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[AZA 0/2] 
5A.12/2000 
 
IIe COUR CIVILE 
************************* 
 
24 août 2000 
 
Composition de la Cour: MM. les Juges Reeb, Président, 
Weyermann, Bianchi, Raselli et Merkli. 
Greffière: Mme Bruchez. 
 
_______ 
 
Statuant sur le recours de droit administratif 
formé par 
X.________, représenté par Me Yves Donzallaz, avocat à Sion, 
 
contre 
l'arrêt rendu le 3 mars 2000 par la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause qui oppose le recourant à L.________ et Y.________, ainsi qu'à D.________ et M.Z.________, tous représentés par Me Léonard A. Bender, avocat à Martigny; 
 
(droit foncier rural; autorisation d'acquérir; 
droit transitoire) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Lors de la vente aux enchères forcées du 11 octobre 1995, L.________ et N.Y.________, ainsi que D.________ et M.Z.________ (ci-après: Y.________ et consorts), ont acquis en copropriété, pour le prix de 1'200'000 fr., la parcelle no 0, folio 12, du cadastre de la Commune de Saillon. 
Le 27 octobre 1995, ils ont obtenu l'autorisation d'acquérir prévue par les art. 61 et 67 de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR). Ils ont été inscrits comme propriétaires au Registre foncier de Martigny le 1er décembre 1995. 
 
B.- Le 14 décembre suivant, Y.________ et consorts ont résilié, pour la fin de l'année, le contrat de métayage dont bénéficiait le fermier de la parcelle, X.________. Une procédure est en cours contre cette résiliation. 
 
C.- a) A sa requête, X.________ s'est vu notifier, le 22 décembre 1995, l'autorisation d'acquérir précédemment délivrée, contre laquelle il a recouru auprès du Conseil d'Etat valaisan le 12 janvier 1996. A titre de mesures provisionnelles, il a en outre requis et obtenu, le 17 janvier 1996, le blocage du registre foncier. 
 
En septembre 1998, la procédure a été suspendue jusqu'à décision exécutoire sur le sort d'une parcelle voisine, dont l'acquisition par Y.________ et consorts avait fait l'objet d'un recours de A.________ au Tribunal cantonal valaisan, qui avait renvoyé la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision. Elle a été reprise après qu'une transaction eut mis un terme à cette affaire. 
 
Le 1er septembre 1999, le Conseil d'Etat a rejeté le recours. 
b) Statuant le 3 mars 2000, la Cour de droit public du Tribunal cantonal valaisan a rejeté le recours interjeté par X.________ contre cette décision. 
 
D.- X.________ forme un recours de droit administratif au Tribunal fédéral, concluant à l'annulation de l'arrêt cantonal. 
 
Les intimés et l'Office fédéral de la justice proposent le rejet du recours. L'autorité cantonale n'a pas répondu. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- L'arrêt de l'autorité cantonale rejetant le recours est une décision au sens de l'art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA; RS 172. 021); prononcé en dernière instance cantonale, il peut en principe faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art. 97 al. 1 et 98 let. g OJ), dès lors qu'un tel recours n'est pas exclu par les art. 99 à 102 OJ. L'art. 89 LDFR prévoit d'ailleurs expressément cette voie de droit contre les décisions sur recours prises par les autorités cantonales de dernière instance au sens de l'art. 88 al. 1 et 90 let. f LDFR. Déposé en temps utile, le recours est aussi recevable au regard de l'art. 106 al. 1 OJ. Selon l'art. 103 let. a OJ, le recourant, qui est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, a en outre qualité pour recourir. 
 
2.- La loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR; RS 211. 412.11) a été modifiée alors que la présente procédure était pendante devant le Conseil d'Etat valaisan. Le 1er janvier 1999 est en effet entrée en vigueur la novelle du 26 juin 1998 (RO 1998 p. 3009 ss). Celle-ci a notamment emporté la modification de l'art. 63 LDFR, en ce sens que le motif de refus tiré de l'accaparement (let. c) a été supprimé et que, selon un alinéa deux nouveau, les acquisitions dans la procédure d'exécution forcée ne sont pas soumises à la limite de prix posée par la lettre b. Le Tribunal cantonal valaisan a appliqué cette nouvelle disposition au cas d'espèce. Il s'est fondé sur l'art. 95 al. 2 LDFR, selon lequel "les procédures d'autorisation et de recours qui sont en cours au moment de l'entrée en vigueur de la LDFR sont liquidées selon le nouveau droit si, à ce moment-là, l'inscription de l'acte juridique n'était pas encore requise auprès de l'office du registre foncier". 
 
a) Le recourant se plaint d'une fausse application de cette dernière norme. Il prétend en résumé que, lors de l'entrée en vigueur de la novelle du 26 juin 1998, l'acte juridique avait fait l'objet d'une réquisition d'inscription régulière; l'art. 63 LDFR dans son ancienne teneur serait ainsi pertinent. L'Office fédéral de la justice approuve l'arrêt cantonal, tout en précisant que la question du droit applicable ne devrait pas être résolue au regard de l'art. 95 al. 2 LDFR, mais des principes généraux de droit transitoire. 
 
b) A défaut de dispositions transitoires particulières à la novelle du 26 juin 1998, on pourrait - à l'instar de l'autorité cantonale - être tenté de trancher la question du droit applicable selon l'art. 95 LDFR. Comme le relève à juste titre l'Office fédéral de la justice, cette norme n'est toutefois pas formulée de façon générale, mais vise à régler les procédures en cours au moment de l'entrée en vigueur de la LDFR en tant que telle (cf. les termes utilisés: "au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi"). Elle ne soumet en outre au nouveau droit les actes juridiques en préparation ou conclus (al. 1) et les procédures pendantes (al. 
2) qu'à la condition qu'aucune inscription n'ait été requise au registre foncier. En choisissant ce dernier critère, le législateur a non seulement marqué sa volonté de mettre en oeuvre le plus rapidement possible les restrictions de droit public de la LDFR édictées dans l'intérêt de l'ordre public (art. 58 ss), mais aussi de préserver la sécurité du droit (FF 1988 III 889, p. 1006; Bandli/Müller/Stalder, in: Le droit foncier rural, Brugg 1998, nos 1, 2, 3 ad art. 95 LDFR). 
 
Les considérations qui ont présidé à l'adoption de la novelle du 26 juin 1998 sont d'un autre ordre. Celle-ci ne vise en effet pas à restreindre plus avant l'autonomie privée, mais au contraire à assouplir certaines mesures de politique structurelle prévues dans la LDFR et à accorder ainsi aux agriculteurs une plus grande liberté dans la gestion de leur entreprise (FF 1996 IV 1, p. 378 ss; Müller/Schmid- Tschirren, Ergänzung des Kommentars zum LDFR zufolge der Teilrevision vom 26. Juni 1998, in: Communications de droit agraire 1999, p. 67 et 77 s.; Schmid-Tschirren, Im Spannungsfeld von Eigentümer- und Pächterinteressen, in: Communications de droit agraire 1998 p. 41, spéc. 48 ss). Dans un tel contexte, il s'agit moins de préserver la sécurité du droit - qui commanderait l'application des anciennes normes plus restrictives aux actes en cours - que de permettre au justiciable de bénéficier immédiatement de dispositions plus favorables. 
Par ailleurs, la détermination du droit applicable selon le critère de la réquisition conduirait à des résultats qui heurteraient le principe de l'économie de procédure et engendreraient un surcroît de coûts inutiles pour le justiciable et la collectivité publique. En effet, dans l'hypothèse où la réquisition serait intervenue avant le 1er janvier 1999, le sort de la demande d'autorisation aurait dû être tranché selon l'ancien droit plus restrictif. En cas de rejet de celle-ci, la réquisition aurait subi le même sort. Toutefois, rien n'aurait empêché les parties de déposer une nouvelle réquisition après l'entrée en vigueur, ce qui aurait entraîné un examen de l'autorisation selon le nouveau droit. 
Dans l'éventualité où l'autorisation aurait été délivrée avant l'entrée en vigueur des modifications et la réquisition opérée après cette date, celle-ci aurait dû être rejetée, dès lors que l'autorisation aurait dû être délivrée selon le nouveau droit conformément à l'art. 95 al. 1 LDFR. Dans ces circonstances, et comme l'a relevé l'Office fédéral de la justice, l'art. 95 LDFR ne peut constituer une règle générale de droit transitoire applicable aux modifications subséquentes de la LDFR. 
 
3.- En l'absence de disposition transitoire expresse, l'autorité doit comparer les intérêts en jeu. Si le droit entré en vigueur en cours de procédure répond à un intérêt public prépondérant par rapport aux intérêts privés opposés, notamment celui à être protégé dans la confiance mise en l'application du droit antérieur (ATF 119 II 46 consid. 1a p. 48), il l'emporte sur le droit qu'il remplace. En revanche, s'il n'est pas prioritaire, il s'efface. Cette balance des intérêts est prévue implicitement par l'art. 2 Tit. fin. CC, auquel le Tribunal fédéral s'est référé - par analogie - à plusieurs reprises (cf. en matière de protection de l'environnement: 
ATF 123 II 359 consid. 3 p. 362 et 112 Ib 39 consid. 1c p. 42; en matière de protection des eaux: ATF 119 Ib 174 consid. 3 p. 176; en matière d'acquisition d'immeubles par des étrangers: ATF 107 Ib 81 consid. 3 et 4 p. 83 ss, et les références citées dans ces arrêts). Selon cette disposition, les règles établies dans l'intérêt de l'ordre public [...] sont applicables, dès leur entrée en vigueur, à tous les faits pour lesquels la loi n'a pas prévu d'exception (al. 
 
 
1); en conséquence, celles de l'ancien droit qui, d'après le droit nouveau, sont contraires à l'ordre public ne peuvent plus recevoir d'application (al. 2). Ces principes sont en tout cas applicables lorsque le changement de loi intervient, comme en l'espèce, au cours de la procédure cantonale de recours (cf. toutefois: ATF 106 Ib 325 consid. 2, lorsqu'un recours est pendant devant le Tribunal fédéral). 
 
Comme il a déjà été dit (cf. supra, consid. 2b), les restrictions de droit public de la LDFR ont été édictées dans l'intérêt de l'ordre public; elles visent à empêcher les actes juridiques qui iraient à l'encontre des objectifs posés par l'art. 1er LDFR (FF 1988 III 904 ss; Hotz, in: Le droit foncier rural, Brugg 1998, nos 7 ss ad art. 1 LDFR). La novelle du 26 juin 1998 ne fait qu'adapter cette législation - généralement par son assouplissement - aux nouvelles orientations de la politique agricole fédérale (FF 1996 IV 378 ss; Müller/Schmid-Tschirren, op. cit. , p. 67 ss). Par ailleurs, si le principe de la sécurité du droit doit céder la place s'agissant des modifications subséquentes de la LDFR, la volonté du législateur de mettre en oeuvre le plus rapidement et largement possible les restrictions de droit public édictées dans l'intérêt de l'ordre public passe au premier plan, qui plus est lorsque celles-ci sont plus favorables pour leur destinataire (cf. supra, consid. 2b). A cela, le recourant ne peut opposer aucun intérêt privé prépondérant. On ne voit en particulier pas en quoi il devrait être protégé dans sa confiance mise en l'application du droit antérieur. Le fait qu'un refus de l'autorisation conformément à l'ancien droit aurait conduit à la nullité de l'adjudication et, partant, par effet réflexe, au maintien du bail n'est à cet égard pas pertinent. Les conditions restrictives d'acquisition posées par l'ancien droit avaient pour but, non de protéger la position du fermier, mais de favoriser l'acquisition des terres agricoles par des exploitants à titre personnel. Par ailleurs, le recourant ne pouvait de bonne foi compter avec la possibilité d'exercer un droit de préemption (art. 47 LDFR) pour le cas où la procédure se serait déroulée normalement. 
De son propre aveu, il n'est au bénéfice du contrat de fermage que depuis le 31 décembre 1992. Avant l'entrée en vigueur de la novelle, il n'a donc jamais rempli la condition de la durée légale minimum du bail posée par l'art. 47 al. 1 let. b LDFR (cf. art. 7 al. 1 LBFA [RS 221. 213.2]; Hotz, op. cit. , nos 10 et 20 ad art. 47 LDFR). Accessoirement, il n'est pas inutile de relever que la prolongation de la procédure lui a plutôt profité. Sur le vu des principes susmentionnés, les dispositions amendées sont dès lors applicables à la présente cause et, dans son résultat, l'arrêt cantonal ne viole, sur ce point, pas le droit fédéral. 
 
4.- a) Le recourant soutient que l'autorisation d'acquérir aurait dû être refusée en application de l'art. 63 let. d aLDFR. Il affirme que c'est le centre d'exploitation de l'entreprise, et non un immeuble parmi d'autres, qui détermine le rayon d'exploitation; en outre, la parcelle litigieuse se situerait en dehors de celui-ci. Quoique ce grief se fonde sur l'ancien droit, il convient de l'examiner, la novelle du 26 juin 1998 n'ayant apporté aucune modification en la matière (cf. art. 63 al. 1 let. d LDFR). 
 
b) Certes, le rayon d'exploitation se calcule à partir du centre d'exploitation de l'entreprise, lequel se trouve normalement au lieu de situation des principaux bâtiments et installations d'exploitation et peut ainsi ne pas coïncider avec le centre géographique de l'entreprise (cf. 
dans ce sens: Stalder, op. cit. , nos 28 et 31 ad art. 63 LDFR et Die verfassungs- und verwaltungsrechtliche Behandlung unerwünschter Handänderungen im bäuerlichen Bodenrecht, thèse Berne 1993, p. 177; cf. aussi: art. 33 al. 2 LBFA; ATF 110 II 213 consid. 5c p. 219). Toutefois, il n'est pas manifeste que le Tribunal cantonal soit parti d'un autre point de référence lorsqu'il a constaté que moins de six kilomètres séparent la parcelle litigieuse des installations vinicoles des acquéreurs. 
En tout cas, le recourant ne démontre pas que cette constatation serait erronée, en sorte que celle-ci lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 2 OJ). Pour le surplus, il n'établit pas qu'une telle distance excéderait ce qui est usuel dans la localité. Dans ces conditions, sa critique est mal fondée, ce qui rend sans objet sa demande tendant à l'administration de l'expertise qu'il avait réclamée en vain en instance cantonale. 
 
5.- Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. 
Le recourant, qui succombe, supportera les frais et dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours de droit administratif. 
 
2. Met à la charge du recourant: 
a) un émolument judiciaire de 3'000 fr.; 
b) une indemnité de 3'000 fr. à verser aux intimés à titre de dépens. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties, à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais et au Département fédéral de justice et police (Office fédéral de la justice, Division principale du droit privé; OFRF/KAR/6. 4.4.3-1-Granges-1). 
________ 
Lausanne, le 24 août 2000 JOR/frs 
Au nom de la IIe Cour civile 
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE, 
Le Président, La Greffière,