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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_723/2021  
 
 
Arrêt du 16 août 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Beusch. 
Greffière : Mme Kleber. 
 
Participants à la procédure 
SI A.________ SA, 
représentée par Maîtres Lionel Delgado et Aurélien Barakat avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, 
rue du Stand 26, 1204 Genève. 
 
Objet 
Impôts cantonal et communal et impôt fédéral direct, période fiscale 2018, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, du 10 août 2021 (ATA/829/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La SI A.________ SA (ci-après: la contribuable), inscrite au registre du commerce du canton de Genève le 30 octobre 2013, a pour but l'acquisition, la construction, vente, détention, gestion, administration et promotion de biens immobiliers, de même que la prise de participations dans des sociétés immobilières. 
Par arrêté départemental du 1 er octobre 2018, le Département du territoire du canton de Genève a accordé à la contribuable une exonération fiscale de l'impôt immobilier complémentaire à concurrence de 80% durant vingt ans et des taux d'imposition réduits en matière d'impôts cantonal et communal (ci-après: ICC) durant vingt ans pour ses immeubles sis Chemin U.________ xxx, yyy et zzz à V.________.  
Selon le chiffre 7 de cet arrêté, "la différence entre les charges annuelles budgétisées dans le plan financier ainsi que dans le résultat d'examen et le coût effectif net de celles-ci constitue une réserve pour l'exécution de travaux d'entretien; cette réserve doit être déposée en banque sur un compte spécial. En cas d'aliénation des immeubles, elle devra être transférée au nouveau propriétaire". 
 
B.  
Dans son bilan et son compte de résultats au 31 décembre 2018 annexés à sa déclaration fiscale 2018, la contribuable a comptabilisé dans ses charges une "provision légale OCLPF" de 245'338 fr., dont la contrepartie figure au passif de son bilan sous la même dénomination. 
Invitée par l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale cantonale) à justifier ce poste, la contribuable a répondu que le montant de 245'338 fr. correspondait à la "différence entre les charges annuelles budgétisées dans le plan financier et le coût effectif. Le point 7 de l'arrêté départemental du 1 er octobre 2018 (...) indique la nécessité de constituer cette réserve et son utilisation". D'après la contribuable, le risque de pertes encourues était "absolument certain puisque la provision permettra de compenser le manque de loyers pour couvrir les charges effectives de l'immeuble dans le futur. Ce risque a[vait] pu être calculé dès la publication de l'arrêté départemental, fixant les conditions d'exploitation de l'immeuble".  
Par bordereaux de taxation du 5 décembre 2019, l'Administration fiscale cantonale a fixé les ICC, ainsi que l'impôt fédéral direct (ci-après: IFD) pour l'année 2018 à respectivement 23'524 fr. 90 et 27'650 fr. 50, sur la base d'un bénéfice imposable de 325'349 fr. et d'un capital propre imposable de 2'666'942 fr. L'autorité fiscale a procédé à la reprise de la provision de 245'338 fr., au motif qu'elle était non conforme à l'usage commercial. Selon l'Administration fiscale cantonale, la provision était assimilable à une provision pour grands travaux d'entretien, qui n'était plus admise fiscalement. 
La contribuable a élevé une réclamation contre ces bordereaux, que l'Administration fiscale cantonale a rejetée par deux décisions du 23 janvier 2020. 
Par jugement du 12 octobre 2020, le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève a rejeté le recours formé par la contribuable contre les décisions sur réclamation. 
Par arrêt du 10 août 2021, la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours de la contribuable contre ce jugement. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la SI A.________ SA demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 10 août 2021 de la Cour de justice et, principalement, de dire que la "provision légale OCLPF" de 245'338 fr. enregistrée dans ses comptes annuels est déductible de son bénéfice imposable pour la période fiscale 2018 et de renvoyer la cause à l'Administration fiscale cantonale pour qu'elle émette de nouveaux bordereaux dans ce sens pour les ICC et l'IFD. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause à la Cour de justice, afin qu'elle instruise la nature factuelle de la provision et son caractère obligatoire. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'Administration fiscale cantonale conclut au rejet du recours avec suite d'émolument. L'Administration fédérale des contributions se rallie au dispositif et aux considérants de l'arrêt attaqué, ainsi qu'à la réponse de l'Administration fiscale cantonale, et conclut au rejet du recours, sous suite de frais. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe sous le coup d'aucune des exceptions de l'art. 83 LTF, par une autorité judiciaire supérieure de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. Cette voie de droit est confirmée par l'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11) et l'art. 73 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14), la détermination du bénéfice imposable étant une matière harmonisée aux art. 24 ss LHID.  
 
1.2. L'instance précédente a traité dans un seul jugement de l'IFD et des ICC, ce qui est admissible (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1). Partant, le dépôt d'un seul acte de recours est aussi autorisé, dans la mesure où la partie recourante s'en prend clairement aux deux catégories d'impôts (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.2), ce qui est le cas en l'espèce.  
 
1.3. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par la destinataire de l'arrêt attaqué, qui a la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière.  
 
2.  
 
2.1. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Il examine en principe librement l'application du droit fédéral ainsi que la conformité du droit cantonal harmonisé et de sa mise en pratique par les instances cantonales aux dispositions de la LHID (cf. ATF 134 II 207 consid. 2; arrêt 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 2, non publié in ATF 143 I 73).  
 
2.2. Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours en matière de droit public ne peut toutefois pas être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel. En revanche, il est possible de faire valoir que l'application du droit cantonal consacre une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit fondamental (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1). Le grief de violation de droits fondamentaux et de dispositions de droit cantonal n'est cependant examiné par le Tribunal fédéral que s'il a été invoqué et motivé par le recourant, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 I 62 consid. 3; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.3. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3).  
 
3.  
Le litige porte sur la reprise dans le bénéfice et capital imposables 2018 de la recourante d'un montant de 245'338 fr., comptabilisé à titre de "provision légale OCLPF" dans ses comptes 2018. 
En substance, la Cour de justice a retenu que la loi genevoise générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL; rsGE I 4 05) et son règlement d'exécution du 24 août 1992 (RGL; rsGE I 4 05.01) imposaient au propriétaire de logements d'utilité publique telle la contribuable de constituer des réserves pour travaux d'entretien, lesquelles n'engendraient pas de charges grevant le bénéfice. Selon la Cour de justice, le montant de 245'338 fr. inscrit dans les comptes 2018 de la recourante correspondait à une provision pour risques ou investissements futurs. A ce titre, il n'était pas déductible sur le plan fiscal. 
 
4.  
La recourante reproche en premier lieu à la Cour de justice de ne pas avoir analysé dans quelle mesure le terme "réserve" employé à l'art. 3 al. 4 RGL faisait véritablement référence à une réserve et non à une provision. D'après la recourante, l'expression "réserve" impliquerait l'obligation légale pour le propriétaire de provisionner sous forme de charges comptables les montants nécessaires à l'entretien du bien immobilier durant la période de contrôle. 
 
4.1. Selon l'art. 3 al. 4 RGL, le propriétaire doit constituer des réserves pour travaux d'entretien et les déposer en banque sur un compte spécial. Il doit pouvoir en tout temps justifier l'utilisation des réserves qui restent attachées à l'immeuble en cas de transfert de celui-ci.  
 
4.2. Dans son arrêt, après avoir relevé la teneur de l'art. 3 al. 4 RGL, la Cour de justice a noté que la constitution de ces réserves avait lieu après la clôture des comptes et n'engendrait pas une charge grevant le bénéfice de l'exercice (consid. 9 de l'arrêt attaqué). La Cour de justice n'a ainsi pas retenu que le terme employé à l'art. 3 al. 4 RGL renverrait à la notion de "provision".  
 
4.3. La recourante estime que le terme "réserve" utilisé dans le droit cantonal signifie en réalité "provision". Elle n'invoque toutefois à aucun moment dans son recours l'arbitraire ou la violation d'autres droits constitutionnels. Si elle procède à sa propre interprétation du règlement d'exécution cantonal, elle n'expose pas en quoi la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en retenant que le législateur genevois visait la notion de réserve en employant le terme "réserve". Or, s'agissant de droit cantonal, il n'appartient pas à la Cour de céans de revoir librement l'interprétation donnée par la Cour de justice. Il n'y a donc pas lieu de s'écarter de la conclusion des précédents juges selon laquelle l'art. 3 al. 4 RGL, en se référant au terme réserve, impose au propriétaire de constituer une réserve et non une provision.  
 
I. Impôt fédéral direct  
 
5.  
La recourante, qui invoque l'art. 960e al. 2 CO et le principe de l'autorité du bilan commercial, fait valoir que la provision litigieuse devait en l'espèce obligatoirement être enregistrée, de sorte qu'elle devait être admise sur le plan fiscal. 
 
5.1. Aux termes de l'art. 57 LIFD, l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Selon l'art. 58 al. 1 LIFD, le bénéfice net imposable comprend notamment le solde du compte de résultats (let. a), ainsi que tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats, qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l'usage commercial (let. b).  
De jurisprudence constante, il ressort des art. 57 et 58 LIFD que le droit fiscal renvoie au droit comptable pour déterminer le bénéfice net imposable et que les comptes établis conformément aux règles du droit comptable lient les autorités fiscales, à moins que des normes impératives du droit commercial ne soient violées ou que des normes fiscales correctrices ne l'exigent (principe de l'autorité du bilan commercial ou de déterminance; cf. notamment ATF 147 II 209 consid. 3.1.1; 137 II 353 consid. 6.2; 136 II 88 consid. 3.1). 
 
5.2. Selon l'art. 63 al. 1 LIFD, des provisions peuvent être constituées à la charge du compte de résultats pour les engagements de l'exercice dont le montant est encore indéterminé (let. a), les risques de pertes sur des actifs circulants, notamment sur les marchandises et les débiteurs (let. b), les autres risques de pertes imminentes durant l'exercice (let. c) et les futurs mandats de recherche et de développement confiés à des tiers [...] (let. d). D'après l'art. 63 al. 2 LIFD, les provisions qui ne se justifient plus sont ajoutées au bénéfice imposable.  
Pour être admise en droit fiscal, la provision doit avoir été dûment comptabilisée (arrêt 2C_455/2017 du 17 septembre 2018 consid. 6.3), être justifiée par l'usage commercial et porter sur des faits dont l'origine se déroule durant la période de calcul (arrêts 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.1 et les arrêts cités; 2C_490/2016 du 25 août 2017 consid. 5.2). Lorsque des provisions, qui ont été passées en charge du compte de résultats, ne sont pas admissibles, l'autorité fiscale est en droit de procéder à la dissolution de la provision. La dissolution a lieu lors de la période durant laquelle l'absence de justification commerciale de la réserve est constatée (arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.1 et les arrêts cités). La société contribuable supporte le fardeau de la preuve de la conformité à l'usage commercial (cf. ATF 147 II 209 consid. 5.1.3; 140 II 248 consid. 3.5; arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.2). 
 
5.3. Les provisions pour les engagements (" Verpflichtungen ") de l'exercice au sens de l'art. 63 al. 1 let. a LIFD doivent reposer sur un contrat ou sur une loi (ATF 147 II 209 consid. 4.1.1; arrêts 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.1; 2C_490/2016 du 25 août 2017 consid. 5.2). D'après l'art. 960e al. 2 CO, lorsque, en raison d'événements passés, il faut s'attendre à une perte d'avantages économiques pour l'entreprise lors d'exercices futurs, il y a lieu de constituer des provisions à charge du compte de résultats, à hauteur du montant vraisemblablement nécessaire. Les provisions exigées par l'art. 960e al. 2 CO sont justifiées commercialement et doivent être reconnues fiscalement (ATF 147 II 209 consid. 4.1.1; arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 4.3; cf. aussi arrêt 2C_392/2009 du 23 août 2009 consid. 2.2, in RDAF 2011 II p. 70).  
 
5.4. La recourante fait valoir que la provision de 245'338 fr. était obligatoire selon l'art. 960e al. 2 CO, dès lors que le propriétaire d'un immeuble soumis au régime de contrôle était tenu, en vertu de la législation cantonale genevoise, de constituer une provision afin de couvrir l'entier des frais d'entretien de son bien immobilier. Comme elle était obligatoire selon l'art. 960e al. 2 CO, elle devait être admise sur le plan fiscal.  
Ainsi qu'il a été vu (cf. supra consid. 4.3), la Cour de justice a retenu que l'art. 3 al. 4 RGL imposait au propriétaire de constituer une réserve. Ni cette disposition, ni le chiffre 7 de l'arrêté départemental du 1er octobre 2018 ne prescrivaient à la recourante de comptabiliser une provision. Il s'ensuit que l'argumentation de la recourante, fondé sur une prétendue obligation légale d'inscription de la provision, tombe à faux.  
 
5.5. La recourante allègue aussi que le risque de travaux serait quasi-certain, de sorte que l'art. 960e al. 2 CO commandait d'enregistrer une provision. Elle se contente toutefois d'alléguer ce risque, sans le démontrer. Elle n'expose par ailleurs pas quel événement passé aurait engendré un risque de pertes, comme le note l'Administration fiscale cantonale dans sa réponse.  
 
5.6. Il suit de ce qui précède qu'on ne peut pas considérer que la provision de 245'338 fr. inscrite dans les comptes de la recourante était exigée par l'art. 960e al. 2 CO. Elle n'est donc pas justifiée commercialement de ce point de vue.  
 
5.7. On peut encore se demander si la provision inscrite par la recourante est admissible en tant que provision pour "autre risque de perte imminente" (art. 63 al. 1 let. c LIFD).  
 
5.7.1. Le cas de figure envisagé à l'art. 63 al. 1 let. c LIFD vise les risques de pertes qui ne reposent pas encore sur des engagements effectifs et qui ne concernent pas les actifs circulants (message sur l'harmonisation fiscale, FF 1983 III 1, 178, cité in ATF 147 II 209 consid. 4.2.2.1). Leur prise en compte sur le plan fiscal est soumise à deux conditions. D'une part, le risque de pertes doit déjà avoir existé au cours de l'exercice lui-même; des provisions pour risques futurs ne sont pas admissibles. D'autre part, le risque doit être imminent (ATF 147 II 209 consid. 4.2.2.1; arrêts 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.1; 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 3.1; ATF 103 Ib 366 consid. 4; cf. message sur l'harmonisation fiscale, FF 1983 III 1, 178). Le droit fiscal n'admet pas la constitution de réserves latentes par le biais de provisions, pourtant tolérées en droit des obligations et selon les usages du commerce (ATF 147 II 209 consid. 4.2.1; arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 5.1 et les arrêts cités). La constitution de provision à la charge du compte de résultat n'est possible que dans des limites relativement étroites et, du point de vue temporel, que si elle se trouve dans une relation claire de connexité avec l'exercice commercial en cause ("durant l'exercice"; "nel corso dell' esercizio"; "die im Geschäftsjahr bestehen") (ATF 147 II 209 consid. 4.2.2.1; arrêt 2C_900/2020 du 20 mai 2021 consid. 3.2).  
En ce qui concerne les travaux d'entretien d'immeubles, ceux à effectuer en permanence doivent être pris en compte dans le compte courant, de sorte que l'admission de provisions n'entre pas en ligne de compte. Quant aux provisions pour de grosses réparations, elles ne peuvent en principe être admises que si l'entretien d'un immeuble détenu par une entreprise a été négligé par le passé, lorsque ce fait n'a pas été pris en compte par la comptabilisation d'amortissements suffisamment élevés et qu'il faudra dès lors s'attendre, dans le futur, compte tenu des importants travaux d'assainissements qui s'imposent, à des charges élevées qui, en raison d'amortissements insuffisants, ne seront pas activables ou ne le seront que partiellement (ATF 147 II 209 consid. 4.2.2.2). A certaines conditions, une provision peut aussi se justifier dans des cas où l'entretien n'a pas été négligé par le passé (cf. ATF 147 II 209 consid. 4.2.2.2). 
 
5.7.2. Selon l'arrêt de la Cour de justice, l'Administration fiscale cantonale genevoise avait pour pratique d'admettre les provisions forfaitaires pour gros travaux d'entretien. Depuis le 17 septembre 2018, cette pratique a été abrogée (information no 1/2018 du 17 septembre 2018, disponible sur: https://www.ge.ch/informations-fiscales; à noter que la jurisprudence ne s'est pas prononcée de manière définitive sur la conformité au droit fédéral de telles provisions forfaitaires cantonales [ATF 147 II 209 consid. 4]).  
 
5.7.3. En l'espèce, la provision enregistrée par la recourante n'est pas susceptible de relever de l'ancienne pratique de l'Administration fiscale cantonale. D'une part, cette pratique a été abrogée avec effet immédiat. D'autre part, la Cour de justice a constaté que la recourante n'avait pas comptabilisé un montant forfaitaire. La recourante ne le conteste du reste pas.  
Par ailleurs, les conditions pour l'admissibilité sur le plan fiscal d'une provision pour gros travaux d'entretien ne sont pas réunies. Il n'est en particulier pas fait état de travaux imminents qui trouveraient leur source en 2018. La recourante, qui expose avoir constitué une provision pour "travaux futurs", ne prétend d'ailleurs pas le contraire. 
 
5.8. Sur le vu de ce qui précède, c'est à bon droit que la Cour de justice a confirmé la reprise d'un montant de 245'338 fr. dans le bénéfice de la recourante. Le recours est donc rejeté en tant qu'il concerne l'IFD de la période fiscale 2018.  
 
II. Impôts cantonal et communal  
 
6.  
 
6.1. L'impôt sur le bénéfice des personnes morales a pour objet l'ensemble du bénéfice net, y compris les charges non justifiées par l'usage commercial, portées au débit du compte de résultats (art. 24 al. 1 let. a LHID). En vertu de l'art. 10 al. 1 let. b LHID, applicable à l'imposition des personnes morales par le biais de l'art. 24 al. 4 LHID, les frais justifiés par l'usage commercial ou professionnel qui peuvent être déduits comprennent notamment les provisions constituées pour couvrir des engagements dont le montant est encore indéterminé ou d'autres risques de pertes imminentes.  
La loi genevoise sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM; rsGE D 3 15) prévoit des dispositions similaires en ces art. 11, 12 al. 1 let. e et 16B, qui correspondent également aux art. 57, 58 et 63 LIFD (arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 6.1). 
Les considérations émises à propos de l'IFD peuvent donc être appliquées aux ICC. 
 
6.2. En vertu de l'art. 2 al. 1 let. b LHID, les cantons prélèvent un impôt sur le capital des personnes morales. L'impôt sur le capital a pour objet le capital propre (art. 29 al. 1 LHID). Le capital propre imposable comprend, pour les sociétés de capitaux et les sociétés coopératives, le capital-actions ou le capital social libéré, les réserves ouvertes et les réserves latentes constituées au moyen de bénéfices imposés (art. 29 al. 2 let. a LHID). Les art. 27 et 28 LIPM contiennent des dispositions similaires. L'impôt sur le capital englobe donc les réserves ouvertes, mais ne vise les réserves latentes que si elles ont été constituées au moyen de bénéfices imposés. Tel est notamment le cas d'amortissements surfaits ou des provisions non admises qui ont fait l'objet de reprises (arrêt 2C_712/2020 du 4 mars 2021 consid. 6.2). En l'espèce, la provision, reprise à bon droit, doit donc être ajoutée au capital imposable, ce que la recourante ne conteste du reste pas.  
 
6.3. Partant, le recours est également rejeté en tant qu'il concerne les ICC de la période fiscale 2018.  
 
7.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours tant en matière d'IFD que d'ICC. Succombant, la recourante doit supporter les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct. 
 
2.  
Le recours est rejeté en tant qu'il concerne les impôts cantonal et communal. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Administration fiscale cantonale et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lausanne, le 16 août 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Kleber