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[AZA 0/2] 
 
1A.289/2000 
 
Ie COUR DE DROIT PUBLIC 
********************************************** 
 
22 janvier 2001 
 
Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président, 
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Mme la Juge suppléante Pont Veuthey. Greffier: M. Kurz. 
 
___________ 
 
Statuant sur le recours de droit administratif 
formé par 
G.________, représenté par Me Jean-Marie Crettaz, avocat à Genève, 
 
contre 
l'ordonnance rendue le 21 septembre 2000 par la Chambre d'accusation du canton de Genève; 
 
(entraide judiciaire à l'Espagne) 
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Le 25 mars 1996, un juge d'instruction de Madrid a adressé à la Suisse une demande d'entraide judiciaire dans le cadre d'une enquête relative à des délits de faux et trafic d'influence, commis à l'occasion de l'adjudication de travaux par les chemins de fer espagnols à un consortium UTE (Union temporaire d'entreprises), mené par S.________. Des commissions illicites auraient été versées afin d'influencer les fonctionnaires chargés de l'adjudication. 
 
Cette demande, exécutée par le Juge d'instruction genevois, a fait l'objet d'un complément du 5 février 1999. 
L'entraide avec la Suisse avait permis de découvrir que l'un des inculpés, C.________, avait ouvert deux comptes au nom des sociétés A.________ et T.________ auprès de la banque Paribas de Bâle, afin d'y faire transiter des commissions illicites correspondant à des contrats fictifs. Un compte "E.________", détenu par C.________ auprès de X.________, avait également été utilisé pour recevoir une partie de ces fonds. La demande complémentaire évoque différents versements, dont le magistrat requérant aimerait connaître l'origine ou la destination; il demande l'identification des comptes à partir desquels (ou à destination desquels) ont eu lieu ces versements. Il requiert en particulier la documentation complète du compte n° xxx auprès de l'UBS de Genève, ainsi que l'identification de tous comptes en rapport avec celui-ci. 
 
Le 23 septembre 1999, l'autorité requérante a également demandé la production d'un exemplaire complet de l'ordonnance de condamnation rendue le 10 mai 1998 par le Juge d'instruction genevois à l'encontre de C.________, et dont ce dernier avait produit une copie caviardée; cette ordonnance mentionnait un compte détenu par un certain G. auprès de l'UBS de Genève, au sujet duquel l'autorité requérante désirait aussi être renseignée. 
 
B.- Le 7 mai 1999, le Juge d'instruction est entré en matière. 
 
Par ordonnance de clôture partielle du 20 avril 2000, il a décidé de transmettre l'ordonnance de condamnation du 10 novembre 1998, condamnant C.________ à une amende de 100'000 fr. pour infraction à l'art. 305bis CP. Cette ordonnance retient notamment qu'une partie des commissions parvenues sur les comptes A.________ et T.________ ont transité par le compte de G.________ auprès de l'UBS. 
 
Par ordonnance de clôture partielle du 8 mai 2000, le Juge d'instruction a décidé de transmettre à l'autorité requérante les documents, numérotés de 1 à 36, relatifs au compte n° xxx détenu par G.________ auprès de l'UBS de Genève, documentation qui avait déjà été recueillie dans le cadre d'une procédure pénale ouverte à Genève. Des fonds, versés par un membre du consortium, étaient parvenus sur ce compte en provenance de A.________, et d'autres avaient été versés en faveur de T.________. 
 
C.- G.________ a recouru contre l'ordonnance du 20 avril 2000, qui équivalait selon lui à une ordonnance de clôture rendue à son encontre, puisque son nom y figurait en tant que titulaire de compte. 
 
G.________ a également recouru contre l'ordonnance de clôture partielle du 8 mai 2000. Neveu de C.________, il expliquait lui avoir mis temporairement son compte à disposition, pour des opérations dont il ignorait tout. La procédure pénale menée en Espagne avait un caractère politique car elle était conduite par le Parti populaire, adversaire du Parti socialiste ouvrier espagnol, dont il était un ancien député. 
 
D.- Par ordonnance du 21 septembre 2000, la Chambre d'accusation a joint les deux recours. Elle a déclaré irrecevable le premier, car l'ordonnance de condamnation visait uniquement C.________; la mention d'un "monsieur G." et de son compte à l'UBS de Genève n'équivalait pas à la remise de documents bancaires. La Chambre d'accusation a rejeté le second recours: les documents à transmettre correspondaient à la requête espagnole; seule la personne poursuivie pouvait se plaindre de défauts tel que le caractère politique de la procédure étrangère. 
 
E.- G.________ forme un recours de droit administratif. 
Il demande l'annulation de cette dernière ordonnance ainsi que des décisions du juge d'instruction, et le refus de toute transmission. Subsidiairement, il demande que l'ordonnance de clôture du 8 mai 2000 soit limitée aux pièces n° 31 à 35. 
 
La Chambre d'accusation se réfère aux considérants de son ordonnance. Le juge d'instruction conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la police conclut au rejet du recours en se référant à la décision attaquée. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le recours est formé dans les délai et formes utiles contre deux décisions de clôture partielle confirmées en dernière instance cantonale (art. 80e let. a de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale - EIMP, RS 351. 1). Le recourant a qualité pour contester le prononcé d'irrecevabilité rendu à l'égard de son premier recours cantonal (ATF 122 II 130). En tant que titulaire du compte au sujet duquel le juge d'instruction a décidé de transmettre des renseignements, il a qualité pour recourir à l'égard de la seconde ordonnance de clôture confirmée par la Chambre d'accusation (art. 80h let. b EIMP, art. 9a let. a OEIMP). 
 
2.- Le recourant soutient que la Chambre d'accusation aurait dû entrer en matière sur le recours dirigé contre la transmission de l'ordonnance de condamnation du 10 novembre 1998. Ce document mentionne clairement son identité en tant que titulaire d'un compte à l'UBS, avec la considération qu'une partie des commissions illicites y aurait transité. 
Même si cette ordonnance, et la procédure pénale dans laquelle elle s'inscrit, concerne C.________, les renseignements qui y figurent suffiraient à justifier sa qualité pour recourir en tant que titulaire de compte (art. 9a OEIMP). 
 
L'intérêt du recourant pour recourir sur ce point n'est pas évident, dès lors que la Chambre d'accusation a aussi confirmé, dans la même décision, l'ordonnance de clôture relative à la transmission de l'ensemble de la documentation relative au compte du recourant. De toute manière, l'argumentation du recourant apparaît manifestement mal fondée. 
 
a) Selon la jurisprudence rappelée par la cour cantonale, la qualité pour recourir est reconnue aux personnes directement touchées par les mesures d'entraide, soit notamment le titulaire d'un compte bancaire dont les pièces sont saisies (ATF 118 Ib 547 consid. 1d et les arrêts cités), la personne qui doit se soumettre personnellement à une perquisition ou une saisie (ATF 118 1b 442 consid. 2c, 121 II 38), ou le témoin appelé à donner des renseignements le concernant personnellement (ATF 121 II 459). L'art. 9a let. a OEIMP n'accorde la qualité pour recourir qu'au détenteur - personne physique ou morale - d'un compte frappé d'une mesure de saisie ou de perquisition, quelle que soit la teneur des renseignements recueillis, et indépendamment de la qualité de personne poursuivie à l'étranger. 
 
b) Les personnes qui ne sont pas directement touchées par les mesures d'entraide peuvent aussi être admises à recourir, en particulier lorsque les renseignements recueillis, à la faveur d'une mesure de contrainte (interrogatoire, saisie) concernant un tiers, équivalent à la transmission de documents bancaires. En l'espèce, l'ordonnance de condamnation concerne C.________; elle mentionne le recourant en tant que titulaire d'un compte bancaire, mais elle n'en indique pas les références; elle relève également que des commissions illicites auraient transité par ce compte, mais on en ignore les détails, en particulier le montant et la date. Ces renseignements n'équivalent donc en aucune manière à la remise de la documentation bancaire. La décision d'irrecevabilité est dès lors conforme au droit fédéral. 
 
3.- Le recourant relève que, contrairement aux autres comptes au sujet desquels des renseignements sont demandés, le juge d'instruction espagnol n'indique aucune opération suspecte justifiant les investigations requises. Le recourant est le neveu de C.________, et aurait accepté de mettre son compte à disposition. Le 3 mai 1990 et le 6 mai 1991, deux versements de 1'900'000 écus et de 550'000 écus seraient parvenus sur ce compte, en provenance de A.________. Le recourant se serait ensuite contenté de clôturer le compte le 13 décembre 1993, en versant le solde, soit 3'644'970 écus, sur le compte de T.________, sur instruction de son oncle. 
L'autorité requérante connaît les transferts de fonds précités, qui font l'objet des pièces 31 à 35, et on ne verrait pas en quoi des renseignements supplémentaires seraient nécessaires. 
 
a) Le principe de la proportionnalité empêche d'une part l'autorité requérante de demander des mesures inutiles à son enquête et, d'autre part, l'autorité d'exécution d'aller au-delà de la mission qui lui est confiée (ATF 121 II 241 consid. 3a). L'autorité suisse requise s'impose une grande retenue lorsqu'elle examine le respect de ce principe, faute de moyens qui lui permettraient de se prononcer sur l'opportunité de l'administration des preuves. Le juge de l'entraide doit lui aussi se borner à examiner si les renseignements à transmettre présentent, prima facie, un rapport avec les faits motivant la demande d'entraide. Il ne doit exclure de la transmission que les documents n'ayant manifestement aucune utilité possible pour les enquêteurs étrangers (examen limité à l'utilité "potentielle", ATF 122 II 367 consid. 2c p. 371). 
 
 
b) Si l'autorité requérante doit exposer en quoi consistent ses soupçons, elle n'a pas à les prouver ni même à les rendre vraisemblables. Ainsi, on ne saurait reprocher au juge d'instruction espagnol de ne pas indiquer pour quels motifs il a été amené à s'intéresser au compte du recourant, car il ressort suffisamment clairement de la demande que ce compte pourrait avoir servi aux transferts de commissions illicites, ce qui est du reste vérifié sur le vu des explications fournies par le recourant lui-même. Quant à l'exécution de l'entraide, elle ne sort pas du cadre de ce qui est requis puisque l'autorité espagnole désire obtenir une documentation exhaustive à propos du compte du recourant. Il se peut que les transferts litigieux soient limités aux trois mouvements évoqués par le recourant, mais l'autorité requérante doit pouvoir s'en assurer, ce qui n'est possible qu'en examinant l'ensemble de la documentation bancaire. L'identité du titulaire fait naturellement aussi partie des renseignements requis et, compte tenu des relations entre le recourant et C.________, l'autorité requérante a un intérêt évident à en prendre connaissance. 
4.- Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être rejeté, aux frais du recourant (art. 156 al. 1 OJ). 
 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours. 
 
2. Met à la charge du recourant un émolument judiciaire de 5000 fr. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction et à la Chambre d'accusation du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice (B 94826/13). 
 
___________ 
Lausanne, le 22 janvier 2001 KUR/col 
 
Au nom de la Ie Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,