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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
5A_777/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 29 janvier 2018  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président, 
Herrmann et Schöbi. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Thibault Blanchard, avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
1. B.________, 
représentée par Me Denis Sulliger, avocat, 
2. C.________, 
intimés, 
 
Objet 
inscription d'une servitude de passage nécessaire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel civile 
du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 30 août 2017 (PS13.015565-161679 381). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.________ est propriétaire individuelle de la parcelle no 2104 de la commune de U.________.  
La parcelle no 2179, située dans la même localité, appartient à C.________ et A.________ en propriété commune. 
La parcelle no 2104 ne dispose pas d'un accès carrossable direct à la voie publique. A l'ouest, elle est séparée du chemin D.________ par les parcelles nos 3770 et 3771; à l'est, elle est séparée du chemin E.________ par les parcelles nos 2177 et 2179. 
 
A.b. La parcelle no 2104 bénéficie d'un certain nombre de servitudes, à savoir:  
 
- deux servitudes de passage à pied no 234'449 et no 234'497, inscrites les 15 mai 1924 et 27 janvier 1933 au registre foncier, grevant respectivement les parcelles nos 3770 et 3771; 
- une servitude de passage à pied no 195'672, de 60 cm de largeur, inscrite le 27 novembre 1959 et grevant la parcelle no 2103; 
- une servitude de passage à pied et pour petits véhicules no 195'672, de 2 mètres de largeur, inscrite le 28 novembre 1959 et grevant la parcelle no 2177. 
Cette dernière servitude permet à B.________ de traverser la parcelle contiguë no 2177 jusqu'à la limite ouest du bien-fonds no 2179. Cette dernière parcelle est grevée d'une servitude de passage à pied et pour petits véhicules de 2 mètres de largeur en faveur de la parcelle no 2177 (servitude no 263'660 inscrite le 21 décembre 1976); elle n'est toutefois grevée d'aucune servitude en faveur de la parcelle no 2104. 
 
A.c. B.________ a acquis la parcelle no 2104 par donation de son père du 14 décembre 2000, celui-ci en ayant été propriétaire depuis le 20 novembre 1959.  
Historiquement, les parcelles nos 2104 et 2103 sont issues des anciennes parcelles nos 88 et 89 du cadastre de U.________, autrefois réunies; la parcelle no 2105 est issue de la parcelle no 85, tandis que les parcelles nos 3770 et 3771 proviennent des parcelles nos 10, 12 et 24 du cadastre de cette dernière commune. 
Au début du 20ème siècle, toutes ces parcelles appartenaient à un dénommé F.________. Les parcelles nos 10 et 12 étaient traversées par le chemin public D.________. Celui-ci existait déjà avant l'introduction du registre foncier en 1912; il a alors été inscrit le 29 juin 1912 en tant que servitude de passage public no 234'370, d'une largeur de 1,20 mètre. 
En 1978, la commune de U.________ a initié une procédure d'expropriation afin de permettre la desserte carrossable des propriétés situées aux alentours du chemin D.________. Dans ce cadre, l'assiette de la servitude de passage public no 234'370 a été élargie de 1,20 mètre à 3 mètres selon jugement d'expropriation du 11 novembre 1980 et inscription au registre foncier du 14 janvier 1981. 
 
A.d. Le 8 novembre 2012, B.________ a demandé à C.________ et A.________ de mettre sa parcelle no 2104 au bénéfice d'un droit de passage nécessaire sur leur parcelle no 2179, contre paiement d'une indemnité de 7'000 fr. et la prise en charge des frais d'inscription au registre foncier.  
A.________ n'est pas entrée en matière sur la requête formulée par B.________. 
C.________ y a en revanche répondu favorablement le 30 novembre 2012, sous réserve de certaines conditions, à savoir l'exercice de la servitude selon une assiette définie par un plan de géomètre daté du 25 mars 1976, l'interdiction de stationner sur le passage et une indemnité augmentée à 10'000 fr. Ces différentes conditions ont été acceptées par la requérante. 
 
B.  
 
B.a. Par demande du 15 avril 2013, modifiée le 2 décembre 2013, B.________ a conclu à ce que le conservateur du registre foncier des districts d'Aigle et de la Riviera inscrive en faveur de sa parcelle no 2104 une servitude de passage nécessaire à pied et pour petits véhicules de 2 mètres de large à charge de la parcelle no 2179, selon plan établi le 25 mars 1976 par le géomètre G.________ et moyennant une pleine indemnité au sens de l'art. 694 CC, fixée à dire de justice.  
A.________ a conclu au rejet de la demande tandis que C.________ a déclaré s'en tenir à la teneur de sa correspondance adressée à la demanderesse le 30 novembre 2012. 
Un rapport d'expertise a été établi le 16 novembre 2014; une inspection locale a également été menée le 23 juin 2015. 
La Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de l'Est vaudois a rejeté la demande par jugement du 23 mai 2016. 
 
B.b. Statuant le 30 août 2017 sur l'appel formé par B.________, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a admis et réformé le jugement entrepris en déclarant que, moyennant une indemnité de 10'000 fr. à verser à C.________ et A.________ solidairement, le conservateur du registre foncier d'Aigle-Riviera inscrira en faveur de la parcelle no 2104 de la commune de U.________ une servitude de passage nécessaire à pied et pour petits véhicules de 2 mètres de large à charge du bien-fonds no 2179, toutes autres ou plus amples conclusions étant rejetées.  
 
C.   
Agissant le 4 octobre 2017 par les voies du recours en matière civile et du recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral, A.________ (ci-après: la recourante) conclut à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que l'appel formé par B.________ (ci-après: l'intimée) est rejeté et le jugement de première instance confirmé; subsidiairement la recourante conclut à l'annulation de la décision rendue par le Tribunal cantonal. 
Des déterminations n'ont pas été demandées. 
 
D.   
La requête d'effet suspensif formée par la recourante a été admise par ordonnance présidentielle du 25 octobre 2017. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 143 III 140 consid. 1). 
 
1.1. Le recours est dirigé contre une décision rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF), dans une affaire pécuniaire.  
 
1.1.1. Le recours en matière civile n'est en principe ouvert que si la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF). C'est le montant litigieux devant la dernière instance cantonale qui est déterminant (art. 51 al. 1 let. a LTF) et l'autorité cantonale de dernière instance doit mentionner celui-ci dans son arrêt (art. 112 al. 1 let. d LTF). La cour cantonale indique qu'elle considère ici la valeur litigieuse comme étant inférieure à 30'000 fr., ce que la recourante conteste.  
Lorsque la contestation porte, comme en l'espèce, sur l'existence d'une servitude, on retiendra l'augmentation de valeur qu'elle procurerait au fonds dominant ou, si elle est plus élevée, la diminution de valeur du fonds servant (parmi plusieurs: ATF 136 III 60 consid. 1.1.1 et les références; 80 II 311 consid. 1). Ainsi que le relève justement la recourante, ces variations de valeur n'ont pas été expertisées. S'agissant de l'augmentation de valeur du fonds dominant, celle-ci ne saurait toutefois simplement être établie en référence à l'indemnité accordée au propriétaire grevé du droit de passage (ATF 120 II 423 consid. 7a; arrêt 5A_142/2011 du 22 septembre 2011 consid. 1.2.1), additionnée du coût réel des travaux d'aménagement (cf. arrêts 5C.200/2005 précité consid. 1.2 et les références; 5A_749/2007 du 2 juin 2008 consid. 1.2). Quant à la diminution de valeur du fonds servant, la recourante omet dans son raisonnement que celui-ci est déjà grevé d'une servitude de passage à pieds et pour petits véhicules en faveur de la parcelle no 2177, la demande de l'intimée visant à étendre le bénéfice de cette servitude à sa parcelle. L'on ne peut donc suivre la recourante lorsqu'elle illustre la perte de valeur de son bien-fonds en alléguant que la constitution de la servitude litigieuse la priverait d'une exploitation rationnelle de ses droits à bâtir. Dès lors que cette restriction existe déjà du fait de l'inscription à sa charge de la servitude de passage en faveur du bien-fonds no 2177, l'on ne peut se fier à ses indications chiffrées. 
En tant qu'aucune donnée chiffrée concrète ne permet de démontrer que la valeur litigieuse serait en l'espèce supérieure à 30'000 fr. et à défaut de constatations ou d'éléments d'appréciation permettant au Tribunal fédéral de fixer lui-même la valeur litigieuse (cf. ATF 136 III 60 consid. 1.1.1; 140 III 571 consid. 1.2), il convient de s'en tenir à la constatation cantonale selon laquelle le seuil de 30'000 fr. n'est pas atteint. Le recours en matière civile ne peut donc être reçu au regard de l'art. 74 al. 1 let. b LTF
 
1.1.2. La recourante ne prétend pas (art. 42 al. 2, 2e phr. LTF) que la contestation soulèverait une question juridique de principe (art. 74 al. 2 let. a LTF), circonstance permettant de déroger à l'exigence de la valeur litigieuse.  
 
1.1.3. Il s'ensuit que le recours en matière civile n'est pas ouvert en l'espèce; en conséquence, la décision n'est susceptible que du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 LTF).  
 
1.2. Celui-ci a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 et 117 LTF), contre une décision finale (90 et 117 LTF), rendue par une autorité supérieure cantonale statuant sur recours (art. 75 et 114 LTF), et la recourante, qui a pris part à l'instance précédente, démontre un intérêt juridique à la modification de la décision attaquée (art. 115 LTF). Le recours constitutionnel subsidiaire est donc en principe recevable.  
 
2.  
 
2.1. Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels exclusivement (art. 116 LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, auquel renvoie l'art. 117 LTF, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs constitutionnels qui sont expressément soulevés et motivés dans l'acte de recours conformément au principe d'allégation (art. 117 et 106 al. 2 LTF; ATF 138 I 232 consid. 3; 134 V 138 consid. 2.1). Il contrôle sous l'angle de l'arbitraire l'application des dispositions législatives ou réglementaires fédérales ou cantonales (cf. notamment: ATF 139 I 169 consid. 6.1) et peut procéder à une substitution de motifs pour autant que la nouvelle motivation, conforme à la Constitution, n'ait pas expressément été écartée par l'autorité cantonale (ATF 138 III 636 consid. 4.3 et les références).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 118 al. 1 LTF). Le recourant ne peut obtenir leur rectification ou leur complètement que s'il démontre la violation de droits constitutionnels (art. 118 al. 2 et 116 LTF). Il doit ainsi exposer avec précision, conformément au principe d'allégation susmentionné, en quoi la constatation d'un fait, pertinent pour l'issue de la procédure, est manifestement insoutenable, c'est-à-dire en contradiction évidente avec la situation de fait, repose sur une inadvertance manifeste ou est dénuée de toute justification objective (ATF 136 I 332 consid. 2.2; 133 III 439 consid. 3.2 et les arrêts cités).  
 
3.   
La recourante invoque avant tout la constatation manifestement lacunaire et inexacte des faits pertinents (art. 118 al. 2 LTF) sur différents points. 
 
3.1. Elle relève d'abord qu'il ressortirait du rapport d'expertise que la variante consistant à grever sa parcelle supposerait d'obtenir également un droit de passage nécessaire sur la parcelle no 4526, arguant que le passage public sur cette partie-là du chemin E.________ ne serait qu'un passage à pied de 1 mètre 20 de large environ, non destiné aux véhicules. La recourante se plaint que l'arrêt entrepris omettrait cette considération factuelle.  
Cet argument tombe à faux. Le passage de l'expertise auquel se réfère la recourante (p. 17) examine la possibilité de désenclaver la parcelle de l'intimée par un passage au travers des bien-fonds nos 2103 ou 2178, à l'exclusion de sa parcelle. L'expert relève en revanche que la parcelle de l'intimée pourrait être reliée aisément au chemin E.________ en passant sur les biens-fonds nos 2177 et 2179 (p. 5), sans aucunement faire état d'un éventuel passage intermédiaire sur la parcelle no 4526. 
 
3.2. La recourante reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir retenu que le chemin E.________ ne serait pas déneigé en hiver, ce qui serait à son sens inexact. Elle ne démontre toutefois nullement en quoi cette circonstance factuelle serait pertinente pour l'issue du litige, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur cette critique.  
 
3.3. La recourante se plaint enfin que la juridiction cantonale aurait supposé, sans aucun fondement, que les chalets et constructions sur les parcelles objets du présent litige se seraient développés récemment. Elle affirme qu'au contraire, les constructions érigées sur les parcelles nos 2104, 2179, 3770 et 3771 l'auraient été il y a des décennies, ainsi que le démontreraient les servitudes de passage et de canalisation à leur charge et profit, constituées pour leur majorité entre 1924 et 1959. L'intéressée n'explique pas ici non plus en quoi cette constatation factuelle aurait un impact sur l'issue du litige, de sorte que sa critique est irrecevable.  
 
4.   
Se référant à l'état antérieur des propriétés, la recourante estime en substance que l'intimée pourrait prétendre à un passage nécessaire à l'ouest, par les parcelles nos 3770 et 3771, voire au nord, au travers du bien-fonds no 2103. Un passage par sa parcelle n'entrerait en revanche nullement en considération sous cet angle. 
 
4.1. La cour cantonale a relevé que les parcelles nos 2104, 2105, 3770 et 3771 étaient autrefois en mains de F.________, cette situation pouvant remonter jusqu'en 1924, sans qu'une datation exacte ne pût cependant être déduite des pièces du dossier. Si le caractère décisif de l'état des lieux antérieur était naturel pour l'acquéreur de la parcelle enclavée issue d'un morcellement ou pour l'ancien co-indivis de la fraction enclavée obtenue après un partage, il était néanmoins inconcevable de remonter ainsi sans limite dans le temps, des quartiers entiers de zones bâties ou à bâtir étant issus, il y a cent ans ou plus, d'une propriété unique. L'on pouvait en conséquence admettre que ce critère n'était plus nécessairement décisif passé une génération ou après plus de cinquante ans pendant lesquels des modifications de surface et des acquisitions par des tiers étaient intervenues. La cour cantonale a par ailleurs observé que ce n'est qu'en 1981 que la largeur du chemin D.________ avait été portée de 1 mètre 20 à 3 mètres. Tant en 1912, qu'en 1924 et qu'en 1959, au moment de l'acquisition de la parcelle no 2104 par le père de l'intimée, l'accès pour véhicules n'était pas assuré en droit par ce chemin pour l'ancienne contenance des parcelles en cause. Enfin, les juges cantonaux ont souligné qu'il " était difficile de reporter aujourd'hui un état antérieur datant du début du siècle précédent dans un contexte de développement de chalets sans aucun lien avec l'aménagement du territoire antérieur au développement des résidences existantes ".  
 
4.2. La recourante affirme d'abord que la solution retenue par la cour cantonale n'assurerait nullement à l'intimée un accès direct à la voie publique dès lors qu'il lui faudrait encore disposer d'un titre juridique l'autorisant à traverser la parcelle no 4526 avec un véhicule automobile. Elle y voit une application arbitraire de l'art. 694 CC ainsi qu'une violation des art. 26 al. 1 et 36 al. 1 Cst.  
Cet argument tombe à faux. Ainsi qu'il l'a été relevé plus haut (consid. 3.1 supra), la nécessité d'un passage sur le bien-fonds no 4526 se pose uniquement dans l'hypothèse de la création d'une voie d'accès au nord, au travers des parcelles nos 2103 ou 2178. Or cette solution n'est pas celle que prévoit la décision entreprise. 
 
4.3. La recourante prétend ensuite que la cour cantonale aurait effectué une application insoutenable de l'art. 694 al. 2 CC et développe son argumentation sous différents angles. Elle soutient ainsi qu'il serait arbitraire de considérer, sans aucun appui juridique, qu'au-delà d'une génération, voire plus de cinquante ans, l'état antérieur des parcelles ne constituerait plus un critère permettant de déterminer le fonds à grever. Dit critère serait pourtant déterminant dans le cas où, comme en l'espèce, une parcelle est privée d'un accès public en raison de mutations foncières et d'aliénation de parcelles contiguës appartenant autrefois à un seul et même propriétaire. L'intéressée souligne également que l'état antérieur des voies d'accès fait aussi référence aux voies d'accès existantes même insuffisantes au regard des besoins actuels. Tel serait le cas en l'espèce en tant que l'intimée disposerait de deux servitudes de passage à pied grevant les parcelles nos 3770 et 3771 qu'il serait envisageable d'aménager pour créer un accès suffisant pour véhicule motorisé. La recourante remarque également qu'il serait arbitraire de considérer que le chemin D.________ n'était pas une voie publique carrossable lorsque F.________ était propriétaire des anciennes parcelles nos 10, 12, 24, 85, 88 et 89. Non seulement la servitude no 234'370 qui rend ce chemin public serait une servitude de passage public dont la portée juridique ne serait pas limitée, mais elle n'était au demeurant pas restreinte à un passage pour les piétons: si sa largeur n'était certes que de 1 mètre 20, elle suffisait toutefois pour faire passer au début du siècle les chars et autres petits véhicules automobiles; l'expropriation au début des années 1980 n'avait pas étendu le droit d'usage déjà illimité, mais uniquement porté sur l'élargissement de l'assiette du passage pour entériner juridiquement un usage carrossable qui existait de longue date, comme en attestait le jugement d'expropriation du 27 juin 1980. Au demeurant, à supposer que l'on considère que le chemin D.________ n'était pas carrossable avant 1980, la recourante souligne que l'on peut en déduire qu'il était néanmoins suffisant à l'époque et assimilable à un passage nécessaire au sens de l'art. 694 CC, l'art. 694 al. 2 CC n'exigeant pas que l'ancien accès soit équivalent à celui réclamé actuellement. La recourante indique enfin que le propriétaire d'une parcelle enclavée ne saurait réclamer un passage nécessaire lorsqu'il a toléré ou s'est accommodé de l'état de nécessité. Tel serait le cas ici dès lors que le père de l'intimée, puis celle-ci, avaient accepté en toute connaissance de cause l'absence d'accès carrossable, l'intimée ayant elle-même accordé le déplacement de l'assiette de la servitude de passage no 234'449 grevant la parcelle no 3771, rendant nettement plus difficile la création d'un passage pour véhicules en sa faveur.  
 
4.4.  
 
4.4.1. Lorsque, comme en l'espèce, il est constant que le propriétaire demandeur n'a qu'une issue insuffisante sur la voie publique, le droit de passage nécessaire s'exerce en premier lieu contre le voisin à qui le passage peut être le plus naturellement réclamé en raison de l'état antérieur des propriétés et des voies d'accès, et, au besoin, contre celui sur le fonds duquel le passage est le moins dommageable (art. 694 al. 2 CC). Quand la nécessité d'un droit de passage est reconnue et que plusieurs fonds voisins offrent une issue vers la voie publique, l'art. 694 al. 2 CC établit ainsi un ordre de priorité (arrêts 5C.246/2004 du 2 mars 2005 consid. 2.2 et la référence publié in RNRF 88/2007 121; 5A_714/2012 du 29 du mai 2013 consid. 4.2.1.1).  
On tiendra compte en premier lieu de l'état antérieur des propriétés et des voies d'accès. Ainsi, dans le cas où la parcelle n'a plus d'accès à la voie publique ensuite de la division d'un fonds, ou de l'aliénation d'une parcelle contiguë appartenant au même propriétaire, le passage sera accordé sur l'autre parcelle qui, elle, a encore un accès à la route (arrêts 5C.246/2004 précité consid. 2.2.1 et les nombreuses références; 5A_714/2012 précité consid. 4.2.1.1). On examinera l'état antérieur des voies d'accès en ne prenant toutefois en considération que les droits de passage existant précédemment, et non de simples autorisations de passer accordées à bien plaire (arrêts 5C.246/2004 précité consid. 2.2.1 et les références; 5A_714/2012 29 précité consid. 4.2.1.1). Les voies d'accès existantes, mais insuffisantes au regard des besoins actuels, notamment parce que le passage est trop étroit ou ne permet pas l'accès avec un véhicule à moteur, entrent aussi en ligne de compte; en pareil cas, le passage nécessaire est dû par le propriétaire du fonds sur lequel s'exerce le droit de passage existant, si un accès suffisant est possible à travers ce fonds (arrêt 5C.246/2004 précité consid. 2.3). 
Ce n'est que si aucun fonds ne répond à ces critères, à savoir lorsque l'état de nécessité ne résulte pas d'une modification de l'état des propriétés ou des voies d'accès, que le droit de passage peut être demandé au propriétaire sur le fonds duquel le passage est le moins dommageable (arrêts 5C.246/2004 précité consid. 2.2.2 et les références; 5A_714/2012 du 29 du mai 2013 consid. 4.2.1.1). Il s'agit-là d'apprécier concrètement (CARONI-RUDOLF, Der Notweg, 1969, p. 96 s.; PITTET, Les servitudes légales, 1967, p. 113) les préjudices causés par la création de la servitude nécessaire, en pesant les intérêts des deux parties (art. 694 al. 3 CC), les intérêts du propriétaire du fonds grevé disposant à cet égard d'une importance prédominante (ATF 86 II 235 consid. 4). 
 
4.4.2. Une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire (art. 9 Cst.) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 141 III 564 consid. 4.1 et les références).  
 
4.5. Il ressort de ce qui précède que le fonds qui doit être grevé du passage nécessaire n'est pas forcément celui qui offre l'accès le plus court à la voie publique, ni celui qui est le plus favorable à l'ayant droit. L'état antérieur des propriétés et des voies d'accès constitue en effet le critère à examiner prioritairement, comme l'a d'ailleurs à juste titre constaté la cour cantonale. La question de savoir si c'est arbitrairement que celle-ci a considéré qu'il serait " inconcevable de remonter sans limite dans le temps " et que le critère de l'état antérieur des voies d'accès ne serait " plus nécessairement décisif passé une génération, ou après plus de cinquante ans pendant lesquels des modifications de surface et des tierces acquisitions sont intervenues " peut néanmoins être laissée indécise, vu ce qui suit.  
Selon les constatations factuelles de la cour cantonale, les parcelles nos 2104 et 2103 sont issues des anciennes parcelles nos 88 et 89 du cadastre de U.________, la parcelle no 2105 procède de la parcelle no 85, tandis que les parcelles nos 3770 et 3771 proviennent des parcelles nos 10, 12 et 24 du cadastre de cette dernière commune. Ces différentes parcelles appartenaient toutes à F.________ au début du 20ème siècle. Les biens-fonds nos 10 et 12 étaient traversés par le chemin D.________. La parcelle no 88 ne bénéficiait pas d'un accès direct à ce dernier chemin; le remaniement parcellaire n'a donc pas eu pour conséquence de la priver d'un accès public. Force est en revanche de constater que la parcelle 2104, issue du bien-fonds no 88, dispose de servitudes de passage à pied sur les parcelles nos 3770 et 3771 lui permettant de se raccorder au chemin D.________. Reste à déterminer si l'accès piétonnier sur les parcelles nos 3770 et 3771 peut être aménagé pour permettre le passage d'un véhicule automobile (supra consid. 4.4.1). D'après le rapport d'expertise établi le 16 novembre 2014, si la réalisation d'un accès carrossable depuis la parcelle no 2104 jusqu'au chemin D.________ est déconseillée financièrement, elle reste techniquement possible, en passant par les parcelles nos 2105 - cette parcelle étant grevée, selon l'extrait du registre foncier relatif au bien-fonds no 2104, d'une servitude de passage à pied au bénéfice de celui-ci -, 3771 et 3770. Le passage sur ce dernier immeuble nécessite néanmoins un raccordement sur la parcelle 2109 et, en conséquence, la constitution d'une servitude sur ce bien-fonds, constatation qui n'est pas contestée par la recourante. Dès lors que la référence au critère de l'état antérieur des voies d'accès implique la constitution d'une nouvelle servitude, l'on ne saurait considérer que l'accès qu'il permet d'envisager l'emporte sur le passage retenu par la juridiction cantonale, lequel nécessite, lui aussi, la création d'une telle charge. C'est donc sans arbitraire que la cour cantonale s'est référée au critère subsidiaire du passage le moins dommageable. 
 
5.  
 
5.1. Se prononçant sur ce dernier critère, la cour cantonale s'est référée au rapport de l'expert-géomètre. Elle a considéré que les issues par l'ouest - en vue d'un raccordement par le chemin D.________ - et par le nord - en passant par la parcelle no 2103 - entameraient plus largement l'état physique des surfaces traversées et entraîneraient des travaux de plus grande ampleur, qui auraient nécessairement des conséquences pour les biens-fonds des propriétaires grevés. Les inconvénients seraient en revanche bien moindres si le passage devait s'effectuer sur la parcelle de la recourante puisqu'entre ce bien-fonds et celui de l'intimée, le terrain était relativement plat. A cela s'ajoutait que le fonds de la recourante était déjà grevé d'une servitude identique à celle requise en faveur de la parcelle no 2177, le droit de passage réclamé pouvant ainsi sans autre s'exercer sur l'assiette de cette servitude.  
 
5.2. La recourante invoque à cet égard une application arbitraire de l'art. 694 al. 2 et 3 CC, étant précisé qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur son grief de violation de la garantie constitutionnelle de la propriété (art. 26 Cst.; cf. ATF 143 I 217 consid. 5.2 et les références). Elle reproche pour l'essentiel aux juges cantonaux d'avoir totalement occulté ses intérêts, pourtant prépondérants, pour se fonder sur des critères extérieurs au système légal, à savoir ceux du coût des travaux et de l'impact sur l'état physique des surfaces traversées.  
 
5.3. Il faut certes admettre que le critère du coût le moins dommageable économiquement n'est pas nécessairement déterminant dans la pesée des intérêts en cause dès lors qu'il concerne principalement l'intérêt subsidiaire du bénéficiaire. Il n'y a donc pas lieu de répondre aux critiques élevées par la recourante sur ce point. Celle-ci ne conteste cependant nullement que le coût des travaux constitue pourtant un indice quant à l'emprise de la servitude projetée sur les parcelles grevées, critère dont elle ne démontre pas l'arbitraire de sa prise en considération dans la comparaison de la situation des différents propriétaires grevés. La recourante admet au demeurant que sa parcelle est déjà grevée d'une servitude identique à celle sollicitée par l'intimée, en faveur de la parcelle no 2177. Les inconvénients qu'elle rattache à la constitution de la servitude sollicitée - à savoir, prétendument: empiètement illicite sur sa parcelle, passage des véhicules à quelques centimètres des pièces habitables de ses chalets, scission de sa parcelle en deux, sol en terre non aménagé pour le passage de véhicules -, outre qu'ils ne sont pas établis en fait, ne sont donc pas liés à la création de cette nouvelle servitude. La recourante ne détaille enfin nullement les inconvénients supplémentaires qu'elle prétend subir du fait de l'extension de la servitude susmentionnée et qu'elle reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement omis d'examiner.  
 
5.4. Vu ce qui précède, il convient de retenir que la recourante n'est pas parvenue à démontrer l'arbitraire du raisonnement cantonal dans la détermination de la solution la moins dommageable au sens de l'art. 694 al. 2 et 3 CC.  
 
5.5. En tant qu'il faut admettre que c'est sans arbitraire que la cour cantonale a considéré que la desserte de la parcelle no 2104 devait s'effectuer au travers de la parcelle de la recourante, il n'y a pas lieu d'établir si le chemin D.________ constituait bien une voie publique carrossable suffisante lors de l'acquisition de la parcelle no 2104 par le père de l'intimée en 1959.  
 
5.6. Il n'y a pas lieu non plus d'examiner le grief de la recourante relatif au comportement prétendument abusif de l'intimée. Cette critique n'a en effet pas été soulevée comme telle devant la juridiction précédente, de sorte que, faute d'épuisement des griefs devant l'instance cantonale, elle doit en conséquence être considérée comme nouvelle et partant, irrecevable devant le Tribunal de céans (art. 75 al. 1 LTF; ATF 135 III 1 consid. 1.2; 134 III 524 consid. 1.3; arrêt 5D_165/2015 du 22 avril 2016 consid. 5).  
 
6.   
En conclusion, le recours en matière civile est irrecevable et le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires sont à la charge de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Les intimés, qui ne se sont pas prononcés sur la requête d'effet suspensif présentée par la recourante, n'ont droit à aucun dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours en matière civile est irrecevable. 
 
2.   
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 29 janvier 2018 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : von Werdt 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso