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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 7} 
I 823/05 
 
Arrêt du 25 avril 2007 
Ire Cour de droit social 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, 
Widmer et Frésard. 
Greffier: M. Métral. 
 
Parties 
D.________, 
recourant, représenté par Me Jacques Emery, avocat, boulevard Helvétique 19, 1207 Genève, 
 
contre 
 
Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 
1203 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 27 septembre 2005. 
 
Faits: 
A. 
A.a D.________, né en 1960, a essentiellement travaillé en qualité d'aide-jardinier au service de divers employeurs. Le 5 juillet 1995, alors qu'il roulait au volant de son véhicule, il n'a pu éviter un bus des Transports publics genevois (ci-après : TPG) qui arrivait sur sa gauche en lui coupant la priorité. Il a été conduit à l'Hôpital X.________, où la doctoresse P.________ a posé les diagnostics de «coup du lapin» et dermabrasion du genou D, et attesté une incapacité de travail totale jusqu'au 9 juillet 1995. Elle a prescrit un traitement antalgique et le port d'une collerette (rapport du 2 août 1995). D.________ n'a pas repris le travail à la date prévue et a consulté son médecin traitant, le docteur S.________, en raison de la persistance de cervicalgies, irradiant dans le bras gauche. Ce praticien a posé le diagnostic de contusion cervicale grave et attesté une incapacité de travail totale pour une durée indéterminée (rapport du 4 octobre 1995). Par la suite, il a également mentionné un état dépressif réactionnel (rapport du 6 décembre 1995). Un séjour du 20 au 31 mai 1996 à l'Hôpital cantonal universitaire de Genève, pour traitement médicamenteux et physiothérapie intensive en vue d'un sevrage progressif de la collerette cervicale, n'a pas permis de mettre fin aux douleurs (rapport du 5 août 1996 du docteur M.________). 
 
Le 23 août 1996, D.________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Son employeur avait précédemment annoncé le sinistre à La Genevoise, Compagnie générale d'Assurances (ci-après : La Genevoise), à laquelle il était lié pour la couverture d'assurance obligatoire contre les accidents. 
 
La Genevoise a mandaté successivement les docteurs D.________, spécialiste en médecine interne, et S.________, psychiatre-psychothérapeute, en vue d'évaluer l'atteinte à l'intégrité et l'incapacité de travail résultant de l'accident du 5 juillet 1995. Le docteur D.________ a nié toute atteinte à la santé physique résultant de l'accident, au moment de l'expertise. Il a posé le diagnostic de cervicalgies, en précisant que celles-ci ne correspondaient à aucune atteinte objectivable (rapport du 16 septembre 1996). Pour sa part, le docteur S.________ a posé le diagnostic de troubles somatoformes douloureux et décrit une personnalité peu différenciée avec pensées de type opératoire, grande demande de passivité, comportement de type histrionique avec manque d'introspection et d'autocritique. Les douleurs exprimées par l'assuré, de nombreux mois après l'accident, ne pouvaient plus être expliquées par une atteinte à la santé physique ou psychique d'origine accidentelle. Plusieurs éléments en interaction pouvaient expliquer la persistance des douleurs, à savoir les particularités de la personnalité de l'assuré (qui n'atteignaient toutefois pas un seuil pathologique), ainsi que «des caractéristiques culturelles, l'histoire personnelle et les circonstances contextuelles» (rapport du 23 mai 1997). 
 
Après avoir eu connaissance de ces rapports d'expertise, l'Office cantonale de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : Office AI) a informé l'assuré, par acte du 23 septembre 1997, de son intention de rejeter la demande de prestations. D.________ a produit un rapport établi le 16 janvier 1998 par les docteurs U.________, G.________ et H.________ à la suite de son hospitalisation au Service de rhumatologie des Hôpitaux universitaires genevois (HUG), du 6 au 9 janvier 1998. Il a également produit un rapport du 9 janvier 1998 des docteurs T.________ et J.________, médecins au Département de psychiatrie des HUG. Selon ces différents médecins, qui se disaient frappés par l'importance du retrait social, des changements de caractère, de la perte de l'élan vital et des idées sombres présentées par l'assuré, ce dernier souffrait d'un syndrome douloureux chronique, avec des cervicalgies chroniques gauches, un état dépressif majeur et un syndrome de stress post-traumatique (hypervigilance, troubles du sommeil avec cauchemars et conduite d'évitement). Compte tenu de ces rapports médicaux, l'Office AI a confié au docteur C.________ le soin de réaliser une expertise psychiatrique. 
 
Le docteur C.________ a posé le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme persistant et attesté une incapacité de travail totale depuis le 5 juillet 1995. Il a notamment préconisé un traitement par antidépresseurs et une psychothérapie. La durée du traitement était difficile à estimer, mais il ne fallait pas attendre de résultat avant six à douze mois. Dans ce contexte, le recouvrement d'une capacité de travail de 50 % semblait un objectif optimiste. Toujours selon le docteur C.________, il n'y a avait pas lieu de retenir un état de stress post-traumatique ni une majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques, et l'assuré ne remplissait clairement pas les critères diagnostiques d'un trouble factice (rapport du 28 décembre 1998). 
 
Par décisions des 16 mars et 6 juillet 1999, l'Office AI a alloué à D.________ une rente entière d'invalidité, avec effet dès le 1er juillet 1996. 
A.b L'Office AI a par la suite demandé au docteur S.________ des renseignements sur l'évolution de l'état de santé de l'assuré, dans le cadre d'une procédure de révision d'office du droit à la rente. Ce médecin a attesté l'absence d'amélioration de l'état de santé de l'assuré (rapports des 3 décembre 2001 et 17 octobre 2003). L'Office AI s'est également vu communiquer une expertise judiciaire réalisée le 20 mars 2002 par le docteur B.________, médecin à la Clinique et policlinique de neurologie des HUG, dans le cadre d'un litige opposant D.________ à l'assurance responsabilité civile des TPG. Selon le docteur B.________, le prénommé présentait des cervico-brachialgies gauches chroniques d'origine post-traumatique et un état anxio-dépressif réactionnel. Ces affections l'empêchaient totalement d'exercer son ancienne profession. En revanche, dans une activité plus légère, sa capacité de travail pouvait varier entre 50 et 70 pour cent d'un temps complet, voire être totale dans le futur; elle pouvait être estimée à 60 % au jour de l'expertise. 
 
L'Office AI a alors confié une expertise bidisciplinaire au Centre Y.________. Selon les docteurs L.________, rhumatologue, et V.________, psychiatre- psychothérapeute, les troubles diagnostiqués (troubles somatoformes persistants, principalement sous forme de cervico-brachialgies gauches, troubles dégénératifs du rachis cervical et lombaire sous forme d'arthrose et discopathies en C5-C6 et L5-S1 modérés, obésité, hypertension artérielle, épisode dépressif léger, sans syndrome somatique) n'affectaient pas sa capacité de travail, si bien qu'il pouvait reprendre son ancienne activité d'aide-jardinier (expertise du 19 mai 2004). 
 
Se référant à cette dernière expertise, l'Office AI a retenu que l'état de santé de D.________ s'était amélioré et a supprimé le droit à la rente, par décision du 21 octobre 2004. Il a par la suite confirmé la suppression de la rente, en précisant qu'il reconsidérait la décision initiale d'allocation de rente (décision sur opposition du 23 décembre 2004). 
B. 
Par jugement du 27 septembre 2005, le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève a rejeté le recours formé par l'assuré contre la décision sur opposition. 
C. 
D.________ interjette un recours de droit administratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation en concluant, sous suite de dépens, au maintien de la rente entière d'invalidité. Il demande par ailleurs la désignation d'office de son mandataire, au titre de l'assistance judiciaire. L'intimé conclut au rejet du recours et l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
Le 25 avril 2007, le Ire Cour de droit social du Tribunal fédéral a tenu une audience ouverte aux parties. 
 
Considérant en droit: 
1. 
1.1 La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L' acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395). 
1.2 Selon l'art. 132 OJ, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 juin 2006 (RO 1969 p. 801), en relation avec les art. 104 et 105 OJ, le pouvoir d'examen du tribunal, dans la procédure de recours concernant l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, n'est pas limité à la violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'opportunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction inférieure et peut s'écarter des conclusions des parties à l'avantage ou au détriment de celles-ci. 
 
La loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité est entrée en vigueur le 1er juillet 2006 (RO 2006 2003) et entraîne des modifications des art. 132 et 134 OJ. Toutefois, conformément aux dispositions transitoires figurant au ch. II let. c de la loi fédérale du 16 décembre 2005, la présente procédure reste soumise aux dispositions de l'OJ telles qu'en vigueur jusqu'au 30 juin 2006. 
2. 
Selon un principe général du droit des assurances sociales, l'administration peut reconsidérer une décision formellement passée en force de chose décidée et sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à condition qu'elle soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable (ATF 127 V 466 consid. 2c p. 469). L'entrée en vigueur de la LPGA, le 1er janvier 2003, n'a pas entraîné de modification sur ce point, l'art. 53 al. 2 LPGA prévoyant désormais expressément que l'assureur peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (arrêt I 61/04 du 20 septembre 2006, prévu pour la publication, consid. 4.1; voir également Ueli Kieser, ATSG-Kommentar, Kommentar zum Bundes-gesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom 6. Oktober 2000, Zürich 2003, ch. 18 ad art. 53). 
3. 
3.1 D'après les premiers juges, les constatations du docteur C.________ relatives à la capacité de travail de l'assuré ne peuvent pas être suivies, dès lors qu'il n'a pas mis en évidence de commorbidité psychiatrique, tous les autres critères permettant d'admettre le caractère invalidant de troubles somatoformes douloureux n'étant par ailleurs pas réunis. Dans ces conditions, les décisions des 16 mars et 6 juillet 1999 étaient «manifestement trop généreuses». 
3.2 
3.2.1 Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une décision, il faut se fonder sur la situation juridique existant au moment où cette décision a été rendue, compte tenu de la pratique en vigueur à l'époque (ATF 125 V 383 consid. 3 p. 389 sv., 119 V 475 consid. 1b/cc p. 479). Par le biais de la reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit, de même qu'une constatation erronée résultant de l'appréciation des faits (ATF 117 V 8 consid. 2c p. 17, 115 V 308 consid. 4a/cc p. 314). Pour des motifs de sécurité juridique, l'irrégularité doit être manifeste, de manière à éviter que la reconsidération devienne un instrument autorisant sans autre limitation un nouvel examen des conditions à la base des prestations de longue durée. En particulier, les organes d'application ne sauraient procéder en tout temps à une nouvelle appréciation de la situation après un examen plus approfondi des faits. Ainsi, une inexactitude manifeste ne saurait être admise lorsque l'octroi de la prestation dépend de conditions matérielles dont l'examen suppose un pouvoir d'appréciation, quant à certains de leurs aspects ou de leurs éléments, et que la décision initiale paraît admissible compte tenu de la situation de fait et de droit (arrêt I 222/02 du 19 décembre 2002 consid. 3.2; cf. également arrêts I 512/05 du 3 mai 2006, I 545/02 du 17 août 2005, I 8/04 du 12 octobre 2005 et I 790/01 du 13 août 2003). 
3.2.2 A l'époque de l'octroi initial d'une rente d'invalidité, l'intimé disposait notamment de rapports médicaux établis par les docteurs S.________ et C.________. Le docteur C.________ pose le diagnostic de syndrome somatoforme persistant et atteste une incapacité de travail totale depuis plusieurs années. Il ne fait toutefois pas état d'une commorbidité psychiatrique et n'expose que relativement brièvement les points sur lesquels il fonde son appréciation de la capacité de travail de l'assuré. Il évoque, certes, un retrait social de l'assuré, mais mentionne en anamnèse, pour l'essentiel, un renoncement à l'exercice d'activités professionnelles. Pour sa part, le docteur S.________ a nié une incapacité de travail. Il a souligné l'importance du bénéfice secondaire que pouvait retirer l'assuré de la symptomatologie douloureuse et qualifié de contre-productives toutes démarches en vue de l'allocation d'une rente d'invalidité. Ces conclusions sont motivées et revêtent une valeur probante notablement supérieure à celles du docteur C.________, au point que les premiers juges ont à juste titre qualifiée de manifestement erronée la décision initiale d'allocation de rente fondée sur les conclusions de ce dernier médecin. Au demeurant, la pleine capacité de travail de l'assuré dans son ancienne activité professionnelle est ajourd'hui également attestée par les docteurs L.________ et V.________. 
4. 
Le recourant demande que soit prise en considération la comparaison de revenu effectuée par la Cour de justice du canton de Genève, dans le cadre du procès-civil relatif à la responsabilité des TPG ensuite de l'accident du 5 juillet 1995. Un jugement civil relatif à l'atteinte à l'avenir économique de la victime d'un accident ne lie toutefois pas le juge des assurances sociales (cf. arrêt 29/05 du 31 janvier 2006, consid. 4.2). En l'occurrence, aucune incapacité de travail n'a été reconnue à l'assuré dans la profession exercée précédemment, ce qui exclut d'emblée le droit à une rente d'invalidité. Par ailleurs, même en admettant la nécessité d'un reclassement dans une activité légère, le recourant y disposerait d'une pleine capacité de travail et pourrait réaliser un revenu excluant un taux d'invalidité ouvrant droit à une rente. Cela ressort plus particulièrement d'une comparaison entre le revenu sans invalidité de 67'680 fr. en 2003 (allégué par le recourant) et le salaire brut (valeur centrale) des hommes exerçant une activité simple et répétitive dans le secteur privé en 2004 (4'588 fr. par mois, ou 55'056 fr. par an), selon les donnée salariales publiées par l'Office fédéral de la statistique (Enquête suisse sur la structure des salaires 2004). Cette comparaison conduit à un taux d'invalidité de l'ordre de 20 %, sans qu'il soit nécessaire d'affiner ici le calcul en procédant aux adaptions requises en principe par la jurisprudence (cf. ATF 126 V 75 consid. 5 et 7 p. 78 ss), qui n'entraîneraient qu'une faible modification de ce taux. 
5. 
Vu ce qui précède, le recourant voit ses conclusions rejetées et ne peut prétendre des dépens à la charge de l'intimé (art. 159 OJ). Il n'a toutefois pas les moyens d'assumer ses frais de défense par un avocat sans entamer les moyens nécessaires à son entretien et à celui de sa famille, comme cela ressort des pièces produites à l'appui de sa demande d'assistance judiciaire. L'assistance d'une mandataire professionnelle était par ailleurs indiquée, de sorte que les conditions posées à la désignation d'un avocat d'office sont réunies (cf. art. 152, en relation avec l'art. 135 OJ; ATF 127 I 202 consid. 3b p. 205, 125 V 201 consid. 4a p. 202, 371 consid. 5b p. 372). Le recourant est rendu attentif au fait qu'il devra rembourser ce montant s'il devient ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit administratif est rejeté. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
3. 
L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires de Me Emery sont fixés à 2'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) pour la procédure fédérale et seront supportés par la caisse du Tribunal. 
4. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales du canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 25 avril 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
p. le Président: Le Greffier: