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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_43/2021, 5A_62/2021  
 
 
Arrêt du 8 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffier : M. Braconi. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Mes Frédéric Pitteloud 
et Laura Rossini, avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
1. B.________, 
représenté par Me Christian Girod, avocat, 
2. C.________, 
3. D.________, 
tous deux représentés par Me Jean-Marie Faivre, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
annulation d'un testament (compétence à raison du lieu), 
 
recours contre les arrêts de la Chambre civile de la Cour 
de justice du canton de Genève du 1er décembre 2020 
(C/25686/2016, ACJC/1712/2020; C/25540/2016, 
ACJ 1713/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
E.________ ( de cujus), né en 1958 (France), de nationalité française, est décédé le 14 novembre 2015 W.________ (Allemagne). Il n'était pas marié et n'avait pas d'enfant. Ses héritiers légaux sont ses frères et soeur: B.________, C.________ et D.________; ils sont tous domiciliés en Suisse.  
 
B.  
Le 11 juillet 1997, par l'entremise de son père, A.________ (né en 1973) a rencontré le de cujus lors de la signature d'un acte notarié par lequel celui-ci a acquis des actions de la société F.________ SA, sise à Sion (VS), et possédant des immeubles à Genève; A.________ était l'un de ses actionnaires principaux.  
Par testament (olographe) du 7 janvier 2010, le de cujus a révoqué toutes ses dispositions testamentaires antérieures, réduit la part de ses héritiers légaux à leur réserve et institué A.________ comme unique héritier.  
 
C.  
 
C.a. Les 13 et 14 janvier 2016, les héritiers légaux se sont opposés à la délivrance d'un certificat d'héritier en faveur de A.________; les 8 et 24 mars 2016, ils ont requis un inventaire conservatoire et la désignation d'un administrateur d'office de la succession.  
Par décision du 31 mai 2016, le Juge de commune de V.________ a rejeté la requête tendant à l'administration d'office de la succession en raison de l'incompétence des autorités suisses, le défunt n'étant pas domicilié en Valais. Statuant le 14 juillet 2016, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Valais a déclaré irrecevable, pour tardiveté, l'appel formé par A.________, décision qui a été confirmée le 21 novembre 2016 par la IIe Cour de droit civil du Tribunal fédéral (arrêt 5A_599/2016). 
 
C.b. Le 20 décembre 2016, les héritiers légaux ont contesté le testament devant l'Amtsgericht d'Altenkirchen (Allemagne).  
Par décision du 19 juin 2018, ce tribunal a refusé de désigner un administrateur de la succession, dès lors qu'il n'avait pas été démontré que le de cujus aurait eu sa résidence habituelle en Allemagne; après avoir retenu que le défunt avait son centre de vie et ses biens en Suisse, il a retenu que les autorités françaises étaient compétentes pour connaître du litige, vu la nationalité française de l'intéressé et l'incompétence des juridictions helvétiques ( cf. supra, let. C.a). Cette décision n'a fait l'objet d'aucun recours.  
 
D.  
Le 17 juin 2019, la Justice de paix du canton de Genève a déclaré les autorités suisses compétentes pour connaître de la succession et pour ordonner des mesures conservatoires, déclaré le droit suisse applicable aux dites mesures, ordonné l'administration d'office de la succession, nommé l'administrateur et défini ses tâches; à l'appui de cette décision, elle a retenu que des biens se situaient à Genève et que les autorités étrangères n'étaient pas compétentes, respectivement pas en mesure de rendre des décisions susceptibles d'être reconnues à Genève. 
Par arrêt du 2 décembre 2019, la Cour de justice du canton de Genève a annulé cette décision pour violation du droit d'être entendu de A.________ et renvoyé l'affaire au premier juge pour nouvelle décision. 
Statuant à nouveau le 29 avril 2020, la Justice de paix s'est déclarée derechef compétente pour prononcer des mesures conservatoires sur la base de l'art. 88 al. 1 LDIP
 
E.  
Le 14 janvier 2019, les héritiers légaux ont saisi le Tribunal de première instance de Genève de deux demandes en annulation des dispositions testamentaires du de cujus (causes C/25686/2016 [B.________] et C/25540/2016 [C.________ et D.________]). Le défendeur a conclu à leur irrecevabilité pour incompétence à raison du lieu des juridictions suisses.  
Après avoir limité la procédure à la question de la compétence à raison du lieu, le Tribunal, par jugements du 19 novembre 2019, s'est déclaré compétent pour connaître des demandes. 
Par arrêts du 1er décembre 2020, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé ces décisions. 
 
F.  
Agissant le 15 janvier 2021 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral contre chacun des arrêts précités, le défendeur conclut sur le fond à l'irrecevabilité des demandes. 
Des observations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
G.  
Par ordonnances présidentielles du 9 février 2021, l'effet suspensif a été attribué aux recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les présents recours sont dirigés contre deux arrêts distincts, mais qui concernent les mêmes parties, se réfèrent à la même situation juridique et comportent une argumentation identique. Cela étant, il se justifie de joindre les causes et de les trancher par un seul arrêt (art. 24 PCF, par renvoi de l'art. 71 LTF; ATF 142 II 293 consid. 1.2). 
 
2.  
Les recours ont été déposés en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre des décisions incidentes qui confirment la compétence à raison du lieu des juridictions suisses (art. 92 al. 1 LTF). Ces décisions ont été prises en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale ayant statué sur recours en dernière instance (art. 75 al. 1 et 2 LTF). Il est acquis que la valeur litigieuse est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant, qui a pris part à la procédure devant la juridiction précédente et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification des décisions attaquées, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). 
 
3.  
 
3.1. L'autorité précédente a préalablement retenu que tant la LDIP que le Règlement (UE) N° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les successions reposent sur des critères similaires pour déterminer le domicile, respectivement la résidence habituelle: ils se réfèrent à la volonté de l'intéressé de s'établir dans un certain lieu et d'en faire le centre de ses intérêts, ainsi qu'à sa présence physique en un lieu donné, en tenant compte de l'ensemble de ses circonstances de vie. A cette fin, elle a constaté en bref les faits suivants:  
Le de cujus, né en France, était de nationalité française; il a cependant passé la première partie de son existence essentiellement en Suisse, où semble résider aussi la majeure partie de sa famille, à tout le moins ses frères et soeur (héritiers légaux). Par la suite, il s'est déplacé dans plusieurs pays (Suisse, France, Belgique et Allemagne), sans jamais s'installer durablement dans un lieu donné. Il était célibataire et n'avait pas d'enfant, et n'a jamais exercé d'emploi fixe. Ainsi, il ne ressort pas de la procédure que l'intéressé aurait fixé le centre de ses intérêts à un endroit précis, que ce soit à l'époque de son décès ou dans les années précédentes. S'il était certes propriétaire d'une " ferme " en France, cet immeuble est vide de tout mobilier et inhabitable au moins depuis 2009 à la suite d'une catastrophe naturelle; il n'est pas allégué que la maison aurait été réaménagée ou que des travaux de réhabilitation auraient été effectués, ce qui démontre l'absence de volonté de s'y établir de façon stable. L'intervention des autorités tutélaires françaises n'est pas non plus un élément déterminant, la dernière décision à ce sujet ayant été prise en 2010, c'est-à-dire plus de cinq ans avant le décès. Quant au véhicule détenu en France, il ne permet pas d'établir un lien particulier avec ce pays à la date pertinente; s'il était bien immatriculé en France, les documents administratifs qui s'y rapportaient, notamment le contrat d'assurance, étaient envoyés à une adresse en Suisse. On ne saurait déduire du jugement de l'Amtsgericht d'Altenkirchen du 19 juin 2018 un argument en faveur des juridictions françaises, puisque les magistrats allemands ont estimé que le " centre de vie " du de cujus se trouvait en Suisse et ont admis que la compétence des tribunaux français résultait de la nationalité française du défunt ( cf. supra, let. C.b).  
 
3.2. Après avoir admis que l'art. 88 al. 1 LDIP est également applicable lorsque - comme ici - le de cujus n'a pas de domicile ni de résidence habituelle à l'étranger, ou si son domicile, respectivement sa résidence habituelle, ne peut pas (plus) être établi, la cour cantonale a constaté que la compétence prévue par cette disposition ne porte que sur la part de la succession sise en Suisse; la compétence des autorités suisses du lieu de situation des biens peut toutefois s'étendre aux biens situés à l'étranger s'il n'existe pas de chefs de compétence à l'étranger ou si un conflit négatif de compétence peut se réaliser, cette extension de la compétence étant alors fondée sur l'art. 3 LDIP (for de nécessité).  
En l'espèce, la juridiction précédente a retenu que le de cujus n'avait pas de domicile, ni de résidence habituelle, en France à la date de son décès (ni dans un autre État), ce qui exclut la compétence des autorités françaises fondée sur l'art. 4 du Règlement européen. Comme il n'y a pas eu de professio iuris en faveur du droit français, une décision de ces autorités portant sur l'entier de la succession reposerait sur le seul critère de la nationalité du de cujus (art. 10 al. 1 let. a du Règlement), de sorte qu'elle ne peut pas être reconnue en Suisse. Compte tenu de ce que le domicile, respectivement la résidence habituelle, du de cujus ne peuvent être déterminés, de la présence de biens successoraux en Suisse et de l'inaction (juridique) des autorités françaises - en raison de leur incompétence ratione loci pour rendre une décision susceptible d'être reconnue en Suisse -, c'est à juste titre que le premier juge s'est déclaré compétent sur la base de l'art. 88 al. 1 LDIP.  
Les magistrats précédents ont en outre considéré que, dans la mesure où le recourant ne contestait l'application de l'art. 3 LDIP qu'en relation avec la compétence des juridictions françaises découlant de l'art. 4 du Règlement européen, son appel n'était pas suffisamment motivé sur ce point. En tout état de cause, le litige présente un " lien suffisant " avec la Suisse, plus précisément avec le canton de Genève, puisque plusieurs biens successoraux y sont localisés et que deux des intimés y sont domiciliés (le troisième étant domicilié dans le canton de Vaud). On ne peut exiger de ceux-ci qu'ils procèdent devant les tribunaux français, dès lors qu'une éventuelle décision fondée sur l'art. 10 du Règlement européen ne serait pas reconnue en Suisse; au reste, lesdits tribunaux pourraient décider de restreindre leur compétence au seul bien sis en France ( i.e. la ferme sinistrée) en application de l'art. 12 du Règlement européen pour s'éviter de rendre une décision qui ne pourrait pas être exécutée en Suisse. Enfin, le recourant ne peut rien tirer en sa faveur de l'arrêt 5A_255/2011 du 13 septembre 2011, car, dans cette affaire, une action successorale était déjà pendante à l'étranger. Il s'ensuit que la décision du premier juge d'admettre sa compétence pour connaître de l'ensemble de la succession, " pour des motifs d'opportunité " et afin d'éviter un conflit négatif de compétence ainsi que la multiplication des procédures, n'est pas critiquable.  
Dans un dernier motif, l'autorité cantonale a déclaré irrecevable, faute de motivation suffisante, le grief pris de l'absence de reconnaissance en France d'une éventuelle décision prise par les tribunaux suisses; le recourant se borne à réaffirmer la compétence des autorités françaises au regard de l'art. 4 du Règlement européen et n'expose pas en quoi les conditions posées par la législation française pour reconnaître une décision des tribunaux helvétiques ne seraient pas remplies dans le cas présent. 
 
4.  
 
4.1. Dans un premier moyen, le recourant se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits. En bref, il reproche à l'autorité cantonale d'avoir affirmé que le de cujus ne s'était jamais durablement installé dans un lieu donné, alors qu'il avait résidé en France entre 1998 et 2011, " soit durant treize ans ", et passé sous silence le " terrain de 1,8 ha " dont il était propriétaire sur la commune française de X.________; enfin, les juges cantonaux n'ont pas indiqué que, à la date de l'ouverture de l'action en annulation d'un testament, en rapport et subsidiairement en réduction à l'encontre de ses frères et soeur ( i.e. le 2 mars 2012), le de cujus était domicilié en France (" X.________ ").  
 
4.2.  
 
4.2.1. Conformément à l'art. 97 al. 1 LTF, le recourant ne peut critiquer les constatations de fait que si, en particulier, les faits ont été établis de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause ( cf. ATF 134 V 53 consid. 3.4). Or, tel n'est pas le cas.  
 
4.2.2. Selon la conception suisse - seule déterminante en l'espèce -, la constitution d'un domicile peut intervenir dès l'arrivée dans le nouveau lieu de séjour, indépendamment de la durée passée dans le précédent pays; ainsi, lorsqu'une fiancée n'arrive en Suisse, pour s'y établir, que le jour de son mariage, la constitution du domicile se manifeste dès le premier jour déjà, quel que soit le temps écoulé dans le pays d'origine ( cf. ATF 116 II 202 [ i.c. nom de épouse domiciliée en France jusqu'à son mariage]). Partant, le séjour du de cujus en France " entre 1998 et 2011", ainsi que son domicile dans cet État à l'époque de l'ouverture de l'action successorale à l'encontre des intimés (2012), n'impliquent pas en soi un domicile, respectivement une résidence habituelle, en France à la date du décès ( i.e. le 14 novembre 2015). Encore faut-il examiner si, à l'époque déterminante, il a définitivement abandonné sa résidence précédente, au point que l'on ne puisse plus parler d'un " centre de vie " dans cet État ( cf. infra, consid. 5.2).  
 
4.2.3. Quant au " terrain de 1,8 ha " dont le de cujus était prétendument propriétaire, le recourant n'en dit pas plus; en particulier, il ne soutient pas qu'il s'agirait d'un immeuble bâti, à usage d'habitation, dans lequel l'intéressé entendait emménager - voire d'un bien-fonds destiné à une construction ultérieure -, afin de compenser sa " ferme sinistrée (...) et inhabitable en l'état ". Or, à défaut de plus amples informations sur ce point - qu'il n'incombe pas au Tribunal fédéral de rechercher lui-même dans les pièces du dossier -, ce terrain ne peut pas être tenu pour l'un des éléments du " centre de gravité " du défunt.  
 
5.  
 
5.1. Il convient de préciser d'emblée que la Suisse n'est pas liée par le Règlement (UE) N° 650/2012, de sorte que la juridiction précédente ne saurait se voir reprocher d'avoir violé ses art. 4 et 10. Comme l'a retenu l'autorité précédente, la compétence des tribunaux suisses doit dès lors s'analyser sur la base des art. 86 ss LDIP, dont l'arrêt déféré rappelle correctement les principes ( cf. parmi plusieurs: arrêts 5A_653/2020 du 2 février 2022 consid. 2.2; 5A_419/2020 du 16 avril 2021 consid. 2.2, avec la jurisprudence citée dans ces arrêts). D'ailleurs - même s'il ne faut pas surestimer la différence entre ces notions ( cf. ATF 120 Ib 299 consid. 2a) -, ces deux législations se distinguent quant au critère de rattachement adopté: tandis que le Règlement européen se fonde sur la résidence habituelle (art. 4), le droit suisse consacre le domicile, dès lors que " le rapport donné par la résidence habituelle paraît trop faible pour les exigences du droit successoral " (Message concernant une loi sur le droit international privé du 10 décembre 1982, FF 1983 I 371). Ce rattachement est expressément maintenu dans le projet de révision du 13 mars 2020 (FF 2020 3215, 3227 ch. 3.1.2); à ce propos, le Conseil fédéral souligne que les décisions prises dans " l'État du dernier ou de l'avant-dernier lieu de résidence habituelle (...) " ne peuvent donc pas en principe être reconnues en Suisse (FF 2020 3222 ch. 1.1.4). Toutefois, le critère de la résidence habituelle intervient à titre subsidiaire en vertu de l'art. 20 al. 2 LDIP lorsque la personne " n'a nulle part de domicile " (DUTOIT/BONOMI, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 6e éd., 2022, n° 4 ad art. 86 LDIP).  
 
5.2. Il ressort des faits souverainement constatés par la cour cantonale (art. 105 al. 1 LTF) que, après avoir quitté la France - au plus tard en 2012 si l'on suit la thèse du recourant -, le de cujus a successivement vécu en Belgique Y.________, en Suisse puis en Allemagne, pays où il est décédé en 2015.  
 
5.2.1. Si le recourant concède expressément que le de cujus n'a jamais eu de domicile ni de résidence habituelle en Allemagne - conclusion que corrobore le jugement prononcé le 19 juin 2018 par l'Amtsgericht d'Altenkirchen -, la question est plus délicate pour la Suisse. En effet, il est constant que l'intéressé a vécu en Suisse de 1962 à 1998; dans un courrier du 25 août 2000, il a exprimé sa volonté de " couler des jours enfin paisibles " en Suisse; il a réitéré cet attachement à la Suisse dans une lettre du 23 avril 2014 et un courriel du 20 juin 2014, adressés aux autorités valaisannes quant à une autorisation de séjour en Suisse, " le pays de son enfance, où il avait vécu 36 ans et se trouvaient la majorité de ses amis ainsi que la plupart de sa fortune "; il a exprimé l'intention de vendre sa ferme en France, aussitôt reçue l'indemnité d'assurance, et " d'investir dans un nouveau logement en Suisse afin d'y passer sa retraite ".  
 
La jurisprudence admet un rattachement anticipé au domicile - ou à la résidence habituelle - imminent dans le cas où l'intéressé a effectué des démarches qui démontrent de façon reconnaissable pour les tiers l'intention de créer dans l'État de destination le nouveau centre de ses intérêts (arrêt 5A_659/2011 du 5 avril 2011 consid. 2.3 et les citations); c'est alors la perspective de l'établissement dans ce pays qui apparaît déterminante ( cf. sur l'ensemble de la question: OTHENIN-GIRARD, note in : PJA 2012 p. 856 ss, 858-859). Vu les constatations qui précèdent, le projet du de cujus de s'établir en Suisse ne paraît pas avoir reçu de commencement d'exécution ( cf. OTHENIN-GIRARD, op. cit., p. 858), mais en est resté au stade d'une simple déclaration d'intention qui, en tant qu'expression de la volonté interne, ne suffit pas (ATF 97 II 1 consid. 3; arrêt 5A_267/2012 du 21 novembre 2012 consid. 6.4).  
 
5.2.2. Avec le recourant, il faut convenir que l'opinion de la juridiction précédente d'après laquelle le de cujus n'a jamais eu de domicile ni de résidence habituelle en France prête le flanc à la critique; elle s'avère néanmoins exacte aux fins de la question litigieuse.  
En admettant que les juges cantonaux eussent dû considérer que " le domicile et la résidence habituelle du défunt se situaient en France entre 1998 et 2011 à tout le moins ", cela n'implique pas en soi un centre de vie dans cet État à la date déterminante du décès (2015). Le recourant part du principe que, n'ayant plus constitué ultérieurement de domicile ni de résidence habituelle, le défunt aurait ainsi conservé " le domicile et la résidence habituelle " qu'il avait en France " jusqu'en 2011". Or, cette argumentation ne peut pas être suivie; elle repose en définitive sur le principe de la persistance du domicile antérieur (art. 24 al. 1 CC), qui n'est pas applicable dans les rapports internationaux (ATF 133 III 252 consid. 4 et les nombreuses citations).  
De jurisprudence constante, la notion de résidence habituelle implique une " présence physique" dans un endroit précis (parmi plusieurs: arrêts 4A_481/2021 du 4 juillet 2022 consid. 3.2.2 et 5A_933/2020 du 14 avril 2021 consid. 1.1, obs. A. BUCHER, in : RSDIE 2021 p. 497), l'accent étant mis sur la présence physique de l'individu dans le pays de séjour (arrêt 5A_812/2015 du 6 septembre 2016 consid. 5.1.2). On ne peut dès lors admettre en l'espèce le maintien (rétroactif) d'une résidence habituelle dans un État que le de cujus a quitté depuis plusieurs années et dans lequel - à teneur des constatations des juges cantonaux - il n'est plus retourné vivre (art. 105 al. 1 LTF). A cet égard, la présente cause se distingue de l'affaire 5A_68/2017 du 21 juin 2017 ( in : FamPra.ch 2017 p. 1167 ss), dans laquelle la personne en question partageait sa vie à peu près à parts égales entre la Tchéquie et la Suisse, mais retournait fréquemment en Suisse - tenue pour sa résidence habituelle - afin d'y recevoir des soins et réclamer le soutien de sa fille (consid. 2.4).  
Enfin, l'immatriculation du véhicule en France jusqu'en 2015 ne permet nullement de conclure à elle seule à l'existence d'un domicile ou d'une résidence habituelle dans cet État (parmi d'autres: arrêt 5A_278/2017 du 19 juin 2017 consid. 3.3.2.2). L'autorité cantonale a du reste constaté à ce sujet que les documents administratifs dudit véhicule, en particulier le contrat d'assurance, " étaient renvoyés au de cujus à une adresse en Suisse "; le recourant ne démontre pas qu'une telle constatation serait manifestement inexacte, à savoir arbitraire (art. 97 al. 1 LTF, en relation avec l'art. 9 Cst.; sur cette forme d'arbitraire: ATF 144 V 50 consid. 4.2 et les nombreux arrêts mentionnés).  
 
5.2.3. En définitive, la juridiction cantonale n'a pas violé le droit (art. 86 al. 1 LDIP; cf. supra, consid. 5.1) en retenant que, à la date pertinente du décès, le de cujus n'avait ni son domicile ni sa résidence habituelle en France.  
 
6.  
 
6.1. Dans un dernier moyen, le recourant se plaint d'une violation des " articles 3, 88 et 96 LDIP en lien avec les art. 4 et 10 du Règlement UE 650/2012 ".  
 
6.2. Autant qu'ils sont valablement réfutés (art. 42 al. 2 LTF; ATF 140 III 86 consid. 2 et les arrêts cités), les motifs de la juridiction cantonale quant à l'application de l'art. 88 al. 1 LDIP sont convaincants, de sorte qu'on peut y renvoyer. Les critiques du recourant reposent du reste sur la prémisse que l'art. 4 du Règlement européen attribue aux tribunaux français la compétence pour connaître de l'ensemble de la succession du de cujus - ce qui n'est pas le cas ( cf. supra, consid. 5.2) - et sur l'opinion erronée (FF 2020 3222 ch. 1.1.4) selon laquelle une décision française fondée sur le chef de compétence prévu à l'art. 10 du texte précité est susceptible de reconnaissance en Suisse.  
Quant à l'application de l'art. 3 LDIP - évoquée par le Tribunal fédéral dans un arrêt du 28 novembre 2013 (5A_264/2013 consid. 3.3.1, publié in : RNRF 2015 p. 205 ss) -, la cour cantonale a déclaré principalement irrecevable l'appel sur ce point, faute de motivation suffisante (art. 311 al. 1 CPC), n'examinant que par surabondance cette question. Or, le recourant se contente de qualifier d'" erroné " ce motif, argument pour le moins indigent qu'il complète par un renvoi inadmissible (ATF 140 III 115 consid. 2) à son acte d'appel cantonal; il s'ensuit que les recours sont irrecevables dans cette mesure (art. 42 al. 2 LTF; ATF 142 III 364 consid. 2.4 in fine et la jurisprudence citée).  
 
6.3. Après avoir rappelé les conditions de la reconnaissance en France d'une décision suisse en matière successorale, l'autorité précédente a déclaré irrecevable, pour défaut de motivation (art. 311 al. 1 CPC), la critique du recourant à cet égard, ajoutant que celui-ci n'avait de toute manière pas exposé en quoi ces conditions ne seraient pas remplies en l'espèce ( cf. supra, consid. 3.2 in fine).  
Les normes du Règlement européen sur la reconnaissance (art. 39 ss) ne visent que les décisions rendues dans un " État membre " - à savoir lié par ce texte -, tandis que les décisions émanant d'un État tiers (en l'occurrence la Suisse) sont soumises à la législation de l'État membre (en l'occurrence la France) dans lequel la reconnaissance est requise (parmi plusieurs: PRETELLI, in : Le droit européen des successions, 2013, n° 7 ad Introduction au Chapitre IV). Le présent litige étant de nature pécuniaire ( cf. arrêt 5A_235/2014 du 23 juillet 2014 consid. 1.2 et les arrêts cités), le Tribunal fédéral ne revoit l'application du droit étranger que sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 143 III 51 consid. 2.3 et la jurisprudence citée). Or, à ce sujet, les recours ne respectent pas les exigences légales de motivation. Le recourant soutient que la décision prise par les autorités suisses " en application des art. 3 et/ou 88 LDIP ne pourra faire l'objet d'aucune procédure d'exequatur en France ", en excipant (à tort) de l'incompétence ratione loci desdites autorités, mais sans réfuter le motif subsidiaire des juges précédents; de surcroît, on cherche en vain dans les recours une critique argumentée à l'encontre du motif principal, pris de l'irrecevabilité du grief en appel (ATF 142 III 364 consid. 2.4 in fine et les arrêts cités).  
 
7.  
Vu l'issue de la procédure, il devient superflu d'examiner si - comme le suggère l'intimé n° 1 dans ses déterminations sur la requête d'effet suspensif - les recours ne devraient pas être déclarés irrecevables en raison de l'attitude contradictoire du recourant (sur cette forme d'abus de droit [art. 2 al. 2 CC], parmi d'autres: STEINAUER, Le Titre préliminaire du Code civil, in : TDPS II/1, 2009, nos 589 ss). En effet, dans la cause ayant abouti à l'arrêt 5A_599/2016 du 21 novembre 2016, le recourant s'était prévalu du dernier domicile en Suisse du de cujus à l'appui d'un recours interjeté contre la décision du Juge de commune de V.________ refusant d'ordonner l'administration d'office de la succession pour cause d'incompétence ratione loci des juridictions suisses.  
 
8.  
En conclusion, les recours (préalablement joints) sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité, avec suite de frais à la charge du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux intimés, qui n'ont pas été invités à présenter des observations sur le fond et se sont opposés à tort à l'octroi de d'effet suspensif. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 5A_43/2021 et 5A_62/2021 sont jointes. 
 
2.  
Les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 8 décembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
Le Greffier : Braconi