prononcé du 9 mai 2006, le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a condamné le mari à contribuer à l'entretien des siens par le paiement d'une pension de 500 fr. par mois, allocations familiales en sus, dès le 1er décembre 2005 (ch. II). 
 
Sur appel du mari, le Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a, par arrêt du 29 juillet 2006, modifié ce jugement en ce sens que «toute contribution due [par le mari] pour l'entretien des siens est suspendue» (ch. II). 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral pour violation de l'art. 9 Cst., dame X.________ conclut à l'annulation de cet arrêt. 
 
L'intimé propose le rejet du recours; la juridiction cantonale a renoncé à répondre. 
D. 
Par ordonnance présidentielle du 20 décembre 2006, l'effet suspensif a été attribué au recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral vérifie d'office et librement la recevabilité du recours qui lui est soumis (ATF 132 III 291 consid. 1 p. 292 et la jurisprudence citée). 
1.1 Les décisions prises en matière de mesures protectrices de l'union conjugale ne sont pas susceptibles de recours en réforme, faute d'être finales au sens de l'art. 48 al. 1 OJ (ATF 127 III 474 consid. 2 p. 476 ss et les références). Les moyens invoqués ne pouvant pas être soumis par une autre voie de droit au Tribunal fédéral, le présent recours est ouvert au regard de l'art. 84 al. 2 OJ
1.2 Déposé en temps utile à l'encontre d'une décision finale rendue en dernière instance cantonale (p. ex.: arrêt 5P.145/2005 du 26 mai 2005, consid. 1.2 et les arrêts cités), le recours est également recevable sous l'angle des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ. 
1.3 Dans un recours de droit public pour arbitraire, les faits et moyens de preuve nouveaux sont prohibés (ATF 129 I 49 consid. 3 p. 57 et les références). Le Tribunal fédéral s'en tient, dès lors, aux faits constatés par l'autorité cantonale, à moins que le recourant ne démontre que ces constatations sont arbitrairement fausses ou lacunaires (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). Ces principes valent aussi pour la partie intimée (pour les nova: ATF 118 III 37 consid. 2a in fine p. 39; pour les exigences de motivation: ATF 128 III 4 consid. 4c/aa p. 7). 
 
En l'espèce, à défaut d'une telle démonstration, il n'y a pas lieu de tenir compte des allégations de la recourante qui s'écartent des faits constatés dans la décision déférée, notamment celles relatives à la cessation de toute activité de l'entreprise de l'intimé et au licenciement des deux employés de cette société. 
 
Il en va de même de la critique de l'intimé selon laquelle le dossier ne comporte aucune pièce justificative des revenus de sa partie adverse, d'autant que l'intéressé ne prétend pas avoir contesté la quotité de ces gains en instance cantonale, ce qui ne ressort pas non plus de l'arrêt attaqué. Bien que la maxime inquisitoire soit applicable en l'occurrence (art. 280 al. 2 CC, par renvoi de l'art. 173 al. 3 CC; arrêts 5P.387/2002 du 27 février 2003, consid. 3.2, et 5P.333/2002 du 19 décembre 2002, consid. 3.1.2), dès lors que la contribution réclamée par la recourante doit aussi couvrir les besoins de la fille mineure des parties, force est de constater que l'intimé n'a pas satisfait à son devoir de collaborer activement à la procédure en étayant sa propre thèse et en requérant à temps des preuves disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1 p. 413 et les citations). Enfin, il n'y a pas lieu de tenir compte de l'héritage qui serait échu à la recourante en juillet 2006 à la suite du décès de son père; cela étant, la requête de l'intimé tendant à la production de tout document permettant d'établir la quotité de la part successorale ainsi que la date de l'entrée en possession de l'héritage doit être écartée. 
2. 
La recourante se plaint d'arbitraire. En premier lieu, elle reproche à la juridiction cantonale d'avoir retenu «d'ores et déjà, pour une pension débutant le 1er décembre 2005, des charges hypothétiques non effectives et non prouvées, qui ne débuteront qu'en décembre 2006, voire postérieurement». En second lieu, elle affirme qu'il est insoutenable de n'avoir imputé qu'une capacité contributive de 2'500 fr. à l'intimé, alors même que celui-ci aurait déclaré pouvoir réaliser 4'000 fr. par mois en travaillant à mi-temps pour l'EPFL. 
2.1 D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et incontesté, ou heurte le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une solution différente soit concevable, voire préférable; une telle décision n'est de surcroît annulée que si elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1 p. 211 et les arrêts cités). 
2.2 Le Tribunal d'arrondissement a retenu que l'intimé, qui avait «fait preuve d'une volonté hors norme durant sa détention», notamment en parvenant à maintenir «son entreprise à flot, pourtant en grande difficulté», avait un minimum vital «strict» de 1'700 fr. par mois (montant de base pour personne seule: 1'100 fr.; frais de semi-détention: 250 fr.; assurance-maladie: 350 fr.). Toutefois, ce montant ne comprend pas les «frais du droit de visite» qui sera repris, les frais de véhicule pour «démarcher et livrer ses clients» et les «nombreux frais», en particulier de relogement, inhérents à sa libération conditionnelle. 
 
Ces frais se rapportent donc à des périodes futures, à savoir celles de semi-détention (août-décembre 2006) et de libération conditionnelle (à partir de décembre 2006). Or, non seulement leur estimation apparaît largement aléatoire et dépourvue de base factuelle, mais les magistrats précédents les ont en outre pris en considération pour supprimer toute pension afférente à la période antécédente, c'est-à-dire celle comprise entre les mois de décembre 2005 et juillet 2006, durant laquelle l'intimé versait mensuellement 500 à 600 fr. à sa fille aînée, sans supporter de toute évidence les frais en question. 
 
Le Tribunal d'arrondissement semble attacher une certaine importance au fait que, durant sa détention, l'intimé a versé 500 à 600 fr. par mois à sa fille aînée pour ses dépenses courantes. Cependant, il s'agit là d'une prestation volontaire que l'intéressé a octroyée à une personne de son choix et qui, pour ce motif déjà, ne pouvait se substituer à ses obligations légales; en admettant même que les conditions d'application de l'art. 277 al. 2 CC soient réalisées, l'obligation découlant de cette disposition ne saurait l'emporter sur celle à l'égard de l'épouse et de la fille mineure (cf. ATF 132 III 209 et la doctrine citée). Cet argument est ainsi dénué de pertinence. 
2.3 Il résulte de ces motifs que le Tribunal d'arrondissement aurait dû s'en tenir aux éléments qui lui étaient connus au moment où il a statué et renvoyer, le cas échéant, l'intimé à demander une modification de la décision conformément à l'art. 179 al. 1 CC. En jugeant comme il l'a fait, il a commis arbitraire, en sorte que le recours doit être admis pour ce motif déjà. 
3. 
Vu ce qui précède, il est superflu de connaître du second moyen de la recourante, d'autant que plusieurs éléments importants pour apprécier la capacité contributive de l'intimé devront encore être vérifiés. 
4. 
En conclusion, le présent recours doit être admis et la décision attaquée annulée. Les frais et dépens incombent à l'intimé (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de l'intimé. 
3. 
L'intimé versera à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et au Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne. 
Lausanne, le 20 décembre 2006 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: