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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 7} 
I 560/06 
 
Arrêt du 22 juin 2007 
IIe Cour de droit social 
 
Composition 
MM. les Juges U. Meyer, Président, 
Borella et Kernen. 
Greffier: M. Berthoud. 
 
Parties 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
recourant, 
 
contre 
 
J.________, 
intimée, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat, Service juridique d'Intégration handicap, place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 28 mars 2006. 
 
Vu: 
la demande de prestations que J.________, née en 1958, a présentée le 11 octobre 2001, en invoquant des douleurs sur tout le corps; 
 
le questionnaire de l'employeur du 23 octobre 2001, dont il ressort que l'assurée a travaillé comme auxiliaire à la famille pour le compte de l'Association X.________, à plein temps dès le 1er juin 1996 pour un salaire annuel de 29'791 fr. (1999) et 29'253 fr. (2000), puis à 60 % à compter du 1er janvier 2001; 
 
la décision du 21 juillet 2003, confirmée sur opposition du 30 août 2004, par laquelle l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (l'office AI) a rejeté la demande de prestations; 
 
le recours que J.________ a formé contre cette décision devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud, en concluant à son annulation et à la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique; 
 
le rapport du 17 juin 2005, suivi d'un rapport complémentaire du 25 octobre 2005, dans lesquels le docteur K.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, mandaté en qualité d'expert par le tribunal cantonal, a diagnostiqué une schizophrénie paranoïde (F20.0) depuis 1973 aggravée en 2000 ainsi qu'un retard mental léger (F70) depuis l'enfance, en attestant que l'assurée avait présenté une incapacité de travail de 30 % en 1988, de 40 % dès le mois de mai 1996, de 70 % à partir d'avril 2001, puis de 100 % à compter de la fin de l'année 2002, la stabilisation constatée en 2005 ne permettant qu'une activité occupationnelle avec un rendement de 10 à 20 %; 
 
le jugement du 28 mars 2006, par lequel la juridiction cantonale a admis le recours et réformé la décision litigieuse en ce sens qu'elle a mis l'assurée au bénéfice d'un quart de rente d'invalidité à compter du 1er juin 1997, puis d'une rente entière à partir du 1er juillet 2001; 
 
le recours de droit administratif que l'office AI a interjeté contre ce jugement dont il a demandé la réforme, en ce sens que la rente ne soit versée à J.________ qu'à compter du 1er octobre 2000; 
 
les observations de l'intimée qui s'en est remise à justice; 
le préavis de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) qui a proposé d'admettre le recours; 
 
attendu: 
que le litige porte uniquement sur le moment à partir duquel l'intimée a droit à une rente d'invalidité; 
 
que le Tribunal des assurances a exposé correctement les règles applicables à la solution du litige, si bien qu'il suffit de renvoyer au jugement attaqué; 
 
qu'en particulier, en vertu de l'art. 48 al. 1 aLAI (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, applicable ratione temporis au cas d'espèce) le droit à des prestations arriérées s'éteint cinq ans après la fin du mois pour lequel elles étaient dues; 
 
que d'après l'art. 48 al. 2 aLAI, si l'assuré présente sa demande plus de douze mois après la naissance du droit, les prestations ne sont allouées que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande, mais qu'elles sont néanmoins allouées pour une période antérieure si l'assuré ne pouvait pas connaître les faits ouvrant droit à prestations et qu'il présente sa demande dans les douze mois dès le moment où il en a eu connaissance; 
 
que selon la jurisprudence, l'art. 48 al. 2 seconde phrase aLAI s'applique lorsque l'assuré ne savait pas et ne pouvait pas savoir qu'il était atteint, en raison d'une atteinte à la santé physique ou mentale, d'une diminution de la capacité de gain dans une mesure propre à lui ouvrir le droit à des prestations; 
 
que cette disposition ne concerne en revanche pas les cas où l'assuré connaissait ces faits mais ignorait qu'ils donnent droit à une rente de l'assurance-invalidité (ATF 102 V 112 consid. 1a p. 113); 
 
qu'autrement dit, les « faits ouvrant droit à des prestations (que) l'assuré ne pouvait pas connaître », au sens de l'art. 48 al. 2 seconde phrase aLAI, sont ceux qui n'étaient objectivement pas reconnaissables, mais non ceux dont l'assuré ne pouvait subjectivement pas saisir la portée (ATF 100 V 114 consid. 2c p. 119 sv; RCC 1984 p. 419 consid. 1 p. 420 sv); Valterio, Droit et pratique de l'assurance-invalidité [les prestations], p. 305 sv.); 
que toutefois, une restitution de délai doit également être accordée si l'assuré a été incapable d'agir pour cause de force majeure - par exemple en raison d'une maladie psychique entraînant une incapacité de discernement (ATF 108 V 226 consid. 4 p. 228 sv; consid. 1b de l'arrêt M. du 22 mars 2001, I 264/00) - et qu'il présente une demande de prestations dans un délai raisonnable après la cessation de l'empêchement; 
 
qu'il faut encore qu'il s'agisse d'une impossibilité objective, s'étendant sur la période au cours de laquelle l'assuré se serait vraisemblablement annoncé à l'assurance-invalidité s'il l'avait pu, et non d'une difficulté ou d'un motif subjectif, comme celui d'ignorer son droit ou de mal concevoir ses intérêts (ATF 102 V 112 consid. 2a p. 115; RCC 1984 p. 419 consid. 1 p. 420 sv; Valterio, eod. loc.); 
 
que la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242), mais que l'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395); 
 
que selon l'art. 132 al. 1 OJ dans sa version selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI (en vigueur depuis le 1er juillet 2006), dans une procédure concernant l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribunal fédéral peut ainsi examiner également l'inopportunité de la décision attaquée et n'est pas lié par la constatation de l'état de fait de l'autorité cantonale de recours; 
 
qu'en vertu de l'art. 132 al. 2 OJ, ces dérogations ne sont cependant pas applicables lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne les prestations de l'assurance-invalidité; 
 
que selon le ch. II let. c de la loi fédérale du 16 décembre 2005, l'ancien droit s'applique aux recours pendants devant le Tribunal fédéral au moment de l'entrée en vigueur de la modification; 
 
que dès lors que le recours qui lui est soumis était pendant au 1er juillet 2006, le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral résulte de l'ancien art. 132 OJ, dont la teneur correspond à celle du nouvel al. 1; 
qu'en l'espèce, les premiers juges ont considéré que l'intimée n'avait pas eu conscience de la nature de ses affections psychiques au moins jusqu'au moment où elle avait introduit sa demande de prestations en octobre 2001, dès lors qu'elle n'avait invoqué que des problèmes physiques (des douleurs multiples, à la cuisse gauche et à la colonne vertébrale, ainsi que des allergies), de sorte qu'elle avait été dans l'incapacité de faire valoir ses droits en temps utile et que le délai devait ainsi lui être restitué (art. 48 al. 2 aLAI); 
 
que si l'office recourant ne remet pas en cause le bien fondé du taux d'invalidité fixé par les premiers juges ainsi que la quotité des rentes qui en découlent (un quart de rente à compter du 1er juin 1997 puis une rente entière à partir du 1er juillet 2001), il estime toutefois que la demande de prestations est tardive et que les prestations ne sauraient être versées antérieurement au 1er octobre 2000; 
 
qu'en effet, le recourant relève que l'intimée a déclaré à l'expert K.________ qu'elle avait séjourné en institution psychiatrique et suivi un traitement psychiatrique dès l'année 1973 et qu'elle ne supportait pas le travail que sa mère voulait lui assigner à cette époque-là (rapport du 17 juin 2005, p. 9), ce qui le conduit à déduire qu'elle avait pleinement conscience de ses problèmes psychiatriques, voire de leur influence quant à sa capacité de travail, cela bien avant le dépôt de sa demande de prestations en octobre 2001; 
 
que dans son rapport d'expertise, le docteur K.________ a constaté que l'intimée était déjà gravement malade à l'adolescence, époque à laquelle elle avait été hospitalisée en milieu psychiatrique (p. 9); 
 
que l'expert est parvenu à la conclusion que l'intimée a cherché sciemment à masquer sa pathologie psychiatrique en s'appuyant sur l'atteinte physique qu'elle semble avoir placée au premier plan (p. 18); 
 
qu'il ressort ainsi clairement de l'expertise judiciaire que l'intimée avait conscience de ses problèmes psychiatriques depuis l'adolescence, c'est-à-dire des faits ouvrant droit à prestations litigieuses; 
 
que de plus, en suivant le docteur K.________, il faut admettre que l'incidence des affections psychiques de la recourante sur sa capacité de travail était objectivement reconnaissable depuis l'adolescence, puisque c'est à cette époque-là que cet expert judiciaire fait remonter le début de l'incapacité de travail partielle (cf. rapport du 25 octobre 2005, p. 5); 
qu'en outre, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la connaissance des faits ouvrant droit aux prestations ne porte pas sur la qualification de somatique ou de psychique des troubles présentés mais sur l'atteinte à la santé en tant que telle qui entrave la capacité de travail; 
 
qu'il y a lieu d'ajouter que le dossier ne contient pas d'indice permettant de penser, et l'intimée ne le soutient du reste pas, qu'elle était privée de la faculté d'agir raisonnablement en raison de ses troubles psychiques (situation que la jurisprudence assimile à un cas de force majeure; voir supra), ce qui eût justifié un complément d'instruction (cf. consid. 3 de l'arrêt F. du 6 août 2002, I 125/02, publié in RDAT 2003 I n. 71 277 p. 278 sv.); 
 
que par ailleurs, dans son préavis, l'autorité fédérale de surveillance conteste d'une part le bien-fondé de l'évaluation rétrospective de la capacité de travail par l'expert judiciaire, alléguant qu'elle ne se recoupe pas avec l'activité que l'intimée a réellement déployée, d'autre part l'évaluation médico-théorique de l'invalidité à laquelle la juridiction cantonale a procédé, alléguant qu'il aurait fallu comparer les revenus; 
 
qu'une évaluation rétrospective de la capacité de travail est en principe admissible, pour autant que le rapport d'expertise satisfasse - comme en l'espèce - aux réquisits jurisprudentiels relatifs à la valeur probante de tels documents (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352), en particulier qu'il soit dûment motivé et convaincant (voir notamment l'arrêt Y. du 5 octobre 2006, I 582/05, concernant le même expert judiciaire); 
 
qu'on ne saurait enfin écarter les conclusions de l'expert judiciaire pour le seul motif que le taux d'occupation de l'assurée avait légèrement divergé au fil du temps de celui que l'expert avait tenu pour exigible; 
 
que dans ces conditions, les griefs que l'OFAS adresse à l'encontre de l'évaluation médico-théorique de l'invalidité de l'intimée sont dénués de fondement, 
 
par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours de droit administratif est admis. Le ch. II du dispositif du jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 28 mars 2006 est réformé comme suit : 
 
« La décision attaquée est réformée en ce sens que J.________ a droit : 
- à un quart de rente dès le 1er octobre 2000 
puis 
- à une rente entière dès le 1er juillet 2001 ». 
 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
 
3. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 22 juin 2007 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: