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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_287/2021  
 
 
Arrêt du 7 juin 2022  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Hohl, Présidente, Kiss, Niquille, Rüedi et May Canellas. 
Greffière: Mme Raetz. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Maurice Utz, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. B.________ SA, 
2. C.________ SA, 
toutes deux représentées par Me Daniel Udry, avocat, 
intimées. 
 
Objet 
contrat de bail conclu en faveur d'un tiers; résiliation par le locataire, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 19 avril 2021 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève (C/19160/2019; ACJC/466/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. La B.________ SA est propriétaire d'appartements dans l'immeuble sis à l'avenue de U.________ à V.________. Ses statuts lui permettent de les louer à ses propres actionnaires notamment.  
Elle est en particulier propriétaire d'un appartement de deux pièces situé au 3ème étage de l'immeuble. 
 
A.b. Le 1er septembre 1989, le porteur des certificats nos 35 et 36 correspondant à 92 actions de la B.________ SA a, en tant que locataire et sous-bailleur, loué à D.________ cet appartement de deux pièces avec une cave (ci-après: le contrat de bail du 1er septembre 1989).  
Ce bail prévoit que les locaux sont destinés à l'habitation exclusive de A.________. Conclu pour une durée déterminée, jusqu'au 31 octobre 1990, il était ensuite renouvelable tacitement d'année en année, sauf résiliation respectant un préavis de trois mois. Par avenant du 9 juillet 1991 notifié à D.________, le loyer a été augmenté à 1'540 fr. par mois. 
 
A.c. Depuis le début du bail, seule A.________ occupe l'appartement. D.________ n'y a jamais habité.  
 
A.d. Le 19 mars 2014, C.________ SA a acquis par convention de sociétariat les 92 actions de la B.________ SA correspondant aux certificats susmentionnés. La B.________ SA lui a, par contrat de bail du même jour, loué cet appartement. Elle lui a reconnu le droit de (sous-) louer la part de copropriété correspondant à l'appartement.  
 
A.e. Par courrier du 25 novembre 2015, envoyé à l'adresse de l'appartement, au nom de " D.________, à l'att. de Mme A.________ ", la régie en charge de la gestion de ce logement a informé que la nouvelle bailleresse était C.________ SA.  
 
A.f. Le 6 mars 2017, D.________ a résilié le bail de l'appartement. Il a demandé à la régie que A.________ puisse rester dans le logement jusqu'à la fin du mois de mai 2017.  
Le 9 mars 2017, par courrier expédié à l'adresse de D.________, au chemin des W.________, la régie lui a répondu que la prochaine échéance du bail était au 31 octobre 2017. Par courrier séparé, envoyé à l'adresse de l'appartement loué, elle a informé A.________ de ce qui précède. 
Les 5 mai et 10 juillet 2017, deux courriers liés à l'état des lieux préliminaire ont été envoyés à l'adresse de l'appartement au nom de " D.________, à l'att. de Mme A.________ ". 
Le 18 octobre 2017, D.________ a relayé à la régie la demande de A.________ de pouvoir prolonger le bail de trois mois, ce que la régie a refusé par courrier du 25 octobre 2017 envoyé à l'adresse de D.________, confirmant que l'état des lieux de sortie se tiendrait le 2 novembre 2017. 
Par courrier du 3 novembre 2017 expédié à l'adresse de D.________, la régie l'a averti que depuis le 1er novembre 2017, il occupait de manière illicite l'appartement. 
 
B.  
 
B.a. La B.________ SA et C.________ SA ont déposé une requête en revendication à l'encontre de A.________ auprès du Tribunal de première instance du canton de Genève. Par jugement du 21 juin 2019, le tribunal a déclaré la requête irrecevable pour incompétence à raison de la matière. Il a retenu que le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève était compétent pour statuer sur tout litige relatif aux baux et loyers opposant un bailleur principal à un sous-locataire.  
 
B.b. Le 22 octobre 2019, au bénéfice d'une autorisation de procéder, la B.________ SA et C.________ SA (ci-après: les demanderesses ou les intimées) ont saisi le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève. Elles ont conclu à ce que le tribunal ordonne l'évacuation de A.________ (ci-après: la défenderesse ou la recourante) de l'appartement litigieux, sous la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP, et les autorise à faire appel à la force publique pour y procéder. Elles ont allégué que leur locataire, D.________, avait résilié le contrat de bail et que la défenderesse, sous-locataire, occupait ainsi l'appartement sans droit.  
La défenderesse a quant à elle invoqué qu'elle occupait l'appartement depuis plus de trente ans et qu'elle s'était toujours acquittée du loyer. La régie s'était adressée à elle pendant les relations contractuelles, encore récemment en lui faisant parvenir les bulletins de versement concernant les indemnités pour occupation illicite, si bien qu'elle se considérait comme la locataire de l'appartement. La résiliation du bail était donc nulle. 
Lors de l'audience du 9 juin 2020, les demanderesses ont indiqué que les indemnités pour occupation illicite avaient été réglées. 
Par jugement du 21 septembre 2020, le tribunal a constaté que la défenderesse était locataire de l'appartement litigieux et a déclaré nulle la résiliation du bail donnée par D.________ le 6 mars 2017. 
 
B.c. Saisie d'un appel des demanderesses, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice a, par arrêt du 19 avril 2021, annulé ce jugement. Statuant à nouveau, elle a condamné la défenderesse à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens, ainsi que toute autre personne faisant ménage commun avec elle, l'appartement et la cave litigieux. Elle a renvoyé l'affaire à l'instance précédente afin qu'elle statue sur les mesures d'exécution sollicitées.  
 
C.  
La défenderesse a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Elle a conclu, en substance, à sa réforme en ce sens qu'il soit constaté qu'elle est locataire - respectivement co-locataire - de l'appartement litigieux, que la résiliation du bail soit déclarée nulle et que les demanderesses soient déboutées de toutes autres conclusions. Elle a requis l'octroi de l'effet suspensif au recours et a sollicité l'assistance judiciaire. 
La requête d'effet suspensif a été admise par ordonnance présidentielle du 29 juin 2021. 
La demande d'assistance judiciaire de la recourante a été rejetée par ordonnance du 8 septembre 2021. 
Dans leur réponse, les intimées ont conclu au rejet du recours. 
La cour cantonale s'est référée à son arrêt. 
La recourante a déposé une réplique spontanée, qui a été communiquée aux intimées avec un délai pour formuler d'éventuelles observations. Celles-ci n'en ont pas fait usage. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes au délai (art. 100 al. 1 LTF) et à la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. requise pour ce type de conflit (art. 74 al. 1 let. a LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard, toutefois, à l'exigence de motivation qu'impose l'art. 42 al. 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait envisageable, voire préférable (ATF 136 III 552 consid. 4.2). 
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées. Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). 
 
3.  
En bref, le Tribunal des baux et loyers a considéré que le bail (i.e. le sous-bail) passé avec D.________ n'était pas valable parce que celui-ci n'avait jamais eu l'intention d'occuper l'appartement. Il en a conclu que la réelle et commune intention des parties était donc de sous-louer l'appartement directement à la défenderesse, de sorte que le contrat passé avec D.________ était simulé et, partant, nul. Ce dernier ne pouvait valablement résilier le bail. 
La cour cantonale a écarté la simulation, estimant que les parties avaient bien eu l'intention de sous-louer l'appartement à D.________. La précision que l'appartement était réservé à l'usage de la défenderesse constituait une modalité d'utilisation de l'appartement, qui était admissible et n'avait pas pour effet de modifier les parties au contrat, ni de conférer à l'occupante la qualité de locataire. Elle a nié que la défenderesse ait pu devenir titulaire du sous-bail par actes concluants, car aucun élément ne permettait de l'admettre. Le bail a donc bien été valablement résilié par D.________. 
La recourante se plaint d'établissement manifestement inexact des faits. Essentiellement, elle reproche à la cour cantonale d'avoir nié sa qualité de locataire ou colocataire, violant par là les art. 18 et 253 CO
 
4.  
Tout d'abord, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir établi certains faits de manière manifestement inexacte. A cet égard, elle énumère plusieurs faits que la cour cantonale aurait omis d'établir et requiert un complètement de l'état de fait. 
Pour l'essentiel de ces points, la recourante n'expose pas de façon précise, notamment par des renvois à ses écritures, avoir allégué ces faits devant la cour cantonale. La référence à certaines pièces figurant au dossier est à cet égard insuffisante. S'agissant du fait que la régie ne lui aurait jamais proposé de solution de relogement, la recourante n'explique pas de manière satisfaisante en quoi ce point serait juridiquement pertinent. Il en va de même concernant les éléments ayant motivé la demande d'annulation de l'état des lieux. 
Ainsi, il y a lieu de se fonder exclusivement sur les faits retenus par la cour cantonale. 
 
5.  
Faute de grief en ce sens, le Tribunal fédéral renonce à examiner si la B.________ SA, propriétaire de l'appartement litigieux qui a remis à bail cet appartement à C.________ SA, a la qualité pour agir en expulsion de la recourante (cf. consid. 2.1 ci-dessus). 
Par ailleurs, l'arrêt attaqué ne reproduit pas correctement les positions de la propriétaire et de C.________ SA en lien avec le contrat de bail du 1er septembre 1989, puisque la B.________ SA a loué l'appartement à C.________ SA, qui l'a sous-loué à D.________. Ce point n'a toutefois pas été soulevé par la recourante et n'est quoi qu'il en soit pas déterminant, au vu de ce qui suit. 
 
6.  
La recourante reproche à l'instance cantonale d'avoir considéré que le contrat de bail du 1er septembre 1989 était valide et d'avoir nié sa qualité de locataire ou de co-locataire. Elle dénonce une appréciation arbitraire des preuves et une violation des art. 18 et 253 CO
 
6.1.  
 
6.1.1. Le bail à loyer est un contrat par lequel le bailleur s'oblige à céder l'usage d'une chose au locataire, à charge pour celui-ci de lui verser un loyer (art. 253 CO). Le contrat de bail, notamment lorsqu'il porte comme en l'espèce sur une habitation, est soumis, pour sa formation et son contenu, aux art. 1 ss et 18 CO. Le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté (art. 1 al. 1 CO).  
 
6.1.2. En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (cf. art. 18 CO; ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b).  
Le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités). L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises ou, au contraire, qu'elles ne se sont pas comprises, il s'agit de constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles ne soient manifestement inexactes (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités). 
Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties, il doit interpréter leurs comportements selon le principe de la confiance (interprétation objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait. Les circonstances déterminantes à cet égard sont uniquement celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les arrêts cités). 
 
6.2. Il y a lieu d'examiner tout d'abord la question de la simulation écartée par la cour cantonale, sur laquelle la recourante revient implicitement.  
 
6.2.1. Pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, le juge n'est pas lié par les expressions ou dénominations inexactes dont les parties ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO). Dans cette dernière hypothèse, on parle de simulation (arrêt 4A_362/2012 du 28 septembre 2012 consid. 4.1). La volonté de simuler un acte juridique est nécessairement liée à une intention de tromper ( Täuschungsabsicht) (arrêt 4A_90/2016 du 25 août 2016 consid. 3.3.2; Wolfgang Wiegand, in Basler Kommentar, Obligationenrecht, vol. I, 7e éd. 2019, n° 51 ad art. 18 CO). Un acte juridique est simulé au sens de l'art. 18 CO lorsque les deux parties sont d'accord que les effets juridiques correspondant au sens objectif de leurs déclarations ne doivent pas se produire et qu'elles n'ont voulu créer que l'apparence d'un acte juridique à l'égard des tiers (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc; arrêts 4A_484/2018 du 10 décembre 2019 consid. 4.1; 4A_473/2018 du 5 juin 2019 consid. 4.1.3; 4A_90/2016 précité consid. 3.3.2). Leur volonté véritable tendra soit à ne produire aucun effet juridique, soit à produire un autre effet que celui de l'acte apparent; dans ce dernier cas, les parties entendent en réalité conclure un second acte dissimulé (cf. les mêmes arrêts). Juridiquement inefficace d'après la volonté réelle et commune des parties, le contrat simulé est nul (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc), tandis que le contrat dissimulé - que, le cas échéant, les parties ont réellement conclu - est valable si les dispositions légales auxquelles il est soumis quant à sa forme et à son contenu ont été observées (ATF 117 II 382 consid. 2a; arrêts précités 4A_484/2018 consid. 4.1; 4A_473/2018 consid. 4.1.3; 4A_90/2016 consid. 3.3.2).  
Savoir si les parties avaient la volonté (réelle) de feindre une convention revient à constater leur volonté interne au moment de la conclusion du contrat, ce qui constitue une question de fait (arrêt 4A_308/2021 du 10 juin 2021 consid. 5.5.2); le comportement ultérieur des parties est un indice de leur intention réelle au moment de la conclusion du contrat (ATF 112 II 337 consid. 4a; arrêts précités 4A_484/2018 consid. 4.1; 4A_473/2018 consid. 4.1.3). Il incombe à celui qui se prévaut de la simulation d'en apporter la preuve (art. 8 CC), étant précisé qu'on ne saurait admettre trop facilement que les déclarations ou attitudes des parties ne correspondent pas à leur volonté réelle; le juge doit se montrer exigeant en matière de preuve d'une simulation (ATF 112 II 337 consid. 4a; arrêts précités 4A_308/2021 consid. 5.5.2; 4A_90/2016 consid. 3.3.2). Des allégations de caractère général et de simples présomptions ne suffisent pas (arrêt 4A_429/2012 du 2 novembre 2012 consid. 4.2). 
 
6.2.2. Examinant la validité du contrat de bail du 1er septembre 1989, l'instance cantonale a retenu que le contrat précisait expressément de manière claire que l'appartement était destiné à l'habitation exclusive de A.________. Les parties ne créaient aucune apparence d'un acte juridique à l'égard de tiers qui ne correspondrait pas à leur volonté réelle et elles n'avaient pas l'intention de tromper quiconque. Les déclarations des parties et leur volonté concordaient par ailleurs, en ce sens qu'elles souhaitaient effectivement mettre à disposition de A.________ l'appartement loué. Les correspondances en relation avec l'appartement étaient adressées par la régie en charge de l'immeuble à " D.________, à l'att. de Mme A.________ ", ce qui montrait également que le locataire était effectivement D.________, mais que le destinataire intéressé à ces communications était A.________, qui occupait effectivement les locaux, conformément à la volonté exprimée des parties de lui en laisser la jouissance. La cour cantonale a donc conclu que le contrat de bail du 1er septembre 1989 n'était pas simulé.  
 
6.2.3. La recourante n'invoque pas que la cour cantonale aurait arbitrairement constaté la volonté réelle des parties. Ce point, qui relève du fait, ne peut en effet être corrigé que s'il est arbitraire, ce qu'il incombe à la recourante de démontrer. Or, elle allègue simplement que l'indication explicite dans le contrat de la personne ayant la jouissance de l'appartement ne suffit pas à elle seule pour écarter la possibilité d'un contrat simulé. Ainsi, elle se limite, en quelques lignes, à opposer sa propre appréciation des faits à celle de l'autorité précédente, sans parvenir à démontrer le moindre arbitraire dans la constatation de la cour cantonale. Au demeurant, lorsqu'elle soutient que les éléments de la procédure ne permettraient pas de comprendre la raison pour laquelle les parties auraient voulu désigner D.________ en qualité de locataire, elle oublie qu'il lui appartenait d'apporter la preuve de la divergence entre la volonté exprimée et réelle des parties.  
La volonté réelle des parties ayant été établie, il n'y a pas place pour une interprétation (objective) selon le principe de la confiance. 
On relève que la recourante ne se prévaut pas non plus de l'art. 273b al. 2 CO, dont elle ne démontre pas la réalisation des conditions. 
 
6.3. Il faut encore examiner si un tel sous-bail est juridiquement valable.  
Le Tribunal des baux et loyers avait considéré que le sous-bail n'était pas valable parce que D.________ n'avait jamais eu l'intention d'y habiter et n'y avait jamais habité. 
Or, légalement, un bail est valable même lorsque le locataire (ici le sous-locataire) n'a pas l'intention d'utiliser lui-même l'appartement, à moins que les parties n'aient convenu du contraire et prévu que le locataire doit habiter personnellement l'appartement, en d'autres termes aient exclu la sous-location. Par conséquent, la précision, dans le contrat lui-même, que l'appartement était réservé à l'usage de la défenderesse constitue une modalité d'utilisation, voire un consentement donné par avance à une sous-location. 
En tant que la recourante reproche aux juges cantonaux d'avoir perdu de vue que les demanderesses avaient elles-mêmes soutenu, dans leur demande, que le contrat signé par D.________ ne serait pas valable, sa critique s'épuise dans cette seule phrase. Celle-ci n'a donc pas à être prise en compte, faute de satisfaire aux exigences de motivation prévalant devant le Tribunal fédéral. 
 
6.4. Enfin, il reste à examiner si la bailleresse, respectivement sa successeur, lui aurait reconnu la qualité de locataire ou co-locataire " par acte concluant ".  
 
6.4.1. La recourante se prévaut du fait que l'appartement a été mis à sa disposition en 1989 déjà, qu'elle y a habité durant 30 ans, et que la régie s'est adressée à elle tout au long de la relation contractuelle, ce dont elle déduit qu'elle serait devenue titulaire ou cotitulaire du bail par actes concluants.  
 
6.4.2. Par cette critique, la recourante ne démontre pas l'arbitraire de l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle aucun élément ne permet de déduire un changement de titulaire par actes concluants. Elle affirme certes qu'elle a toujours payé le loyer, mais ce fait ne résulte pas de l'arrêt attaqué et elle ne démontre ni l'avoir allégué, ni l'avoir prouvé, ni que la partie adverse l'aurait admis.  
Même supposé allégué, ce fait n'est pas non plus prouvé par le fait qu'après la résiliation du bail par D.________, pour le paiement du loyer pour occupation illicite, la régie lui a adressé des bulletins de versement sur lesquels figuraient le nom de D.________ et le sien. De ces bulletins envoyés postérieurement à la résiliation, on ne saurait non plus déduire que la bailleresse aurait admis, avec un effet rétroactif de 30 ans, que la défenderesse était colocataire du bail. 
Lorsqu'elle fait valoir que la régie s'est adressée à elle tout au long de la relation, elle fait mine d'ignorer que les correspondances étaient adressées à " D.________, à l'att. de Mme A.________ ". On ne peut qu'en déduire que la bailleresse considérait que son locataire était bien D.________ et que l'appartement était occupé par la défenderesse. Le seul écoulement du temps, 30 ans, ne suffit pas pour admettre un changement des parties au contrat qui avait été signé, par actes concluants. 
 
6.5. En définitive, la cour cantonale a retenu, sans arbitraire, que le contrat de bail du 1er septembre 1989 n'était pas simulé et que D.________ avait seul la qualité de locataire, de sorte que ce dernier pouvait valablement résilier le contrat.  
 
7.  
Le recours droit être rejeté dans la mesure où il est recevable. La recourante supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). De plus, elle versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 3'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 7 juin 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Raetz