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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
4A_290/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 1er septembre 2014  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales Klett, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Piaget. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, représentée par Me Grégoire Rey, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, représentée par 
Me Michel Ducrot, 
intimée. 
 
Objet 
motivation de l'appel (art. 311 al. 1 CPC), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour civile I, du 1er avril 2014. 
 
 
Faits :  
 
A.   
En 2004 et 2005, C.________ SA (ci-après: C.________) et D.________ SA (ci-après D.________) ont vendu de la marchandise à A.________ SA (ci-après: A.________), sur commande de celle-ci. La marchandise a été livrée par camion à A.________, en général dans ses locaux, contre signature de bulletins de livraison. Des factures lui ont ensuite été adressées. 
Les 3 juillet et 17 septembre 2007, C.________ et D.________ ont chacune fait notifier un commandement de payer à A.________ pour des factures demeurées impayées. La débitrice y a fait opposition. 
 
B.   
Le 5 février 2007, C.________, à laquelle a succédé en cours de procédure D.________, a ouvert une action en reconnaissance de dette contre A.________ s'agissant de sa créance. Le 14 février 2007, D.________ en a fait de même pour la sienne. 
A.________ a déposé des mémoires de réponse à ces deux demandes les 25 mai 2007 et 25 juin 2007. 
Les deux affaires ont été jointes. Au dernier état des conclusions, prises le 22 février 2012, D.________ conclut à ce que A.________ soit reconnue lui devoir: 
 
- le montant de 234'988 fr. 95 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2006, l'opposition au commandement de payer n° xxx de l'Office des poursuites et des faillites de l'Entremont étant définitivement levée à due concurrence, et 
- le montant de 201'407 fr. 25 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2006, l'opposition au commandement de payer n° yyy de l'Office des poursuites et des faillites de l'Entremont étant définitivement levée à due concurrence (jugement de première instance p. 2). 
Par jugement du 9 janvier 2013, le juge du district de l'Entremont a entièrement fait droit aux conclusions de la demanderesse et mis les frais (77'686 fr. 20) et les dépens (23'186 fr. 20 à titre de remboursement des avances et 28'000 fr. à titre de frais d'avocat) à la charge de la défenderesse qui a entièrement succombé. 
 
C.   
Le 11 février 2013, la défenderesse a déposé un mémoire d'appel, qui a été déclaré irrecevable par la Cour civile I du Tribunal cantonal valaisan le 1er avril 2014, faute de motivation satisfaisant aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC. Par conséquent, la cour cantonale a confirmé le jugement de première instance, en en reprenant les termes dans son dispositif. 
 
D.   
Le 16 mai 2014, la défenderesse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant à son annulation et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour qu'il entre en matière sur son appel. Elle invoque la violation des art. 311 al. 1 et 57 CPC
Les parties n'ont pas été invitées à se déterminer sur le fond. Toutefois, en se déterminant sur l'effet suspensif, le Tribunal cantonal a indiqué également qu'il se référait aux considérants de son jugement. 
La requête d'effet suspensif présentée par la recourante a été rejetée le 12 juin 2014. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision, rendue sur recours par le tribunal supérieur du canton du Valais (art. 75 LTF) dans une contestation civile (art. 72 al. 1 LTF) dont la valeur est supérieure à 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions. 
Par courrier du 9 juillet 2014, l'intimée a informé le Tribunal fédéral qu'elle avait fusionné avec une autre société et constitué ainsi une nouvelle société, laquelle a ensuite modifié sa raison sociale (B.________ SA). Le rubrum du présent arrêt a donc été modifié en conséquence. 
 
2.   
Le recours en matière civile au Tribunal fédéral peut être exercé pour violation du droit suisse tel qu'il est délimité à l'art. 95 LTF, en particulier du droit fédéral, y compris le droit constitutionnel (let. a). Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). 
Le mémoire de recours en matière civile doit contenir les conclusions et les motifs à l'appui de celles-ci (art. 42 al. 1 LTF). Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Pour satisfaire à cette obligation de motiver (Begründungspflicht, obbligo di motivare), le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit fédéral (ATF 133 IV 286 consid. 1.4; arrêts 5A_92/2007 du 8 juin 2007 consid. 4.1; 5A_129/2007 du 28 juin 2007 consid. 1.4). 
 
3.   
En ce qui concerne les prétentions au fond, la cour cantonale a refusé d'entrer en matière sur l'appel, considérant que celui-ci n'était pas motivé conformément aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC. Si le dispositif de son arrêt confirme le jugement du juge de district du 9 janvier 2013, ce n'est qu'en tant que conséquence de l'irrecevabilité de l'appel. La recourante lui reproche d'avoir violé l'art. 311 al. 1 CPC
 
3.1. Selon l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe au recourant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 p. 375). Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si la motivation de l'appel est identique aux moyens qui avaient déjà été présentés en première instance, avant la reddition de la décision attaquée (arrêt 4A_97/2014 du 26 juin 2014 consid. 3.3), ou si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêts 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2; 4A_97/2014 déjà cité consid. 3.3).  
 
3.2. Force est de constater que le mémoire d'appel de 44 pages consiste en un " copié/collé " des faits allégués et de l'argumentation juridique que l'appelante avait présentés dans ses mémoires de réponse dans les deux affaires, avant leur jonction, les 25 mai 2007 et 25 juin 2007, l'appelante n'y ayant ajouté qu'une critique "sur les dépens" (p. 42) et 4 allégués sur une action en libération de dette (p. 29).  
Ce faisant, s'agissant des prétentions au fond, l'appelante procède comme s'il n'y avait jamais eu de premier jugement. Elle repropose au juge d'appel ses allégués de fait et son argumentation juridique présentés en première instance, comme si le juge d'appel était un second juge chargé de faire à nouveau exactement le même travail que le juge de district. Une telle façon de procéder ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC. L'appelante n'a pas démontré en quoi la motivation du premier juge était erronée. C'est donc à raison que la cour cantonale a jugé que, sur le fond, le recours était irrecevable. 
 
4.   
 
4.1. En ce qui concerne les dépens alloués en première instance, l'appel contient 4 allégués de fait (p. 29), repris sous une forme légèrement modifiée dans son argumentation juridique (p. 42), relatifs à une procédure antérieure de libération de dette, qu'elle indique avoir dû introduire, et dont les frais et dépens de première instance auraient dû entraîner une réduction des dépens de l'action en reconnaissance de dette.  
La cour cantonale a déclaré le grief irrecevable, le dossier ne permettant pas de déterminer si la question des dépens d'une action en libération de dette antérieure, que l'appelante prétend avoir dû introduire à la suite d'une décision de mainlevée, avait été soumise au premier juge, de sorte que son grief, qui repose sur des faits nouveaux, est irrecevable. Dans une motivation subsidiaire, la cour cantonale a jugé que, même s'il était recevable, l'appel serait manifestement sans fondement et confinerait à la témérité. La recourante lui reproche également une violation de l'art. 311 al. 1 CPC
Dans son recours en matière civile (p. 11 n. 3e), la recourante ne s'en prend pas à la motivation de la cour cantonale conformément aux exigences sus-exposées (cf. consid. 2), se bornant à affirmer que " l'instance cantonale supérieure n'a nullement critiqué la qualité de la motivation de la recourante sur ce point ", de sorte que son grief portant sur les dépens avait été " motivé à suffisance de droit ". Partant, sa critique est irrecevable. 
 
5.   
La recourante soutient aussi que lorsqu'un seul grief de l'appel est recevable - en l'occurrence, selon elle, son grief sur les dépens de première instance -, l'instance d'appel doit appliquer le droit d'office en vertu de l'art. 57 CPC à tout l'appel - même si les griefs sur les prétentions au fond sont irrecevables. 
Or, la cour cantonale n'a pas considéré que le grief de l'appelante sur les dépens fût recevable. Au demeurant, si l'instance d'appel applique le droit d'office, elle le fait uniquement, en vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, sur les points du jugement que l'appelante estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable (cf. consid. 3.1) -, pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). 
 
6.   
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais de son auteur. L'intimée ayant été invitée à se déterminer sur la requête d'effet suspensif, mais pas sur le fond, des dépens ne lui seront alloués que pour sa détermination sur l'effet suspensif, sur lequel elle a obtenu gain de cause. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
La recourante versera à l'intimée une indemnité de dépens de 500 fr. pour sa détermination sur l'effet suspensif. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour civile I. 
 
 
Lausanne, le 1er septembre 2014 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Klett 
 
Le Greffier : Piaget