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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.32/2007 /col 
 
Arrêt du 26 janvier 2007 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Reeb et Fonjallaz. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Bruno Charrière, avocat, 
 
contre 
 
Ministère public de l'Etat de Fribourg, 
rue de Zaehringen 1, 1700 Fribourg, 
Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat 
de Fribourg, case postale 56, 1702 Fribourg. 
 
Objet 
détention préventive, 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg 
du 23 novembre 2006. 
 
Faits: 
A. 
Arrêté le 7 juillet 2004 dans le cadre d'une enquête pour infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants, A.________ a été placé en détention préventive le lendemain, en raison des risques de collusion, de récidive et de fuite. Le 23 mai 2005, il a présenté une requête de mise en liberté provisoire, qui a été rejetée par le Juge de la détention du canton de Fribourg (ci-après: le Juge de la détention). 
Par ordonnance du 30 octobre 2006, le Juge de la détention a rejeté une nouvelle requête de mise en liberté provisoire de A.________, considérant qu'il existait de forts soupçons de son implication dans un important trafic de stupéfiants. En effet, malgré les dénégations de l'intéressé, l'instruction avait permis de rassembler suffisamment de preuves et d'indices à son encontre. Si un risque de récidive pouvait être nié, il n'en allait pas de même du risque de fuite, qui ne pouvait être prévenu que par la détention préventive. Dans la mesure où A.________ devait s'attendre à une peine privative de liberté de plusieurs années, "largement supérieure à cinq ans", son maintien en détention préventive respectait le principe de la proportionnalité. 
B. 
Par acte du 10 novembre 2006, A.________ a recouru contre cette ordonnance devant la Chambre pénale du Tribunal cantonal du l'Etat de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal), faisant valoir en substance qu'il n'y avait pas d'indices sérieux de sa culpabilité et que le Juge de la détention avait apprécié les preuves de manière arbitraire. Il soutenait également qu'une libération moyennant le versement de sûretés était envisageable et proposait à cet égard le versement d'une caution de 100'000 francs. 
Le Tribunal cantonal a admis partiellement ce recours par arrêt du 23 novembre 2006, considérant que A.________ devait être mis en liberté moyennant paiement de la caution que le juge d'instruction exigera de lui, le dépôt de son passeport et sa soumission à un contrôle judiciaire. Le recours était rejeté pour le surplus, au motif que des indices de culpabilité suffisants étaient manifestement réunis et qu'au stade actuel de l'instruction, on ne pouvait raisonnablement nier les forts soupçons de crime ou de délit pesant sur A.________. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et d'ordonner sa mise en liberté. Il invoque une violation des art. 10 al. 2 et 32 al. 1 Cst. ainsi que de l'art. 6 par. 2 CEDH et se plaint d'une atteinte à la liberté personelle et d'une violation de la présomption d'innocence. Le Tribunal cantonal a renoncé à formuler des observations. Le Ministère public de l'Etat de Fribourg s'est déterminé; il conclut au rejet du recours. Le recourant a présenté des observations complémentaires. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La décision attaquée ayant été rendue avant le 1er janvier 2007, la loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ) demeure applicable à la présente procédure de recours (art. 132 al. 1 LTF). 
2. 
Le recours est formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale et respecte les exigences des art. 84 ss OJ. L'admission partielle du recours du 10 novembre 2006 par l'autorité intimée ne concernait qu'une conclusion subsidiaire relative à la libération sous caution; elle ne remet pas en cause l'intérêt actuel et pratique du recourant à l'admission d'un recours de droit public portant uniquement sur les soupçons de culpabilité, dès lors qu'une éventuelle admission lui permettrait de recouvrer la liberté sans avoir à réunir la somme que le juge d'instruction est invité à fixer à titre de sûretés. Il a donc la qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ. Par exception à la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion du recourant tendant à ce que le Tribunal fédéral ordonne à l'autorité intimée de mettre fin à sa détention préventive est recevable (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). 
3. 
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 110 du Code de procédure pénale fribourgeois du 14 novembre 1996 (CPP/FR; RS 32.1). Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; art. 110 al. 2 CPP/FR; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 110 al. 1 let. a à c CPP/FR). La gravité de l'infraction - et l'importance de la peine encourue - n'est, à elle seule, pas suffisante (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 70 consid. 4a). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 116 Ia 144 consid. 3; art. 110 al. 1 in initio CPP/FR). S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271; pour la définition de l'arbitraire, cf. art. 9 Cst. et ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275). L'autorité cantonale dispose ainsi d'une grande liberté dans l'appréciation des faits (ATF 114 Ia 283 consid. 3; 112 Ia 162 consid. 3b). 
4. 
Le recourant ne conteste pas la base légale de la détention préventive et ne remet pas en cause l'existence d'un risque de fuite. Il soutient en revanche qu'il n'y avait pas de sérieuses présomptions de culpabilité à son encontre. Le Tribunal cantonal aurait en outre violé la présomption d'innocence en appréciant sa culpabilité sur la seule base de témoignages à charge, sans prendre en compte les éléments à décharge. 
4.1 La présomption d'innocence empêche le juge de la détention de désigner une personne comme coupable, sans réserve et sans nuance, en préjugeant de l'appréciation des faits par le juge du fond (ATF 124 I 327 consid. 3c p. 331 s. et les références citées). Elle ne signifie en revanche pas qu'une détention préventive doive se fonder sur des faits clairement établis; des indices sont suffisants pour autant qu'ils reposent sur des faits concrets et précis (cf. art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 107 Ia 138 consid. 4c p. 142; Jacques Velu/Rusen Ergec, La Convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles 1990, n. 572 s., p. 477 s.; Jochen Frowein/Wolfgang Peukert, EMRK-Kommentar, 2ème éd., Kehl, Strasbourg, Arlington, 1996, n. 170 s. p. 291 s.; Arthur Haefliger/Frank Schürmann, Die Europäische Menschenrechtskonvention und die Schweiz, 2ème éd., Berne 1999, p. 209 et les arrêts cités). De plus, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître vraisemblable après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Les mesures provisoires en procédure civile, administrative et pénale, RDS 1997 II p. 43 s. et les arrêts cités). 
4.2 En l'occurrence, sur le vu des éléments rassemblés au stade actuel de l'enquête, qui n'est pas terminée, le Tribunal cantonal n'avait aucune raison sérieuse de dénier toute crédibilité aux déclarations des témoins qui mettent en cause le recourant. Il ressort en effet du dossier que le témoin affirmant que le recourant est impliqué dans une livraison de 5 kg d'héroïne dans un garage à Villars-sur-Glâne a confirmé et précisé ses déclarations lors d'une confrontation, malgré l'attitude intimidante de l'intéressé. De plus, quatre autres témoins affirment que le recourant est mêlé au trafic de stupéfiants (livraisons de paracétamol, échange d'héroïne et de cocaïne, fourniture de produit de coupage). A cet égard, le recourant se borne à alléguer que ces déclarations sont "expressément démenties" par d'autres témoignages et par des "éléments importants", mais il ne les expose pas de manière convaincante; il ne démontre en tout cas pas que l'autorité intimée aurait procédé à une appréciation arbitraire des faits à cet égard. Par ailleurs, des traces d'héroïne et de cocaïne ont été trouvées dans le bureau et la voiture du recourant ainsi que dans le garage susmentionné. Le recourant ne parvient pas à expliquer comment on a pu retrouver des traces de cocaïne dans ses cheveux, alors qu'il affirme ne pas consommer de stupéfiants. De même, il n'est guère crédible lorsqu'il affirme ne pas connaître B.________, impliqué dans la livraison des 5 kg d'héroïne, alors que la police a constaté, lors d'un contrôle de circulation effectué à la même période, que cet individu accompagnait le recourant dans sa voiture. Le recourant ne se plaint pas d'une appréciation arbitraire de ces faits. Dans ces conditions, il y a lieu de constater avec l'autorité intimée qu'il existe des indices de culpabilité suffisants, étant rappelé qu'il n'appartenait pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge. 
Le recourant reproche également au Tribunal cantonal de n'avoir pas indiqué, même sommairement, pour quelles raisons il avait privilégié les témoignages à charge. A supposer qu'il entende se plaindre par là d'un défaut de motivation de la décision attaquée, il lui appartenait de le faire en invoquant une violation de l'art. 29 al. 2 Cst., le Tribunal fédéral n'examinant pas cette question d'office (art. 90 al. 1 let. b OJ; cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31; 125 I 71 consid. 1c p. 76). Au demeurant, les éléments précités, clairement exposés par le Juge de la détention et par le Tribunal cantonal, suffisent à expliquer pourquoi les témoignages à charges n'apparaissaient pas dénués de toute crédibilité. Enfin, la considération selon laquelle le recourant s'expose, si sa culpabilité est retenue, au prononcé d'une peine privative de liberté de plusieurs années - dont la durée ne paraît d'emblée devoir dépasser celle de la détention préventive subie - est suffisamment prudente et nuancée; elle ne fait en aucune manière ressortir que le Tribunal cantonal aurait préjugé du fond, en tenant d'ores et déjà le recourant pour coupable des faits qui lui sont imputés. On ne discerne ainsi aucune violation du principe de la présomption d'innocence, garantie aux art. 6 par. 2 CEDH et 32 al. 1 Cst. 
Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que l'autorité intimée n'a pas fait preuve d'arbitraire ou violé la présomption d'innocence en appréciant la constitutionnalité de la détention du recourant. 
5. 
Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. 
Lausanne, le 26 janvier 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: