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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_139/2012 
 
Arrêt du 22 juin 2012 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Mathys, Président, 
Jacquemoud-Rossari et Denys. 
Greffière: Mme Livet. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Paul Marville, avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
1. Ministère public central du canton de Vaud, Avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
2. A.________, 
représenté par Me François Magnin, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Lésions corporelles graves par négligence; présomption d'innocence, arbitraire, droit d'être entendu, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 7 décembre 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
Par jugement du 19 juillet 2011, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a libéré X.________ du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence et l'a condamnée pour violation grave des règles de la circulation routière à une peine de 5 jours-amende à 50 fr. le jour avec sursis pendant 2 ans. 
 
B. 
Par jugement du 7 décembre 2011, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel formé par X.________. Elle a, en revanche, admis celui de A.________ et a condamné X.________ pour lésions corporelles graves par négligence à une peine de 10 jours-amende à 50 fr. le jour avec sursis pendant 2 ans. 
 
En bref, il ressort les éléments suivants de ce jugement. 
 
Le 17 octobre 2008, sur l'autoroute A1, X.________ circulait de Morges en direction de la semi-jonction de Malley sur la voie médiane. Après avoir dépassé deux véhicules dont celui de A.________, elle s'est dirigée sur la voie de droite afin d'emprunter la sortie de Malley. Souhaitant rétrograder, elle a confondu la pédale d'embrayage et celle de frein. Son véhicule a brusquement réduit sa vitesse et son moteur a calé. Cela a eu pour effet d'immobiliser subitement la voiture sur la voie de droite. Survenant depuis l'arrière sur la même voie, limitée à 80 km/h, A.________, a heurté l'arrière du véhicule de X.________ malgré un freinage d'urgence et une ébauche de manoeuvre d'évitement. Au moment de l'accident, la route était sèche, il faisait jour et la visibilité était bonne. A.________ a souffert d'une fracture grave à la jambe gauche nécessitant une opération et causant une incapacité de travail de plusieurs mois. 
 
Il ressort de l'expertise technique que A.________ circulait à une vitesse comprise entre 89 et 100 km/h au point de réaction. Une distance entre les deux véhicules inférieure à 44,4 m ne garantissait plus l'évitement dans tous les cas. En revanche, une distance entre véhicules correspondant à 2 secondes, soit entre 50 et 55 m, aurait permis à A.________ de s'arrêter à temps en procédant à un freinage d'urgence. En tenant compte d'une distance approximative de 1200 m entre l'endroit où X.________ s'était rabattue après son dépassement et l'endroit de la collision et en admettant une différence de vitesse hypothétique de 5 à 10 km/h, l'expert a obtenu une distance entre les véhicules de 76 à 95 m. L'expert a toutefois précisé que cela ne pouvait pas être prouvé, une variation de vitesse de l'un ou l'autre des véhicules étant possible sur cette distance. 
 
C. 
X.________ forme un recours en matière pénale contre ce jugement. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens qu'elle est acquittée du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence et qu'aucune condamnation pour violation grave des règles de la circulation routière n'est prononcée. 
 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Invoquant la violation de l'article 399 al. 2 CPP (recte : 399 al. 3 CPP), la recourante soutient que la déclaration d'appel de l'intimé du 23 août 2011 était irrecevable car insuffisamment motivée. 
 
Le 29 juillet 2011, A.________ a formé appel contre le jugement de première instance. Il a adressé, le 23 août 2011, une déclaration d'appel à l'autorité cantonale. Par courrier du 26 septembre 2011, X.________ a déclaré renoncer à déposer une demande de non-entrée en matière s'agissant de l'appel de A.________. 
En application de l'article 400 al. 3 CPP, les parties disposent d'un délai de 20 jours dès réception de la déclaration d'appel pour présenter une demande motivée de non-entrée en matière. En l'espèce, la recourante a expressément déclaré renoncer à déposer une telle demande. C'est de manière contraire au principe de la bonne foi en procédure (art. 5 al. 3 Cst.) qu'elle tente de faire valoir ce moyen, dont elle est déchue, devant le Tribunal fédéral (cf. ATF 135 III 334 consid. 2.2 p. 336). Le grief est irrecevable. 
 
2. 
La recourante reproche à la cour cantonale une violation des principes in dubio pro reo et de l'interdiction de l'arbitraire. Se référant à l'expertise, elle prétend que l'autorité cantonale aurait dû retenir qu'une distance de 95 m séparait les véhicules au point de réaction et que l'intimé aurait pu éviter le choc en freinant à temps. Elle invoque aussi une violation de son droit d'être entendue en soutenant que la cour cantonale aurait méconnu le résultat de l'administration des preuves en tenant insuffisamment compte de l'expertise. 
 
2.1 Dans le recours en matière pénale, les constatations de fait de la décision entreprise lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF). Il n'en va différemment que si le fait a été établi en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (cf. ATF 136 II 304 consid. 2.4, p. 313; sur la notion d'arbitraire, v. : ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5). Ce dernier reproche se confond avec celui déduit de la violation du principe in dubio pro reo (art. 32 Cst.; art. 6 par. 2 CEDH; art. 10 al. 3 CPP) au stade de l'appréciation des preuves (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88). L'invocation de ces moyens ainsi que, de manière générale, de ceux déduits du droit constitutionnel et conventionnel (art. 106 al. 2 LTF), suppose une argumentation claire et détaillée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287), circonstanciée (ATF 136 II 101 consid. 3, p. 105). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 c. 5.1 p. 356 et réf. citées). 
 
2.2 En tant que l'argumentation de la recourante consiste, pour l'essentiel, à opposer une nouvelle fois sa propre appréciation des faits et des preuves à celle de la cour cantonale, elle apparaît largement appellatoire. Il en va ainsi de son exposé préliminaire. Quant à la question de la distance séparant les véhicules au moment du point de réaction, l'autorité cantonale a expliqué de manière détaillée l'avis de l'expert à ce sujet. Elle a retenu que la vitesse de l'intimé se situait entre 89 et 100 km/h et qu'il lui aurait été possible de s'arrêter si la distance séparant les véhicules excédait 50 à 55 m. En retenant que l'intimé avait fait preuve d'inattention, la cour cantonale a considéré qu'il se trouvait à une distance supérieure à celle nécessaire pour s'arrêter, soit de 55 m. Elle a aussi considéré que l'expert avait précisé que la distance de 76 à 95 m, fondée sur des vitesses hypothétiques, ne pouvait être prouvée. On ne saurait donc reprocher à la cour cantonale d'être tombée dans l'arbitraire en ne retenant pas l'une ou l'autre de ces deux distances. Elle n'a pas méconnu l'expertise et son raisonnement n'est arbitraire ni dans son principe, ni dans son résultat. Les griefs sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
 
3. 
La recourante invoque une violation des articles 122 et 125 CP. Elle soutient que le lien de causalité naturelle et adéquate n'existerait pas entre son comportement et les lésions subies par l'intimé ou qu'à tout le moins le lien de causalité adéquate aurait été rompu par la faute de celui-ci. 
 
3.1 L'article 125 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura causé une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé d'une personne. La réalisation de cette infraction suppose ainsi la réunion de trois conditions: l'existence de lésions corporelles, une négligence et un lien de causalité entre la négligence et les lésions. 
 
Seul prête à discussion en l'espèce le rapport de causalité. 
 
3.2 Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire si, sans lui, le résultat ne se serait pas produit. La constatation du rapport de causalité naturelle relève du fait (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). 
 
Le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). La causalité adéquate sera admise même si le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2 p. 148). La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2 p. 265 s. et les arrêts cités). Il s'agit là d'une question de droit que la cour de céans revoit librement (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3 p. 61). 
 
3.3 La décision entreprise constate dûment l'existence du rapport de causalité naturelle. Sur cette question de fait, la recourante ne démontre pas en quoi il serait insoutenable de retenir, comme l'a fait la cour cantonale, que si son véhicule ne s'était pas immobilisé de manière subite sur la chaussée, l'accident ne se serait pas produit. 
 
L'arrêt intempestif d'un véhicule sur une portion d'autoroute limitée à 80 km/h était propre, selon le cours ordinaire des choses, à entraîner un accident du genre de celui qui s'est produit. Contrairement à ce que soutient la recourante, peu importe que l'intimé ait disposé d'une distance suffisante pour s'arrêter avant l'impact. En effet, il n'est pas nécessaire que le comportement de la recourante soit la cause directe ou unique de l'accident. La causalité entre ce comportement et les lésions subies par l'intimé apparaît ainsi adéquate. 
 
La recourante allègue que la cour cantonale aurait dû retenir, au bénéfice du doute en sa faveur, que l'intimé roulait à 100 km/h et qu'il commettait ainsi un excès de vitesse de 20 km/h. Elle soutient ensuite, toujours au bénéfice du doute en sa faveur, que l'intimé aurait commis une longue inattention de plus de 4 secondes calculée sur la base d'une distance entre les véhicules de 95 m et d'une vitesse de 80 km/h. Outre que les deux critiques s'excluent l'une l'autre, l'argumentation présentée est appellatoire (v. supra 2.2), partant irrecevable. 
 
Se référant à l'article 4 OCR et à divers arrêts du Tribunal fédéral, la recourante invoque également que l'intimé aurait dû pouvoir, en tout temps, arrêter son véhicule avant un éventuel obstacle. La cour cantonale n'a pas ignoré cela dès lors qu'elle a retenu que l'intimé avait commis un excès de vitesse et une brève inattention. Elle a toutefois rappelé, à juste titre, qu'il n'y avait pas de compensation des fautes au pénal (ATF 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 24). En outre, sous l'angle de la rupture du lien de causalité adéquate et dans les circonstances du cas d'espèce (route sèche, de jour, bonne visibilité), le comportement de l'intimé n'apparaît pas comme si exceptionnel ou si extraordinaire au point de reléguer à l'arrière-plan le comportement de la recourante. 
 
3.4 Il résulte de ce qui précède que la condamnation de la recourante en vertu de l'article 125 CP ne viole pas le droit fédéral. 
 
4. 
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. La recourante, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 22 juin 2012 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Mathys 
 
La Greffière: Livet